Identité de la substance

Les renseignements sur l'identité de la quinoléine sont présentés dans le tableau 1.

Tableau 1 : Identité de la substance
No CAS 91-22-5
Nom dans la LIS Quinoléine
Noms relevés dans les NCI Benzo[b]pyridine (ECL) Quinoléine (AICS, ASIA-PAC, EINECS, ENCS, NZIoC. PICCS, SWISS, TSCA)
Autres noms Azanaphtalène, 1-benzanine, 1-benzine, benzopyridine, chinoléine, leucoline
Groupe chimique (groupe de la LIS) Produits chimiques organiques définis
Principale classe chimique ou utilisation N-hétérocycles (aza-arènes)
Principale sous-classe chimique Quinoléines
Formule chimique C9H7N
Structure chimique Structure chimique pour la quinoléine (base) et ions quinolinium (acide conjugué)
SMILES c12c(cccc1)nccc2
Masse moléculaire 129,16 g/mol

Abréviations : AICS (inventaire des substances chimiques de l'Australie); ASIA-PAC (listes des substances de l'Asie-Pacifique; no CAS (numéro de registre du Chemical Abstracts Service); LIS (Liste intérieure des substances); ECL (liste des substances chimiques existantes de la Corée); EINECS (inventaire européen des substances chimiques commerciales existantes); ENCS (inventaire des substances chimiques existantes et nouvelles du Japon); NCI (National Chemical Inventories); NZIoC (inventaire des substances chimiques de la Nouvelle-Zélande); PICCS (inventaire des produits et substances chimiques des Philippines); SMILES (simplified molecular input line entry specification); SWISS (liste des toxiques 1 et inventaire des nouvelles substances notifiées de la Suisse) et TSCA (inventaire des substances chimiques visées par la Toxic Substances Control Act des États-Unis).
Source : NCI, 2006

La quinoléine est une base organique qui appartient au groupe d'hétérocycles d'azote ou d'aza-arènes. Il s'agit d'un liquide hygroscopique avec une odeur pénétrante (Finley, 1996). Le tableau 2 présente certaines propriétés physiques et chimiques de la quinoléine. Son point d'ébullition, son point de pression et sa pression de vapeur laissent entendre que la quinoléine sera semivolatile dans des conditions atmosphériques (courriel de 2004 de la Direction de la recherche sur la qualité de l'air d'Environnement Canada adressé à la Division des évaluations écologiques; source non citée). La valeur pKa de 4,9 indique qu'à des valeurs de pH ambiantes (de 6 à 9 pour la plupart des eaux de surface), presque toute la quinoléine sera présente sous forme non ionisée.

Tableau 2 : Propriétés physiques et chimiques de la quinoléine
Propriété Type Valeur Température Référence
Point de fusion (°C) Expérimental -15 Mackay et al., 1999
Point d'ébullition (°C) Expérimental 237,7 Mackay et al., 1999
Pression de vapeur (Pa) Expérimental 8 25 oC Mackay et al., 1999
Modélisé 0,65 0 °C MPBPWIN, 2000
Constante de la loi de Henry (Pa·m3/mol) Estimation (pression de vapeur/
hydrosolubilité)1
0,169 25 oC Mackay et al., 1999
Log Koe (sans dimension) Expérimental 2,10 Mackay et al., 1999
Log Kco (sans dimension) 3,26 Fowler et al., 1994
Solubilité dans l'eau (mg/L) Expérimental 6110 25 oC Mackay et al., 1999
pKa (sans dimension) Expérimental 4,9 20 oC Mackay et al., 1999
kOH(cm3/molécule par seconde) Estimation 1,16 × 10-11 24 °C Mackay et al., 1999

Abréviations : Kco, coefficient de partage carbone organique-eau; kOH, constante du taux pour la réaction de la phase gazeuse avec des radicaux hydroxyles; Koe, coefficient de partage octanol-eau; pKa, constante de dissociation acide.
1 Pression de vapeur/solubilité dans l'eau

En tant que HAP remplacé par de l'azote, la quinoléine peut être présente à divers degrés dans plusieurs mélanges de HAP (Environnement Canada, 1999, McNeil, 1981). La quinoléine est naturellement présente dans le charbon (Clemo, 1973). Le goudron de houille est produit à partir du charbon en tant que sous-produit de la production de coke métallurgique au Canada et est récupéré et raffiné afin de servir comme produit intermédiaire pour être utilisé à des fins industrielles et comme ingrédient dans plusieurs produits commerciaux et de consommation (courriel de 2010 de la Division des mines et du traitement d'Environnement Canada adressé à la Division des évaluations écologiques d'Environnement Canada; source non citée). La quinoléine demeure présente dans le goudron de houille industriel et dans ses produits de distillation – huiles de goudron de houille et brai de goudron de houille. Les huiles de goudron de houille sont raffinées afin de produire de la créosote au Canada. L'utilisation de la créosote comme produit de préservation du bois au Canada est bien documentée (courriel de 2010 de la Division de la gestion des substances chimiques d'Environnement Canada adressé à la Division des évaluations écologiques d'Environnement Canada; source non citée). Le brai de goudron de houille est utilisé dans plusieurs secteurs industriels, notamment la production d'aluminium et la fabrication d'électrodes de graphite, de produits de carbone de spécialité et d'enduits pour les chaussées d'asphalte. Les alumineries sont des consommateurs importants de brai de goudron de houille (McNeil, 1981; Sutton, 2008).

La quinoléine pure est produite de façon commerciale à partir de distillats de goudron de houille (HSDB, 2009). Elle peut être extraite de l'huile d'os (EOHS, 1983), et elle peut être produite par la synthèse Skraup, dans le cadre de laquelle l'aniline est chauffée avec du glycérol et du nitrobenzène en présence de l'acide sulfurique (Finley, 1996).

Selon une enquête réalisée en vertu de l'article 71 de la LCPE (1999), au moins une entreprise au Canada a déclaré fabriquer ou importer de la quinoléine en quantités supérieures à 20 000 kg pendant l'année civile 2000, dans des mélanges où la quinoléine représente moins de 1 % de la composition (Environnement Canada, 2001a); toutefois, des données plus récentes ne sont pas disponibles.

La quinoléine a été détectée dans des produits à base de goudron de houille, comme les couches de scellement au bitume des stationnements et des allées de véhicules et la créosote utilisée comme agent de préservation dans les industries du bois d'œuvre et du bois sur le marché canadien (Zhu, 2007; EHS, 2010; HSDB, 2009). La quinoléine a également été désignée comme composant de mélanges de fragrance (RIFM, 2003). On peut également trouver de la quinoléine Toutefois, la quinoléine n'est pas homologuée comme ingrédient actif ni comme formulant dans les pesticides au Canada (courriel de 2009 de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire de Santé Canada adressé au Bureau de l'évaluation des risques de Santé Canada; source non citée).

Il est rapporté dans la litérature publique que la quinoléine a été utilisée comme solvant, produit chimique intermédiaire et inhibiteur de corrosion, ainsi que dans la fabrication de teintures et de produits pharmaceutiques, bien qu’il n’y ait aucune preuve de ces utilisations au Canada (Finley, 1996; HSDB, 2009). À l'échelle mondiale, la quinoléine est surtout utilisée comme précurseur pour la production de 8-quinolinol, un agent chélateur qui est utilisé pour les produits pharmaceutiques et les médicaments vétérinaires complexes et qui est ajouté au shampooing antipelliculaire (HSDB, 2009). La quinoléine est également un précurseur pour la production de la substance 8-hydroxyquinoléine de cuivre (HSDB, 2009). Les applications industrielles de la quinoléine incluent la fabrication de teintures de type méthine et la production de terbène; la quinoléine est également utilisée comme réactif de décarboxylation, solvant de HAP dans la production de peinture, et comme produit chimique intermédiaire et antimousse pour la fabrication de produits pétrochimiques (Scorecard, 2005; HSDB, 2009). La quinoléine agit comme inhibiteur de corrosion lorsqu'elle est présente dans un antigel de type éthylèneglycol ou dans des recouvrements en ciment pour les fils et les tiges d'armature en acier, et elle est utilisée dans l'extraction et la séparation et comme additif dans les bains galvanoplastiques (Finley, 1996).

