Guide de la détermination de l'admissibilité Chapitre 8 - Section 5
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8.5.0 Perte d'un emploi et impossibilité de reprendre un emploi
Aux fins de l’application des dispositions de la Loi concernant les conflits collectifs, on a déjà mentionné qu’il est essentiel de réunir quatre éléments bien définis (section 8.1.3 du Guide). Le quatrième élément entre en jeu une fois que l’on a établi l’existence d’un conflit collectif ayant découlé d’un arrêt de travail au lieu de travail du prestataire. En d’autres termes, il s’agit de déterminer si le prestataire a perdu son emploi ou est incapable de le reprendre en raison de l’arrêt de travail en question.
En dépit de sa complexité apparente, il n’est pas difficile d’aborder cette question qui repose sur trois notions de base :
- la perte d’un emploi ou l’impossibilité de reprendre un emploi;
- le lien qui existe entre ce fait et l’arrêt de travail;
- la situation du prestataire dans ce contexte.
8.5.1 Perte d'un emploi
Du point de vue de l’admissibilité aux prestations, une perte d’emploi réfère fondamentalement à un arrêt de rémunération provenant d’un emploi (CAF A-592-99, CUB 45449). Ceci ne veut pas dire qu’un arrêt de moins de sept jours consécutifs ne constitue pas une perte d’emploi. Les termes utilisés ou les raisons invoquées ne font guère de différence, qu’il soit question de grève, d’abandon d’un travail ou d’omission de s’y présenter, de refus de franchir la ligne de piquetage, de lock-out ou de suspension.
Dans ces circonstances, il est indéniable que la relation employeur-employé puisse être touchée par l’existence d’un conflit, surtout si celui-ci se transforme en arrêt de travail. Habituellement, il n’y a pas rupture complète des liens entre les parties. En principe, chaque partie a un intérêt à rechercher un terrain d’entente en vue d’une solution éventuelle au conflit. La plupart des codes provinciaux ainsi que le Code canadien du travail renferment des dispositions précises garantissant le droit du travailleur, avec préséance sur toute autre personne, de retourner au travail lorsque les activités reprennent à nouveau.
Peu d’arrêts de travail sont à l’origine d’une rupture permanente de la relation entre les parties, prenant la forme d’une démission, d’un congédiement ou même d’une mise à pied qui peut survenir avant ou après le début de l’arrêt de travail ou une fois que l’arrêt de travail a pris fin (section 8.5.5 du Guide, section 8.5.6 du Guide et section 8.13.0 du Guide).
Une perte d’emploi peut aussi être causée par l’exercice du droit de supplantation en fonction des années d’ancienneté ou être le fait du report d’heures de travail à une date ultérieure et ce, même si le nombre total d’heures prévu au contrat de travail est finalement respecté (CAF A-1415-84, CUB 9598). L’obtention immédiate d’un autre emploi n’empêche pas de conclure qu’il y a effectivement eu perte d’emploi.
Telles qu’elles sont libellées, les dispositions relatives aux conflits collectifs (LAE 36(1)) exigent la prise en compte de la perte de tout emploi occupé par le prestataire au moment de l’arrêt de travail, sans égard au fait que le prestataire en exerçait plus d’un au moment où il l’a perdu ou qu’il ait continué à exercer ses autres emplois par après. Elles visent également l’emploi qu’une personne devait commencer à exercer chez un nouvel employeur à une date déterminée, mais qui n’a pas pu débuter à cause d’un arrêt de travail dû à un conflit collectif. Le libellé s’applique à tout emploi antérieur qu’un prestataire n’a pas été en mesure de reprendre pour le même motif (section 8.5.2 du Guide).
L’emploi dont il est question doit par ailleurs être conforme à la définition qui figure dans la Loi (LAE 2(1)), ce qui élimine le travail indépendant, puisqu’il n’existe alors pas de relation employeur-employé. Dans la mesure où l’emploi en cause est conforme à cette définition, il peut tout aussi bien s’agir d’un emploi exercé au Canada ou à l’étranger ou encore d’un emploi qui ne remplit pas les conditions minimales d’assurabilité.
8.5.2 Impossibilité de reprendre un emploi
Vu que la phrase « le prestataire […] qui ne peut reprendre un emploi en raison d’un arrêt de travail dû à un conflit collectif » figure dans la Loi (LAE 36(1)), on peut conclure que le prestataire est assujetti aux dispositions relatives aux conflits collectifs.
Par conséquent, lorsqu’un prestataire, qui était absent du travail au moment où l’arrêt de travail s’est produit, n’a pu, après des vacances, un congé de maladie ou de maternité ou une période de rétablissement après une blessure, reprendre son emploi parce que l’arrêt de travail n’était pas terminé, on pourrait présumer que la perte de son emploi est due à l’arrêt de travail. S’il convient de le déclarer inadmissible, cette mesure prend effet le jour où il devait revenir au travail (CUB 21571 et CUB 20347).
Il peut être plus difficile de faire le rapprochement dans les cas où un prestataire n’a pas pu reprendre son emploi après un congé pour fonctions syndicales (CAF A-661-83, CUB 8639). Des difficultés semblables peuvent survenir relativement à des travailleurs occasionnels sujets à être rappelés au travail et à des travailleurs saisonniers (CAF A-787-81, CUB 6801; CAF A-1036-92, CUB 21236; et CAF A-549-81, CUB 6827). Ces prestataires n’ont pas littéralement perdu leur « emploi » au début de la saison d’activité, mais plutôt la « possibilité d’un emploi ».
Il était donc nécessaire d’ajouter à la Loi (LAE 36(1)) une mention précise concernant le « prestataire […] qui ne peut reprendre un emploi », afin qu’il soit clair que les dispositions relatives aux conflits collectifs s’appliquent aussi à son cas. Cette mention établit une équité de traitement autant pour un prestataire qui a perdu un emploi que pour celui qui ne peut reprendre un emploi, tous deux, pour les mêmes raisons.
