Notes d’allocution de la ministre Qualtrough à l’occasion du sommet « Au-delà des bandes » de Hockey Canada
Discours
Le 8 septembre 2023 – Calgary (AB)
[La version prononcée fait foi.]
Bonjour tout le monde,
Merci de m’inviter à participer à cette discussion importante.
Je tiens tout d’abord à souligner que nous sommes réunis sur les territoires traditionnels des peuples du Traité 7, y compris la Confédération des Pieds-Noirs composée des Nations Siksika [six-ih-gah], Piikani [pee-gun-ee] et Kainai [kai-na-wah]; la Nation Tsuut’ina [sue-tin-ah]; et la Première Nation Stoney Nakoda, y compris les Premières Nations des Chiniki [chin-ih-kee], Bearspaw et Goodstoney. Le secteur abrite aussi la Métis Nation of Alberta, Région 3.
Je désire également rendre hommage aux personnes survivantes. Je pense notamment à celles qui ont pris la parole pour nous donner la chance d’apprendre, de mieux protéger nos enfants et d’améliorer nos systèmes et nos façons de faire. J’admire votre courage. Vous n’auriez jamais dû vivre de telles expériences. Je suis résolue à vous soutenir.
Je réintègre mon poste de ministre des Sports à un moment où le système sportif canadien, comme partout ailleurs dans le monde, est en pleine tourmente : la confiance envers les têtes dirigeantes et les organismes voués au sport est effritée.
Depuis ma nomination, j’ai rencontré des personnes survivantes, des athlètes, des parents, des spécialistes, des défenseurs et des membres d’organismes nationaux de sport et d’organismes de services multisports. Entre autres, Hockey Canada, Soccer Canada et Gymnastique Canada.
J’ai bien compris qu’il fallait effectuer un changement systémique. Notre système sportif ne protège pas comme il le devrait nos enfants et les autres parties prenantes. Notre système n’est pas assez exigeant envers les têtes dirigeantes et les responsables des organismes quand il est question de rendre des comptes. Gagner à tout prix n’est pas gagner.
En fait, il faut changer la culture. Cela aurait dû être fait il y a bien longtemps.
J’ai aussi compris que les gens étaient disposés à apporter les changements qui s’imposent. À faire le boulot.
Fort heureusement, il semble que le système sportif canadien soit disposé à conjuguer ses forces pour trouver la voie de l’avenir. Il y a un désir de reconnaître les erreurs du passé, de soutenir les personnes survivantes et de canaliser tout ce que le sport offre de meilleur afin de transformer l’activité sportive au pays.
Je n’irai pas jusqu’à dire que tout le monde est là. Mais je crois qu’il y a une masse critique.
Nous avons fait d’immenses progrès. Attribuons-en le mérite aux athlètes qui ont survécu et raconté courageusement leur histoire dans les médias et devant les comités de la Chambre des communes et les membres du gouvernement. De tels événements n’auraient jamais dû se produire, mais vos plaidoyers ont touché la nation tout entière, qui en a fait une priorité.
Nous avons mis en place le Bureau du Commissaire à l’intégrité dans le sport, et 93 % des organisations sportives nationales qui reçoivent des fonds publics fédéraux sont des membres signataires du programme.
Nous avons le Code de conduite universel pour prévenir et contrer la maltraitance dans le sport, lequel a été adopté par toutes les organisations sportives nationales financées. Nous avons des procédures pour traiter les plaintes, mener des enquêtes et imposer des sanctions. Ce sont toutes des étapes importantes.
Et si certains organismes ont commencé leur périple, comme Hockey Canada, il est trop tôt pour se féliciter des progrès accomplis. Je vois des premiers pas prometteurs, mais il reste encore beaucoup à faire. C’est pourquoi les événements comme ce sommet sont si importants.
Si vous me le permettez, je vais maintenant présenter ma vision et mes récentes réflexions.
Comme vous, je crois que la population du Canada mérite un système sportif qui reflète et célèbre nos valeurs d’égalité, de justice et d’inclusion.
Comme vous, je crois que les Canadiens et Canadiennes méritent un système sportif qui soit sécuritaire et responsable. Voilà le sport que nous voulons pour nos enfants.
Le sport a le pouvoir de changer le monde en mieux. Le sport donne vie à des communautés. Il est une source de fierté nationale. Nous nous souvenons tous où nous étions lorsque Paul Henderson, Sidney Crosby et Marie-Philip Poulin ont compté leurs « buts en or ».
Toutefois, quand les mesures de protection et la reddition de comptes sont inadéquates, le sport peut aussi blesser. Il nous faut revoir notre système sportif dans l’optique des droits de la personne; la gouvernance et le fonctionnement du système doivent s’inspirer de ces droits. Les notions de reddition de comptes, d’intégrité et de sport sécuritaire doivent faire partie intégrante du système dans son ensemble.
