Projet de décision d’examen spécial PSRD2018-02, Examen spécial des risques posés par le thiaméthoxame pour les invertébrés aquatiques : Projet de décision aux fins de consultation

Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire
Le 15 août 2018
ISSN : 2561-6277 (version PDF)
Numéro de catalogue : H113-30/2018-1F-PDF (version PDF)

Résumé du Web

Table des matières

• Introduction
• Utilisations du thiaméthoxame au Canada
• Aspect préoccupant qui a suscité l’examen spécial
• Évaluation de l’aspect préoccupant par l’ARLA
• Projet de décision d’examen spécial concernant le thiaméthoxame
• Prochaines étapes

Introduction

Après avoir mis à jour son évaluation des risques pour les invertébrés aquatiques, Santé Canada consulte maintenant la population canadienne sur le Projet de décision d’examen spécial concernant le thiaméthoxame, un pesticide de la classe des néonicotinoïdes.

L’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) a entrepris un examen spécial du thiaméthoxame en vertu du paragraphe 17(1) de la Loi sur les produits antiparasitaires en se fondant sur une analyse préliminaire des renseignements disponibles sur les concentrations et la fréquence de détection du thiaméthoxame dans les milieux aquatiques.

Comme l’exige le paragraphe 18(4) de la Loi sur les produits antiparasitaires, l’ARLA a évalué l’aspect préoccupant qui a motivé l’examen spécial des produits antiparasitaires contenant du thiaméthoxame. Cet examen spécial vise à étudier un aspect préoccupant, à savoir évaluer le risque potentiel pour les invertébrés aquatiques exposés au thiaméthoxame appliqué comme traitement des semences, traitement foliaire ou traitement du sol.

Utilisations du thiaméthoxame au Canada

L’annexe I du document Projet de décision d’examen spécial PSRD2018-02, Examen spécial des risques posés par le thiaméthoxame pour les invertébrés aquatiques : Projet de décision aux fins de consultation énumère tous les produits à base de thiaméthoxame utilisés à l’extérieur à des fins agricoles et sur les plantes ornementales qui sont homologués en vertu de la Loi sur les produits antiparasitaires en date de mai 2018 et qui font l’objet du présent examen spécial. Le thiaméthoxame est présent dans 18 préparations commerciales agricoles auxquelles les invertébrés aquatiques peuvent être exposés. Ces produits peuvent être utilisés dans les serres (poivrons et plantes ornementales), pour l’enrobage des semences (diverses céréales, légumineuses à grains et cultures légumières, tournesol, et pommes de terre pour le traitement des plantons), en pulvérisation foliaire (plantes ornementales, pommes de terre, fruits à pépins, fruits à noyau, petits fruits, mûres et framboises et diverses cultures légumières), ou par mouillage en sillons (pommes de terre, diverses cultures légumières). Les applications par pulvérisation foliaire peuvent être faites par rampe d’aspersion, pulvérisation pneumatique ou pulvérisation aérienne, selon la culture. L’annexe II du document PSRD2018-02 indique toutes les utilisations homologuées des préparations commerciales contenant du thiaméthoxame qui font l’objet du présent examen spécial.

Aspect préoccupant qui a suscité l’examen spécial

Cet examen spécial a été amorcé le 23 novembre 2016, en même temps que la publication de la décision de réévaluation cyclique proposée par l’ARLA pour l’imidaclopride (PRVD2016-20). L’évaluation des risques que pose l’imidaclopride pour le milieu aquatique a mis en évidence des risques préoccupants pour les invertébrés aquatiques. Le thiaméthoxame partage le même mode d’action avec un profil de toxicité similaire. Les données de surveillance disponibles indiquent que le thiaméthoxame est détecté dans les milieux aquatiques à des concentrations et à des fréquences pouvant présenter un risque pour les invertébrés aquatiques. Une évaluation préliminaire a été réalisée afin de déterminer si un examen spécial était nécessaire. D’après les renseignements disponibles sur le devenir, la toxicité et la surveillance du thiaméthoxame dans l’eau, il y avait des motifs raisonnables de croire que le risque potentiel pour les invertébrés aquatiques, découlant de l’utilisation du thiaméthoxame, pourrait dépasser le niveau préoccupant établi par l’ARLA dans les conditions d’utilisation actuelles.