Dans les situations de congés de plus longue durée, comme un congé pour affaires syndicales ou l’exercice d’un autre emploi, il est plus approprié de se demander si le prestataire peut ou non reprendre un emploi. Cette méthode doit également être appliquée lorsque le prestataire ne peut reprendre un emploi à l’occasion d’un retour ou d’un rappel au travail après une période de mise à pied ou à la fin d’un contrat de travail. Il en va de même pour le travailleur occasionnel ou saisonnier qui ne peut revenir au travail à cause d’un arrêt de travail dû à un conflit collectif (section 8.5.8 du Guide).
Cela ne veut pas dire pour autant que toute personne qui a une possibilité d’être rappelée par son employeur pendant un arrêt de travail est automatiquement un « prestataire qui ne peut reprendre un emploi ». Au préalable, on doit pouvoir raisonnablement conclure que, n’eût été l’arrêt de travail, l’employeur aurait repris cette personne à son service à une date ou à un moment déterminé et que, par conséquent, celle-ci aurait été en poste s’il n’y avait pas eu d’arrêt de travail. Cependant, une possibilité non confirmée ou l’absence de garantie de travailler pendant cet arrêt, ou la seule existence d’un droit de rappel, ne sont pas des éléments suffisants pour en arriver à une telle conclusion.
L’emploi dont on parle ici doit être un emploi que le prestataire a occupé auparavant, que ce soit récemment ou il y a plus longtemps. Il ne désigne pas uniquement l’emploi que le prestataire a exercé immédiatement avant son dernier emploi ou avant de présenter une demande de prestations. Il pourrait même s’agir d’un emploi que le prestataire a cessé d’exercer pour une raison ou pour une autre pendant une période de prestations et qu’il ne peut reprendre par la suite pendant cette même période à cause d’un arrêt de travail dû à un conflit collectif.
Cet emploi doit toutefois être lié au même employeur pour lequel le prestataire a déjà occupé un emploi, sans que ça soit nécessairement la même occupation ou le même lieu de travail. Le fait qu’une personne ne puisse, à cause d’un arrêt de travail, entrer en fonction à la date prévue chez un employeur où elle n’a jamais travaillé n’entre pas dans cette catégorie. Le cas échéant, il convient plutôt de déterminer si la perte d’emploi est visée par les dispositions de la Loi relatives aux conflits collectifs.
Il faut préciser finalement qu’un « prestataire qui ne peut reprendre un emploi » est une expression qui désigne autant la personne qui ne peut reprendre son emploi à cause d’un arrêt de travail que celle qui décide de plein gré de ne pas le reprendre.
8.5.3 Perte d'un emploi ou incapacité de reprendre un emploi à cause d'un arrêt de travail
De multiples événements de la vie courante sont liés parce qu’ils subissent ce que l’on appelle l’« effet domino » ou une réaction en chaîne qui fait en sorte qu’un premier événement en entraîne un deuxième qui est lui-même à l’origine d’un troisième. Les dispositions concernant les conflits collectifs produisent un effet semblable sur trois événements, soit le conflit collectif, l’arrêt de travail et le fait de perdre un emploi ou de ne pas pouvoir reprendre un emploi (section 8.1.3 du Guide).
Le terme « arrêt de travail » ne fait pas référence au travail des employés, mais aux activités de l’employeur (CUB 16553). L’arrêt de travail signifie une « interruption de l’activité normale de l’entreprise de l’employeur ». Il peut être causé par une grève ou un lock-out légaux ou illégaux. C’est à la Commission qu’il incombe de prouver qu’il y a eu arrêt de travail. La fermeture permanente d’une entreprise n’est pas un arrêt de travail dû à un conflit collectif.
Le fait de perdre un emploi ou de ne pas pouvoir reprendre un emploi et l’arrêt de travail ne sont pas des événements qui se produisent nécessairement en même temps. Si l’on suit la ligne de pensée propre aux dispositions de la Loi relatives aux conflits collectifs, le fait de perdre un emploi ou de ne pas pouvoir reprendre un emploi visé par ces dispositions devrait survenir après le début de l’arrêt de travail, ou à tout le moins, coïncider avec celui-ci. Il s’agit alors de se demander si ce fait suit un événement lié au conflit et à l’arrêt de travail (CUB 39840 et CUB 21211) ou s’il ne se serait pas produit à ce moment précis, sans l’arrêt de travail (CUB 76451 et CUB 56343). Dans l’un ou l’autre des cas, il est raisonnable de conclure à l’existence réelle d’une relation de cause à effet entre ces événements. Il importe peu dans ces circonstances que ce lien soit direct ou indirect.
Même si la situation est beaucoup moins claire lorsque la perte d’un emploi ou l’incapacité de reprendre un emploi précède le moment où survient l’arrêt de travail, un effet ne peut devancer sa cause. Par conséquent, un prestataire qui a perdu son emploi ou était incapable de le reprendre avant un arrêt de travail n’est pas visé par les dispositions relatives aux conflits collectifs (LAE 27, LAE 28, LAE 29; section 8.5.5 du Guide et section 8.5.6 du Guide). Il importe peu que cette perte d’emploi ou cette incapacité de reprendre un emploi soit attribuable à l’imminence d’un arrêt de travail.
Il est fréquent que des employés soient en congé au moment d’un arrêt de travail. Les liens avec l’employeur ne sont pas rompus de façon définitive dans de telles circonstances et ce même, si le congé est non rémunéré. On considère qu’une personne qui ne peut revenir au travail une fois son congé terminé a perdu son emploi ou est incapable de le reprendre à cause d’un arrêt de travail, si celui-ci est toujours en cours (section 8.5.2 du Guide et section 8.5.7 du Guide).
