Évaluation des risques pour la santé humaine du dioxyde d'azote ambiant

Le présent rapport, intitulé Évaluation des risques pour la santé humaine du dioxyde d'azote (NO2) ambiant et préparé par la Section sur l'évaluation de la qualité de l'air de Santé Canada, est un examen exhaustif de la science la plus pertinente liée à la santé et à l'exposition à ce polluant atmosphérique. Cet examen vise à appuyer l'élaboration des normes canadiennes de qualité de l'air ambiant (NCQAA) concernant le NO2. Ces normes constituent un des éléments du Système (fédéral, provincial et territorial) de gestion de la qualité de l'air.

Émissions

Les oxydes d'azote (NOx) sont principalement émis par des sources de combustion. La plupart des émissions de NOx sont sous la forme de monoxyde d'azote (qui est rapidement converti en NO2) avec des quantités moindres de NO2 lui-même. D'après l'Inventaire national des rejets de polluants (INRP), en 2011, les principaux rejets dans l'air ambiant de NOx au Canada provenaient de sources mobiles (50 % des émissions totales), principalement des moteurs diesel sur route et hors route. De grandes quantités ont également été émises par des sources industrielles (30 %), la majorité provenant d'installations pétrolières et gazières en amont. Des quantités moindres ont été rejetées par la catégorie non industrielle (12 %, la majeure partie provenant de la production d'électricité par combustion) et par des sources naturelles (7 %, la majorité provenant de l'activité microbienne dans les sols agricoles fertilisés). D'une façon générale, la tendance des émissions de NOx déclarées à l'INRP de 1985 à 2011 était à la baisse en ce qui concerne les sources mobiles, non industrielles et naturelles, tandis que les émissions industrielles ont augmenté au cours de la même période, principalement en raison des émissions provenant du secteur pétrolier et gazier en amont.

Concentrations ambiantes

Les renseignements sur les concentrations ambiantes de NO2 au Canada sont principalement fournis par le Réseau national de surveillance de la pollution atmosphérique (RNSPA) de stations de surveillance. Les données de ce réseau indiquent que les concentrations de NO2 varient considérablement à plusieurs échelles dans l'espace et le temps, reflétant ainsi souvent l'influence importante des émissions dues au trafic routier sur l'exposition.

En ce qui concerne la variation spatiale, les concentrations les plus élevées de NO2 dans l'air ambiant surviennent aux stations influencées par les transports et aux stations potentiellement influencées par des sources industrielles. Les concentrations de NO2 dans d'autres types de stations du RNSPA sont inférieures et semblent proportionnelles au degré d'urbanité qui est probablement une fonction des changements parallèles observés dans les émissions provenant de sources mobiles, du chauffage résidentiel et d'autres sources liées à la population. Diverses mesures de concentrations (concentration quotidienne maximale sur 1 heure [max. sur 1 h], concentration moyenne sur 24 heures [moy. sur 24 h] et concentration moyenne annuelle) présentent des relations similaires à cet égard. Il existe également une grande variabilité spatiale du NO2 relativement aux marqueurs des émissions attribuables au trafic routier, notamment la distance par rapport aux routes, le débit de circulation et la longueur des routes.

En ce qui concerne la variation temporelle, les concentrations ambiantes de NO2 quotidiennes maximales sur 1 h et annuelles moyennes dans les divers types de stations du RNSPA, à l'échelle nationale, ont constamment diminué de 1997 à 2011. Cette baisse était attribuable aux contrôles réglementaires propres aux NOx effectués sur le secteur mobile et la production d'électricité par combustion fossile. Tous les types de stations ont aussi présenté une tendance commune selon la saison, avec des valeurs maximales en hiver et des valeurs minimales en été; ces dernières concordent avec l'augmentation des hauteurs de mélange et l'oxydation photochimique de NO2, et avec la diminution des émissions provenant du chauffage résidentiel par rapport à l'hiver. Les concentrations ambiantes de NO2 varient également tout au long de la journée; les deux concentrations maximales correspondent aux heures de pointe du matin et de l'après-midi ou du soir. Les concentrations de NO2 durant la fin de semaine sont généralement inférieures à celles des jours de la semaine, et les périodes de concentrations diurnes maximales sont plus courtes la fin de semaine, probablement en raison de la diminution du trafic routier (notamment celui des camions diesel) et de l'absence de trafic d'heure de pointe pendant la fin de semaine.

