Paruline de Kirtland (Dendroica kirtlandii) programme de rétablissement : chapitre 1
CONTEXTE
1.1 Évaluation de l'espèce par le COSEPAC
Date de l'évaluation :Mai 2000 Nom commun : Paruline de Kirtland Nom scientifique : Dendroica kirtlandii Statut selon le COSEPAC :En voie de disparition Justification de la désignation :Cette espèce est en voie de disparition à l’échelle mondiale. Il n’existe aucune donnée récente de reproduction au Canada, mais on observe parfois des mâles chanteurs dans les habitats convenables de reproduction en Ontario[1]. Présence au Canada : Ontario1 Historique du statut selon le COSEPAC : Espèce désignée « en voie de disparition » en avril 1979. Réexamen et confirmation du statut en avril 1999 et en mai 2000. Dernière évaluation fondée sur un rapport de situation existant. |
1.2 Description
La Paruline de Kirtland est un oiseau chanteur omnivore de taille moyenne de la famille des Parulidés (parulines). Le mâle adulte est de couleur bleu-gris sur la tête, et son dos est marqué de lignes noires. Le ventre est jaune citron, et les flancs sont marqués de lignes ou de taches noires. Les paupières ont une coloration blanche formant un cercle presque complet autour de l’œil. Des barres alaires indistinctes et blanchâtres peuvent également être présentes. Les femelles adultes ressemblent aux mâles, mais ont un plumage moins éclatant et des parties inférieures plus pâles. Les femelles immatures ont généralement un plumage globalement plus brun. La Paruline de Kirtland agite fréquemment la queue. Le chant du mâle se compose d’une série de notes fortes et insistantes. On trouvera des illustrations et des descriptions plus détaillées dans Mayfield (1992), dans Walkinshaw (1983) et dans tout guide d’identification standard.
1.3 Population et répartition
La Paruline de Kirtland est une des espèces les plus gravement menacées d'extinction, avec une cote mondiale de G1[2](NatureServe, 2005). Son aire de répartition est principalement confinée à la portion nord de la basse péninsule du Michigan (figure 1). L'espèce est cotée S1[3] au Michigan. La Paruline de Kirtland est considérée comme un migrant accidentel dans six autres États de l'est des États-Unis. La population du Michigan s'est progressivement relevée après un grave déclin survenu entre 1961 et 1971. Le nombre de mâles chanteurs est ainsi passé de 167 en 1974 à 1 478 en 2006 (Byelich et al., 1985; Michigan Department of Natural Resources, 2005). Ce redressement est en grande partie attribuable à la création de nouveaux peuplements de pin gris (Pinus banksiana) par les feux de forêt (Sykes, 1997), à la gestion de grands peuplements de pin gris d'âge convenable (Probst et Weinrich, 1993) et aux mesures de lutte contre le Vacher à tête brune(Molothrus ater)(Kelly et DeCapita, 1982).
Figure 1 Aire de reproduction de la Paruline de Kirtland
La seule mention de reproduction au Canada a été enregistrée en 1945, dans la région de Midhurst (Barrie), en Ontario (Speirs, 1984). Cette mention est toutefois quelque peu ambiguë (Centre d’information sur le patrimoine naturel, 2005). La Paruline de Kirtland pourrait avoir niché dans la région de Petawawa, en Ontario, au 19e siècle et au début du 20e siècle, et possiblement aussi ailleurs au Canada (Harrington, 1939; COSEPAC, 2000). Un mâle chanteur a été observé du côté québécois de la rivière des Outaouais, près de Kazabazua, en 1978 (COSEPAC, 2000). Au cours de l'été de 1916, des mâles chanteurs ont régulièrement été vus et entendus à la Base des Forces canadiennes (BFC) de Petawawa, en Ontario. Un mâle a également été observé dans le même secteur le 5 juin 1939 (Harrington, 1939). Des mâles chanteurs ont été entendus dans de jeunes pinèdes en Ontario à au moins huit occasions, dont l’observation la plus récente étant celle de trois individus à la BFC de Petawawa en juin 2006.. On ne croit toutefois pas que ces mâles aient été accompagnés d'une femelle. Il est possible que des oiseaux occupant des peuplements plus grands et moins accessibles de cette région n’aient pas été détectés (COSEPAC, 2000) (Figure 2).