Il peut parfois être difficile de déterminer quelle était la situation d’un employé au moment de l’arrêt de travail. Le cas de l’employé qui travaille à temps plein ou à temps partiel, sur une base temporaire, permanente ou à l’essai, ne pose généralement pas de véritables problèmes. Il existe une relation évidente entre la perte d’emploi ou l’incapacité de reprendre un emploi et l’arrêt de travail pendant la période au cours de laquelle cet employé aurait été en poste, s’il n’y avait pas eu d’arrêt de travail.
La situation de l’employé occasionnel est bien moins claire. Il faut alors trancher la question en fonction des antécédents de travail de l’employé et des probabilités selon lesquelles celui-ci aurait poursuivi son emploi, n’eût été l’arrêt de travail (section 8.5.12 du Guide).
Dans le cas d’un employé réintégré dans ses fonctions à la suite d’un grief, le fait que sa situation au moment de l’arrêt de travail n’ait été connue que plusieurs mois après cet arrêt n’est pas pertinent. Il faudra donc réexaminer la décision relative à la perte d’un emploi en fonction de la nouvelle situation, même si le prestataire n’a été mis au courant de ce fait qu’après l’arrêt de travail (CUB 16582).
Le salarié dont l’emploi devait, pour une raison étrangère au conflit, prendre fin après le début de l’arrêt de travail se trouve dans la même situation que celui qui a reçu un avis de licenciement définitif prenant effet à une date ultérieure à celle du début de l’arrêt de travail. La relation entre la perte d’emploi initiale et l’arrêt de travail demeure inchangée (CAF A-181-83, CUB 7842A; CAF A-270-91, CUB 19037) jusqu’au moment où le lien employeur-employé est rompu de manière permanente (CAF A-942-85, CUB 11403 et CAF A-1036-92, CUB 21236; section 8.13.0 du Guide).
8.5.4 Plus d'un arrêt de travail ou d'un conflit
Plusieurs éléments peuvent ajouter à la complexité d’un conflit collectif, notamment le nombre de parties en cause. Cela se produit fréquemment lorsqu’un conflit oppose un employeur ou une association d’employeurs à plusieurs sections locales d’un même syndicat ou même à plusieurs syndicats. La première réflexion à faire consiste à déterminer s’il y a un ou plusieurs conflits au lieu où le prestataire exerce un emploi.
On compte généralement autant de conflits collectifs qu’il y a de conventions collectives faisant l’objet de négociations. On peut parler d’un seul conflit lorsque les principaux points en litige se rapportent à une convention collective de base, que les négociations concernent l’ensemble de l’industrie ou que les divers groupes de travailleurs forment un front commun, en constituant par exemple un comité conjoint ou même en faisant de la signature de chaque convention collective une condition essentielle au règlement de tous les conflits (CAF A-512-88, CUB 12992A; CAF A-814-91, CUB 20138). Lorsqu’il existe plus d’un conflit au lieu de travail du prestataire, il convient de déterminer l’incidence de chaque arrêt de travail sur la perte d’emploi ou l’incapacité de reprendre un emploi.
Lorsque plusieurs syndicats font l’objet d’un lock-out de la part d’un employeur, l’arrêt de travail qui en résulte peut être dû à l’ensemble des conflits, et non seulement à un seul (CUB 67605, CUB 39832A et CUB 25474). Il importe peu qu’un seul syndicat soit responsable de l’événement à l’origine du lock-out ou que cet événement soit survenu dans un autre lieu de travail.
Il est possible d’illustrer la situation à l’aide d’un scénario où les cols bleus et les cols blancs sont en pourparlers avec un même employeur concernant le renouvellement de leur convention collective respective. Afin de faire valoir leurs revendications, les cols bleus déclenchent la grève, ce qui entraîne la mise à pied de quelques cols blancs. Il est essentiel à cette étape de décider s’il n’y a qu’un seul conflit collectif complexe, dans lequel sont impliqués à la fois les cols bleus et les cols blancs, ou s’il s’agit de deux conflits collectifs distincts. La question est importante surtout parce que les conditions de non-application ne visent que le conflit qui a entraîné l’arrêt de travail et a mené à la mise à pied de quelques cols blancs.
Dans cette situation, il existe de toute évidence deux conflits collectifs. Si l’employeur avait décrété un lock-out à l’égard des cols blancs quelques semaines après que les cols bleus ont eux-mêmes déclenché leur grève, la mise à pied des cols blancs préalablement au lock-out est réputée avoir été causée par la grève des cols bleus, et est visée par les dispositions relatives aux conflits collectifs (LAE 36(1)). Dans ce cas, les cols blancs ont perdu leur emploi ou auraient pu avoir été incapables de reprendre leur emploi en raison d’un arrêt de travail dû à un conflit collectif des cols bleus. Cependant, s’il peut être démontré qu’il s’agit d’un conflit collectif auxquels ils sont étrangers, il est vraisemblable que ces quelques cols blancs n’auraient aucune difficulté à satisfaire aux conditions de non-application (LAE 36(4)).
La situation serait différente si l’employeur, également en conflit avec ses cols blancs, décrétait un lock-out envers eux. Dès lors, on considérerait que les quelques cols blancs mis à pied auparavant ne peuvent reprendre leur emploi en raison d’un arrêt de travail dû aux deux conflits collectifs en cours. Il devient beaucoup plus difficile dans ce contexte pour ces quelques cols blancs, devenus partie au conflit collectif, de prouver qu’ils remplissent encore les conditions de non-application.
8.5.5 Mise à pied avant l'arrêt de travail
Le fait qu’au moment de la mise à pied d’un ou de plusieurs employés, un conflit soit en cours et qu’un arrêt de travail soit imminent, peut être simplement dû à l’effet du hasard et n’avoir aucun lien avec la mise à pied. La même situation peut se produire lorsqu’un employeur annule le rappel prévu d’un certain nombre de ses employés. Ces cas ne sont pas visés par les dispositions relatives aux conflits collectifs.