La quinoléine est associée naturellement au charbon et aux dérivés du charbon et peut donner lieu à des traces de polluants pendant la combustion incomplète de substances contenant de l'azote (HSDB, 2009). Les niveaux de fond naturel au Canada ne sont pas connus; toutefois, les mesures de traces de quinoléine dans les sédiments préindustriels laissent entendre des sources naturelles de faible niveau de cette substance. Furlong et Carpenter (1982) ont mesuré des concentrations de quinoléine variant de 120 à 770 ng/g de carbone organique dans des sédiments antérieurs à 1870 à Puget Sound, à Washington.

Au Canada, en 2008, des rejets de quinoléine ont été déclarés à l'Inventaire national des rejets de polluants par six installations : un raffineur de pétrole, un producteur d'enduits à toiture et de produits chimiques connexes, un producteur de brai de goudron de houille, un fabricant de produits métalliques, un fabricant de produits chimiques et une installation de traitement et d'élimination des déchets. Les rejets atmosphériques sur place ont totalisé 445 kg et 58 tonnes ont été incinérées hors site. Aucun rejet dans l'eau n'a été déclaré (INRP, 2009).

Les sources déclarées de rejets de quinoléine dans l'environnement comprennent les installations de distillat de goudron de houille (créosote) et les usines d'imprégnation du bois, le bois imprégné de créosote utilisé dans les quais de havre, les cadres ferroviaires utilisé dans les murs porteurs le long de rives de lac (Canada, 1993), les aciéries équipées de fours à coke (Onuska et Terry, 1989; Kauss et Hamdy, 1991), les alumineries (courriel de 2009 de la Division mines et traitement – Québec d'Environnement Canada adressé à la Division des évaluations écologiques d'Environnement Canada; source non citée) et les usines de gazéification du charbon abandonnées (usines à gaz) (Johansen et al., 1997a). Un inventaire national effectué en 1987 a recensé plus de 150 sites de gazéification du charbon à l'échelle du pays. Ces sites étaient situés dans toutes les provinces, à l'exception de l'île-du-Prince-Édouard, et les plus fortes densités de sites se trouvaient à Montréal, à Toronto et à Vancouver (RDRC, 1987).

Il convient de noter que des mesures de protection environnementales ont été mises en œuvre au Canada, surtout pour les aciéries équipées de fours à coke (SLV, 1996; EMA, 1997, 2000; Environnement Canada, 2001b) et les installations de préservation du bois (Environnement Canada, 1999). Les rejets importants de quinoléine dans l'environnement ont été réduits par des mesures mises en œuvre pour réduire les rejets de créosote (qui contient de la quinoléine) et de HAP (associés avec la quinoléine) de ces sources (courriel de 2010 de la Division de la gestion des substances chimiques d'Environnement Canada adressé à la Division des évaluations écologiques d'Environnement Canada; source non citée).

Dans le cas des usines à gaz abandonnées, la majorité des sites au Québec, en Ontario et en Colombie-Britannique ont fait l'objet d'une certaine forme d'attention, sous la forme d'activités d'évaluation, d'assainissement ou de gestion des risques (MENVIQ, 1988; courriel de 2005 de l'Unité d'évaluation environnementale et de prévention des déchets d'Environnement Canada adressé à la Direction des substances existantes d'Environnement Canada; source non citée; courriel de 2005 du Programme d'assainissement des lieux contaminés d'Environnement Canada adressé à la Direction des substances existantes d'Environnement Canada; source non citée). Des activités d'assainissement sont en cours à deux anciens sites d'usines à gaz appartenus par le gouvernement fédéral; au premier site (Colombie-Britannique), les travaux sont en cours depuis 2005-2006 (courriel de 2010 du groupe d'évaluation et d'atténuation environnementale des programmes environnementaux de Transports Canada adressé à la Division des sites contaminés d'Environnement Canada; source non citée); au deuxième site (Ontario), les travaux d'assainissement ont commencé en 1996 et devraient se terminer en 2010-2011 (courriel de 2010 du Bureau de la coordination environnementale de Pêches et Océans Canada adressé à la Division des sites contaminés d'Environnement Canada; source non citée). Dans les provinces de l'Atlantique, rien n'indique que des activités d'évaluation, d'assainissement ou de gestion des risques ont eu lieu pour les 12 usines à gaz abandonnées (RDRC, 1987; courriel de 2005 de la Section de la gestion et du traitement des déchets d'Environnement Canada adressé à la Direction des substances existantes d'Environnement Canada; source non citée). Bien que les initiatives ci–dessus ciblent des polluants particuliers, comme les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), le benzène, le toluène, l'éthylbenzène et les xylènes, elles devraient également être efficaces pour s'attaquer à la contamination de quinoléine (p. ex. courriel de 2004 de Purifics ES Inc. à la Direction des substances existantes d'Environnement Canada; source non citée).

Étant donné que la quinoléine peut se former pendant la combustion incomplète de substances contenant de l'azote (p. ex. pétrole, charbon), elle peut être rejetée dans l'environnement par des sources comme le gaz d'échappement automobiles (Dong et al., 1997). Rogge et al. (1993) ont recueilli des échantillons d'aérosols (<2 µm) à partir des gaz d'échappement de véhicules à moteur essence et diesel construits entre le milieu des années 1960 et le milieu des années 1980. Le parc de véhicules soumis aux essais comprenait des véhicules sans convertisseurs catalytiques (N = 5), des véhicules avec des convertisseurs catalytiques (N = 7) et des camions fonctionnant au diesel (N = 2). Les taux d'émission de la quinoléine, mesurés en microgrammes par kilomètre parcouru, étaient les suivants : véhicule sans convertisseurs catalytiques, 5,3, véhicules avec des convertisseurs catalytiques, 0,57, et les camions fonctionnant au diesel, 0,46. Les enquêtes plus récentes n'ont pas mesuré les taux de quinoléine dans les gaz d'échappement des véhicules, des petits moteurs ou des moteurs diesel. De la même manière, il n'est pas certain s'il y a de la quinoléine dans les émissions actuelles provenant de centrales électriques alimentées au charbon (Mortazavi, 1996; Cianciarelli et Mortazavi, 1998; USEPA, 2000; SENES Consultants Limited, 2002a, b).

La quinoléine peut également être présente dans les gaz émis par les incinérateurs de déchets privés et publiques (Benestad, et al., 1987; Minomo et al., 2009).

On peut trouver de la quinoléine dans les produits à base de goudron de houille, comme les couches de scellement au bitume des stationnements et des allées de véhicules (EHS, 2010). Les essais de lixiviation effectués sur ces matériaux indiquent un risque de ruissellement de la quinoléine entraîné par des précipitations (Zhu, 2007). Ce résultat est conforme aux constatations de Mahler et al. (2005) selon lesquelles les couches de scellement des stationnements peuvent être une source de rejets de HAP dans l'environnement.

Le total des émissions atmosphériques de la quinoléine à l'échelle nationale pour les États-Unis pour le période de 1990 à 1993 était estimé à 23,6 tonnes par année, et les contributions principales provenaient de la fabrication de produits chimiques et de produits analogues (11,3 tonnes), la transformation de métaux (8,2 tonnes), des raffineries de pétrole et des industries connexes (4 tonnes) et du secteur du bois et des pâtes et papiers et des produits de publication (0,08 tonne) (USEPA, 2000).

L'analyse du devenir dans l'environnement intègre les données sur le comportement chimique de la substance aux propriétés du milieu récepteur. Elle a pour but de déterminer la répartition de la substance entre plusieurs milieux après son rejet dans l'environnement, ce qui comprend la prise en compte de la persistance et du potentiel de bioaccumulation de cette dernière.