Exposition au NO2 provenant de sources ambiantes

L'ensemble de la population est exposé au NO2 provenant de sources ambiantes, lorsque les personnes sont à l'extérieur et lorsqu'elles sont dans des milieux intérieurs où du NO2 dans l'air ambiant s'est infiltré. Au fil de leur journée, certaines personnes passent également du temps à des endroits dans lesquels les concentrations de NO2 sont plus élevées en raison de rejets provenant de sources non ambiantes (p. ex. à l'intérieur de résidences équipées de cuisinières au gaz).

Cette évaluation est menée dans le but d'appuyer l'élaboration d'une norme de qualité du milieu ambiant concernant le NO2 et elle est fondée en grande partie sur les données épidémiologiques probantes qui établissent un lien entre les concentrations ambiantes de NO2 et un large éventail d'effets sur la santé. Dans ce contexte, un enjeu clé concerne la capacité des concentrations de NO2 mesurées par le réseau de surveillance à servir d'indicateur de l'exposition personnelle au NO2 provenant de l'air ambiant, par rapport à l'exposition personnelle totale au NO2 provenant de toutes les sources qui est mesurée dans la plupart des études sur l'évaluation de l'exposition.

Les études sur la relation entre les expositions personnelles au NO2 et les concentrations mesurées par les réseaux de surveillance de la qualité de l'air ambiant ont en général mis en évidence des corrélations positives et souvent statistiquement significatives ou des régressions entre les concentrations ambiantes à court terme et les expositions personnelles totales. Généralement, la composante ambiante de l'exposition personnelle aux polluants atmosphériques n'est pas directement mesurable, mais l'exposition personnelle totale peut être considérée comme l'exposition personnelle provenant de l'air ambiant s'il n'existe pas de sources intérieures. Dans ces études où les sources intérieures de NO2 étaient absentes, la corrélation entre l'exposition personnelle et les concentrations ambiantes était modérée à forte et deux à trois fois plus élevée par rapport à celle observée en présence de sources intérieures. En outre, le lien entre les expositions personnelles totales et le NO2 dans l'air ambiant était plus important durant la saison chaude (lorsque les personnes sont généralement plus exposées aux polluants dans l'air ambiant, car leur infiltration dans les bâtiments et le temps passé à l'extérieur sont plus importants) dans un certain nombre d'études. Ces résultats ont été confirmés dans une méta-analyse d'un grand nombre d'études sur l'évaluation de l'exposition.

Dans l'ensemble, les résultats de ces études montrent que, même si les concentrations mesurées par le réseau de surveillance de qualité de l'air ambiant ne tiennent pas nécessairement compte des différences d'exposition au NO2 provenant de l'air ambiant entre les individus, elles semblent offrir une valeur de substitution raisonnable de l'exposition à l'échelle de la population. De plus, il est probable que les variations journalières de l'exposition de la population au NO2 provenant de l'air ambiant suivent les fluctuations des concentrations mesurées aux stations centrales. Les liens entre les concentrations ambiantes de NO2 et les effets sur la santé, qui sont établis dans les études épidémiologiques à court terme, s'appuient donc davantage sur ces variations temporelles et sur la capacité de représenter l'exposition personnelle moyenne dans la population que sur l'ampleur absolue de l'exposition. Par conséquent, les concentrations ambiantes constituent une mesure utile et appropriée de l'exposition pour les études épidémiologiques sur les effets de la pollution atmosphérique par le NO2 sur la santé.

Le trafic routier comme source d'exposition au NO2

Les émissions des véhicules représentent une source importante de NO2 dans les milieux urbains. De grands gradients horizontaux des concentrations de NO2 à proximité des routes principales ont été observés dans un certain nombre d'études. Les concentrations à proximité des routes, sur celles-ci ou dans l'habitacle des véhicules étaient plusieurs fois supérieures aux concentrations de fond en milieu urbain dans ces études. Les variables du trafic routier sont aussi souvent des prédicteurs importants du NO2 dans l'air ambiant dans les modèles de régression de l'utilisation des terres et de l'exposition personnelle au NO2. Le NO2 à proximité des routes présente également un gradient vertical négatif : les concentrations augmentent à mesure que l'on se rapproche de la surface de la route.

