ARCHIVÉE - Évaluation sommative du Programme canadien de nutrition prénatale 2004-2009

 

Résumé

Vue d’ensemble

Annoncé en 1994, le Programme canadien de nutrition prénatale (PCNP) octroie un financement à long terme aux organismes et aux coalitions communautaires afin qu’ils mettent sur pied ou améliorent des services qui répondent aux besoins des femmes enceintes à risque, de leurs enfants et de leurs familles dans le but de promouvoir une grossesse en santé et d’améliorer les résultats pour les bébés. Le programme finance des services communautaires complets et il est particulièrement conçu pour faire fond sur les programmes de santé prénatale existants ou établir de tels programmes lorsqu’il n’y en a pas.

Le PCNP n’est pas un programme universel; au lieu il cible particulièrement les femmes qui sont confrontées à des situations de vie difficiles telles que la pauvreté, la grossesse chez les adolescentes, l’abus d’alcool ou d’autres drogues, la violence familiale, l’isolement social et géographique et l’arrivée récente au Canada. Les projets du PCNP accroissent également la disponibilité de services prénataux adaptés sur le plan culturel pour les femmes autochtones qui vivent hors des réserves. Ler PCNP offre un soutien financier à des organisations communautaires et sans but lucratif qui appuient la prestation de services de prévention et d’intervention précoce. À l’heure actuelle, 330 projets du PCNP sont en oeuvre dans plus de 2000 collectivités dans toutes les régions du Canada. Chaque projet communautaire fournit une gamme complète de services pouvant inclure: des suppléments alimentaires; un counselling sur la nutrition et le mode de vie; l’éducation en matière de soins prénataux, d’allaitement maternel, d’attachement du nourrisson et de développement de l’enfant; le soutien social et le développement des compétences, et l’aiguillage vers des services sociaux et de santé appropriés là où il y en a.

Contexte et objet de l’évaluation

L’évaluation continue fait partie intégrante du processus d’amélioration et d’imputabilité des programmes du PCNP depuis qu’il a été créé. Le présent rapport d’évaluation sommative donne une évaluation complète du programme pour la période de 2004 à 2009 et en cerne les forces et les faiblesses afin d’éclairer son amélioration continue. La présente évaluation sommative satisfait également à une exigence en matière de production de rapport du Cadre de gestion et de responsabilisation axé sur les résultats (CGRR) du programme. L’évaluation sommative du PCNP se concentre sur sept questions du CGRR, énumérées ci-dessous, portant sur la pertinence, l’incidence et la rentabilité du programme tel qu’indiqué dans la Politique sur l’évaluation de 2001 du Conseil du Trésor.

  1. Dans quelle mesure la santé des femmes enceintes, de leurs bébés et de leurs familles continuent-elle à être menacée?
  2. Le PCNP est-il conforme aux engagements intérieurs et internationaux du gouvernement fédéral concernant la santé de la population et les disparités existant sur ce plan pour les femmes enceintes, leurs bébés et leurs familles?
  3. D’autres intervenants continuent-ils d’attacher de la valeur au rôle que peut jouer le gouvernement fédéral dans la lutte contre les disparités existant sur le plan de la santé pour les femmes enceintes, leurs bébés et leurs familles?
  4. Dans quelle mesure les projets du PCNP atteignent-ils avec succès les femmes enceintes confrontées à des situations à risque?
  5. Quelle a été la contribution du PCNP à l’amélioration de la santé et à la réduction des disparités existant sur ce plan pour les femmes enceintes et les bébés confrontés à des situations à risque?
  6. Dans quelle mesure les projets du PCNP adoptent-ils une approche axée sur la santé de la population?
  7. Ce programme en donne-t-il aux contribuables canadiens pour leur argent?

Méthodologie

La présente évaluation sommative est une méta-analyse des constatations de divers rapports d’évaluation du PCNP produits entre 2004 et 2009. Étant donné que les études sur lesquelles s’appuie la présente évaluation ont été menées en utilisant diverses méthodes, ses résultats ont été obtenus en utilisant une approche combinant plusieurs méthodes. En outre, les données sur le PCNP tant qualitatives que quantitatives ont été analysées.