Tableau 3 : Résultats du modèle de fugacité de niveau III pour la quinoléine (EQC, 2003)1
Substance rejetée dans : Fraction de la substance se répartissant dans chaque milieu (%)
Air Eau Sol Sédiments
l'air (100 %) 18 10 72 0
l'eau (100 %) 0 99 0,13 0,22
le sol (100 %) 0,06 6,7 93 0,015

1 Modélisation effectuée pour la forme non ionisée à une température de 25 oC. Paramètres d'entrée : masse moléculaire, 129,16; solubilité aqueuse, 6 110 mg/L; pression de vapeur, 8 Pa; log Koe, 2,1; point de fusion, -15ºC. Des détails sur les demi-vies sélectionnées (eau, 552 h; sédiments, 552 h; air, 16 h; sol, 4 368 h) sont présentés dans la section sur la persistance et le potentiel de bioaccumulation.

Des simulations pour la répartition dans l'environnement ont été effectuées au moyen du modèle de niveau III (modèle hors de l'équilibre et à l'état stable) au critère d'équilibre pour les produits chimiques de type I (Mackay et al., 1996; EQC, 2003). Les paramètres d'entrée pour l'exécution de ce modèle et les résultats sont présentés dans le tableau 3. Si la quinoléine est rejetée dans l'atmosphère, sa volatilité modérée fera en sorte qu'une partie de la quinoléine quittera l'air et se répartira dans le sol et les eaux de surface; une quantité de masse d'environ 18 % demeurera dans l'air. Si la quinoléine est rejetée dans les eaux de surface, le modèle prédit qu'elle demeurera surtout dans ce milieu. De la même manière, si elle est rejetée dans le sol, la quinoléine demeurera principalement dans ce milieu.

Le modèle TaPL3 a été utilisé pour évaluer le potentiel de transport à grande distance de la quinoléine lorsqu'elle est rejetée dans l'air ou dans l'eau. Le modèle calcule la distance – la distance de transport caractéristique (DTC) – qu'une substance voyagera dans un milieu mobile avant que la concentration diminue à 37 % (1/e) de sa valeur initiale en raison de la répartition inter-milieu et des réactions de dégradation. Les pertes d'advection ne sont pas comprises (Beyer et al., 2000; TaPL3, 2003). Avec une DTC modélisée de 332 km, la quinoléine n'est pas assujettie au transport atmosphérique à des régions éloignées, comme l'Arctique. Le modèle TaPL3 peut sous-estimer la répartition de la quinoléine entre la phase gazeuse et les matières particulaires atmosphériques en négligeant de tenir compte de la formation d'aérosols organiques secondaires produits par la photooxydation de la quinoléine. Toutefois, une analyse de sensibilité indique qu'ignorer les aérosols organiques secondaires formés par la photooxydation a probablement seulement un léger effet sur la distribution de la quinoléine à l'état stable dans cet environnement d'évaluation.

Aucun niveau de référence n'a été proposé par Beyer et al. (2000) pour l'interprétation des DTC des produits chimiques dans l'eau. La DTC pour la quinoléine dans l'eau est bien supérieure à 1 500 km et cela peut refléter la demi-vie de dégradation lente présumée dans ce milieu.

Les données ci-dessous ont été prises en compte pour savoir si la quinoléine satisfaisait aux critères de persistance et de potentiel de bioaccumulation définis dans le Règlement sur la persistance et la bioaccumulation pris en vertu de la LCPE (1999) (Canada, 2000). Les critères de persistance sont des demi-vies supérieures ou égales à 2 jours dans l'air, supérieures ou égales à 182 jours dans l'eau, supérieures ou égales à 365 jours dans les sédiments ou supérieures ou égales à 182 jours dans le sol, ou des preuves de transport sur de longues distances vers des régions éloignées. Les critères de bioaccumulation sont un facteur de bioaccumulation (FBA) ou un facteur de bioconcentration (FBC) supérieur ou égal à 5 000 ou un log Koe supérieur ou égal à 5.

En été, la quinoléine ne devrait pas être persistante dans l'air ou dans les eaux de surface, selon les processus d'enlèvement de dégradation par les radicaux hydroxyles dans l'air et la photooxydation dans l'eau; les demi-vies modélisées sont de 16 heures pour l'air et de 14 à 23 jours pour les eaux de surface (Smith et al., 1978; Kochany et Maguire, 1994; Mackay et al., 1999). En hiver, on estime que la demi-vie atmosphérique soit aussi élevée que 99 heures (Mackay et al., 1999). Inversement, il est prévu que la pression de vapeur de la quinoléine diminue en hiver mais demeure modérée, comme le montre la pression de vapeur modélisée de 0,65 Pa à 0 oC (MPBPWIN, 2000). Ces résultats sont jugés suffisants pour conclure que la quinoléine est persistante dans l'air pendant les mois d'hiver.

Il a été montré que la quinoléine est biodégradable dans le sol dans des conditions qui favorisent la croissance de micro-organismes (minéralisation en 7 à 10 jours; Thomsen et al., 1999). Toutefois, au cours d'un test en laboratoire avec des conditions moins propices, seulement 0,2 % de la quinoléine était dégradée après une exposition de deux semaines aux micro-organismes (MITI, 1992). Sa solubilité élevée dans l'eau, combinée à une affinité modérée pour le carbone organique en particules (log Kco de 3,26), appuie la mobilité modérée à élevée dans le sol attribuée au produit chimique par Fowler et al., (1994); par conséquent, même si la quinoléine est facilement dégradée dans les sols aérobies, elle peut facilement se déplacer à des régions plus profondes anéorobies, où elle peut persister pendant de longues périodes. En effet, ces milieux anaérobies fournissent de mauvaises conditions pour la biodégradation, par exemple une faible concentration en oxygène, des basses températures et peu de sources de carbone. On a fréquemment observé une absence de dégradation importante de quinoléine associée avec l'occurrence de goudron de houille dans les sols (p. ex. Lesage et Jackson, 1992; Johansen et al., 1997a). La présence de quinoléine dans les sédiments qui remontent à il y a un siècle est une preuve de la persistance de la substance dans ce milieu (Furlong et Carpenter, 1982).

La quinoléine a un faible potentiel de bioaccumulation; deux valeurs du FBC ont été déterminées pour les poissons sur la base de la masse lipidique. Le FBC de 8 obtenu par Bean et al. (1985) a été calculé pour la quinoléine et ses métabolites (le FBC pour la molécule de quinoléine non métabolisée est par conséquent inférieur à 8); de Voogt et al. (1991) ont calculé une valeur du FBC de 158 pour les poissons.

Selon les critères du Règlement sur la persistance et la bioaccumulation (Canada, 2000), il est proposé de conclure que la quinoléine répond aux critères de persistance pour l'air et le sol, mais pas à ceux du potentiel de bioaccumulation.

Très peu de données ayant trait aux concentrations de quinoléine dans l'environnement canadien ont été relevées. Certaines des concentrations disponibles ont au moins 15 ans et peuvent ne pas refléter les conditions d'exposition actuelles. Aucune donnée n'a été trouvée sur les niveaux de quinoléine dans les sols naturels et non agricoles. Le tableau 4 présente des concentrations environnementales de quinoléine au Canada ainsi qu'à l'extérieur du Canada.