Cela veut dire envisager la « victoire » sous un nouvel angle. Je crois fermement que nous pouvons aspirer à la victoire au sein d’un système sportif remanié et d’une culture du sport bien ancrés dans nos valeurs. Un système et une culture axés sur le bien-être physique, émotionnel et mental des athlètes et des autres parties prenantes du milieu sportif. Dans ce nouvel esprit, nous pouvons maintenir nos objectifs de performance ambitieux et encourager nos équipes à gagner.
À mon avis, c’est la clé de notre succès à l’avenir.
Dans un tel contexte, ma priorité en tant que ministre des Sports consiste à entreprendre une vaste réforme du système en axant sa gouvernance et son fonctionnement sur les droits de la personne, les athlètes et le sport sécuritaire. Je souhaite aussi que notre système représente fièrement et plus fidèlement la diversité de notre pays de sorte que les groupes autrefois sous-représentés pourront dorénavant avoir un accès équitable à des possibilités intéressantes de faire du sport.
Je ne vous le cacherai pas, réformer le système et changer la culture ne seront pas une sinécure. Pour certaines personnes, il est difficile de reconnaître que la maltraitance a été banalisée dans beaucoup de milieux sportifs. Ce qui se passe dans nos vestiaires et sur le banc peut être dangereux et entraîner les gens dans une spirale destructrice.
C’est pourquoi, selon moi, il faut d’abord jeter les bases d’une saine gouvernance et établir une solide politique, puis aller au-delà des mots et faire le boulot.
Bien que le pays ait commencé à se doter d’un système ou d’un cadre sportif sécuritaire, la mise en œuvre est fragmentaire. Les champs de compétence posent certains défis. Les ressources sont insuffisantes. Les perceptions de conflits et les préjugés persistent, et le système n’inspire pas toujours confiance. De nombreuses victimes craignent encore des représailles si elles se manifestaient. Il arrive que les enquêtes, si enquêtes il y a, s’étirent dans le temps. Il peut régner un climat d’incertitude, voire de peur, dans l’entourage des entraîneurs et des officiels.
La vraie question est la suivante : comment faire pour mettre en pratique la notion de sport sécuritaire et changer la culture dans les activités sportives au quotidien au Canada?
Je pense que nous allons trouver la réponse à cette question au cours de forums et de sommets comme celui-ci, mais aussi grâce à notre action collective.
En tant que têtes dirigeantes, nous devons prendre les mesures nécessaires pour créer des lieux sécuritaires et adaptés aux traumatismes afin que d’autres voix se fassent entendre.
Nous devons écouter les alliés de la cause et les athlètes, en particulier les personnes survivantes, et en tirer des leçons.
Nous devons écouter le point de vue de gens en dehors du milieu sportif, comme les spécialistes de la protection de l’enfance et la police communautaire.
Nous devons parler des sujets que nous avons évités jusqu’à maintenant – parler de ce qui se passe réellement.
Nous devons parler de racisme et de misogynie, d’homophobie et de transphobie.
Nous devons parler des comportements négatifs, inappropriés et dangereux qui sont banalisés. Les comportements qu’on observe tous les jours, à chaque entraînement et à chaque partie. Le langage. Les gestes. Les moqueries. L’intimidation. Quelles limites devons-nous fixer?
Nous devons parler des rôles et des responsabilités. Les parents, les athlètes, les officiels, les responsables de l’administration, les bénévoles et l’équipe d’entraînement ont tous un rôle à jouer.
Nous devons parler des mesures à prendre pour gagner et comment nous voulons gagner. Mais gagner dignement.
Quant à nous, Sport Canada, le gouvernement du Canada et moi-même, nous sommes des partenaires dans cette entreprise. Nous savons que nous avons du ménage à faire dans notre propre cour. Nous pouvons améliorer et moderniser notre cadre financier. Nous pouvons renforcer nos mesures en matière de reddition de comptes et d’intégrité. Nous pouvons remanier nos objectifs de performance dans l’optique de gagner dignement.
Il y a beaucoup à faire.
Il nous incombe à tous et à toutes de relever ce défi qui se présente à nous. Notre attitude et notre comportement vont modeler les changements à apporter. Les joueurs, les joueuses, les parents, les entraîneuses et les entraîneurs, les officiels et l’administration méritent d’évoluer dans un milieu sportif juste, inclusif et sécuritaire, sans exception.
Nous devons montrer au pays entier que la sécurité et le bien-être demeureront toujours une priorité, et ce, peu importe la discipline et le niveau.
Au boulot maintenant!
Je vous remercie.