Au cours des six dernières années, nous avons assisté à une transformation remarquable de l'entreprise de recherche en santé au Canada. J'y reviendrai plus loin. Il y a actuellement beaucoup d'anxiété au sein du milieu de la recherche, anxiété que je partage en grande partie. Elle est suscitée dans une large mesure, mais pas uniquement, par les résultats du concours de subventions ouvert de septembre dernier, qui seront annoncés plus tard au cours du mois. Comme nombre d'entre vous le savent, il est maintenant presque certain que le taux de succès à ce concours sera sensiblement plus bas que lors des concours de subventions ouverts précédents.
Pourquoi, malgré les hausses sans précédent apportées au budget des IRSC, les taux de succès au concours ouvert de septembre seront-ils si bas? Il y a deux raisons. Premièrement, plus de chercheurs demandent plus de financement. Deuxièmement, sans une augmentation de leur budget de base, les IRSC auront moins de fonds non engagés pour financer de nouvelles demandes de subvention.
Je suis très inquiet des effets qu'aura cette situation sur tous les membres du milieu de la recherche ( les nouveaux chercheurs, les chercheurs en milieu de carrière et les chercheurs chevronnés. Je m'inquiète en particulier des effets sur les nouveaux chercheurs en début de carrière. Ces nouveaux chercheurs représentent l'avenir de la recherche en santé au Canada. L'incapacité d'obtenir une subvention pour leur recherche au cours de ces premières années critiques risque d'avoir un effet négatif durable sur leur carrière. De toute évidence, nous devons tous penser à des façons de redresser la situation pour le groupe même de chercheurs qui mettent leur énergie, leur formation exceptionnelle et leurs nouvelles approches au service de la recherche en santé.
Dans ce message, je voudrais vous faire part de mon point de vue sur la recherche en santé au Canada - hier, aujourd'hui et demain - ainsi que sur la façon dont nous pouvons commencer à faire face à la situation financière difficile actuelle.
Les six dernières années : une analyse quantitative
Depuis la dernière année du Conseil de recherches médicales (1999), le budget de base des IRSC est passé de 289 millions de dollars en 1999-2000 à 723 millions de dollars en 2006-2007. Cette augmentation du financement destiné à la recherche en santé a été pour ainsi dire sans pareille dans le monde. Cette augmentation a signifié que :
la valeur totale du concours de subventions ouvert (CSO) a plus que doublé, passant de 165 millions de dollars à 350 millions de dollars;
le nombre de chercheurs financés dans le cadre de ce concours est passé d'environ 2 100 (1999-2000) à 3 300 (2005-2006);
la valeur moyenne d'une subvention de fonctionnement est passée de 81 000 $ (1999-2000) à 111 000 $ (2005-2006).
Le financement des bourses de formation et de carrière a aussi considérablement augmenté. Avec le lancement de l'Initiative stratégique pour la formation en recherche dans le domaine de la santé (ISFRS), le nombre de stagiaires financés directement par les IRSC s'est accru d'environ 96 %. Parce que le soutien financier apporté aux étudiants diplômés et aux boursiers postdoctoraux compte pour une proportion importante de nombreuses subventions de recherche, l'ISFRS représente aussi une importante augmentation des fonds consacrés à la recherche.
La reconfiguration de notre programme de bourses de carrière pour privilégier les nouveaux chercheurs, auquel s'est ajouté l'investissement de fonds nouveaux, a eu pour résultat de faire passer de 422 à 665 le nombre de chercheurs bénéficiant de bourses de carrière des IRSC. C'est une augmentation de 58 %.
La croissance des 13 instituts a également créé de nouvelles possibilités de financement dans des domaines de recherche stratégiques qui cadrent avec les plans stratégiques de chacun des instituts et le plan global des IRSC. Ces domaines de recherche ciblés, définis lors de consultations approfondies avec les 13 conseils consultatifs des instituts et le vaste milieu des intervenants, représentent une manière entièrement nouvelle d'établir et de mettre en oeuvre les priorités de recherche au Canada.
Au total, le financement ciblé de la recherche est passé d'environ 26 millions de dollars en 1999 à quelque 172 millions de dollars aujourd'hui.
Conformément au mandat qui nous est conféré par le Parlement, nous avons aussi augmenté sensiblement le nombre de programmes et les fonds destinés à l'application des connaissances, autrement dit pour faire en sorte que la recherche débouche sur des produits, des pratiques et des politiques. Des programmes comme le Programme de démonstration des principes (PDP), Des sciences aux affaires, Des connaissances à la pratique, les ACRS et le Partenariat pour l'amélioration des systèmes de santé ont permis de créer pour les chercheurs de tous les secteurs de la recherche en santé de nouvelles possibilités de travailler avec les utilisateurs de cette recherche afin d'appliquer les résultats obtenus dans nos universités et hôpitaux à la pratique et aux politiques.