L'émission localisée provenant de sources routières mène à une variabilité des concentrations de NO2 qui n'est pas prise en compte par le réseau régional de surveillance de la qualité de l'air existant. Cette variation a une incidence sur les estimations de l'exposition à l'échelle de la population et ajoute des erreurs de mesure de l'exposition dans les études épidémiologiques qui reposent sur les concentrations ambiantes utilisées comme indicateurs de l'exposition. Les concentrations élevées de NO2 à proximité des routes ou sur celles-ci augmentent également l'exposition de toute personne qui passe beaucoup de temps à de tels endroits.

Corrélations entre les autres polluants et le NO2 dans l'air ambiant

Les liens entre le NO2 dans l'air ambiant et les copolluants rejetés par les mêmes sources doivent être pris en compte au moment d'interpréter les résultats des études épidémiologiques à propos des effets sur la santé liés au NO2. L'attribution causale du NO2 est difficile, car les associations épidémiologiques peuvent refléter des corrélations avec d'autres polluants plutôt qu'un véritable lien de causalité avec le NO2. Dans la plupart des études, les concentrations ambiantes de NO2 sont modérément à fortement corrélées avec des polluants attribuables au trafic routier, tels que le monoxyde de carbone (CO) et les particules fines (PM2,5) et elles le sont moins avec des polluants qui sont plus régionaux par nature (p. ex. ozone [O3]) ou qui proviennent d'autres sources (p. ex. dioxyde de soufre [SO2]). Les corrélations sont également modérées entre l'exposition personnelle au NO2 et les concentrations ambiantes ou l'exposition personnelle à d'autres polluants liés à la combustion dans les zones urbaines, en particulier le CO, les PM2,5, les hydrocarbures aromatiques polycycliques, certains composés organiques volatils tels que le benzène et le 1,3-butadiène, et des composantes des particules, telles que le carbone élémentaire (CÉ) et le carbone organique.

Approche générale pour évaluer le poids de la preuve concernant les effets sur la santé

Les effets sur la santé du NO2 ont été examinés de manière approfondie dans un très grand nombre d'études, y compris les études épidémiologiques à propos des effets sur la santé associés au NO2, les études d'exposition contrôlée chez les humains effectuées sur des volontaires exposés au NO2 dans le cadre d'études en enceintes expérimentales et les études toxicologiques sur des animaux exposés au NO2 en laboratoire.

Dans le cadre de cette évaluation, les études épidémiologiques sur le NO2 dans l'air ambiant ont été davantage prises en compte par rapport aux études toxicologiques sur les animaux ou aux études d'exposition contrôlée chez les humains, pour plusieurs raisons : 1) les études épidémiologiques fournissent la méthode la plus directe pour évaluer les effets sur la santé de mélanges complexes en conditions réelles de polluants atmosphériques auxquels les gens sont exposés, 2) les populations humaines sont très hétérogènes comparativement aux populations d'animaux de laboratoire et elles englobent un vaste éventail de sensibilités, de maladies ou d'états de santé et d'expositions et 3) aucune extrapolation d'une espèce à l'autre n'est nécessaire.

Cependant, les résultats provenant d'études toxicologiques sur les animaux et particulièrement d'études d'exposition contrôlée chez les humains demeurent assez pertinents et font la lumière sur les résultats d'études épidémiologiques, notamment en ce qui concerne les mécanismes pathophysiologiques qui sont à l'origine des effets observés.

En outre, les études épidémiologiques sont des études observationnelles plutôt qu'expérimentales et, par conséquent, il peut exister des incertitudes quant à savoir si les effets signalés dans les études épidémiologiques sont réellement dus seulement au NO2 dans l'air ambiant. Le NO2 pourrait être le marqueur (en tout ou en partie) d'autres polluants atmosphériques, ou le lien observé pourrait même être le résultat de certains autres facteurs.