Le lancement de l’examen spécial a été annoncé dans le document REV2016-17, Annonce d’examens spéciaux : Risques environnementaux potentiels pour les invertébrés aquatiques découlant de l’utilisation de la clothianidine et du thiaméthoxame. Cet examen spécial vise à étudier un aspect préoccupant, à savoir évaluer le risque potentiel pour les invertébrés aquatiques exposés au thiaméthoxame appliqué comme traitement des semences, traitement foliaire ou traitement du sol.

Évaluation de l’aspect préoccupant par l’ARLA

L’ARLA exigeait que le titulaire d’homologation soumette toutes les données disponibles sur le devenir du thiaméthoxame dans l’environnement, y compris les données de surveillance sur les eaux de surface au Canada et sur sa toxicité pour les invertébrés aquatiques. Les mêmes renseignements ont été demandés aux provinces et autres ministères et organismes fédéraux pertinents, conformément au paragraphe 18(2) de la Loi sur les produits antiparasitaires. L’ARLA a reçu l’information requise au sujet de l’aspect préoccupant.

Les données supplémentaires fournies par le titulaire d’homologation comprenaient des renseignements sur le devenir environnemental du thiaméthoxame dans le sol et l’eau, ainsi que sur l’écotoxicité du thiaméthoxame et de ses principaux produits de transformation pour les invertébrés aquatiques. Les données sur la toxicité du thiaméthoxame pour les invertébrés aquatiques générées par Environnement et Changement climatique Canada et par des chercheurs universitaires ont été incluses pour cet examen spécial. Une analyse documentaire exhaustive des données actuelles pertinentes pour l’examen spécial a fourni des données supplémentaires sur l’écotoxicité du thiaméthoxame. Au total, l’ARLA a tenu compte des données sur l’écotoxicité aiguë pour 44 espèces d’invertébrés aquatiques et des données sur la toxicité chronique pour 8 espèces, ainsi que des critères d’effet basés sur la communauté de niveau supérieur, établis par deux études. Aucun incident environnemental mettant en cause les invertébrés aquatiques n’a été relevé en Amérique du Nord.

L’ARLA a reçu des données publiées et inédites sur la surveillance de l’eau douce au Canada de la part des gouvernements fédéral et provinciaux, de chercheurs universitaires, d’entreprises titulaires et de membres du Groupe de travail multipartite sur la surveillance environnementale d’Agriculture et Agroalimentaire Canada. Les données sur la surveillance de l’eau douce consistent en plusieurs ensembles de données robustes, associées la plupart du temps à un grand nombre d’échantillons prélevés à des fréquences élevées dans des zones agricoles entre 2010 et 2017.

Principales constatations

L’évaluation environnementale a montré que, dans les milieux aquatiques au Canada, le thiaméthoxame est mesuré à des concentrations nocives pour les insectes aquatiques. Ces insectes comptent pour une part importante de l’écosystème, notamment comme source de nourriture pour les poissons, les oiseaux et d’autres animaux. D’après les renseignements actuellement disponibles, la plupart des utilisations du thiaméthoxame à l’extérieur au Canada ne sont pas durables. Pour de plus amples renseignements sur le projet de décision de Santé Canada concernant l’examen spécial du thiaméthoxame, voir la section Projet de décision d’examen spécial concernant le thiaméthoxame.

Conclusions de l’évaluation des risques

En matière d’évaluation des risques pour l’environnement, l’ARLA a pour politique de tenir compte à la fois des données de surveillance (lorsqu’elles sont disponibles) et des concentrations estimées dans l’environnement (CEE) générées à l’aide de modèles pour l’eau dans le cadre de son évaluation globale des risques. Bien que les données de surveillance valides soient considérées comme préférables aux CEE modélisées, l’importance accordée à ces données varie selon les circonstances.