Figure 2 Données sur la répartition de la Paruline de Kirtland au Canada
(les enregistrements multiples au même emplacement ne sont pas montrés)
Des observations ont été signalées au Canada de Minaki, en Ontario jusqu’à l’est de Kazabazua, au Québec. La majorité des 76 enregistrements de cette espèce au Canada, entre 1900 et 2006, et ce principalement en Ontario, portaient sur des spécimens en migration printanière. On a également observé quelques mâles chanteurs pendant l'été (de juin à la mi-juillet) et quelques oiseaux en migration automnale (Aird et Pope, 1987; COSEPAC, 2000; P. Aird, comm. pers., 2006; Petrucha et Sykes, 2006); Ontario Bird Records Committee, 2005). Même si la Paruline de Kirtland a été observée en général au moins une fois chaque année en Ontario depuis 1990, aucune tendance ne se dessine quant au nombre d'observations de mâles chanteurs. Aucune Paruline de Kirtland nicheuse n'a été documentée dans l’une ou l’autre des régions de l'Ontario au cours des cinq dernières années (2001-2005) du projet de l’atlas des oiseaux nicheurs de l'Ontario (Ontario Breeding Bird Atlas, 2005).
L'aire mondiale de reproduction de la Paruline de Kirtland est donc confinée aux États-Unis. Toutefois, vu l'expansion de la population du Michigan et le nombre grandissant de mâles chanteurs signalés dans cet État et au Wisconsin, certains à moins de 25 kilomètres de la frontière canadienne, près de Sault Ste. Marie, il est possible que des occurrences de reproduction soient signalées au Canada dans l'avenir.
1.4 Besoins de la Paruline de Kirtland
1.4.1 Besoins biologiques et en matière d'habitat
La Paruline de Kirtland est une espèce spécialiste en matière d’habitat. Au Michigan, ses besoins essentiels en matière d’habitat sont notamment la présence de peuplements équiennes de pin gris occupant plus de 32 ha (Mayfield, 1953) et créés par des feux de forêt ou issus de plantations spécialement conçues pour imiter l’effet des feux. Les peuplements de pin gris de plus de 80 ha constituent des habitats de reproduction optimaux, comme le montre le succès de nidification accru dans ces peuplements. Dans une étude, Anderson et Storer (1976) ont observé que 90 % des nids qui avaient produit des jeunes ayant atteint l’âge de l’envol se trouvaient dans des peuplements de plus de 80 ha. L'habitat optimal consiste également en des peuplements denses de pin gris (au moins 3 500 arbres par hectare) entrecoupés de petites ouvertures, produisant un important volume de feuillage et un couvert forestier de 35 % à 65 % (Probst, 1988; Kepler et al., 1996). Les études suggèrent que le succès de nidification est plus élevé dans les parcelles denses et éparses d'arbres mesurant entre l,5 et 5 m (ou âgés de 7 à 20 ans), qui offrent un couvert de branches près du sol adéquat pour les nids, qui se trouvent en sols sableux secs et bien drainés et qui présentent une couverture au sol composée de plantes comme les bleuets (Vaccinium angustifolium, V. myrtilloides), le raisin d'ours (Arctostaphylos uva-ursi), la fougère- aigle de l’Est (Pteridium aquilinum), l'amélanchier (Amelanchier spp.), le cerisier des sables (Prunus pumila), la comptonie voyageuse (Comptonia peregrina), les barbons (Andropogon spp.), les carex (Carex spp.) et les verges d'or (Solidago spp.).
Les plantations de pin gris, et plus rarement de pin rouge (Pinus resinosa), offrent également des habitats convenables pour la nidification de la Paruline de Kirtland (Weinrich, 1994). Au cours des dernières années, plus de 90 % des Parulines de Kirtland nichaient dans des plantations de pin gris spécialement créées pour l'espèce (P. Huber, comm. pers., 2006). Les oiseaux qui nichent dans les plantations peuvent produire des nombres de jeunes comparables à ceux produits dans les zones qui se régénèrent naturellement à la suite de feux de forêt (Bocetti, 1994).
La taille du territoire du mâle chanteur étant évaluée en moyenne à 15 ha (38 acres), la nidification de seulement 25 couples exige environ 375 ha (950 acres) d'habitat convenable. Les efforts de rétablissement mis de l'avant au Michigan exigent qu'au moins 15 200 ha (38 000 acres) de terrain soient disponibles en tout temps, ce qui nécessite la gestion en rotation de 76 000 ha (190 000 acres) de pinède grise (Olson, 2002).