En plus du budget de base des IRSC, un nouveau fonds de cofinancement de 516 millions de dollars a été garanti par les instituts pour des objectifs ciblés et communs, entre 1999-2000 et 2005-2006.
En outre, le gouvernement fédéral a aussi instauré plusieurs nouveaux programmes d'envergure, tous conçus pour renforcer la capacité de recherche - par exemple la Fondation canadienne pour l'innovation, Coûts indirects, les Chaires de recherche du Canada -, qui apportent à l'infrastructure une aide nouvelle aussi considérable que nécessaire, mettent des fonds de démarrage à la disposition des nouveaux chercheurs, prennent en charge les coûts indirects pour les établissements, et procurent une aide salariale à plus de 700 chercheurs dans le domaine de la santé. Ce financement nouveau représente aussi des centaines de millions de dollars par année pour la recherche en santé.
Globalement, cette augmentation de l'aide sous toutes ses formes a profondément changé le paysage de la recherche en santé financée par des instances publiques au Canada par rapport à la sombre période du milieu des années 1990.
Les six dernières années
Néanmoins, aussi impressionnants que soient ces chiffres, les changements qualitatifs ne sont pas moins profonds. Les IRSC ne sont pas seulement une version agrandie du CRM. Au cours des huit dernières années, soit depuis le débat national dirigé par le Dr Henry Friesen, le Canada a été à l'avant-garde d'une nouvelle vision de la recherche en santé. Cette vision reconnaît explicitement que pour améliorer la santé et traiter efficacement les maladies, il faut tenir compte à la fois des facteurs biologiques, des aspects cliniques, du système de santé et de la santé des populations. La vision des IRSC reconnaît tout aussi explicitement que l'application des connaissances est aussi un élément nécessaire d'une stratégie de recherche en santé intégrée pour le 21e siècle.
Par conséquent, à mesure qu'augmentait leur budget global, les IRSC ont étendu leurs investissements à tous ces domaines de recherche et à l'application des connaissances.
La Figure 1 illustre comment cette extension aux quatre domaines de la recherche en santé s'est produite au cours des six dernières années. Deux choses apparaissent clairement sur ce graphique : premièrement, nous sommes déterminés à étendre la définition de la recherche en santé pour faire une place aux domaines 2 à 4; deuxièmement, tous les domaines de la recherche en santé ont bénéficié de très importante façon de l'augmentation du budget des IRSC.
Figure 1 IRSC : Élargissement du mandat
Cette vision canadienne de la recherche en santé a été vue d'un bon oeil par d'autres, elle est en effet mentionnée dans le rapport du Comité d'examen international, et plus récemment dans le rapport de Sir David Cooksey sur l'organisation du financement de la recherche en santé au Royaume-Uni (anglais seulement).
J'appuie cette vision intégrée de la recherche en santé. Elle est à la fois convaincante et opportune, et c'est dans une grande mesure la raison pour laquelle j'ai accepté le poste de président des IRSC en 2000. Comme je l'ai mentionné dans mon discours d'ouverture devant l'Académie canadienne des sciences de la santé, je ne vois pas notre situation comme un jeu à « somme nulle » . C'est-à-dire que je ne considère pas, par exemple, que des fonds qui vont à la recherche sur les soins palliatifs sont des fonds qui, autrement, auraient été consacrés à la biologie des systèmes.
Le défi aujourd'hui
Comme je l'ai mentionné au début de ce message, les IRSC font face à un double défi : premièrement, l'expansion rapide et sans précédent du milieu de la recherche en santé; deuxièmement, une diminution des fonds en cours d'exercice pour financer de nouvelles demandes de subvention.
A. Plus grande demande de fonds
La FCI, les CRC, le Programme des coûts indirects et les nouveaux incitatifs fiscaux fédéraux pour la philanthropie ont permis un accroissement sans précédent, quoique fort nécessaire, de la capacité de recherche en santé au Canada. Par exemple, c'est dans la recherche en santé que la FCI a le plus investi au niveau de l'infrastructure. Ce n'est pas étonnant. La complexité et le perfectionnement sans cesse croissants de la recherche en santé, ainsi que des champs de recherche entièrement nouveaux, ont créé de nouvelles possibilités enthousiasmantes pour la recherche et son application.Les 13 plus grandes universités du Canada, et donc les bénéficiaires de la majorité des fonds des IRSC, ont toutes des écoles de sciences de la santé et de multiples hôpitaux d'enseignement et de recherche affiliés. Ces établissements ont aussi ambitieusement accru leur capacité de recherche, sous l'impulsion de la FCI, des gouvernements provinciaux et des organismes philanthropiques. Ces 13 universités et leurs hôpitaux affiliés, qui sont près de 50, sont pratiquement tous en train d'accroître leur capacité de recherche.Lorsque j'ai visité les campus partout au Canada au cours des six dernières années, j'ai été impressionné par l'ampleur et le caractère ambitieux d'abord des plans et ensuite des constructions, et maintenant par les extraordinaires chercheurs qui ont été et qui continuent d'être recrutés pour venir au Canada.