Les données qui ont été utilisées dans le présent rapport ont principalement été obtenues à l’aide de trois instruments nationaux de collecte de données qui ont continuellement recueilli des données sur les projets, notamment:

  • Le questionnaire du projet (QP): Un instrument national qui recueille des données sur le rendement des projets.
  • Le questionnaire du client (QC): Un instrument national conçu pour recueillir des données sur les comportements liés à la santé, l’utilisation des services du PCNP et l’issue de la grossesse des participantes. En 1999, l’instrument a été remanié et une seconde version intitulée le QC2 a été élaborée.
  • Carte d’accueil (CA): Un instrument national de liaison remis aux participantes au moment de leur admission au programme qui est utilisé pour tenir le compte du nombre de participantes, dresser le profil des participantes et cerner des échantillons de participantes.

Ces instruments ont recueilli des données sur les caractéristiques socio-démographiques des participantes, les résultats des participantes et l’administration du programme. Les données provenant de ces sources ont servi de base aux analyses qui ont contribué aux constatations sur la pertinence, l’impact et la rentabilité du programme.

Les éléments probants sont également issus d’analyses statistiques de données et d’autres sources telles que: Statistique Canada, d’autres enquêtes nationales sur les caractéristiques socio-démographiques de populations comparables à celles des participantes au PCNP, des données de surveillance et des documents sur la santé maternelle et infantile, des données d’enquête des intervenants et d’une enquête sur les activités gouvernementales et internationales dans le domaine de la santé maternelle et infantile.

Constatations clés

Pertinence

Le PCNP demeure pertinent pour les femmes enceintes à risque. Bien que dans l’ensemble, au Canada, les menaces à la santé aient tendance à la baisse, il existe des preuves qu’elles persistent toujours chez les populations à risque. Par exemple, les populations à faible revenu et les populations autochtones affichent les taux de tabagisme pendant la grossesse les plus élevés. Les populations les plus vulnérables affichent également les taux de pauvreté les plus élevés. Le tabagisme et la pauvreté sont tous deux associés à des issues défavorables de la grossesse, notamment les maladies périnatales et des taux plus élevés de problèmes de santé à long terme. Les populations ciblées par le PCNP incluent celles qui sont particulièrement susceptibles aux menaces à la santé maternelle. Le PCNP tient également compte des engagements intérieurs et internationaux du gouvernement fédéral concernant la santé et les disparités existant sur ce plan. Compte tenu de ces engagements, le programme a été établi de sorte à permettre au gouvernement fédéral de jouer un rôle approprié qui rehausse, mais ne dédouble pas, les services fournis par les organismes provinciaux et municipaux. Le PCNP offre un appui qui est apprécié par ses parties intéressées et qui apporte une variété d’avantages, tels qu’une capacité communautaire renforcée et un accès amélioré aux services pour les participantes, tant au niveau des collectivités qu’au niveau individuel.

Incidence

Une enquête sur les populations atteintes par le PCNP a révélé qu’une proportion élevée des participantes au programme font partie de populations à risque. Un examen des données de 2002 à 2006 sur les participantes au PCNP a révélé que près de 28 % d’entre elles étaient des immigrantes récentes (au Canada depuis moins de dix ans); près du quart étaient des Autochtones; le revenu mensuel du ménage de plus de 80 % des participantes était de 1900$ ou moins, près de 10 % déclarant n’avoir aucun revenu; près de 12 % étaient des adolescentes; et plus de 40 % ont indiqué avoir consommé de l’alcool pendant qu’elles étaient enceintes, plus de la moitié d’entre elles ayant pris au moins cinq verres en un jour.

