Guide de la détermination de l'admissibilité Chapitre 8 - Section 12
8.12.0 Autre emploi exercé au cours de l'arrêt de travail
La fin d’un arrêt de travail ne constitue pas le seul facteur à prendre en compte pour déterminer si une période d’inadmissibilité prend fin (section 8.1.8 du Guide). Le paragraphe 36(1) de la LAE en prévoit une autre, comme le montre l’extrait suivant :
« . . . le prestataire qui a perdu un emploi ou qui ne peut reprendre un emploi en raison d’un arrêt de travail . . . n’est pas admissible au bénéfice des prestations avant :
- soit la fin de l’arrêt de travail;
- soit, s’il est antérieur, le jour où il a commencé à exercer ailleurs d’une façon régulière un emploi assurable. »
La fin de la période d’inadmissibilité dans les circonstances est donc reliée à la réalisation de l’une ou l’autre de deux éventualités. La première, soit la fin de l’arrêt de travail, vise les employés (prestataires) et les activités d’un lieu de travail donné, alors que la deuxième, qui consiste à exercer ailleurs un emploi assurable d’une façon régulière, est un événement individuel qui n’intéresse que le prestataire et qui n’a pas de lien avec les autres employés ou les activités du groupe.
Il appartient au prestataire de prouver qu’il a commencé à exercer d’une façon régulière un emploi assurable ailleurs depuis qu’il a perdu son emploi ou n’a pas pu le reprendre en raison d’un arrêt de travail (LAE 36(1)). Un emploi ou une période d’emploi qui a précédé le moment où le prestataire a perdu ou n’a pu reprendre un emploi antérieur n’est d’aucun secours dans un tel contexte (CUB 64431). Ce que l’on peut toutefois accepter, c’est la transformation d’un emploi à temps partiel qui a commencé avant l’arrêt de travail en emploi à temps plein ou une augmentation considérable du nombre d’heures de travail depuis que le prestataire a perdu son emploi ou n’a pas pu reprendre son emploi en raison de l’arrêt de travail.
8.12.1 Exercer ailleurs un emploi assurable
L’emploi assurable que le prestataire a commencé à exercer doit nécessairement respecter le sens que lui donne la Loi (LAE 2(1)), ce qui signifie qu’il existe une relation employeur-employé. On doit donc exclure tout emploi exercé à son propre compte (CUB 64431) de même que toute autre activité qui ne constitue pas comme tel un emploi assurable.
Enfin, la Loi précise que cet emploi assurable doit être régulièrement exercé ailleurs qu’au lieu de travail où l’arrêt de travail est en cours (LAE 36(1) et CUB 77469), ce qui exclut en principe tout emploi qu’un prestataire peut commencer à exercer sur les lieux mêmes où se déroule l’arrêt de travail.
Ainsi, celui qui a réintégré son poste avant la fin de l’arrêt de travail ne satisfait pas à la condition requise pour que l’inadmissibilité soit terminée. Il doit attendre le retour au travail de l’ensemble des travailleurs touchés par l’arrêt de travail, ce qui entraînerait la fin de l’arrêt de travail (LAE 36(1)a)), ou remplir les conditions de non-application (LAE 36(4)).
8.12.2 D'une façon régulière
Le fait d’avoir été embauché par un employeur ne signifie pas nécessairement qu’un prestataire exerce un emploi de façon régulière; il doit occuper le nouveau poste et suivre un horaire de travail donné. Si la durée prévue de l’emploi est si courte qu’il est impossible d’en déterminer la continuité, il ne s’agit pas d’un emploi exercé de façon régulière, mais plutôt d’un emploi occasionnel. L’application de cette disposition de la Loi a donné lieu à une jurisprudence et à des interprétations abondantes à l’appui de ces faits. Les principes jurisprudentiels figurent dans plusieurs jugements de la Cour d’appel fédérale et de la Cour suprême (décision 1669883 de la Cour Suprême, CAF A-1198-84, CUB 9488 et CAF A-765-85, CUB 76911A).