Même sans cette augmentation de la capacité de recherche en santé, l'élargissement de notre mandat par rapport à celui du CRM s'est aussi traduit par une importante augmentation du nombre de chercheurs qui se sont adressés aux IRSC pour obtenir des fonds.
La complexité toujours plus grande et la nature de la recherche en santé signifient aussi que les coûts d'une recherche qui soutient la comparaison internationale ont augmenté. La valeur moyenne d'une subvention de fonctionnement a augmenté pour passer de 75 000 $ en 1999-2000 à plus de 111 000 $ par année en 2005-2006. Et si l'on compare seulement les subventions en sciences biomédicales (qui représentent essentiellement ce que le CRM finançait), la subvention moyenne a doublé, passant de 75 000 $ en 1999-2000 à environ 150 000 $ en 2005-2006. Selon moi, ces chiffres devraient augmenter encore, mais nous avons adopté une approche équilibrée, prenant en considération le besoin d'assurer un financement de niveau international ainsi que le désir et l'obligation de financer autant de chercheurs exceptionnels que possible à la grandeur du pays.
Le recrutement de centaines de nouveaux chercheurs, soit des chercheurs qui viennent de terminer leur formation postdoctorale ou des chercheurs expérimentés attirés au Canada par un climat de recherche et un milieu de vie des plus avantageux, a fait croître une ressource fantastique pour notre pays : un effectif grandissant de talents scientifiques dont le Canada aura besoin pour être réellement compétitif dans un monde hypnotisé par l'ascension de la Chine et de l'Inde. Ces scientifiques ont une formation exceptionnelle, sont ambitieux et présentent aux comités d'examen des IRSC des programmes de recherche à la fine pointe de la science. Le nombre de ces programmes est beaucoup plus élevé que ce que nous avions imaginé lorsque les IRSC ont été créés en 2000.
B. Importante diminution des fonds disponibles
Parce que les projets de recherche durent plusieurs années, les IRSC prennent généralement des engagements par anticipation de trois à cinq ans, soit de 4,2 ans environ en moyenne. Toutefois, les IRSC reçoivent des crédits annuels du Parlement. Ainsi, chaque année, la plus grande partie des fonds des IRSC est déjà engagée, et les fonds non engagés disponibles pour financer de nouveaux projets de recherche ne correspondent pas au budget total, mais seulement aux fonds « libérés » par la fin de subventions accordées quatre ou cinq ans auparavant et aux nouveaux crédits reçus du Parlement. Comme la croissance budgétaire des IRSC a ralenti au cours des dernières années, les fonds non engagés permettant d'accorder de nouvelles subventions et bourses ont diminué. Par exemple, pour le plus récent concours du programme de subvention de fonctionnement, il a été estimé que le financement disponible serait de 30 % inférieur à celui de l'exercice précédent.
Ensemble, la demande considérablement accrue de subventions et les contraintes budgétaires prévues ont créé la situation actuelle.
L'avenir
Comment devrions-nous réagir à cette situation? Des stratégies à court et à long terme sont nécessaires si nous voulons maintenir et renforcer l'élan pris au cours des six dernières années.
À mes yeux, cette stratégie pour l'avenir comprend plusieurs éléments essentiels :
L'excellence doit être au coeur de tout ce que nous faisons : dans la recherche que nous finançons et dans notre façon de fonctionner.
Il faut mettre l'accent de moins en moins sur les « intrants » et les produits immédiats (p. ex. nombre de subventions financées, taux de succès, nombre d'étudiants formés) et davantage sur les résultats plus en aval de la recherche en santé (p. ex. nouvelle compréhension de la maladie, améliorations des traitements, endiguement des nouvelles infections, déterminants environnementaux et psychosociaux de la santé et de la maladie, nouvelles entreprises ou ententes de concession de licence fructueuses, réductions des temps d'attente, technologies de diagnostic nouvelles ou améliorées). Voilà ce qui intéresse le public.
Les jeunes chercheurs exceptionnels nouvellement recrutés s'attendent à être financés. Il faut une approche qui reconnaît cette réalité et qui permet aux meilleurs jeunes chercheurs de démontrer leur potentiel.
Il incombe à chacun de faire le lien entre le soutien des contribuables à la recherche et les répercussions de cette recherche. Qui que nous soyons - étudiants, boursiers postdoctoraux, assistants de recherche, professeurs, employés des IRSC - nous avons une formidable occasion de montrer au public canadien et aux parlementaires la valeur de la recherche en santé. Les projets pilotes que les IRSC ont réalisés au cours des dernières années ( Café scientifique, cours pour les médias, forums publics sur une vaste gamme de sujets ( ont tous été couronnés de succès. Et je sais que nombre d'universités, d'hôpitaux et de chercheurs individuels participent activement à de telles activités.