Tableau 4 : Concentrations environnementales de quinoléine dans l'air extérieur, les eaux de surface, les eaux souterraines, les sédiments et les sols
Milieu/emplacement Période d'échantillonnage et limite de détection (LD) Concentration Référence
Air (ng/m3)
Gaz de combustion provenant de l'incinérateur de déchets domestiques en Norvège (N = 9)

Le 23 et 24 avril 1985

LD non précisée

ng/m3 à 10 % O2

Moyenne : 10 000

Benestad et al., 1987
Secteur résidentiel, à Columbus, en Ohio

Mars 1987

LD non précisée

Moyenne : 3 3001 Chuang et al., 1991
Régions urbaines et rurales, Colorado

Novembre 1982

LD non précisée

Non détectée Hawthorne et Sievers, 1984
Régions urbaines et rurales, état de New York Données modélisées

Moyenne urbaine : 2 × 10-3

Moyenne rurale : 1,3 × 10-4

USEPA, 1996
Régions urbaines, Michigan Données modélisées Moyenne : 0,77 USEPA, 1996
Secteur résidentiel, à Ottawa, en Ontario

Hiver 2002 et 2003

LD estimée : 50

Non détectée Zhu et al., 2005
Gaz de combustion provenant d'incinérateurs de déchets publics au Japon

2004-2006

LD non précisée

(ng/m3 N)2 Minomo et al., 2009
Déchets solides municipaux (N = 7) Moyenne : 74
Boues d'épuration (N = 3) Moyenne : 550
Déchets de bois (N = 10) Moyenne : 93 000
Déchets d'hôpitaux (N = 3) Moyenne : 34 000
Huiles usées (N = 1) 99
Aérosols (ng/m3)
Ville de New York, à New York

Hiver 1975

LD non précisée

Échantillon 1 : 2,2 × 10-2

Échantillon 2 : 6,9 × 10-2

Dong et al., 1977
Sédiments de rue (µg/g)
Douze villes dans le bassin canadien des Grands Lacs (Ontario)

1979-1983

LD : 0,05

Moyenne : 0,53 Marsalek et Schroeter, 1988
Eau de pluie (µg/L)
Los Angeles, en Californie

Hiver 1982

LD non précisée

1-4 Kawamura et Kaplan, 1983
Eau de surface (µg/L)
Rainy River, en Ontario (frontière de Minnesota)

Du 21 au 25 août 1986

LD : 0,001

Non détectée Merriman, 1988
Effluents des usines de pâtes et papiers, à Rainy River, en Ontario - au Minnesota

Novembre 1982

LD : 0,001

Non détectée Merriman, 1988
Eaux de surface touchées par des eaux souterraines contaminées Modélisation ChemSim

10,3-51,73

2,11-10,64

Le présent rapport
Eau souterraine (µg/L)
Près d'une installation de traitement du bois abandonnée, à Pensacola, en Floride

1983

LD non précisée

Non détectée - 288 Pereira et al., 1987
Puits d'une profondeur de 6,1 m près d'une installation de traitement du bois abandonnée, à Pensacola, en Floride

1983

LD : 100

Non détectée - 11 200 Godsy et al., 1992
Près d'une installation de préservation du bois abandonnée, à Pensacola, en Floride

Mars 1985

LD non précisée

Non détectée - 10 500 Lesage et Jackson, 1992
Près d'une entreprise d'asphalte, à Ringe, au Danemark

Échantillonnage : Non précisé

LD : 0,05

Non détectée - 0,07 Johansen et al., 1997a
Près d'une usine de gazéification du charbon, à Holte, au Danemark

Échantillonnage : Non précisé

LD : 0,05

Non détectée Johansen et al., 1997a
Près d'une usine de gazéification du charbon, à Frederica, au Danemark

Échantillonnage : Non précisé

LD : 0,05

0,12-45 Johansen et al., 1997a
Usines à gaz Østre, au Danemark

Échantillonnage : Non précisé

LD non précisée

Maximum : 64 000 Johansen et al., 1997a
Lixiviats des sites d'enfouissement de 10 sites d'enfouissement, au Japon

1995

LD non précisée

Non détectée - 0,046 Yasuhara et al., 1999
Près d'une marre de goudron de houille dans le sol Données modélisées 6 900-34 500 Le présent rapport
Interface eau-sédiments touchée par l'écoulement des eaux souterraines contaminées Données modélisées 690-3 450 Le présent rapport
Sédiments (µg/kg [poids sec])
Hamilton Harbour, en Ontario (sites industriels)

Échantillonnage : Non précisé

LD 1 - 10

8-63 Onuska et Terry, 1989
Rivière St. Marys, en Ontario (sites industriels)

Du 24 septembre au 4 octobre 1985

LD : 20

Non détectée - 460 Kauss et Hamdy, 1991
Sydney Harbour, en Nouvelle-Écosse

Du 16 au 19 octobre 1986

LD : de 50 à 200

Non détectée Environnement Canada, 1988
Estuaire de la rivière Sainte-Croix et baie de Passamaquoddy, au Nouveau-Brunswick

Échantillonnage : Non précisé

LD non précisée

Non détectée Loring et al., 1998
Sols (µg/kg [poids sec])
Huit champs agricoles, au sud de l'Ontario

1992

LD non précisée

ND - 60 Webber, 1994
Deux sites, en Ontario

Échantillonnage : Non précisé

LD : de 20 à 100

Non détectée Golder Associates Ltd., 1987

Abréviations : LD, limite de détection; ND, non détecté; NP, non précisé
1 Les unités fournies dans l'étude de Chuang et al. (1991) ne sont pas uniformes et sont possiblement erronées, parce que les valeurs ont été signalées en µg/m3 et en ng/m3. À titre de scénario de la pire éventualité, les unités µg/m3 ont été utilisées pour l'évaluation de l'exposition écologique.
2 Dans l'unité ng/m3 N, N signifie dans des conditions normales, p. ex. 0 °C et une pression atmosphérique de 101,3 kPa.
3 Simulation ChemSim utilisant une estimation d'un débit correspondant au 10e percentile (faible débit) à 1 000 m de la source (annexe 1).
4 Simulation ChemSim utilisant une estimation d'un débit correspondant au 50e percentile à 1 000 m de la source (annexe 1).

La quinoléine est une composante connue du goudron de houille et de la créosote (McNeil, 1981). La contamination des eaux souterraines et des sols par ces mélanges chimiques a été consignée à des usines de gazéification du charbon abandonnées, à des aciéries équipées de fours à coke et à des usines de traitement du bois. La présence de goudron de houille a été documentée dans le sol, les eaux souterraines et les eaux de surface (rivière Rideau) aux alentours d'une ancienne usine à gaz à Ottawa, en Ontario. Un échantillon de goudron de houille pur obtenu du fond de la rivière en 1986 contenait de la quinoléine à une concentration de 0,51 mg/g en goudron (INTERA, 1987b; seuil de détection signalé de 0,5 µg/g en goudron). Toutefois, il est très possible que la quinoléine se soit dégagée de cet échantillon. Le site a été dépollué depuis (communication de 2004 entre le ministère de l'Environnement de l'Ontario et la Direction des substances existantes d'Environnement Canada; source non citée). Un tel exemple de la contamination par des liquides non aqueux (p. ex. goudron de houille) constitue la base du scénario d'exposition présenté dans la caractérisation des risques pour l'environnement ci-dessous (INTERA, 1987a, b; Lesage et Jackson, 1992; Raven et Beck, 1992; Furimsky, 2002). On a obtenu les concentrations de quinoléine dans les eaux souterraines et de surface contaminées par des panaches de goudron de houille par modélisation, car peu de mesures ont été effectuées au Canada. Le modèle estime des concentrations de quinoléine dans un panache d'eau souterraine qui se développe en lien avec une flaque de goudron de houille pur dans le sol et qui est rejeté dans les eaux de surface à moins de 10 m de la marre. Ce scénario est fondé sur des observations sur le terrain de panaches de goudron de houille à des sites d'usines à gaz abandonnées et à des sites de fours à coke au Canada. Ce scénario d'exposition serait pertinent pour les usines à gaz abandonnées, les fours à coke et les applications industrielles actuelles qui produisent des déchets de goudron sur le site, y compris des usines de distillation de goudron de houille, des usines de créosote et des usines de fabrication de rouleaux asphaltés et de papier goudronné. Une approche numérique simple mentionnée dans les publications approuvées par des collègues, la loi de Raoult, a servi à calculer la concentration aqueuse maximale de quinoléine en contact avec une phase de goudron de houille pur (King et Barker, 1999). Deux concentrations de quinoléine, soit 6,9 et 34,5 mg/L, associées aux limites inférieures et supérieures pour le contenu de quinoléine dans le goudron de houille (McNeil, 1981), représentent la plage de concentrations dans les eaux souterraines en contact avec du goudron de houille pur. Ces deux valeurs, divisées par un facteur de 10 pour tenir compte de la dilution, représentent la plage des concentrations de quinoléine aux interfaces eau-sédiments qui sont exposées aux points de rejet dans l'eau souterraine contaminée par la quinoléine : 0,69 et 3,45 mg/L. Des simulations au moyen du modèle ChemSim (ChemSim, 2003) ont servi à calculer les concentrations de quinoléine dissoute dans l'eau de surface, en présumant que le débit de l'eau souterraine était de trois centimètres par jour et que la dilution était instantanée. L'élaboration des paramètres, une discussion sur la simplification des hypothèses à l'origine du présent scénario d'exposition et une brève description du modèle ChemSim sont fournis à l'annexe 1. Les concentrations modélisées dans l'eau souterraine et les eaux de surface sont présentées au tableau 4 et ont été sélectionnées comme les concentrations environnementales prévues à retenir pour le calcul des quotients de risque dans le cas de l'eau.