Malgré les exigences spécifiques énumérées ci-dessus, il peut être difficile d’évaluer avec précision la quantité et la qualité de l’habitat disponible requis. Certaines zones apparemment de grande qualité peuvent ne pas être occupées, et l'habitat occupé peut ne pas paraître idéal, même aux yeux d'un observateur expérimenté (Mayfield, 1992). D'autres facteurs, comme le microclimat et des caractéristiques structurelles spécifiques, pourraient avoir plus d'importance que ne le laissent penser les connaissances actuelles. La littérature contient des renseignements plus détaillés sur les exigences en matière d'habitat (Wood, 1904, 1926; Barrows, 1921; Leopold, 1924; Wing, 1933; Mayfield, 1953, 1960, 1962; Line, 1964; Anderson et Storer, 1976; Chamberlain, 1978; Buech, 1980; Harwood, 1981; Ryel, 1981; Wright et Bailey, 1982; Probst, 1986; Probst et Hayes, 1987).
Des analyses des fèces menées dans le cadre d'une étude du régime alimentaire de la Paruline de Kirtland ont révélé que l'oiseau se nourrissait principalement de cercopes et d’aphidiens (Homoptères; dans 61 % des échantillons), de fourmis et de guêpes (Hyménoptères; 45 %), de bleuets (Vaccinium angustifolium; 42 %), de coléoptères (Coléoptères; 25 %) et de larves de papillons nocturnes (Lépidoptères; 22 %) (DeLoria-Sheffield et al., 2001). Pour être convenable, l’habitat doit sans doute fournir une quantité suffisante de ces aliments.
Les lieux pouvant contenir de l'habitat convenable qui ont fait l’objet de relevés en Ontario dans les années 1970 n'étaient pas considérés comme optimaux selon les normes du Michigan : les arbres mesuraient plus de 6 m et les associations végétales y étaient différentes de celles observées dans l’État américain (Chamberlain, 1978). Toutefois, les travaux réalisés en 2003 dans la région de Thessalon, en Ontario, ont permis de repérer des associations végétales et des habitats très semblables à ceux que l'on trouve dans les landes à pin gris du Michigan, où les sols sont de sable grossier et où poussent principalement le bleuet à feuilles étroites (V. angustifolium) de même que des graminées et carex variés (Bloom, 2003). Cependant, la quantité de travaux de terrain réalisés jusqu'à maintenant en Ontario au sujet de la disponibilité d'habitats convenables demeure très limitée (P. Aird, comm. pers., 2006). En Ontario, des mâles chanteurs ont été observés dans des peuplements ou des plantations de pin gris d'une superficie supérieure à 20 ha et où les arbres poussent sur du sable bien drainé ou sur des sols peu profonds couvrant le substrat rocheux (Aird et Pope, 1987). La Paruline de Kirtland a également été observée dans une plantation de pin sylvestre (Pinus sylvestris) à au moins une occasion dans le comté de Simcoe, entre le 16 et le 21 mai 1964 (Devitt, 1967).
La Paruline de Kirtland est une espèce migratrice néotropicale qui hiverne aux Bahamas, où elle préfère les zones de végétation basse et clairsemée (Mayfield, 1972, 1996). La majeure partie des îles sont couvertes de broussailles à larges feuilles, et les îles les plus au nord comptent de grandes pinèdes. La majorité des observations de la Paruline de Kirtland ont été faites sur les îles qui comptent des peuplements clairs de pin de Cuba (Pinus caribaea) (Haney et al., 1998). Les périodes de dégradation et de rétablissement des écosystèmes de pin aux Bahamas correspondent peut-être aux périodes de déclin et de rétablissement des populations de Paruline de Kirtland. On a donc suggéré de tenir compte de l'aire d'hivernage dans la planification de la conservation de l'espèce (Haney et al., 1998). Cependant, on ne croit généralement pas que la disponibilité de l'habitat dans les aires d'hivernage soit un facteur limitatif (Sykes et Clench, 1998).
1.4.2 Rôle écologique
Le régime alimentaire de la Paruline de Kirtland comprend une variété d'insectes de différents ordres (DeLoria-Sheffield et al., 2001), mais aucune recherche n'a été menée pour déterminer l’effet spécifique de cette paruline sur les populations de chaque groupe taxinomique d'insectes. Le bleuet (V. angustifolium) est également un élément important du régime alimentaire de la Paruline de Kirtland, et il est possible que les oiseaux contribuent à la dispersion des graines dans l’habitat convenable.