L'engagement du public est essentiel pour l'avenir de ce que nous voulons tous faire. Il est à espérer que cet engagement incitera des jeunes pleins de talent à faire carrière en recherche. Il permettra aussi de dissiper les craintes ou les malentendus chez le public au sujet de ce que nous faisons; il créera un fort mouvement politique en faveur de la recherche; et il nous procurera à tous, la possibilité de savoir ce que le public pense.
Bien que ce ne soit pas une question budgétaire en soi, la nature changeante des exigences en ce qui a trait à la recherche en santé exige que nous prenions du recul afin d'avoir une vue d'ensemble sur l'examen par les pairs.
J'ai reçu de nombreuses observations et suggestions judicieuses en réponse à ma demande de suggestions quant à la façon dont les IRSC devraient répondre à l'examen du CEI et réagir à la situation financière actuelle.
Beaucoup de ces observations ont porté sur l'importance du concours de subventions ouvert (CSO) et la nécessité de lui donner plus d'ampleur. Les IRSC croient fermement au CSO. C'est pourquoi ce concours a bénéficié de la plus forte augmentation en dollars de notre budget (192 millions de dollars en 1999-2000 comparativement à 350 millions de dollars en 2005-2006). Toutefois, même si ce concours est important et central pour nombre de chercheurs et l'avancement de la recherche, la diversité des milieux de recherche que les IRSC appuient désormais ainsi que les exigences et les besoins que font naître différentes menaces pour la santé ou occasions à saisir exigent que les IRSC offrent un éventail plus complet de possibilités. Par exemple, lorsqu'il y a des lacunes évidentes en recherche ou que des problèmes doivent faire l'objet d'étude, le Canada a besoin d'un mécanisme proactif qui favorise la recherche dans des domaines déterminés. Voici des exemples de recherche réalisée au cours des cinq dernières années : la recherche sur les soins palliatifs; le programme de recherche en collaboration en matière de santé avec le CRSNG pour encourager la recherche à la limite des sciences de la santé et des sciences naturelles; la recherche sur la santé des Autochtones, ainsi que l'initiative en médecine régénérative et en nanomédecine. Il y a aussi des circonstances, qu'il s'agisse du SRAS ou des temps d'attente, où le milieu de la recherche en santé du Canada a la possibilité de démontrer l'incidence immédiate que la recherche peut avoir sur la santé des Canadiens.
D'autres suggestions ont porté sur le besoin de réduire le nombre d'initiatives modestes pilotées par des instituts et d'explorer de nouveaux mécanismes pour faire en sorte que les IRSC lancent des initiatives moins nombreuses, mais d'une plus grande envergure, qui auront plus de chances d'avoir des répercussions importantes. Nous souscrivons à cette idée et nous étudions activement la meilleure façon d'y arriver.
Certaines personnes ont suggéré que nous réduisions nos coûts administratifs (le « budget de fonctionnement » comme on dit à Ottawa). Les IRSC consacrent actuellement environ 6 % de leur budget à l'administration. Je suis heureux d'annoncer que des mesures d'économie permettront de transférer un million de dollars du budget de fonctionnement 2006-2007 au budget des subventions et bourses. Il importe aussi de savoir que la plus grande partie du budget de fonctionnement des IRSC sert au traitement des demandes de subvention et à l'administration du processus d'examen par les pairs.
Mot de la fin
Le milieu de la recherche en santé du Canada a une belle histoire à raconter aux Canadiens et aux parlementaires. Ce n'est pas une histoire de taux de réussite en chute libre. C'est plutôt une histoire qui témoigne de la nouvelle compréhension du point de vue biologique des mécanismes de maladies comme le cancer, l'autisme et le diabète; de nouvelles méthodes thérapeutiques; des changements apportés à la pratique clinique grâce à des données probantes; de la recherche qui éclaire l'élaboration de politiques en matière de santé; de la création d'entreprises dérivées et d'ententes de concession de licence fructueuses, et de la recherche sur le comportement humain et la promotion de la santé.
Nous aurons à relever de grands défis scientifiques et sociaux. La hausse insoutenable des coûts des soins de santé, le vieillissement rapide de la population canadienne, les effets des changements environnementaux et du réchauffement de la planète sur la santé humaine, la mise au point de nouveaux outils pour comprendre des systèmes biologiques complexes comme le cerveau et le besoin de comprendre l'épidémie d'obésité ne sont que quelques exemples de besoins criants. Des besoins auxquels il faut trouver des solutions, des solutions que seule la recherche en santé peut offrir.Voilà ce que les parlementaires doivent entendre.