Pour évaluer le poids de la preuve indiquant que les relations épidémiologiques entre les effets sur la santé et le NO2 dans l'air ambiant sont des liens de causalité, il est nécessaire d'examiner les différentes sources de données simultanément et d'évaluer l'ensemble des données selon les critères établis pour déterminer la causalité. Dans cette évaluation, on examine les données relatives à diverses catégories d'effets sur la santé, en intégrant les résultats des études épidémiologiques disponibles, des études d'exposition contrôlée chez les humains ou des études toxicologiques sur les animaux. Ces données groupées sont ensuite évaluées pour différentes catégories d'effets sur la santé, en tenant compte des critères qui sont généralement utilisés pour déterminer si les associations observées sont causales, probablement causales, évocatrices, mais pas suffisamment pour conclure à un lien de causalité, etc.

Les points à considérer sont notamment les suivants :

  • la force de l'association, y compris l'importance et la précision des estimations des risques et leur signification statistique;
  • la robustesse des liens relativement aux spécifications des modèles et aux corrections pour tenir compte de possibles facteurs de confusion tels que les conditions météorologiques, les tendances temporelles et la présence de copolluants;
  • la constance des liens signalés d'une étude à l'autre et des divers plans d'étude utilisés par différents chercheurs, à différents endroits et différents moments;
  • la cohérence de la relation entre l'exposition au NO2 et les paramètres connexes dans des études toxicologiques sur les animaux, des études sur l'exposition humaine contrôlée et différents types d'études épidémiologiques, et entre ces études;
  • la plausibilité biologique des liens, compte tenu de ce que l'on sait de la dosimétrie du NO2, des types d'effets observés et des mécanismes d'action potentiels connexes, qui repose principalement sur des études toxicologiques sur les animaux et des études d'exposition contrôlée chez les humains.

Effets sur la fonction respiratoire à court terme

Dans le cadre d'études d'exposition contrôlée à court terme menées chez des adultes asthmatiques, l'exposition à des concentrations de NO2 proches de celles dans l'air ambiant a provoqué un éventail d'effets nocifs sur la fonction respiratoire, notamment une diminution de la fonction pulmonaire, une augmentation de l'hyperréactivité bronchique (HRB) et une inflammation des voies respiratoires. La plupart de ces effets, ainsi que l'augmentation des symptômes respiratoires liés à l'asthme, ont également été associés au NO2 dans l'air ambiant dans les études épidémiologiques menées chez les enfants asthmatiques. Dans plusieurs études épidémiologiques, les symptômes respiratoires chez les enfants asthmatiques étaient également liés au NO2 dans l'air intérieur et les interventions visant à réduire le NO2 provenant des appareils au gaz présents dans les salles de classe faisaient diminuer les symptômes respiratoires. Les mécanismes à l'origine de ces effets ont été étudiés chez les humains et les animaux, et des voies biologiquement plausibles ont été proposées pour expliquer ces effets.

Dans de nombreuses études épidémiologiques basées sur la population, les concentrations de NO2 dans l'air ambiant étaient associées de façon significative et indépendante à l'augmentation des hospitalisations pour troubles respiratoires et pour de l'asthme et à celle des visites à la salle d'urgence (VSU) pour cause d'asthme. Ces résultats concordent fortement avec les données expérimentales et épidémiologiques concernant la diminution de la fonction pulmonaire, l'augmentation des symptômes respiratoires, l'inflammation des voies respiratoires et l'intensification de l'HRB chez les asthmatiques, et ils fournissent une indication des répercussions sur la santé publique de l'ensemble de la population découlant des effets sur les voies respiratoires observés dans le cadre d'études expérimentales et épidémiologiques.

Ainsi, plusieurs sources de données indiquent que le NO2 dans l'air ambiant est associé à une exacerbation de l'asthme. Les liens épidémiologiques établis avec les résultats liés à l'asthme satisfont aux critères suivants : force de l'association, constance, robustesse et cohérence. En parallèle avec les résultats expérimentaux chez les animaux et les humains, les données globales indiquent qu'il existe un lien de causalité entre l'exposition à court terme au NO2 dans l'air ambiant aux concentrations actuelles et une morbidité accrue associée à l'asthme (notamment une inflammation et une hyperréactivité bronchique, une augmentation des symptômes respiratoires, une hospitalisation pour de l'asthme et des VSU pour cause d'asthme).