Aucune concentration de quinoléine n'a été détectée dans un secteur résidentiel à Ottawa, en Ontario, selon une enquête sur la qualité de l'air effectuée au cours de l'hiver 2002–2003 (la limite de détection estimée était de 0,05 µg/m3) (Zhu et al., 2005). De plus, Chuang et al. (1991) ont obtenu des corrélations statistiquement significatives entre les concentrations de quinoléine et de phénanthrène dans l'air ambiant à Columbus, à Ohio. Il a été proposé (courriel de 2004 de la Direction de la recherche sur la qualité de l'air d'Environnement Canada adressé à la Direction des substances existantes d'Environnement Canada; source non citée) d'utiliser le ratio quinoléine:phénanthrène calculé par Chuang et al. (1991), une moyenne de 0,106 pour l'air extérieur et les mesures ambiantes du phénanthrène dans l'air au Canada pour en déduire les concentrations ambiantes de quinoléine dans l'air canadien. Dans le cadre de l'approche fondée sur le poids de la preuve, on a tiré parti des ensembles de données de grande qualité figurant dans le rapport canadien d'évaluation des HAP afin d'obtenir les concentrations mesurées de phénantrène au milieu des années 1980 et au début des années 1990 dans l'air ambiant à divers endroits au Canada (Canada, 1994). Les concentrations de quinoléine, calculées d'après les concentrations de phénanthrène et exprimées en nanogrammes par mètre cube, sont les suivantes :

Comme le ratio quinoléine:phénanthrène a été obtenu pour la région urbaine de Columbus, à Ohio, il sera probablement plus représentatif des sources urbaines.

Vingt-sept études portant sur la toxicité aiguë et chronique de la quinoléine pour le poisson, les invertébrés aquatiques, les invertébrés du sol, les microalgues et les micro–organismes ont permis de calculer 96 valeurs différentes de la toxicité. Quatre études principales ayant trait à la toxicité pour les organismes dans différents milieux naturels ont été choisies et sont examinées ci-dessous. Elles présentent les résultats les plus critiques et dignes de foi choisis pour chaque milieu et voie d'exposition. Elles ont fait l'objet d'un examen critique et il a été déterminé qu'elles sont d'une fiabilité satisfaisante pour la présente évaluation des risques (annexe 2). Les études de toxicité pour les organismes de sol ne sont pas traitées car un scénario d'exposition ne pouvait pas être élaboré pour ceux-ci, en raison de l'information limitée disponible.

Johansen et al. (1997b) ont utilisé un essai de toxicité appelé MINNTOX pour étudier l'inhibition de l'oxydation de l'ammoniac par le groupe bactérien Nitrosomonas sp. en présence de quinoléine. Un inoculum a été prélevé dans des boues activées provenant d'une station d'épuration des eaux usées. Le protocole expérimental consistait à mélanger 3 mL de la solution toxique avec 3 mL de boues activées nitrifiantes. Six concentrations d'essai couvraient la plage de 0 à 200 mg/L, et trois échantillons répétés ont été analysés pour chaque concentration. L'essai a duré deux heures, ce qui correspond à une exposition chronique à Nitrosomonas sp. On a calculé que la concentration médiane efficace, ou la CE50 (c. à d. la concentration qui inhibait la nitrification de 50 %), de la quinoléine était de 54 mg/L.

Bleeker et al. (1998) ont effectué des essais de toxicité aquatique de la quinoléine après 96 heures en utilisant le premier stade larvaire du moucheron Chironomus riparius, et ils ont obtenu une concentration létale médiane (CL50) après 96 heures de 4,90 mg/L.D'autres études utilisant des invertébrés benthiques et aquatiques et des microalgues qui ont été publiées dans les revues scientifiques ont mentionné pour la quinoléine des CL50 aiguës variant entre 5 et 191 mg/L.

L'étude de Black et al. (1983) sur la toxicité pour le poisson a servi à formuler les Recommandations canadiennes pour la qualité de l'eau relatives à la quinoléine en vue de la protection de la vie aquatique (CCME, 1999). Ces chercheurs ont étudié la survie des stades embryo-larvaire de la truite arc-en-ciel Oncorhynchus mykiss) exposés à la quinoléine dans l'eau. Ils ont utilisé un système à écoulement continu où l'exposition a commencé à la fertilisation des œufs et a continué pendant quatre jours après l'éclosion (27 jours en tout). Le pH a été maintenu entre 7,4 et 8,1, la température variait entre 13,3 et 14,2 °C et l'oxygène dissous était compris entre 8,6 et 10,2 mg/L. Cinq concentrations d'essai ont été établies, et il y avait deux échantillons répétés par essai, ainsi que de 100 à 150 œufs par enceinte d'exposition. Les concentrations de quinoléine ont été mesurées quotidiennement. La survie des larves de truite exposées à la quinoléine était de 95 % à 13 µg/L, de 89 % à 90 µg/L et de 82 % à 370 µg/L.

Milleman et al. (1984) ont exposé pendant 96 heures, dans des conditions statiques, des têtes-de-boule (Pimephales promelas) juvéniles à la quinoléine dissoute dans l'eau. Le pH a été maintenu à 7,8, la température était de 20 ± 0,5 oC, et l'oxygène dissous variait entre 8,6 et 4,3 mg/L. Un protocole expérimental consistait à placer cinq spécimens dans un aquarium de 7,6 L recouvert d'une feuille d'aluminium. Quatre concentrations d'essai ont été établies, et il y avait deux échantillons répétés par essai. Les concentrations de quinoléine ont été mesurées à 0, 24, 48, 72 et 96 heures dans chaque essai. La CL50 aiguë après 96 heures était de 0,44 mg/L(de 0,12 à 1,32 mg/L; limites de confiance de 95 %). Toutes les études existantes permettent de dire que la CL50 aiguë pour le poisson d'eau douce variait entre 0,44 et 78 mg/L.

Le faible taux de bioaccumulation de la quinoléine ne reflète pas entièrement le danger qu'elle présente, parce que le mode d'action de la molécule n'est pas fondé sur la narcose. Des éléments de preuve portent à croire que la toxicité de la quinoléine peut être associée à sa conversion dans les organismes, par activation métabolique, en une molécule mutagène (p. ex. Talcott et al., 1976; Eisentraeger et al., 2008; Neuwoehner et al., 2009). Des études en laboratoire attribuent à la quinoléine un pouvoir mutagène (de faible à moyen) à l'égard des bactéries (Talcott et al., 1976). Le mode d'action proposé est la liaison d'un époxyde intermédiaire métabolique avec les acides nucléiques, ce qui produit un adduit de l'acide désoxyribonucléique (ADN). Ce métabolite époxydé est possiblement produit aussi bien pendant la biotransformation de la quinoléine par la truite arc-en-ciel (Bean et al., 1985).