Il en va tout autrement lorsque la décision de mise à pied ou d’annulation du rappel est liée à l’existence d’un conflit collectif et à certains indices révélant l’imminence d’un arrêt de travail. Cette relation peut être la conséquence d’éléments externes tels que la rupture d’un contrat ou le report de commandes par une clientèle qui, étant donné les circonstances, craint que celles-ci ne puissent être remplies dans les délais requis ou qui appuie une campagne de boycottage orchestrée par le syndicat. Elle peut également être le fait de considérations internes en réaction par exemple à certaines initiatives des travailleurs, telles qu’un ralentissement de travail, ou en prévision de difficultés de fonctionnement suite à des bris d’équipement provoqués intentionnellement. Il n’est d’ailleurs pas rare dans ce contexte que des employés soient suspendus ou congédiés du fait de leur implication dans ces incidents, même avant que ne survienne un arrêt de travail (section 7.3.0 du Guide).
Bien que le libellé des dispositions relatives aux conflits collectifs (LAE 36(1)) porte expressément sur la perte d’un emploi ou l’incapacité de reprendre un emploi à cause d’un arrêt de travail, l’interprétation historiquement privilégiée a été que ces dispositions peuvent aussi s’appliquer en prévision d’un arrêt de travail; il suffit que soit démontrée une relation de cause à effet entre ces événements et l’arrêt de travail, même si cet arrêt est seulement imminent.
Le nombre de jours écoulés entre la mise à pied ou l’annulation du rappel et l’arrêt de travail ainsi que le fait qu’un mandat de grève ait été donné au comité exécutif syndical, peuvent être des signes d’arrêt de travail prévu. L’éventualité d’un tel arrêt de travail à brève échéance peut fort bien inciter un employeur à effectuer des mises à pied ou à annuler le rappel ou le retour au travail de l’ensemble ou d’une partie de ses employés. Plus l’intervalle entre la mise à pied ou l’annulation du rappel et l’arrêt de travail est court, plus il est vraisemblable que ces événements soient liés à l’arrêt de travail. Il est impératif que l’arrêt de travail ait effectivement lieu pour qu’on puisse déclarer un prestataire inadmissible au bénéfice des prestations. Si une inadmissibilité s’applique, elle ne prend effet qu’à partir du premier jour de l’arrêt de travail. Lorsque deux causes sont à l’origine de la mise à pied ou de l’annulation du rappel, il s’agit de décider si l’imminence de l’arrêt de travail en est la principale.
Cette approche est de toute évidence étayée par le libellé exact des dispositions relatives aux conflits collectifs (CAF A-0595-00, CUB 45670A; CUB 76451 et CUB 56343). L’application uniforme des dispositions visant les conflits collectifs permet d’éviter d’avoir deux poids et deux mesures, selon qu’un travailleur a perdu un emploi ou ne peut reprendre un emploi juste avant l’arrêt de travail, alors que pour un autre, c’est tout juste après.
La jurisprudence a établi que la chronologie des événements est importante; un arrêt de travail réel est essentiel et doit coïncider avec la perte d’emploi mentionnée dans les dispositions relatives aux conflits collectifs, ou la précéder (CUB 9830A). Cela peut se révéler important lorsqu’une mise à pied a lieu pour un motif ayant trait à la situation particulière d’un employé. Dans ce contexte, on ne considère pas que le prestataire mis à pied de façon permanente, sans espoir de rappel et dans le cadre d’un incident isolé préalable à l’arrêt de travail, a perdu son emploi en raison de l’arrêt de travail. Le fait que la perte d’emploi ait été causée par l’imminence de l’arrêt de travail n’a aucun effet sur l’admissibilité aux prestations dans ces circonstances. Le même principe peut s’appliquer lorsqu’un prestataire dont le retour au travail chez un employeur était fixé pour telle date et a été annulé définitivement, sans espoir de retour, en raison de l’arrêt de travail imminent.
On privilégiera de façon générale l’interprétation retenue dans la plupart des jugements rendus sur la question, surtout lorsqu’il y a un licenciement collectif ou une annulation du rappel de bon nombre d’employés avant un arrêt de travail. Habituellement, ces employés sont impliqués dans le conflit collectif. L’application des dispositions concernant les conflits collectifs ne peut pas être automatiquement rejetée pour le seul motif que le fait de perdre un emploi ou de ne pouvoir reprendre un emploi est survenu avant l’arrêt de travail. Il convient d’examiner attentivement le caractère définitif des mises à pied ou de l’annulation du rappel, ainsi que la situation de chaque employé.
Lorsqu’un employé est suspendu avant l’arrêt de travail pour des activités reliées au conflit ou pour d’autres motifs, on ne peut considérer la perte d’emploi comme étant définitive. Les dispositions visant les conflits collectifs sont donc applicables, mais seulement une fois que la période de suspension a pris fin. Cela s’explique tout simplement par le fait que c’est à ce moment-là que la perte de l’emploi est considérée comme étant attribuable à l’arrêt de travail causé par un conflit.
À partir de ce qui précède, on s’entend généralement pour dire que l’application des dispositions relatives aux conflits collectifs n’est pas pertinente lorsqu’un congédiement permanent a lieu avant l’arrêt de travail. Les choses sont différentes lorsque, à la suite du règlement d’un grief, un employé est réintégré dans ses fonctions et que tous ses droits sont reconnus rétroactivement. Les dispositions visant les conflits collectifs sont alors applicables à cet employé à partir du début de l’arrêt de travail, au même titre que pour tous les employés, et ce, même si la situation de cet employé n’a réellement été définie que plusieurs mois après (CUB 16582).
8.5.6 Départ volontaire avant l'arrêt de travail
Le départ volontaire diffère de la mise à pied, car c’est le prestataire qui prend l’initiative de rompre les liens avec son employeur; la rupture n’est pas dictée ou imposée par l’employeur. Il en va de même lorsqu’un prestataire décide lui-même de ne pas reprendre le travail à une date déterminée.