Les prédateurs connus de la Paruline de Kirtland adulte, de ses oisillons et de ses œufs au Michigan sont notamment le geai bleu (Cyanocitta cristata), le spermophile rayé (Spermophilus tridecemlineatus), le raton laveur (Procyon lotor), la mouffette rayée (Mephitis mephitis), le chat domestique et la couleuvre rayée(Thamnophis sirtalis)(Walkinshaw, 1983). On soupçonne également l'écureuil roux (Sciurus vulgaris)et la corneille (Corvus spp.) d'être des prédateurs des œufs et des oisillons au Michigan, mais il n'a pas encore été nécessaire de lutter contre les prédateurs (Huber et al., 2001).
1.4.3 Facteurs limitatifs
Parmi les caractéristiques de la biologie de la Paruline de Kirtland observées au Michigan qui pourraient limiter le rétablissement de l'espèce au Canada, on compte les suivantes :
· Préférence extrêmement marquée pour les jeunes peuplements denses de pin gris. Les pinèdes grises convenables créées à la suite de feux de forêt exigent un entretien continu (p. ex. plantations spécialement conçues) à cause de la suppression des incendies. Les jeunes peuplements qui conviennent à la Paruline de Kirtland sont dispersés et possiblement limitatifs dans certaines parties de l'Ontario.
· Préférence pour les territoires de nidification sis dans de grandes étendues d'habitat convenable.
· Occupation temporaire de l'habitat (de 8 à 15 ans) en raison d’une préférence pour les stades peu avancés de la succession forestière (Probst, 1986).
· Grande vulnérabilité au parasitisme par le Vacher à tête brune dans les lieux de nidification (Mayfield, 1977; Harwood, 1981).
· Caractéristiques de dispersion. Les jeunes de l'année se dispersent généralement sur de grandes distances à la recherche de nouveaux territoires. Bien que la dispersion permette aux oiseaux de coloniser de nouveaux territoires, les mâles chanteurs risquent de ne pas pouvoir trouver de partenaire sexuelle dans les régions où la densité de l'espèce est très faible (Mayfield, 1983).
1.5 Menaces
Trois principales menaces pèsent sur la Paruline de Kirtland. Ces menaces ont toutes été amplement démontrées pour la population du Michigan. Des études additionnelles devront être réalisées afin de déterminer dans quelle mesure la suppression des incendies, la progression de la succession forestière, et le manque d'habitat convenable sont des menaces en Ontario. Le parasitisme par le Vacher à tête brune est un important problème dans la basse péninsule du Michigan, mais aucune mesure de lutte contre ce parasite n'a dû être prise dans la haute péninsule (S. Sjogren, comm. pers., 2006). Si une population de Paruline de Kirtland est détectée en Ontario, les mesures de lutte ne seront peut-être nécessaires que dans le sud de la province, où le Vacher à tête brune est plus commun et où l'habitat est davantage fragmenté.
1.5.1 Suppression des incendies et succession forestière
Les cônes des pins gris restent généralement fermés jusqu'à ce qu'ils soient exposés à la chaleur dégagée par les feux de forêt, et les peuplements sont plus denses à la suite d'un feu qu'à la suite de coupes effectuées selon les pratiques standard (Olson, 2002). Lors d'une régénération naturelle à la suite d'un feu de forêt, des taillis et des ouvertures se forment, et ces espaces sont privilégiés par les femelles reproductrices (Bocetti, 1994). L'habitat optimal était probablement plus vaste à la fin du 19e siècle, à une époque où des feux se déclaraient souvent après les coupes intensives (Mayfield, 1960). Au 20e siècle, la suppression des incendies a grandement réduit l'habitat de la Paruline de Kirtland, en Ontario comme au Michigan (COSEPAC, 2000).