La démarche adoptée dans la présente évaluation écologique préalable consiste à examiner divers faits à l'appui et à tirer des conclusions reposant sur une méthode axée sur le poids de la preuve, comme l'exige l'article 76.1 de la LCPE (1999). On a accordé une attention particulière à l'analyse des quotients de risque, à la persistance, à la toxicité intrinsèque et au réalisme environnemental du scénario d'exposition retenu pour déterminer la concentration environnementale estimée (CEE) et la présence générale dans l'environnement. Des organismes paramètres ont été choisis en fonction de l'analyse des voies d'exposition. Pour chaque organisme paramètre, une CEE prudente (la pire éventualité raisonnable) et une concentration estimée sans effet (CESE) sont déterminées. On calcule la CESE en choisissant la plus faible valeur critique de la toxicité (VCT) pour l'organisme d'intérêt et en la divisant par un coefficient approprié au point de données. Un quotient de risque (CEE/CESE) est calculé pour chacun des organismes paramètres afin de déterminer s'il existe un risque écologique potentiel au Canada.

Les CEE retenues aux fins de la présente évaluation figurent au tableau 5. Ces valeurs ont été obtenues par modélisation d'une marre de goudron de houille présente dans le sol contaminant des eaux souterraines.

Pour le scénario de la pire éventualité mettant en jeu les micro-organismes de l'eau souterraine, la CESE est de 5 400 µg/L, calculée en divisant la VCT, une valeur de la CE50 égale à 54 mg/L (obtenue pour l'inhibition de la nitrification par Nitrosomonas sp. en présence de quinoléine), par un coefficient de 10.

Pour le deuxième scénario, l'exposition des organismes benthiques à l'eau contaminée aux points d'alimentation en eau souterraine, la VCT est de 4,90 mg/L,une valeur fondée sur l'exposition aiguë après 96 heures des larves de Chironomus riparius à la quinoléine présente dans l'eau.Unfacteur de 100 a été utilisé pour tenir compte de l'extrapolation de l'exposition aiguë à l'exposition chronique, et des espèces de laboratoire à différentes espèces sur le terrain. En divisant la VCT par un facteur général de 100, on a obtenu une CESE de 49 µg/L pour les organismes benthiques dans ce scénario.

Un troisième scénario mettait en jeu les apports d'eau souterraine par les zones d'infiltration, qui sont importants pour le frai du poisson, l'incubation des œufs et qui servent de zones d'alevinage. Par exemple, ces zones d'infiltration d'eau souterraine sont très attrayantes pour les salmonidés qui recherchent des frayères (Blanchfield et Ridgway, 1997; Bernier-Bourgault et Magnan, 2002). Afin d'estimer le risque pour les premiers stades de vie du poisson que l'on retrouve dans les frayères, l'étude de Black et al. (1983), où des stades embryo-larvaires d'une espèce de salmonidé ont été exposés à la quinoléine dans l'eau, a été prise en compte. La formule du CCME (1999) pour l'exposition chronique a servi à calculer la VCT. Une valeur de la VCT, soit 34 µg/L, a été obtenue en calculant la moyenne géométrique des deux concentrations minimales avec effet, 13 µg/L et 90 µg/L. On a présumé que la moyenne géométrique était plus valable pour l'environnement que la concentration minimale avec effet seulement (taux de survie de 95 %). La VCT a été divisée par un facteur de 10 pour obtenir une CESE de 3,4 µg/L, qui a été utilisée pour le scénario d'exposition à l'eau de surface.

Le tableau 5 présente les quotients de risque obtenus à partir des valeurs de la CEE et de la CESE. La plupart des quotients de risque sont nettement supérieurs à 1, avec un maximum de 70. C'est donc dire que les concentrations de quinoléine obtenues par modélisation pour les eaux souterraines et de surface en contact avec des marres de goudron de houille présentes dans le sol sont représentatives d'un important risque écologique.

Tableau 5 : Résumé des valeurs utilisées pour la caractérisation du risque de la quinoléine
Organisme VCT (µg/L) CESE (µg/L) CEE
(µg/L)
Scénario Quotient de risque (CEE/CESE)
Poissons et autres organismes aquatiques 341 3,4 10,3 à 51,7 2,11 à 10,6 ChemSim - 10 % ChemSim - 50 % 3 à 15 0,62 à 3,1
Organismes vivant à l'interface eau-sédiments ou près de cette dernière 4 900 49 690 à 3 450 La pire des éventualités raisonnables 14 à 70
Micro-organismes de l'eau souterraine 54 000 5 400 6 900 à 34 500 La pire des éventualités raisonnables 1,3 à 6,4

Abréviations : VCT, valeur critique de la toxicité, CEE, concentration environnementale estimée; CESE, concentration estimée sans effet
1 La VCT de 34 µg/L a été obtenue en calculant la moyenne géométrique des deux concentrations minimales avec effet, c'est-à-dire 13 µg/L et 90 µg/L, de l'étude de Black et al., (1983).

La quinoléine est jugée persistante conformément au Règlement sur la persistance et la bioaccumulation pris en vertu de la LCPE (1999) (Canada, 2000), en raison des observations de sa persistance dans les sols profonds, l'eau souterraine et l'air. Les données empiriques disponibles en matière de toxicité aquatique révèlent que la quinoléine est susceptible d'être nocive pour les organismes aquatiques à des concentrations relativement faibles (des valeurs inférieures à 1 mg/L et à 0,1 mg/L ont été obtenues respectivement au cours des essais de toxicité aiguë et de toxicité chronique). En outre, les éléments de preuve existants portent à croire que la quinoléine peut se biotransformer chez le poisson en un dérivé époxydé qui peut être lié par covalence aux acides nucléiques (p. ex. pour former un adduit de l'ADN), ce qui donne lieu à des effets mutagènes (Bean et al., 1985).

Au Canada, on a décelé la présence de la quinoléine dans divers milieux. Par exemple, elle a été décelée dans les sols agricoles et dans les dépôts sur les chaussées en Ontario, et dans les sédiments de fond des rivières près des zones industrielles; toutefois, les concentrations n'étaient pas supérieures aux CESE calculées. Le milieu récepteur du scénario d'exposition modélisé est représentatif d'une forte proportion de systèmes aquatiques avoisinant les lieux contaminés par le goudron de houille et la créosote au Canada. Cette observation est confirmée par les renseignements contenus dans les inventaires des anciens sites de gazéification du charbon et des sites industriels où le goudron de houille a été entreposé et traité qui existent pour le Québec, l'Ontario et d'autres provinces (RDRC, 1987; MENVIQ, 1988; OMEE, 1997)

L'estimation quantitative d'exposition était fondée sur les prévisions modélisées. Le scénario d'exposition générique à partir duquel les quotients de risque sont calculés est plutôt réaliste (pas trop conservateur). Les concentrations de quinoléine dissoute modélisée dans les eaux souterraines sont semblables aux concentrations de quinoléine mesurées dans les eaux souterraines ailleurs dans le monde (tableau 4), ce qui indique qu'il s'agit probablement d'estimations réalistes. De plus, la rivière modélisée n'est pas exceptionnellement petite (GRI, 1990; OMEE, 1997), la vitesse de l'eau souterraine sélectionnée n'est pas très grande (Freeze et Cherry, 1979) et la distance de la marre de goudron à la rivière n'est pas exceptionnellement petite (GRI, 1990). Il faut également noter que le nombre de sites contaminés au Canada qui sont ciblés par ce scénario d'exposition et qui demeurent non gérés n'est pas connu avec certitude à l'heure actuelle.

En raison du manque d'information, les scénarios d'exposition n'ont pas été élaborés et caractérisés pour le risque environnemental pour possibilités de rejet suivantes de la quinoléine dans l'environnement : émissions atmosphériques des aciéries équipées de fours à coke et des alumineries, émissions dans le sol et l'eau provenant des installations industrielles qui manipulent actuellement du goudron de houille et de la créosote, utilisation de scellants à asphalte et de matériel de toit à base de goudron de houille, bois imprégné de créosote utilisé dans les quais de havre, cadres ferroviaires utilisés dans les murs porteurs le long de rives de lac. Par conséquent, le risque à l'environnement lié aux rejets de quinoléine provenant de ces sources n'est pas connu actuellement.