La décision volontaire du prestataire de quitter son emploi ou de ne pas reprendre un emploi lorsqu’un conflit collectif est en cours et qu’un arrêt de travail semble imminent peut être motivée par cette situation ou par des raisons qui y sont étrangères, auquel cas il s’agira de rendre une décision en fonction de ces raisons, sans égard aux dispositions relatives au conflit collectif.
La menace d’un arrêt de travail qui pourrait être long peut amener un prestataire à prendre certaines décisions relatives à son avenir, en fonction de son évaluation de la situation, de critères personnels et de sa situation dans l’entreprise. À titre d’exemple, le prestataire peut décider volontairement, avant que survienne l’arrêt de travail, de remettre sa démission ou de ne pas reprendre un emploi, parce qu’il estime que la grève peut être de longue durée, qu’il n’endosse pas les revendications de son syndicat ou qu’il souhaite retourner aux études.
Que la décision de départ volontaire ait été prise en prévision d’un arrêt de travail ou pour d’autres motifs, une chose est certaine : à la suite de sa démission définitive, le prestataire n’est plus un employé de l'entreprise. On ne peut pas dire par la suite qu’il a perdu son emploi ou n’a pas pu le reprendre en raison d’un arrêt de travail dû à un conflit collectif. Cela s’explique par le fait que la perte d’emploi ou l’incapacité de reprendre un emploi était délibérée, même si c’était par crainte d’un arrêt de travail (CAF A-1082-84). Les dispositions relatives aux conflits collectifs ne s’appliqueraient pas.
Bien qu’il puisse sembler que cette approche soit inconciliable avec les dispositions législatives, le fait que les prestations ne seront pas refusées au titre de ces dispositions ne signifie pas nécessairement que, dans la réalité, les prestations seront versées à un prestataire se trouvant dans une telle situation. D’autres dispositions législatives doivent être appliquées au moment de prendre la décision finale concernant l’admissibilité aux prestations; il faut notamment déterminer, mais sans si limiter, s’il existe un motif valable pour le départ volontaire ou si toutes les conditions requises et d’admissibilité sont remplies.
Il convient de faire la distinction entre une perte d’emploi découlant d’une démission véritable et une perte d’emploi que l’on pourrait considérer comme un départ fabriqué. Dans le premier cas, il s’agit d’une véritable démission individuelle qui équivaut à une rupture complète et permanente de la relation employeur-employé. Il n’y a alors aucun risque que les prestations que le prestataire pourrait recevoir influent sur son comportement par rapport au conflit. En modifiant ainsi complètement son état, une telle personne ne devient jamais gréviste. Elle peut ainsi éviter les dispositions relatives aux conflits collectifs; toutefois, la question de savoir si elle va recevoir des prestations dans la réalité serait tranchée en vertu des dispositions relatives au départ volontaire ou au refus de reprendre le travail (LAE 29(1)).
Dans le cas d’un départ fabriqué, la démission peut être révocable, parce que la relation employeur-employé n’est pas totalement rompue; soit que l’employé n’a pas encore pris toutes les mesures nécessaires à cette fin, ou que la rupture n’est que superficielle, parce que l’employé participe au piquetage ou à d’autres activités syndicales. Il en va de même des démissions collectives, qui ne constituent la plupart du temps qu’un moyen supplémentaire de pression sur l’employeur dans un ensemble de stratégies visant à obtenir de celui-ci qu’il fasse droit aux revendications des employés. L’intérêt de ces travailleurs demeure lié au sort de l’entreprise.
Les prestations de l’assurance-emploi ne doivent en aucun cas servir à financer des employés en grève ou qui ont un intérêt dans un conflit. Dans ce contexte, la pensée traditionnelle a toujours sa raison d’être, pourvu que ce soit bien à cause de l’imminence de l’arrêt de travail que le prestataire a quitté son emploi, sans pour autant rompre tous les liens qui l’unissent à son employeur. Il en va de même du prestataire qui, volontairement et pour ces mêmes raisons, ne reprend pas un emploi, sans pour autant rompre les liens avec son employeur de façon définitive. L’inadmissibilité au bénéfice des prestations prendra effet à partir du premier jour de l’arrêt de travail, à la condition évidente que cet arrêt se concrétise.
Une perte d’emploi qui survient entre la démission fabriquée du prestataire (qui est réellement liée à un conflit collectif) et le début d’un arrêt de travail qui pourrait ne jamais se produire pourrait être considérée en vertu des dispositions relatives à l’exclusion (LAE 27(1)a), b)). Un travailleur qui, jour après jour, n’entre volontairement pas au travail du fait d’un conflit collectif et d’un arrêt de travail imminent aura de la difficulté à prouver qu’il est incapable d’obtenir un emploi convenable. Puisque l’employeur lui offre un emploi et que le travailleur choisit de ne pas l'occuper, le litige à considérer est sa disponibilité pour travailler. Une inadmissibilité aux termes de l’alinéa 18a) de la LAE serait probablement justifiée, pour la période pendant laquelle l’employé ne se présente pas au travail avant l’arrêt de travail (LAE 36). Ce principe s’applique également au prestataire qui ne reprend volontairement pas un emploi pour ces mêmes raisons, sans rompre les liens avec l'employeur de façon définitive.
Les dispositions relatives aux conflits collectifs ne s’appliqueront pas à ceux qui peuvent démontrer qu’ils ont vraiment démissionné et qu’une rupture complète et définitive entre eux et l’employeur est survenue avant le début de l’arrêt de travail. Dans le cas d’une rupture fabriquée ou non permanente, le prestataire doit être déclaré inadmissible, parce qu’il ne prouve pas qu’il est disponible pour travailler à compter de la date de sa démission, jusqu’au début de l’arrêt de travail.