Pour déterminer les critères d’effet toxicologique les plus appropriés qui seront pris en considération dans l’évaluation des risques, l’ARLA tient compte des études soumises par les titulaires d’homologation et des études accessibles au public. Les données sur l’écotoxicité sont examinées au moyen d’une approche par niveaux qui comprend les éléments suivants :

le critère d’effet pour l’espèce traduisant la plus grande sensibilité;

une distribution de la sensibilité des espèces lorsque suffisamment de points de données sont disponibles;

des études en mésocosme qui prennent en compte les effets à l’échelle de la communauté.

Pour le thiaméthoxame, les distributions de la sensibilité des espèces (DSE) pour l’exposition aiguë et chronique dans les milieux d’eau douce ont été déterminées. De plus, deux études acceptables en mésocosme étaient disponibles pour évaluer les concentrations auxquelles des effets à l’échelle de la communauté seraient observés. Pour l’évaluation de la toxicité chronique, les critères d’effet pour l’étude en mésocosme des espèces traduisant la plus grande sensibilité, les DSE et les données pour l’espèce individuelle traduisant la plus grande sensibilité ont été pris en compte selon une approche fondée sur le poids de la preuve dans l’évaluation des risques.

L’un des principaux produits de transformation du thiaméthoxame dans le sol est la clothianidine, un autre insecticide homologué qui est également toxique pour les invertébrés aquatiques. La conclusion de l’évaluation des risques que représente le thiaméthoxame tient compte du thiaméthoxame seulement, et non de la combinaison du thiaméthoxame et de la clothianidine. Étant donné que les deux pesticides sont homologués pour une utilisation sur plusieurs des mêmes cultures, il est souvent impossible de déterminer si les concentrations de clothianidine mesurées dans l’eau résultent de la transformation du thiaméthoxame, de l’utilisation de la clothianidine comme insecticide, ou d’une combinaison des deux. Parallèlement à cet examen spécial du risque que représente le thiaméthoxame pour les invertébrés aquatiques, l’ARLA a effectué un examen spécial distinct du risque posé par la clothianidine pour les invertébrés aquatiques. L’examen spécial de la clothianidine est publié dans le document PSRD2018-01.

L’évaluation des risques fondée sur les résultats de la modélisation indique que l’exposition au thiaméthoxame pose un risque aigu minimal pour les invertébrés d’eau douce. Cependant, sur une base chronique, l’exposition au thiaméthoxame pose un risque pour les invertébrés d’eau douce. En règle générale, les intrants et les hypothèses utilisés pour la modélisation sont prudents et les CEE générées sont susceptibles d’être plus élevées que les concentrations réelles présentes dans les plans d’eau. En ce qui concerne le thiaméthoxame, cependant, la plage des CEE pour les eaux de surface prévue par la modélisation chevauche la plage des concentrations mesurées dans les plans d’eaux de surface.

Les concentrations de thiaméthoxame mesurées dans les plans d’eau canadiens n’ont pas dépassé le niveau préoccupant aigu. Les risques chroniques pour les invertébrés d’eau douce ont été établis à partir d’ensembles canadiens de données de surveillance robustes. Les données de surveillance fournissent probablement une sous-estimation de l’exposition aiguë, car en général, l’échantillonnage ne saisit pas les concentrations maximales.

Les concentrations de thiaméthoxame détectées dans les régions de culture suivantes dépassaient fréquemment le critère d’effet chronique DSE pour les invertébrés d’eau douce (les méthodes d’application homologuées de la clothianidine sont indiquées entre parenthèses) :

• régions de culture du maïs et du soja (traitement des semences),
• pommes de terre (traitement des semences, application au sol ou pulvérisation foliaire),
• légumes (traitement des semences ou pulvérisation foliaire, selon le type).

Les concentrations de thiaméthoxame dépassaient parfois le critère d’effet chronique DSE pour les invertébrés d’eau douce dans quelques plans d’eau situés dans des régions où les vergers occupent une grande partie de la superficie cultivée dans le bassin hydrographique.