Étant donné que la quinoléine est une substance d'origine naturelle, en principe, sa concentration de fond pourrait être prise en compte dans la caractérisation des risques. Toutefois, aucune donnée n'a été relevée concernant les concentrations de fond biogéochimiques de quinoléine dans les eaux souterraines, les eaux de surface et le sous–sol. On s'attend à ce que les concentrations naturelles de quinoléine contribuent de façon négligeable aux CEE des eaux de surface, car les concentrations de quinoléine dans les sédiments préindustriels semblent être inférieures à 1 µg/kg (Furlong et Carpenter, 1982), et que cette substance a une meilleure affinité avec les matières organiques particulaires qu'avec l'eau.

Les données disponibles sur les concentrations de quinoléine dans l'air ambiant, les eaux de surface, les eaux souterraines, le sol et les sédiments sont résumées dans le tableau 4. On a recensé peu de données sur les concentrations de quinoléine dans l'air intérieur au Canada ou dans d'autres pays.

Dans le cadre d'une enquête canadienne sur la qualité de l'air intérieur effectuée en 1991, des échantillons d'air intérieur ont été recueillis dans 757 résidences sélectionnées aléatoirement. La quinoléine a été détectée dans les échantillons combinés d'air intérieur à une concentration de 22 µg/m3 (Otson et al., 1992, 1994). Plus récemment, dans le cadre d'une enquête sur la qualité de l'air effectué pendant l'hiver 2002-2003 dans 75 résidences sélectionnées aléatoirement à Ottawa, en Ontario, la quinoléine n'a pas été détectée dans les échantillons d'air intérieur (salle de séjour ou salle commune) ou extérieur (allées de véhicules) (la limite de détection estimée était de 0,05 µg/m3). Dix pour cent des échantillons d'air ont été recueillis des maisons où habitent des fumeurs (Zhu et al., 2005) Bien que l'information récente sur les concentrations de quinoléine dans l'air canadien est limitée en raison du manque de mesure d'un échantillon jumelé standard de quinoléine (Zhu et al., 2005), la limite de détection estimée de quinoléine pour cette étude (c.-à-d. 0,05 µg/m3) est comparable à la concentration de quinoléine dans l'air intérieur mesurée dans les maisons où il n'y a aucun fumeur (c.-à-d. 0,04 µg/m3) dans une enquête en Californie (Air Resources Board, 1993), qui a été effectuée dans 280 maisons sélectionnées à Placerville et à Roseville pendant l'hiver 1992. Les résultats de l'enquête effectuée en Californie suggèrent que la consommation du tabac est une source importante de quinoléine dans l'air intérieur; des concentrations maximales de quinoléine de 0,22 et de 0,16 µg/m3 ont été décelées dans les maisons où vivent des fumeurs, et dans les maisons où vivent des fumeurs et où un foyer est utilisé, respectivement, par rapport à un maximum de 0,04 µg/m3 décelé dans les maisons où un foyer était utilisé mais où ne vivait aucun fumeur (Air Resources Board, 1993). De plus, dans le cadre d'une étude effectuée pendant la saison de chauffage de l'hiver de 1987, des échantillons d'air intérieur et extérieur ont été recueillis dans huit maisons à Columbus, à Ohio. Dans chaque maison, des échantillons d'air intérieur ont été prélevés dans la cuisine et dans la salle de séjour sur deux périodes consécutives de huit heures, et un seul échantillon d'air prélevé sur une durée de seize heures a été recueilli à l'extérieur. Les concentrations moyennes de quinoléine dans la cuisine, la salle de séjour et à l'extérieur étaient de 140, 240 et 3,3 µg/m3, respectivement. Les échantillons ont été davantage catégorisés en fonction des systèmes de chauffage et de cuisson utilisés dans la maison et en fonction des styles de vie des résidences (p. ex. consommation du tabac ou non). Les concentrations moyennes les plus élevées de quinoléine étaient de 26 µg/m3 dans l'air intérieur des maisons des non-fumeurs et de 560 µg/m3 dans l'air des maisons des fumeurs (Chuang et al., 1991). Toutefois, les unités fournies dans cette étude sont déclarées de façon non uniforme dans les tableaux (µg/m3)et dans le texte (ng/m3); par conséquent, il est possible que les données soient erronées.

Aucune donnée sur les concentrations de quinoléine dans l'eau potable n'est disponible. Dans la seule étude disponible concernant les concentrations de quinoléine dans les eaux de surface canadiennes, la quinoléine n'a pas été décelée dans les échantillons d'eau de surface prélevés à Rainy River, en Ontario, en 1986, à trois stations de surveillance de la qualité de l'eau, et à partir des effluents terminaux déversés dans la rivière par deux usines de pâte kraft blanchie et papiers (la limite de détection était de 0,001 µg/L) (Merriman, 1988).

De la quinoléine a été décelée dans trois échantillons, à une concentration maximale de 60 µg/kg en poids sec, dans 24 échantillons de sol recueillis en 1992 à partir de huit champs agricoles au sud de l'Ontario qui avaient reçu une ou plusieurs applications de boue (Webber, 1994). De plus, aucune concentration de quinoléine n'a été décelée dans le sol à deux emplacements en Ontario (la limite de détection se situait entre 0,02 et 0,1 mg/kg) (Golder Associates Ltd., 1987).

On n'a relevé aucune donnée sur les concentrations de quinoléine dans les aliments ni dans les emballages alimentaires. Dans le cadre d'une expérience sur le terrain, des moules Elliptio complanata ont été placées dans des cages et exposées à la substance pendant trois semaines à 14 stations dans la rivière St. Marys, en Ontario et au Michigan, en octobre 1985. La quinoléine n'a pas été décelée dans aucun des échantillons (la limite de détection était de 1 µg/kg de poids humide) (Kauss et Hamdy, 1991).

En fonction des renseignements limités disponibles sur les concentrations de quinoléine dans l'air ambiant et dans l'air intérieur (Zhu et al., 2005), dans les eaux de surface (comme substitut pour les données sur les concentrations dans l'eau potable) (Merriman, 1988) et dans le sol (Webber, 1994) dans l'environnement canadien, l'estimation de la limite supérieure d'absorption de la population générale canadienne varie entre 0,01 µg/kg de poids corporel (µg/kg p.c.) par jour (pour les personnes de 60 ans et plus) à 0,03 µg/kg p.c. par jour (pour les enfants de six mois à quatre ans), et l'air intérieur représentait possiblement la source d'exposition la plus importante (voir l'annexe 3).

Les produits de consommation constituent une source possible d'exposition. D'après des renseignements confidentiels fournis par l'enquête menée en application de l'article 71 de la LCPE (1999) (Environnement Canada, 2001a), l'absorption quotidienne de quinoléine provenant de produits de consommation était estimée à 1,7 × 10-3 µg/kg p.c. par jour pour les adultes (de 20 à 59 ans), ce qui est moins élevé que l'estimation de l'absorption quotidienne par les milieux environnementaux. De plus, les scellants pour allées de véhicules à base de goudron de houille, dans lesquels la quinoléine existe en tant que composante naturelle du brai de goudron de houille (Zhu, 2007; EHS, 2010), peuvent être une source d'exposition pour les consommateurs. Les scellants pour allées de véhicules à base de goudron de houille sont principalement appliqués par des consommateurs au moyen de rouleaux; compte tenu des propriétés physiques et chimiques de la quinoléine, il n'est pas probable que l'utilisation de scellants pour allées de véhicules à base de goudron de houille augmenterait de façon significative la concentration de quinoléine dans l'air extérieur. Ainsi, aucune quinoléine n'a été décelée dans les échantillons d'air extérieur (allées de véhicules) prélevés à Ottawa, en Ontario (Zhu et al., 2005). Dans le cadre d'une expérience en laboratoire, des produits de scellants pour allées de véhicules à base de goudron de houille ont été placés dans des flacons pendant 48 heures; de la quinoléine a été décelée dans l'air de l'espace libre des flacons, avec une concentration moyenne maximale de 9 µg/m3 (Zhu, 2007). Cette concentration atmosphérique de quinoléine serait beaucoup plus élevée que le niveau d'exposition aigü réel pendant l'utilisation de scellants pour allées de véhicules à base de goudron de houille, car le concept expérimental ne comprend pas la dispersion dans l'air extérieur.