8.5.7 En congé au moment de l'arrêt de travail
En général, les dispositions portant sur les conflits collectifs ne visent pas un employé qui est en congé au moment où survient un arrêt de travail, jusqu’au jour où il aurait normalement repris le travail, n’eût été cet arrêt de travail. Il existe une relation de cause à effet entre la perte d’emploi ou l’incapacité de reprendre un emploi et l'arrêt de travail seulement à compter de la date à laquelle l’employé était censé reprendre son emploi. Une inadmissibilité aux termes des dispositions relatives aux conflits collectifs prendrait effet ce jour-là. Cela ne serait pas le cas si l’employé avait été mis à pied antérieurement pendant un congé, pour un motif non lié au conflit. Cette approche s’appliquera uniformément aux congés pris pour cause de maladie, de blessure ou de quarantaine, de maternité, de soins prodigués à un nouveau-né ou à un enfant placé en vue de son adoption, ou de soins prodigués à un enfant ou à un autre membre de la famille gravement malade.
Il peut y avoir d’autres genres de congés, comme le congé consacré aux affaires syndicales, après lesquels un prestataire ne revient pas travailler à la fin de l’activité qui faisait l’objet du congé. On considère qu’un tel prestataire est incapable de reprendre son emploi et par conséquent, il est visé par les dispositions concernant les conflits collectifs (LAE 36(1)). Un congé prolongé consacré à l’exercice d’un autre emploi pourrait aussi entrer dans cette catégorie, à moins que le prestataire remplisse clairement la condition énoncée à l’alinéa 36(1)b) de la LAE.
Il arrive fréquemment qu’un prestataire continue de recevoir, pendant son congé, un paiement de la part de son employeur, visant à l’indemniser en tout ou en partie de sa perte de revenu pendant une période de congé autorisé. Telle est la situation, particulièrement en ce qui concerne les vacances et les congés de maladie pendant lesquels le prestataire peut recevoir son plein salaire pendant une partie ou la totalité de la période de congé. La rémunération peut également prendre la forme de paiements spéciaux pour compléter des allocations de formation reçues d’autres sources.
Lorsqu’un arrêt de travail est dû à un conflit collectif, un employeur pourrait cesser de payer les employés en congé. Cette interruption du versement représente une perte d’emploi ayant pour cause l’arrêt de travail dû au conflit collectif. Dans un tel cas, l’application des dispositions visant les conflits collectifs doit être envisagée dès l’arrêt des paiements, même si la période prévue pour le congé n’est pas terminée. Il faut examiner attentivement tous les faits pour déterminer si un prestataire répond aux conditions afin d’être exempté d’une inadmissibilité.
8.5.8 Rappel au travail
Que les employés aient été mis à pied après avoir exercé un emploi sur une base régulière, saisonnière ou occasionnelle, il n’est pas rare qu’ils se voient rappelés par leur employeur. Dans certains cas, la période ou la date de retour au travail est plus ou moins déterminée chaque année, alors que pour d’autres, le rappel est en fonction des nécessités du moment.
Dans de telles circonstances, il faut examiner soigneusement la question de l’admissibilité aux prestations lorsque, à la date prévue ou fixée de rappel de ces prestataires, un arrêt de travail dû à un conflit collectif empêche la réintégration. Il convient de déterminer si ces gens ne peuvent reprendre leur emploi et si, le cas échéant, les dispositions visant les conflits collectifs leur sont applicables.
Avant l’ajout de la mention particulière d’un « prestataire qui ne peut reprendre un emploi » (LAE 36(1)) aux dispositions législatives, la plupart de ces gens étaient traités comme s’ils avaient subi une perte d'emploi. Avant ce changement, l’évaluation des cas des travailleurs saisonniers dont l'emploi prend fin chaque année au terme de la saison d’activité (CAF A-209-89, CUB 16202; CAF A-1036-92, CUB 21236), des travailleurs occasionnels dont les modalités d’emploi peuvent varier considérablement, ou encore d’une personne au chômage pouvant être rappelée ou non, était bien plus difficile (CAF A-801-82, CUB 7464; et CAF A-594-91, CUB 19771).
Les modifications qui ont été apportées ont clarifié cette situation et permettent maintenant de considérer la question de l’admissibilité aux prestations en fonction de la notion du prestataire « qui ne peut reprendre un emploi », ce qui correspond plus correctement à la situation réelle de ces prestataires.
Dans ce contexte, il ne suffit toutefois pas que le travailleur, en chômage au moment de l’arrêt de travail, ait uniquement une vague possibilité de travailler pendant cet arrêt; une garantie morale à cet égard ou un simple droit de rappel peut suffire dans certains cas et ne pas être suffisant dans d’autres (CAF A-044-90, CUB 17664). De fait, pour que l’on puisse considérer qu’un prestataire « ne peut reprendre un emploi » en raison d’un arrêt de travail, on doit pouvoir raisonnablement conclure que le travailleur aurait été rappelé et donc qu’il aurait eu un emploi s’il n’y avait pas eu d’arrêt de travail.
En voici quelques exemples: un avis de rappel effectué par l’employeur ou la publication d’un horaire de travail requérant les services de l’employé à une date précise; le fait que la cessation d’emploi précédente était temporaire et prévue pour une période déterminée et que l’employé devait revenir au travail à une date précise (CAF A-209-89, CUB 16202) ou, finalement, le fait qu’on puisse raisonnablement conclure, d’après l’importance et la régularité de l’emploi du prestataire, que celui-ci aurait travaillé s’il n’y avait pas eu d’arrêt de travail (CUB 48815). Lorsque l’employé ne donne pas suite à une telle offre d’emploi ou opportunité, il est de toute évidence incapable de reprendre un emploi antérieur (CAF A-595-00, CUB 45670A). De telles situations nécessitent l’application des dispositions relatives aux conflits collectifs.