À la lecture de ces jugements, afin de déterminer si un prestataire a commencé à exercer d’une façon régulière un emploi assurable, il faut que trois critères soient satisfaits. Les voici :
- le caractère ferme, sérieux et authentique de l’emploi;
- la continuité de l’emploi;
- la régularité du régime de travail du prestataire.
Un emploi s’avère ferme, sérieux et authentique lorsqu’il comporte à un moment donné une relative assurance pour le travailleur d’un certain nombre de périodes de travail à intervalles prévisibles. Il ne l’est pas lorsque :
- il n’offre pas grande garantie en ce sens;
- le nombre de périodes de travail proposé est vague, imprécis, non défini et incertain;
- il est offert en fonction des besoins;
- le travailleur ne sait pas trop s’il va se poursuivre d’un jour à l’autre ou dans quelle mesure cela se fera (CUB 64431).
Lorsque le travailleur n’a pas obtenu une telle garantie au moment de son embauche ou plus tard, le fait qu’il ait exécuté un certain nombre de périodes de travail ne peut servir à démontrer après coup que l’emploi était conforme au premier critère.
Il faut aussi qu’il y ait eu continuité de l’emploi, donc que celui-ci se soit poursuivi sans interruption, c’est-à-dire sans mise à pied, fin de contrat ou rupture de la relation employeur-employé, même de courte durée, qui aurait nécessité par la suite un réembauchage. Une telle continuité n’est pas démontrée lorsqu’un emploi a été exercé de façon intermittente, sporadique, occasionnelle ou sur appel (CUB 64431 et CUB 55172).
On doit pouvoir retrouver une régularité dans le régime de travail. En général, cela signifie que le prestataire a travaillé selon un régime précis au chapitre de l’horaire et du nombre d’heures ou de jours et que ce régime s’est répété d’une façon régulière au cours de la période où l’emploi s’est poursuivi (CUB 64431). Il y a lieu à ce stade de déterminer quel était le régime de travail du prestataire au cours d’un intervalle qui s’avère représentatif de son emploi.
Un tel intervalle peut varier d’un cas à un autre. Mais on peut penser que, dans la majorité des cas, un intervalle d’une semaine, soit sept jours commençant un jour quelconque, constitue un intervalle représentatif de l’emploi en cause. Il se peut dans certains cas que cet intervalle soit plus court ou plus long, comme lorsqu’une personne a été embauchée pour travailler une semaine sur deux, auquel cas la période de deux semaines constitue l’intervalle représentatif.
Une fois déterminé l’intervalle représentatif, il reste à examiner quel a été le régime de travail du prestataire au cours de cet intervalle et dans quelle mesure ce régime de travail s’est répété pendant la période d’emploi. Au strict minimum, on estime qu’il y a régularité du régime de travail à partir du moment où un régime de travail précis a été appliqué pendant au moins deux intervalles successifs de sept jours dans la majorité des cas, lorsque le prestataire occupait son emploi. On pourrait aussi bien retrouver ici un régime de travail à temps partiel qu’un régime à temps plein.
Il ne suffit pas qu’une personne ait été embauchée, ni même qu’elle ait travaillé. Il importe qu’elle satisfasse aux trois grands critères énoncés précédemment.
Le fait qu’un prestataire ait eu l’intention de reprendre son emploi antérieur à la fin de l’arrêt de travail au lieu de conserver son emploi le plus récent pourrait être suffisant pour démontrer qu’il exerçait l’autre emploi de façon régulière (CUB 39266). Cet élément n’influe en rien sur le caractère « régulier » de l’emploi. Par conséquent, il ne saurait être question d’exiger d’un prestataire qu’il fasse preuve d’un quelconque désintéressement, d’un éloignement ou d’une dissociation de l’issue du conflit de travail en rompant toute attache avec l’employeur touché par le conflit collectif.
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