Alors qu’on examinait l’incidence du PCNP sur la santé des femmes qui y participaient et de leurs bébés, on a constaté que celles qui avaient été davantage exposées au programme étaient plus susceptibles d’apporter des changements positifs dans leurs pratiques de santé personnelle et d’avoir une meilleure issue de la grossesse. L’« exposition élevée », une mesure relative, a été définie comme avoir été admis au programme plus tôt pendant la grossesse, avoir eu un plus grand nombre de contacts avec le programme et poursuivre sa participation au programme plus longtemps que d’autres. Particulièrement, les participantes qui ont eu une exposition élevée au PCNP étaient plus susceptibles: d’accroître leur utilisation de suppléments vitaminiques ou minéraux; de réduire le nombre de cigarettes qu’elles fument et de cesser de consommer de l’alcool que celles qui ont eu une exposition d’ensemble moins élevée au programme. De plus, les femmes qui ont eu une exposition élevée au PCNP étaient 26 % moins susceptibles d’avoir un bébé prématuré, 34 % moins susceptibles d’avoir un bébé de faible poids à la naissance et 11 % moins susceptibles d’avoir un bébé hypotrophique. Après la naissance du bébé, on a trouvé que les participantes qui avaient eu une exposition plus élevée au PCNP étaient plus susceptibles de décider d’allaiter leur bébé et de l’allaiter plus longtemps que celles qui avaient eu une exposition moins élevée au programme. L’allaitement maternel est associé à un plus faible risque de maladies au cours de la période périnatale et de la période postnatale ainsi qu’à de meilleurs résultats à long terme pour les bébés sur le plan de la santé.

Une analyse comparative a révélé que chez les participantes au PCNP, les taux d’allaitement maternel et de bébés de faible poids à la naissance étaient généralement aussi bons, sinon meilleurs que les taux retrouvés pour la population générale. Ces résultats sont remarquables compte tenu des difficultés additionnelles auxquelles sont confrontées bon nombre des participantes au PCNP. Il convient d’observer que les participantes au PCNP ont été comparées à une cohorte appariée de femmes canadiennes pour l’allaitement maternel, mais en ce qui concerne le faible poids à la naissance, les bébés des participantes au PCNP ont été comparés à tous les nouveau-nés canadiens étant donné qu’on ne disposait pas de données sur le poids à la naissance d’une population appariée.

Enfin, les constatations ont montré que le PCNP atteint une proportion élevée des femmes faisant partie de populations à risque. Les groupes vulnérables sont représentés à des taux beaucoup plus élevés au sein du PCNP qu’ils existent dans la population générale. Une population de femmes canadiennes comparable à celle du PCNP a été extraite de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) et les deux ont été évaluées en fonction de caractéristiques de risque sélectionnées. Les résultats ont montré que:

  • 73 % de la population du PCNP à comparer à 8 % des répondantes à l’ESCC a déclaré un revenu mensuel du ménage de moins de 1 600 $;
  • 26 % de la population du PCNP à comparer à 5 % des répondantes à l’ESCC a déclaré être âgé de moins de 20 ans;
  • 23 % de la population du PCNP à comparer à 5 % des répondantes à l’ESCC s’est identifiée Autochtone.

Rentabilité

Il a été démontré que les programmes de développement sain des enfants sont au nombre des interventions en santé publique les plus rentables étant donné qu’ils apportent une grande gamme de résultats bénéfiques en matière de santé et d’intégration sociale. L’analyse économique du PCNP menée par McMurchy et Palmer (2008) a montré que le coût d’ensemble moyen par naissance pour les participantes au PCNP était de 1 915 $ à comparer à un coût de 2 004 $ pour la naissance moyenne au Canada (2005-2006), ce qui représente une économie moyenne de 89,24 $. Pour les 17 689 participantes incluses dans l’analyse d’établissement des coûts, cela signifie une économie de près de 1,6 million de dollars. Cela démontre bien que le PCNP atteint les résultats escomptés et en donne pour leur argent aux contribuables canadiens. En outre, lorsqu’on les stratifie par groupes d’âge, les économies de coûts par naissance pour les mères âgées de moins de 20 ans participant au PCNP à comparer aux mères du même âge dans l’ensemble du Canada sont de plus de 230 $. Étant donné que 26 % des participantes au PCNP incluses dans l’analyse économique étaient âgées de moins de 20 ans, cela représente des économies de plus de 1,1 million de dollars.