Le même raisonnement s’applique lorsqu’un prestataire, mis à pied par son employeur, s’est entendu avec lui sur sa réintégration ou son retour éventuel à une date précise ou à un moment déterminé, mais n’a pas pu revenir à la date prévue à cause d’un arrêt de travail dû à un conflit collectif (CAF A-595-00, CUB 45670A).
Dans le même ordre d’idées, on ne peut considérer que le travailleur saisonnier « ne peut reprendre un emploi » avant de pouvoir raisonnablement conclure que l’employeur aurait rouvert les portes de son entreprise au début de la saison d’activité, si l’arrêt de travail n’avait pas eu lieu (CAF A-787-81, CUB 6801 et CAF A-1036-92, CUB 21236).
Le lien de causalité entre l’incapacité de reprendre un emploi et l’arrêt de travail existe à partir de la date où l’employeur aurait rappelé le travailleur, s’il n’y avait pas eu d’arrêt de travail, dans la mesure où cet arrêt est toujours en cours à ce moment-là. L’inadmissibilité, aux termes des dispositions visant les conflits collectifs, ne peut prendre effet qu’à partir de cette date.
On ne peut pas suivre la même ligne de pensée dans le cas d’une personne rappelée au travail par son employeur, du seul fait que ce dernier a besoin de services supplémentaires à cause de l’arrêt de travail, et qui n’aurait pas autrement été rappelée (section 8.5.13 du Guide). Même si les dispositions relatives aux conflits collectifs ne s’appliquent pas dans ce scénario, l’admissibilité aux prestations serait tranchée en vertu d’autres dispositions législatives et réglementaires.
8.5.9 Employés en période d’essai
La période d’essai n’est somme toute qu’une étape préliminaire avant l’obtention d’un emploi permanent. Elle sert à évaluer les compétences d’un employé en fonction des besoins immédiats et futurs d’une entreprise. Un emploi exercé à titre d’essai est comparable à tout autre emploi ordinaire (CUB 56673 et CUB 51828). Le fait que la période d’essai soit interrompue par un arrêt de travail constitue à n’en pas douter une perte d’emploi qui lui est imputable (CUB 20493).
8.5.10 Travailleurs à temps partiel
Les dispositions relatives aux conflits collectifs ne font aucune distinction entre les genres d’emploi qui sont assujettis à leurs prescriptions (CUB 65854 et CUB 32940). Dans la mesure où il s’agit d’un emploi qu’un prestataire a perdu ou ne peut reprendre en raison d’un arrêt de travail dû à un conflit collectif, il importe peu que cet emploi soit à temps plein ou à temps partiel ou encore, régulier ou temporaire.
Il est plus important d’établir si l’emploi à temps partiel a été exercé de façon continue ou selon un mode préétabli ou s’il ne l’a été que de façon irrégulière. Alors que la perte d’un emploi continu à temps partiel constitue une perte d’emploi (CUB 69780 et CUB 13040), il peut en aller autrement si l’emploi à temps partiel était exercé de façon très irrégulière. Dans un tel cas, il faut déterminer si le travailleur était sûr d’être rappelé et aurait été en poste s’il n’y avait pas eu d’arrêt de travail dû à un conflit collectif (CUB 65854 et CUB 32940; section 8.5.8 du Guide et section 8.5.12 du Guide).
Le cas échéant, l’inadmissibilité ne sera imposée qu’à compter du premier jour où le prestataire serait retourné au travail, n’eût été l’arrêt de travail, dans les cas où cet arrêt se poursuit. Il convient de souligner qu’à partir de cette date, le nombre de jours d’inadmissibilité dans une semaine est calculé en proportion de l’emploi à temps partiel que le prestataire a perdu ou ne peut reprendre en raison de l’arrêt de travail dû à un conflit collectif (LAE 36(2); RAE 53; section 8.1.6 du Guide et sections 8.9.0 à 8.9.4 du Guide).
8.5.11 Travailleurs temporaires
La cessation d’un emploi, qu’il soit permanent ou temporaire, constitue une perte d’emploi visée par les dispositions relatives aux conflits collectifs, si elle est attribuable à un arrêt de travail causé par un conflit collectif au lieu de travail du travailleur (CUB 65854 et CUB 32940). Le même principe s’applique lorsqu’un prestataire ne peut reprendre un emploi permanent ou temporaire pour ces mêmes motifs (LAE 36).
Les éléments suivants ne sont pas pertinents pour déterminer si la perte d'emploi est attribuable à un arrêt de travail :
- le fait que l’emploi vienne de débuter, qu’il soit de courte durée ou sur le point de prendre fin;
- que le prestataire ait été embauché pour remplacer des travailleurs en vacances ou qu’il ait été congédié par l’employeur la veille de l’arrêt de travail;
- qu’il ait accepté cet emploi au cours de la morte-saison dans sa profession habituelle;
- qu’il ait obtenu l’emploi au moyen d’un permis syndical de déplacement;
- qu’il soit un employé permanent au service d’une autre entreprise;
- ou qu’il soit un étudiant dont l’emploi ne devait durer que jusqu’à son retour aux études.
De même, le fait qu’un travailleur ait été employé pour une période déjà plus longue que celle qui était prévue n’a aucune importance, si cet emploi a cessé à cause de l’arrêt de travail. Ainsi, un employé muté à une usine où un arrêt de travail a été déclenché deux jours plus tard n’en a pas moins perdu son emploi à cause de l’arrêt de travail. La question qui importe est de savoir si l’employé occupait cet emploi au moment de l’arrêt de travail et non pas, combien de temps il devait y rester ou s’il aurait dû être ailleurs.