Il est possible de reproduire une structure d'habitat similaire en respectant des règles spécifiques de coupe en rotation et grâce à la régénération naturelle des pins gris, avec ou sans ensemencement direct ou établissement de plantations de pin gris (S. Sjogren, comm. pers., 2006). Toutefois, l'occupation de l'habitat de succession par l'espèce demeure limitée à une période de 8 à 15 ans (Probst, 1986). La coupe en rotation de grandes parcelles à l'intérieur de très grandes zones est donc nécessaire pour permettre à la Paruline de Kirtland d'occuper un secteur à long terme (voir section 1.4.1). Une approche écosystémique large et potentiellement complexe, qui tient compte non seulement des pratiques forestières mais également de facteurs du milieu comme le microclimat et l'humidité sera nécessaire pour aménager de grandes zones d'habitat pour l'espèce (Kashian et Barnes, 2000).
1.5.2 Manque d'habitat convenable
Le manque de jeunes peuplements de pin gris suffisamment denses dont le sous-étage est optimal sur le plan de la structure et de la composition pourrait limiter l'établissement de la Paruline de Kirtland dans certaines parties de l'Ontario. Toutefois, des parcelles d'habitat convenable ont été repérées, et des relevés doivent être menés dans de grands peuplements de pin gris un peu partout en Ontario, notamment dans les secteurs de Thessalon, de Petawawa, dans le territoire situé entre Cartier et le lac Wanapitei, dans la région située entre Chapleau et Gowganda, l'île Manitoulin et la péninsule Bruce (Austen et.al., 1993; Bloom, 2003; P. Aird, comm. pers., 2005). Il existe maintenant de nombreuses preuves que le manque d'habitat limitait la petite, mais stable, population du Michigan avant qu'un important feu de forêt n'y fasse rage dans les années 1980 (Probst et Weinrich 1993; Kepler et al., 1996). On a également démontré que chez la Paruline de Kirtland, le succès de pariade est moindre dans les habitats de moins bonne qualité (Probst et Hayes, 1987).
1.5.3 Parasitisme des couvées par le Vacher à tête brune
Il a été démontré que le parasitisme des couvées par le Vacher à tête brune réduit à la fois le taux d’éclosion et le succès d'envol dans les populations du Michigan (Kelly et DeCapita, 1982; Walkinshaw, 1983). Lors de l’important déclin de la Paruline de Kirtland survenu dans les années 1960 et 1970, plus de 70 % des nids étaient parasités, et la production était réduite à moins d’un jeune par couple par année (Ryel, 1981). La lutte contre le Vacher à tête brune s'est amorcée en 1972 et a permis de réduire le parasitisme à environ 3 % ou à des niveaux négligeables (Kelly et DeCapita, 1982) et d'augmenter la productivité à une moyenne de près de trois jeunes atteignant l’envol par couple par année (Kelly et DeCapita, 1982; Walkinshaw, 1983).
S'il existe une population nicheuse de Paruline de Kirtland non détectée au Canada, il est possible que le parasitisme par le Vacher à tête brune représente une menace au succès de nidification, et une évaluation pourrait devenir nécessaire.
1.5.4 Autres
Les pratiques de gestion forestière qui ne tiennent pas compte des besoins spécialisés de la Paruline de Kirtland pourraient par inadvertance rendre les peuplements de pin gris inappropriés. Le remplacement des pins gris par des espèces moins propices à l’oiseau, la fragmentation de la forêt de pin gris par la coupe en petites parcelles lorsque de grandes parcelles sont disponibles et la plantation en densités inappropriées sont des facteurs qui peuvent menacer l'occupation du territoire par la Paruline de Kirtland.
1.5.5 Mesures achevées ou en cours
Au Michigan, un programme de rétablissement à long terme réunissant plusieurs organismes a été couronné d'un immense succès (Solomon, 1998). Grâce à plus de 800 travaux publiés sur la Paruline de Kirtland, les activités de recensement, de gestion et de recherche ont été bien documentées (Mayfield, 1992). Une réunion de rétablissement conjointe de membres de plusieurs équipes de rétablissement américaines et de représentants du Service canadien de la faune (SCF) a eu lieu en 2003. Il y a notamment été question de la possibilité d'entreprendre des efforts concertés de rétablissement pour la Paruline de Kirtland (R. Bloom, comm. pers., 2005).
Au Canada, les mesures de rétablissement se sont limitées principalement aux relevés. Au cours de la dernière décennie, plusieurs efforts de recherche ciblée ont été mis de l'avant en vue de détecter des occurrences de reproduction de la Paruline de Kirtland. À la suite de l’observation, le 4 juillet 1997, d’une Paruline de Kirtland près de Thessalon, des relevés ont été réalisés dans ce secteur en 1999, mais sans succès (Knudsen, 1999).