Il convient d’observer que des données sur le poids à la naissance pour une population à risque semblable à celle du PCNP n’étaient pas facilement disponibles et que les comparaisons ont donc été effectuées entre les nouveau-nés des participantes au PCNP et l’ensemble des naissances au Canada. Par conséquent, bien que les économies estimées soient remarquables compte tenu du fait que les participantes au PCNP sont plus susceptibles d’avoir un bébé de faible poids à la naissance que les mères de la population générale au Canada, une comparaison entre les participantes au PCNP et un sous-ensemble apparié de femmes de la population canadienne (présentant des caractéristiques de risque similaires) apporterait vraisemblablement des résultats encore plus exceptionnels.

Le PCNP a également été efficace pour obtenir des fonds. La valeur des ressources en nature affectées aux projets, telles que le temps et les compétences des infirmiers(ères) de la santé publique et des diététistes, est estimée à 9,4 millions de dollars par an. Ces ressources en nature représentent des contributions égales à 54 % du financement fourni par l’ASPC et à 20 % du financement global reçu par le programme. En incluant la valeur de la contribution en nature du personnel sous forme de temps, le montant total des ressources du PCNP est de 52,9millions de dollars. En se fondant sur ce total, le coût moyen par participante au PCNP serait de 623,56 $, le coût variant entre 21 $ et 11 916 $. En général, le coût moyen par participante, à partir de l’admission au programme jusqu’à la sortie, est de 1 000 $ ou moins pour la plupart des projets.

Les participantes au PCNP affichent un taux d’allaitement maternel de plus de 80 %. Les participantes au PCNP qui ont reçu une éducation et un soutien en matière d’allaitement étaient plus susceptibles d’allaiter que les participantes qui n’ont pas reçu ce soutien. Les économies de coûts découlant d’une pratique accrue et d’une plus longue durée de l’allaitement maternel sont fondées sur les maladies évitées au cours de la première année de vie et incluent uniquement les coûts directs d’hospitalisation et des consultations médicales. Chez les participantes au PCNP, celles qui n’ont pas allaité leur bébé à la naissance étaient plus susceptibles de déclarer qu’il avait des troubles respiratoires (55 % plus susceptibles) ou une affection cardiaque (43 % plus susceptibles) au cours de ses deux premières semaines de vie. Les nourrissons qui ne sont pas allaités entraînent des coûts en soins de santé plus élevés pour ces affections que ceux qui sont allaités.

Recommandations

Plusieurs recommandations découlent des constatations du présent rapport et aideront à orienter les décisions concernant la planification des futurs programmes et évaluations. En particulier, il est recommandé que:

  1. Le PCNP continue de surveiller les menaces à la santé maternelle et infantile afin d’éclairer la mise en œuvre du programme et de lui permettre de s’adapter aux priorités émergentes en santé et d’y répondre;
  2. Le PCNP continue de recueillir des données à l’appui de la planification, de la production de rapports sur le rendement et de l’évaluation, y compris:
    1. la collecte continue des données à l’aide du nouvel outil intégré d’évaluation nationale (OIEN) et de la carte d’accueil;
    2. l’exploration d’autres stratégies pour mesurer les résultats plus généraux ou à plus long terme;
    3. l’examen périodique des instruments afin de s’assurer que les données qu’ils recueillent respectent la logique du programme et répondent aux besoins en information du programme;
  3. D’autres études/analyses soient menées afin:
    1. d’examiner les observations quantitatives par le biais d’analyses qualitatives de l’incidence sur la santé;
    2. de cerner une typologie de modèles de prestation prometteurs dans la conception d’ensemble du programme;
    3. de déterminer les relations entre les facteurs de risque pour la mère, l’exposition au programme et les résultats;
    4. de poursuivre l’évaluation économique des impacts associés au programme;
  4. Les résultats de la présente évaluation sommative, y compris les constatations clés, les conclusions et les limites de l’analyse, soient examinés dans le contexte des décisions à long terme concernant les futurs investissements de l’ASPC dans la santé maternelle et infantile;
  5. Les constatations sur les avantages économiques d’une intervention précoce et la pertinence des niveaux de financement actuels du PCNP soient prises en considération dans les décisions concernant les futurs investissements de l’ASPC dans la santé maternelle et infantile;
  6. Toute future évaluation du PCNP soit structurée de sorte à s’inscrire dans le mandat de la Politique sur l’évaluation de 2009 du Conseil du Trésor.

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