Il est important d’établir clairement le motif de toute perte d’emploi survenant pendant un arrêt de travail, particulièrement en ce qui concerne celle d’un travailleur embauché de façon temporaire. Il peut arriver que, même si cette perte d’emploi se produit pendant un arrêt de travail, cela ne soit qu’une simple coïncidence. Arrêt de travail ou pas, si ce travailleur temporaire aurait été mis à pied pour une raison n’ayant rien à voir avec l’arrêt de travail, par exemple parce que la durée déterminée de sa période d’emploi était terminée, alors, les dispositions visant les conflits collectifs ne sont pas applicables. Le fait que certains de ses collègues de travail aient déjà perdu ou perdront éventuellement leur emploi à cause de l’arrêt de travail, ou le fait que le prestataire finance en fait le conflit par l’intermédiaire des cotisations syndicales payées, n’est pas significatif.
Lorsqu’une personne a été embauchée ou rappelée précisément à cause de l’arrêt de travail, les dispositions visant les conflits collectifs ne s’appliqueront pas si elle perd son emploi ou ne peut reprendre son emploi en raison de l’arrêt de travail dû au conflit collectif (section 8.5.13 du Guide)
8.5.12 Travailleurs occasionnels
Il y a différents genres de situations de travail occasionnel qui peuvent avoir des répercussions diverses sur un conflit collectif. Il s’agit premièrement de déterminer dans quel genre de situation les travailleurs occasionnels se trouvent. Il y a les travailleurs occasionnels qui ne travaillent que de temps à autre, pour remplacer ou aider pendant une période bien précise, ou ceux qui peuvent être embauchés pour travailler temporairement selon un horaire établi. Il y a aussi ceux qui figurent sur une liste de rappel et qui n’ont pas horaire établi ni attente quant au moment où ils seront appelés.
Une fois que le statut du travailleur occasionnel est clarifié, il est possible de déterminer les répercussions d’un conflit collectif potentiel sur l’employé. La Commission cherche à distinguer deux situations : celle de la personne qui, sans l’arrêt de travail, aurait sans doute travaillé à un moment donné au cours de l’arrêt de travail, et celle de l’autre qui n’aurait eu en fait qu’une vague possibilité d'être appelée pendant cette même période (section 8.5.8 du Guide). Les dispositions relatives aux conflits collectifs ne touchent que le travailleur occasionnel que l’on pouvait raisonnablement s’attendre à voir travailler pendant le conflit collectif.
8.5.13 Employés embauchés ou rappelés à cause de l'arrêt de travail
L’imminence d’un arrêt de travail n’empêche pas nécessairement un employeur d’embaucher du personnel. Bien au contraire, en plus de nouveaux employés embauchés pour suppléer au taux de roulement régulier de son personnel, l’employeur augmente parfois son effectif pour augmenter la production, hausser le niveau d’inventaire ou devancer l’exécution de certains contrats importants. Il peut aussi être tenté de rappeler au travail certains employés qui, en d’autres circonstances, ne l’auraient pas été, afin d’atténuer les effets anticipés ou réels d’un arrêt de travail éventuel.
Si l’arrêt de travail se concrétise, le fait qu’un prestataire ait perdu un emploi ou ne puisse reprendre un emploi touchera autant le travailleur embauché ou rappelé à cause de l’arrêt de travail que celui dont l’embauchage ou le rappel a été fait pour répondre aux besoins courants de l’entreprise, à la différence que, en règle générale, ce dernier sera visé par les dispositions concernant les conflits collectifs (CUB 10481 et CUB 15967), alors que l’autre ne le sera pas.
Dans la réalité, il n’est souvent pas facile de distinguer entre l’un et l’autre travailleur, tous deux embauchés ou rappelés pour une période temporaire peu de temps avant l’arrêt de travail. Il faut alors se demander pour quelle raison chacun d’eux a été embauché ou rappelé, afin de déterminer s’il s’agit d’un emploi qui a été créé en raison de l’imminence de l’arrêt de travail.
Certains employeurs admettent volontiers que l’embauche ou le rappel d’un ou de plusieurs travailleurs était directement relié à la perspective d’un arrêt de travail. D’autres peuvent déclarer que l’employé a été embauché ou rappelé sur une base permanente. Dans ce dernier cas, pour clarifier le véritable motif de l’embauche ou du rappel, on peut demander à l’employeur pourquoi l’employé a été mis à pied dès son retour au travail après le règlement du conflit.
Le passage du temps peut contribuer à montrer si l’employé a été embauché ou rappelé pour remplir des tâches régulières en remplacement, par exemple, d’une personne en congé de maladie ou de maternité ou, pour accomplir des travaux que les employés permanents refusaient de faire en période de conflit. En fait, l’employé pourrait avoir obtenu un emploi, et non pas perdu un emploi, à cause de l’arrêt de travail imminent.
Dans la plupart des provinces, la législation du travail n’interdit pas le recours aux services de « briseurs de grève » pour remplacer les employés impliqués dans un arrêt de travail. L’embauche ou le rappel de travailleurs à titre de « briseurs de grève » au cours d’un arrêt de travail y est de toute évidence relié; le fait que ces travailleurs perdent par la suite un emploi ou soient incapables de reprendre un emploi, selon le cas, ne les rend pas assujettis aux dispositions visant les conflits collectifs. Chaque cas doit être examiné selon les faits qui lui sont propres.
Même si le grand public sait qu’une grève peut avoir lieu, cela ne veut pas nécessairement dire que tout embauche dans les circonstances y est relié. Même si le prestataire aurait pu initialement démontrer qu’il avait un motif valable de refuser un emploi proposé dans une telle situation, cela n’exclut pas l’application des dispositions visant les conflits collectifs s’il finit par accepter un emploi véritable qui n’est pas lié à un arrêt de travail imminent et que subséquemment, il le perd ou ne peut le reprendre à cause de cet arrêt de travail.
Il faut se rappeler qu’un emploi n’est pas considéré convenable s’il résulte d’un arrêt de travail dû à un conflit collectif (LAE 6(4)a) et section 9.4.4 du Guide).
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