Effets cardiovasculaires à court terme

Dans des études épidémiologiques basées sur la population, un lien cohérent et significatif existait entre le NO2 dans l'air ambiant et la mortalité accrue d'origine cardiovasculaire, les hospitalisations et les VSU, mais ces résultats en matière de morbidité étaient aussi souvent liés à d'autres polluants. En outre, les risques liés au NO2 étaient souvent atténués par la correction tenant compte des copolluants ou on a utilisé des modèles sans copolluant.

Dans certaines études par panel et études d'exposition contrôlée chez les humains, on a observé une diminution de la variabilité de la fréquence cardiaque, une modification de la repolarisation ventriculaire et une augmentation des biomarqueurs inflammatoires ou de la coagulation liées au NO2. Cependant, les résultats tirés de ce petit ensemble de données étaient quelque peu contradictoires et l'éventail des effets cardiovasculaires liés au NO2 n'a pas été bien caractérisé.

Étant donné les questions quant à l'indépendance des effets liés au NO2 et des données à l'appui limitées, les données probantes globales sont évocatrices, mais pas suffisantes pour conclure à un lien de causalité entre l'exposition à court terme au NO2 dans l'air ambiant et les effets cardiovasculaires.

Mortalité liée à une exposition de courte durée

De nombreuses études épidémiologiques menées selon différents plans ont établi des liens indépendants entre l'exposition de courte durée au NO2 dans l'air ambiant et l'augmentation de la mortalité non accidentelle totale, d'origine cardiopulmonaire, cardiovasculaire et respiratoire. Ces associations ont été observées dans des villes de diverses régions du monde, en présence de régimes climatiques, de mélanges de polluants et de conditions socioéconomiques différents. Cependant, la cohérence des résultats épidémiologiques en ce qui concerne la morbidité liée au NO2 qui pourrait être associée à une mortalité d'origine cardiovasculaire et respiratoire est quelque peu limitée, bien qu'il existe des données probantes pour plusieurs éléments dans les séquences d'événements qui pourraient donner lieu à une mortalité accrue d'origine cardiovasculaire et respiratoire. Il existe également des indications de mécanismes d'action plausibles (quoique non spécifiques) pour la mortalité causée par des troubles cardiovasculaires ou respiratoires importants (infarctus du myocarde, maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC) et infections respiratoires).

Dans l'ensemble, les liens avec la mortalité non accidentelle totale, la mortalité cardiopulmonaire totale et, dans une moindre mesure, avec la mortalité d'origine cardiovasculaire et respiratoire affichent clairement une force d'association, de la constance et de la robustesse, mais elles manquent de cohérence pour certains aspects. On a conclu qu'il existe un lien de causalité probable entre l'exposition de courte durée au NO2 dans l'air ambiant, aux concentrations actuelles, et ces catégories de mortalité.

Morbidité respiratoire à long terme

Dans les études épidémiologiques, l'exposition de longue durée au NO2 dans l'air ambiant était associée à des effets néfastes pour la fonction respiratoire, en particulier chez les enfants, y compris une diminution des mesures de la fonction pulmonaire et une diminution du développement de la fonction pulmonaire. Chez les enfants, plusieurs études de cohortes ont également révélé des liens entre l'exposition de longue durée au NO2 et le développement de l'asthme ou de réactions allergiques. L'exposition de longue durée à des concentrations de NO2 semble également augmenter l'incidence de l'asthme chez les adultes. Cependant, une certaine incertitude persiste quant au rôle possible d'autres polluants concomitants dans les effets sur la fonction respiratoire liés au NO2.

Les liens épidémiologiques établis avec certains résultats en matière de santé respiratoire satisfont aux critères de constance, de force d'association et de cohérence dans toutes les disciplines, et certains signes de robustesse et de plausibilité biologique ont également été observés. Cependant, compte tenu des questions quant au rôle possible des copolluants, les données globales indiquent un lien de causalité probable entre les expositions de longue durée aux concentrations actuelles de NO2 ou de NOx dans l'air ambiant et les effets sur la fonction respiratoire liés au développement de l'asthme ou de maladies allergiques.