Cette région a par la suite été utilisée pour élaborer un plan de priorisation des sites au moyen de données spatiales. Dans le nord de l'Ontario, les habitats de pin gris convenables sont potentiellement très vastes. Une méthode de priorisation a donc été élaborée dans le but d'orienter les efforts des futurs relevés. L'information spatiale (p. ex. sur la couverture de pins, les stades de succession, les sols) a servi à évaluer les probabilités de dispersion dans les sites et à établir des priorités pour les activités de suivi. Des employés du SCF accompagnés de chercheurs américains ont ensuite survolé des sections de cette région (Bloom, 2003). Même si le projet n'a pas été mené à terme, la cartographie effectuée jusqu'à maintenant pourrait permettre d'intensifier les relevés aériens et terrestres, de mettre de l'avant un programme de suivi ou de faire des recherches sur le terrain au moyen de méthodes établies afin de déterminer la présence d’habitat convenable (voir p. ex. Bocetti, 1994).
Des efforts de recherche ciblée ont également été entrepris dans la région de Pembroke. En 2002 et en 2003, des employés du ministère des Richesses naturelles de l'Ontario (MRNO) et de la Base des Forces canadiennes (BFC) de Petawawa ont mené des recherches dans l'habitat convenable, mais sans succès. Depuis 2003, le personnel de la BFC de Petawawa a poursuivi les relevés, et le personnel du MRNO a réorienté ses efforts de recherche vers d'autres secteurs du comté de Renfrew. Des recherches ont été effectuées à la BFC de Petawawa afin de trouver des habitats convenables, et ce, dans le cadre d’un relevé des espèces en péril demandé par la Base en 2006. Trois mâles chanteurs ont été observés en juin 2006 et un mâle chanteur a été bagué et remis en liberté.
Des recherches ont été menées annuellement dans l'habitat convenable près d’Orillia, où un mâle chanteur avait été signalé en 1986, et, au cours de la dernière décennie, dans le secteur Chapleau-Cartier, dans la péninsule Bruce et sur l'île Manitoulin. Malgré tout, seul un très faible pourcentage de l'aire de répartition totale du pin gris en Ontario a fait l’objet de relevés. Jusqu'à présent, aucun couple nicheur n'a été localisé (P. Aird, comm. pers., 2005).
Les observations périodiques de Parulines de Kirtland migrantes faites par des ornithologues amateurs en Ontario sont généralement signalées à une ou plusieurs des organisations suivantes : Ontario Field Ornithologists (ontbirds@hwcn.org), Ontario Bird Records Committee, Centre d'information sur le patrimoine naturel de l'Ontario, Études d'Oiseaux Canada, équipe de rétablissement de la Paruline de Kirtland ou projet de l'atlas des oiseaux nicheurs de l'Ontario.
1.5.6 Lacunes dans les connaissances
Malgré les recherches substantielles sur l'espèce, plusieurs lacunes subsistent dans les connaissances sur la population mondiale de la Paruline de Kirtland. Elles ont trait notamment aux réponses des populations aux changements dans l'habitat, à l'écologie alimentaire, aux voies migratoires, aux besoins en matière d'habitat d'hivernage et au rôle potentiel du réchauffement de la planète sur les habitats de pin gris (Woodby et al., 1989; Olson, 2002).
Les lacunes les plus pressantes dans les connaissances au Canada portent principalement sur la répartition, la localisation et la disponibilité de l'habitat convenable. Si la reproduction de la Paruline de Kirtland est reconfirmée au Canada, des recherches sur les sujets suivants devront être menées :
· ampleur du parasitisme par le Vacher à tête brune;
· caractéristiques de l'habitat (y compris une comparaison avec l'habitat présent au Michigan);
· niveaux de recrutement (succès de la nidification et succès d'envol);
· tendances quant à la dispersion;
· fidélité au site;
· espèces concurrentes et prédateurs;
· exigences de gestion possibles.
[1]Un mâle chanteur a également été observé au Québec.
[2]Une cote mondiale de G1 indique que l'espèce est extrêmement rare à l'échelle de la planète et qu'il ne subsiste généralement qu'un très petit nombre d'individus.
[3]Une cote sous-nationale de S1 indique que l'espèce est extrêmement rare à l'échelle d'une province ou d'un État.
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