Le niveau de confiance à l'égard de la base de données sur l'exposition est réputé modéré. Il existait des données sur les concentrations de quinoléine dans les milieux naturels qui sont les plus pertinents pour évaluer l'exposition de la population générale (c.-à-d. l'eau, l'air intérieur et l'air ambiant). Bien qu'aucune donnée ne soit disponible concernant les concentrations de quinoléine dans les aliments, ni dans l'eau dans les milieux urbains, celles-ci de devraient pas être une source importante d'absorption, étant donné que la quinoléine est peu susceptible de se bioaccumuler en raison d'un faible coefficient de partage octanol-eau, comme il est indiqué dans la section Persistance et potentiel de bioaccumulation.

L'annexe 4 résume les renseignements relatifs aux effets de la quinoléine sur la santé. La Environmental Protection Agency des États-Unis (USEPA) a publié une évaluation de la quinoléine (USEPA, 2001). Dans les études passées en revue dans cette évaluation, on a observé une incidence accrue d'une tumeur inhabituelle (c.-à-d. l'hémangio-endothéliome) chez de nombreuses souches de rats et de souris exposés par voie orale, de tumeurs hépatiques (adénomes et hépatomes) chez les souris après une seule injection intrapéritonéale à un jeune âge, et de tumeurs cutanées chez les souris exposées par voie cutanée dans une étude d'initiation-promotion. Bon nombre de ces études sont désuètes et limitées par l'utilisation d'animaux d'un seul sexe, de groupes à faible dose et de brèves durées d'exposition et, dans certains cas, par un manque d'analyses statistiques. L'étude critique, qui a tout d'abord été choisie par l'USEPA (2001) et pour laquelle la relation exposition-réponse a été le mieux caractérisée, était un essai biologique effectué par Hirao et al. (1976) dans lequel une incidence accrue de carcinomes hépatocellulaires, d'hémangio–endothéliomes et/ou d'hémangiosarcomes a été observée dans le foie de rats mâles exposés à des concentrations de 0, 0,05, 0,10 ou 0,25 % de quinoléine dans leur régime alimentaire (soit l'équivalent de 0, 25, 50 et 125 mg/kg p.c. par jour, respectivement) pendant une période allant jusqu'à 40 semaines. Une base de données relativement exhaustive sur la génotoxicité in vivo et in vitro permet d'affirmer que la quinoléine est génotoxique (USEPA, 2001). Des données récentes sur la clastogénicité de la quinoléine appuient davantage cette conclusion (H. Suzuki et al., 2005, 2009; T. Suzuki et al., 2007).

Des effets non néoplasiques, y compris l'augmentation des poids absolu et relatif du foie, des changements dans les lipides, la prolifération des voies biliaires et l'infiltration de cellules ovales dans le foie, ont aussi été observés à toutes les doses (=25 mg/kg p.c. par jour, la dose minimale avec effet observé [DMEO]) dans l'étude de Hirao et al. (1976). Des effets non néoplasiques sur le foie semblables ont été observés dans d'autres recherches limitées de plus courte durée ou par des voies d'exposition moins appropriées chez des rats, des souris, des cobayes et des hamsters. D'après l'USEPA (2001), les changements hépatiques non néoplasiques observés, la perte de masse corporelle et les mortalités précoces ont été jugés par les auteurs de ces études (et par l'USEPA dans une évaluation précédente) comme des effets reliés à l'hépatocancérogénicité de la quinoléine. L'USEPA a aussi mentionné que, même si le lien entre certains effets non néoplasiques (p. ex., les changements dans la masse corporelle et le poids du foie, l'infiltration de cellules ovales, la prolifération des voies biliaires et la dégénérescence des lipides dans les cellules parenchymateuses) et la formation de tumeurs n'était pas aussi évident, il est probable que ces effets étaient au moins masqués par la formation de tumeurs dans le foie et qu'ils n'ont pas été signalés de façon à permettre une caractérisation quantitative probante de la relation dose-réponse.

En raison des preuves suffisantes de cancérogénicité chez les animaux de laboratoire et des preuves à l'appui de la génotoxicité de la substance, l'USEPA (2001) a conclu que la quinoléine était « probablement cancérogène pour les humains ». Les données récentes n'influent pas de façon appréciable sur le choix de l'étude critique ni sur les conclusions de l'USEPA (2001).

Le degré de confiance à l'égard de la base de données toxicologiques sur la quinoléine est considéré comme modéré. Bien qu'il existe une vaste base de données sur les essais de génotoxicité, les études de cancérogénicité qui existent sont quelque peu limitées et désuètes.

La cancérogénicité constitue un effet critique pour la caractérisation du risque pour la santé humaine, en fonction de l'observation d'hémangio-endothéliome chez plusieurs souches de rats et de souris exposés par voie orale. De plus, une injection intrapéritonéale de quinoléine a induit des adénomes du foie et des carcinomes chez les souris, et une application cutanée a donné lieu à des tumeurs cutanées. La quinoléine était également génotoxique et mitogénétique dans plusieurs essais in vitro et in vivo. Par conséquent, même si le mode d'induction des tumeurs n'a pas été complètement élucidé, on ne peut pas exclure la possibilité que les tumeurs observées chez les animaux de laboratoire résultent d'une interaction directe avec le matériel génétique, pour laquelle il pourrait exister une possibilité d'effets nocifs quelque soit le niveau d'exposition.

L'exposition de l'ensemble de la population à la quinoléine devrait se faire essentiellement par inhalation de l'air. Une comparaison entre la concentration à effet critique non néoplasique (c.-à-d. 25 mg/kg p.c. par jour) et l'estimation de la limite supérieure d'exposition (p. ex. 0,03 µg/kg p.c. par jour) entraîne une marge d'exposition d'environ cinq ordres de grandeur (environ 800 000). Si l'on considère l'exposition à la quinoléine par l'intermédiaire de produits de consommation, la marge d'exposition demeurerait dans le même ordre de grandeur. Ces marges d'exposition pour les effets non néoplasiques sont jugées adéquates.

Il existe une incertitude à l'égard des estimations d'absorption quotidienne totale pour la population générale du Canada en raison du manque de concentrations mesurées de quinoléine dans l'environnement canadien. Seulement deux enquêtes semi-quantatives canadiennes sur la qualité de l'air intérieur et extérieur ont été relevées, et il n'y a aucune donnée canadienne disponible sur les concentrations de quinoléine dans l'eau potable et la nourriture, mais on ne prévoit pas que la nourriture soit une source d'absorption importante. De plus, la population générale peut être exposée à la quinoléine provenant de la consommation du tabac et de la combustion incomplète, ce qui pourrait accroître le niveau d'exposition. À la lumière des faibles concentrations de quinoléine dans les produits de consommation sur le marché canadien et des modes d'utilisation de scellants pour allées de véhicules à base de goudron de houille, dans lesquels la quinoléine existe en tant que composante naturelle, l'exposition par la population générale à la quinoléine par l'intermédiaire de produits de consommation devrait être faible.

Bien que l'ensemble des preuves indique que cette substance peut avoir un lien direct avec le matériel génétique, des doutes subsistent concernant le mode d'induction de tumeurs par la quinoléine. La pertinence chez l’humain des tumeurs observées suivant une injection intrapéritonéale chez les humains. Les données disponibles sont insuffisantes pour évaluer les variations intraspécifiques et interspécifiques de la sensibilité et de la cancérogénicité. De plus, l'ensemble de données toxicologiques est incomplète car les données de l'étude sur l'exposition par inhalation ne sont pas disponibles. De plus, il existe des incertitudes quant au potentiel de toxicité pour le développement de la quinoléine, étant donné que des données pertinentes n'ont pas été relevées.

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