Autres effets à long terme

Dans l'ensemble, les données disponibles limitées sont évocatrices, mais pas suffisantes pour conclure à un lien de causalité entre l'exposition de longue durée au NO2 dans l'air ambiant et chacun des effets cardiovasculaires, des effets cancérogènes et connexes, la mortalité et les effets sur la fonction reproductrice et le développement. Il existe, pour chacun de ceux-ci, des associations importantes liées au NO2 dans l'air ambiant dans certaines études épidémiologiques, mais la base de données fait défaut à plusieurs égards. Il est donc nécessaire d'effectuer plus de recherches dans ce domaine.

Effets émergents

Un certain nombre d'autres effets nouveaux associés au NO2 méritent d'être examinés plus à fond, notamment ceux touchant le système nerveux central et d'autres résultats en matière de morbidité (diabète, appendicite, maladie intestinale inflammatoire, otite moyenne, ostéoporose et polyarthrite rhumatoïde), afin de déterminer si ces effets s'observent de façon constante aux concentrations pertinentes. Les données nouvelles, selon lesquelles le polymorphisme dans certains gènes peut influencer le lien entre les expositions aux polluants atmosphériques et les effets sur la morbidité, indiquent le rôle potentiel d'une telle modification des effets génétiques dans certaines populations à risque, et des recherches supplémentaires dans ce domaine contribueraient à une meilleure compréhension de ces interactions gènes-environnement.

Effet de confusion potentiel des copolluants

La présence d'autres copolluants, en particulier ceux qui proviennent des mêmes sources que le NO2, comme le trafic routier, complique l'interprétation des résultats des études épidémiologiques à propos des effets sur la santé liés au NO2. De plus, l'attribution causale du NO2 est difficile, car les associations épidémiologiques peuvent refléter des corrélations avec d'autres polluants plutôt qu'un véritable lien de causalité avec le NO2. En ce qui concerne les effets sur la santé pour lesquels le poids de la preuve est relativement important (c.-à-d. lien de causalité ou un lien de causalité probable), les risques liés au NO2 se sont généralement maintenus après une correction tenant compte des copolluants. Cela a été observé le plus souvent dans des modèles incluant des polluants atmosphériques courants tels que les PM10, l'O3 et le SO2. Cependant, les estimations des effets du NO2 étaient aussi généralement insensibles à la correction pour tenir compte des polluants attribuables au trafic routier, y compris le monoxyde de carbone (CO), les PM2,5 et, dans un nombre réduit d'études, le NO, les particules ultrafines, le carbone élémentaire (CÉ) ou le carbone noir (CN) ou les métaux particulaires, bien que les polluants attribuables au trafic routier n'aient pas été étudiés de façon approfondie à cet égard.

Sous-groupes présentant une sensibilité ou une exposition accrue au NO2 dans l'air ambiant

Les personnes atteintes de certaines maladies préexistantes semblent être sensibles au NO2 dans l'air ambiant. Plusieurs sources de données provenant d'études d'exposition contrôlée chez les humains et d'études épidémiologiques indiquent que les asthmatiques forment un sous-groupe sensible. Certaines données (bien que plus limitées par rapport à celles relatives à l'asthme) indiquent que les personnes atteintes de MPOC semblent être également plus sensibles au NO2.

L'âge est aussi indéniablement lié à la sensibilité. Les résultats des études épidémiologiques indiquent que les enfants, en particulier les asthmatiques, sont plus à risque de subir des effets sur la capacité respiratoire causés par l'exposition de courte et de longue durée au NO2. Les personnes âgées semblent être plus sensibles aux effets à court terme du NO2 par rapport aux hospitalisations, aux VSU et d'autres consultations médicales pour troubles respiratoires, ainsi que par rapport à la mortalité toutes causes confondues et d'origine respiratoire. Les personnes âgées ont également présenté des risques accrus de mortalité et de morbidité d'origine cardiovasculaire dans des études épidémiologiques.