Le critère d’effet chronique DSE a été dépassé dans les milieux humides principalement associés aux utilisations pour le traitement des semences dans les Prairies. Cependant, il y avait une incertitude quant à la durée de l’exposition. Par conséquent, dans la région des Prairies, les données probantes sont insuffisantes pour conclure que les utilisations du thiaméthoxame sont acceptables.

Les concentrations détectées dans certains plans d’eau dans des régions où l’on cultive les pommes de terre, et dans des régions de culture mixte de légumes et de maïs/soja ont dépassé le niveau préoccupant établi par l’ARLA selon le critère d’effet en mésocosme, et ce, pendant des semaines, voire des mois. Cette exposition chronique peut avoir des effets à l’échelle des communautés, y compris des changements dans l’abondance et la richesse des espèces d’insectes. Des concentrations de thiaméthoxame dépassant le critère d’effet à l’échelle de la communauté ont également été détectées dans d’autres régions de culture, mais elles étaient sporadiques et de courte durée. La présence de concentrations de thiaméthoxame égales ou supérieures au critère d’effet à l’échelle de la communauté peut avoir des répercussions importantes sur la structure des invertébrés de la communauté, ce qui est l’un des principaux objectifs de protection de l’ARLA.

Aucune donnée canadienne de surveillance du thiaméthoxame dans les eaux marines ou estuariennes n’était disponible en vue d’exclure les risques pour les invertébrés marins et estuariens.

Projet de décision d’examen spécial du thiaméthoxame

L’évaluation des renseignements scientifiques disponibles concernant l’aspect préoccupant a révélé que la plupart des produits homologués contenant du thiaméthoxame visés par cet examen spécial posent des risques environnementaux dont l’acceptabilité n’a pas été démontrée. Par conséquent, en vertu de la Loi sur les produits antiparasitaires et compte tenu de l’évaluation des renseignements scientifiques actuellement disponibles, Santé Canada propose d’abandonner sur une période de trois à cinq ans toutes les utilisations extérieures du thiaméthoxame sur les cultures vivrières et fourragères (catégories d’utilisation 13 et 14), y compris le traitement des semences (catégorie d’utilisation 10) et l’application sur les plantes ornementales d’extérieur (catégorie d’utilisation 27), conformément à la Directive d’homologation DIR2018-01, Politique sur la révocation de l’homologation et la modification de l’étiquette à la suite d’une réévaluation et d’un examen spécial. L’ARLA étudiera d’autres propositions de gestion des risques, pourvu que ces propositions offrent des niveaux acceptables de protection de l’environnement dans le même délai.

Des mesures additionnelles d’atténuation des risques peuvent s’avérer nécessaires pendant la période d’abandon graduel (annexe VIII du document PSRD2018-02).

Les risques pour les invertébrés aquatiques associés aux utilisations du thiaméthoxame en serre (catégories d’utilisation 5 et 6) sont acceptables, et l’ARLA propose de maintenir l’homologation de ces utilisations en serre, pourvu que les instructions concernant la gestion des eaux usées des serres figurant sur l’étiquette des produits soient respectées.

Le Projet de décision d’examen spécial est ouvert à la consultation publique pendant 90 jours à compter de sa date de publication. L’ARLA invite le public à soumettre ses commentaires sur le Projet de décision d’examen spécial pour le thiaméthoxame, y compris les propositions qui permettraient d’approfondir davantage l’évaluation et la gestion des risques. Lorsque l’ARLA aura pris en considération les commentaires et les renseignements reçus au cours de la période de consultation publique, elle publiera une décision finale.

Prochaines étapes

L’ARLA tiendra compte de tous les commentaires reçus du public en réponse au présent document de consultation sur l’examen spécial du thiaméthoxame avant de rendre une décision finale à l’aide d’une approche scientifique. L’ARLA publiera ensuite un document de décision d’examen spécial qui comprendra la décision, les motifs de celle-ci, un résumé des commentaires reçus sur la décision proposée ainsi que sa réponse à ces commentaires.