Les concentrations de NO2 dans l'air ambiant augmentent près des sources locales, en particulier sur les routes, à proximité de celles-ci et dans les microenvironnements à l'intérieur des véhicules dans le cas de routes à circulation intense. Les expositions au NO2 peuvent être élevées chez les personnes qui passent beaucoup de temps à de tels endroits. Il s'agit notamment des personnes qui effectuent de longs trajets en voiture ou qui sont exposées au cours de leur emploi (p. ex. les camionneurs), qui travaillent ou se déplacent à proximité de routes principales (p. ex. les ouvriers travaillant à la construction de routes, les cyclistes) ou qui résident, travaillent, vont à l'école, etc. dans des bâtiments situés près de telles routes.

Les personnes qui effectuent une activité physique intense inhaleraient aussi une quantité plus importante de NO2.

Conséquences de l'erreur de mesure de l'exposition

La relation entre les concentrations ambiantes et l'exposition personnelle au NO2 provenant de l'air ambiant variera en fonction de l'influence d'un certain nombre de facteurs, y compris la variabilité spatiale et temporelle des concentrations de NO2, les profils d'activité temporelle, le renouvellement d'air du bâtiment et peut-être les artéfacts liés aux mesures et les méthodes d'analyse. L'influence de ces facteurs entraîne une erreur de mesure de l'exposition et peut introduire un biais dans les estimations des risques des études épidémiologiques qui sont fondées sur des concentrations ambiantes. Il peut s'agir d'un biais par excès ou par défaut, mais il est plus fréquent de sous-estimer les risques, ce qui rend plus difficile la détection d'un effet sur la santé. Plusieurs études réalisées à Atlanta (Géorgie) ont examiné le biais potentiel découlant de l'utilisation d'appareils de surveillance fixes sur les estimations des risques à court terme de visites à la salle d'urgence pour maladies cardiovasculaires qui en résultent. Leurs résultats ont indiqué que l'hétérogénéité spatiale des polluants atmosphériques était une source bien plus importante d'erreur de mesure que l'imprécision des instruments. En ce qui concerne le NO2, la plupart des résultats semblent indiquer que cette erreur de mesure a considérablement atténué les estimations des risques, entraînant même parfois une perte de la signification statistique.

Par conséquent, cette source d'incertitude ne devrait pas modifier une des principales conclusions de cette évaluation fondées principalement sur les études épidémiologiques selon lesquelles plusieurs catégories d'effets nocifs sur la santé sont, de façon constante et indépendante, associées aux concentrations ambiantes de NO2.

Répercussions sur la santé publique

Les effets associés au NO2 ont été observés dans des études épidémiologiques menées au Canada et dans d'autres pays à des concentrations de NO2 présentes au Canada et qui se situent bien en deçà des normes et objectifs existants relatifs à la qualité de l'air ambiant. En ce qui concerne les effets sur la santé pour lesquels le poids de la preuve et la puissance statistique sont les plus importants (c.-à-d. la mortalité, les hospitalisations pour troubles respiratoires ou pour de l'asthme et les visites à la salle d'urgence pour de l'asthme dues à l'exposition de courte durée au NO2 dans l'air ambiant, et la morbidité respiratoire due à l'exposition de longue durée au NO2 dans l'air ambiant), les concentrations ambiantes moyennes ou médianes auxquelles les effets sont observés recoupent celles mesurées dans tous les types de stations du RNSPA, des stations dans des centres non urbains aux stations influencées par les transports et aux stations potentiellement influencées par des sources industrielles. Par conséquent, les effets nocifs sur la santé dans les études épidémiologiques se produisent à des concentrations ambiantes de NO2 qui sont couramment observées au Canada.

Dans la plupart des études ayant examiné la forme de la relation concentration-réponse pour la mortalité ou les consultations médicales dues à une exposition de courte durée au NO2, il existait une relation presque linéaire, sans indication précise de seuil. Dans l'ensemble, les données probantes actuelles indiquent que si un seuil établi pour la population générale existe pour les effets sur la santé du NO2, il est probablement proche de la limite inférieure des concentrations ambiantes de NO2. Par conséquent, les données disponibles indiquent que toute augmentation des concentrations ambiantes de NO2 s'accompagne d'un risque accru d'effets graves sur la santé pouvant aller jusqu'à la mortalité.

Bien que les risques d'effets sur la santé liés au NO2 dans l'air ambiant soient relativement faibles en regard des normes épidémiologiques classiques, toute la population est exposée et les sous-populations qui présentent une plus grande sensibilité ou exposition au NO2 (incluant les enfants, les personnes âgées, les personnes atteintes d'asthme ou de MPOC, les personnes effectuant une activité physique intense et celles qui passent beaucoup de temps près de routes principales) forment une proportion appréciable de la population. En outre, les répercussions sur la santé qui ont fait l'objet de la plupart des évaluations, notamment la mortalité, les hospitalisations et les visites à la salle d'urgence, représentent des conséquences graves. Qui plus est, il ne s'agit que de la partie émergée de l'iceberg dans la pyramide des effets sur la santé associés au NO2 dans l'air ambiant, et la morbidité non mesurée représente aussi des répercussions et des coûts importants pour la santé publique. Par conséquent, les répercussions sur la santé publique du NO2 dans l'air ambiant sont importantes et devraient le demeurer à mesure que la population vieillit et que le bassin de personnes âgées augmente, particulièrement à la lumière des taux plus élevés de mortalité et de maladie sous-jacents dans ce groupe d'âge.

Durée de l'exposition

En ce qui concerne les durées d'exposition qui sont associées aux effets sur la santé, les types d'effets sur la santé, les risques estimés de ces effets et la constance des résultats sont sensiblement les mêmes pour les concentrations ambiantes de NO2 quotidiennes maximales sur 1 h et moyennes sur 24 h. On a également relevé les mêmes types d'effets sur la santé pour d'autres moyennes sur des périodes plus courtes que 24 h (p. ex. sur 3 h). Ces ressemblances ne sont pas surprenantes, étant donné que ces diverses mesures d'exposition de courte durée présentent une forte corrélation entre elles. En outre, le recoupement des concentrations ambiantes au Canada et des concentrations associées aux effets sur la santé dans les études épidémiologiques est semblable pour les concentrations de NO2 quotidiennes maximales sur 1 h et moyennes sur 24 h, et même pour les concentrations annuelles ou moyennes à plus long terme. En bref, les renseignements relatifs aux effets sur la santé associés aux concentrations ambiantes de NO2 n'offrent pas un appui solide à aucune des mesures d'exposition de courte durée par rapport aux autres sur lesquels repose l'édiction des NCQAA. Cependant, les différences entre les types d'effets sur la santé qui sont liés à une exposition de courte durée par rapport à une exposition de longue durée au NO2 dans l'air ambiant semblent indiquer que des normes sont nécessaires pour chacune de ces durées afin de fournir une protection contre les effets connexes sur la santé.

Soutien à l'élaboration de nouvelles NCQAA

L'évaluation des risques a été effectuée pour recueillir de l'information en vue d'élaborer de nouvelles NCQAA concernant le NO2 qui remplaceront les objectifs nationaux afférents à la qualité de l'air ambiant (ONQAA). On recommande l'élaboration de nouvelles NCQAA concernant le NO2 dans l'air ambiant en tenant compte des principales conclusions suivantes découlant de l'évaluation des risques pour la santé :

  • il existe de fortes indications selon lesquelles le NO2 dans l'air ambiant entraîne des effets sur la fonction respiratoire à court terme et à long terme ainsi qu'une mortalité à court terme. De plus, les données sont évocatrices de son lien avec un grand nombre d'autres conséquences néfastes pour la santé;
  • ces effets ont été observés dans le cadre d'études épidémiologiques à des concentrations de NO2 couramment présentes au Canada, bien en deçà des concentrations des ONQAA existants et d'autres normes de qualité du milieu ambiant, telles que les directives provinciales ou territoriales et les normes nationales américaines de qualité de l'air ambiant;
  • dans les études examinant la forme de la courbe concentration-réponse, il existe une relation presque linéaire entre les concentrations ambiantes de NO2 et les effets sur la santé, sans indication précise d'un seuil. Ainsi, à la lumière des données probantes, il convient de supposer que toute augmentation des concentrations ambiantes de NO2 dans l'air ambiant s'accompagne d'un risque accru d'effets sur la santé pouvant aller jusqu'à la mortalité;
  • les données sur la santé appuient l'établissement de normes à court terme et à long terme visant à fournir une protection contre la série complète d'effets sur la santé associés au NO2 dans l'air ambiant.

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