Chapitre 2 : Le Rapport de L'administrateur en chef de la santé publique sur l'état de la santé publique au Canada 2010 – Pour un vieillissement en santé : l’expérience du Canada

Chapitre 2 : Pour un vieillissement en santé : L’expérience du Canada

Au Canada, la population des aînés croît plus rapidement que celle de n’importe quel autre groupe d’âge et, si les projections demeurent justes, elle aura rattrapé celle des enfants d’ici 2015Note de bas de page 9. Une population vieillissante est, selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), une victoire de la société moderneNote de bas de page 10. En effet, une population qui vieillit, c’est signe que les pratiques sociales et les pratiques de santé fonctionnent bien, au point d’augmenter la longévité de la population et de réduire le nombre de décès prématurés qui surviennent en bas âge. Avec le temps, le Canada a créé les conditions essentielles pour une population en santé, notamment en agissant sur les déterminants de la santé. Cependant, la croissance de la population vieillissante l’oblige à prendre d’autres mesures pour continuer d’offrir à sa population la chance de vieillir en santé.

Le présent chapitre rappelle certains succès et défis que le Canada a connus dans ses précédentes démarches pour favoriser un vieillissement en santé. Il met aussi en évidence certaines politiques, percées et difficultés qui ont eu une influence sur la santé des aînés avec le temps et révèle quelques grands défis que l’avenir nous réserve.

Un vieillissement actif et en santé

Vieillissement en santé et vieillissement actif

Il existe plusieurs termes pour décrire le fait de maintenir, le plus longtemps possible, une bonne santé physique, sociale et mentale. Bien que vieillissement en santé sera le terme employé le plus fréquemment dans le rapport, d’autres termes comme vieillissement actif ont la même définition.

Au Canada, le terme vieillissement en santé est le plus souvent employé pour décrire le processus qui consiste à optimiser les possibilités de maintenir une bonne santé physique, sociale ou mentale pour permettre aux aînés de préserver leur autonomie, de jouir d’une belle qualité de vie et de jouer un rôle actif dans la société, à l’abri de la discriminationNote de bas de page 11 Note de bas de page 12.

À l’échelle internationale, l’Organisation mondiale de la Santé et d’autres organismes utilisent le terme vieillissement actif pour désigner le processus qui consiste à optimiser les possibilités de bonne santé, de participation et de sécurité afin d’accroître la qualité de vie pendant la vieillisseNote de bas de page 10.

Puisque personne n’échappe au vieillissement, les Canadiens ont intérêt à mettre toutes les chances de leurs côtés pour s’assurer de bien vieillirNote de bas de page 12 Note de bas de page 13. Vieillir en santé exige des efforts continus pour améliorer et maintenir, par tous les moyens, sa qualité de vie, son autonomie et sa santé physique, sociale et mentale tout au long de sa vieNote de bas de page 11 Note de bas de page 12.

Pour favoriser le vieillissement en santé de la population, il faut examiner les facteurs qui ont un effet déterminant sur les aînés, mais il faut aussi tenir compte des expériences et des événements survenus plus tôt dans leur vie sachant qu’ils peuvent, avec le temps, influer la santé et la qualité de vieNote de bas de page 10. Il faut aussi pouvoir compter sur une société qui soutient et valorise la contribution des aînés, favorise la diversité, s’attaque aux inégalités en matière de santé et offre aux Canadiens la possibilité de préserver leur qualité de vie et leur autonomie et de faire des choix sains tout au long de leur vieNote de bas de page 10. Le chapitre 4 décrit plus en détail les interventions, les politiques et les programmes qui créent, ou ont le potentiel de créer, des conditions propices à un vieillissement en santé.

Vieillissement et trajectoire de vie

La trajectoire de santé est le parcours suivi par une personne tout au long de sa vie et qui détermine son état de santé. Ce parcours évolue au fil du temps, en fonction des actions que cette personne pose et des situations auxquelles elle est exposée durant sa vieNote de bas de page 14.

La trajectoire de vie est le parcours suivi par une personne, de la naissance à la mortNote de bas de page 6. Cette trajectoire peut changer ou évoluer à chacune des étapes de la vie (enfance, adolescence, début de l’âge adulte, milieu de l’âge adulte et troisième âge) et varier d’une personne à l’autre selon des facteurs qui interagissent et ont une incidence sur la santé (facteurs biologiques, comportementaux, physiques et sociaux) qui, en interagissant, influent sur la santéNote de bas de page 6 Note de bas de page 14. Ces facteurs, qu’ils soient positifs ou négatifs, évoluent et s’influencent mutuellement au cours des différentes étapes de la vie. À terme, ils peuvent avoir un effet bénéfique ou négatif sur la santé. C’est pendant les premières années de la vie que les déterminants de la santé peuvent, par effet cumulatif, entraîner sur la santé des répercussions qui s’amplifient avec les annéesNote de bas de page 14 Note de bas de page 15. Pour une description plus détaillée du modèle basé sur le cycle de vie et la trajectoire de vie, veuillez consulter le Rapport de l’administrateur en chef de la santé publique sur l’état de la santé publique au Canada, 2009 : Grandir sainement – Priorités pour un avenir en santéNote de bas de page 6.

En santé publique, le modèle basé sur la trajectoire de vie présente un intérêt parce qu’il aide à comprendre le lien entre le temps, l’exposition à un ou plusieurs facteurs, les expériences vécues et les répercussions à long terme sur la santé. L’approche axée sur le cours de la vie peut aider à cerner et à interpréter les tendances ayant trait à la santé des populations et les liens entre les diverses étapes de la vie Note de bas de page 6 Note de bas de page 14 Note de bas de page 16 Note de bas de page 17. Ce modèle peut également servir à planifier des interventions, des politiques et des programmes adaptés aux diverses étapes de la vie. Enfin, il nous assure que le vieillissement en santé est considéré dans le contexte global de la vie, et non simplement comme un phénomène de fin de vie.

Facteurs ayant des répercussions sur la santé et le vieillissement

Les déterminants sociaux de la santé sont des facteurs socioéconomiques qui ont une influence sur la santéNote de bas de page 18. Il s’agit en quelque sorte des conditions dans lesquelles les personnes naissent, vivent, travaillent, se divertissent, interagissent et vieillissentNote de bas de page 19. Tout au long de la vie, la santé est déterminée par l’interaction complexe des facteurs sociaux et économiques ainsi que par l’environnement physique et les comportements individuels. Ces facteurs sont souvent influencés par le patrimoine, le statut et les ressources qui, à leur tour, ont des répercussions sur les politiques et les choix et, ultimement, sur les différences dans l’état de santé des personnes et des communautésNote de bas de page 19. On nomme inégalités en matière de santé ces différences observées dans les résultats pour la santéNote de bas de page 20.

La santé individuelle ou collective est le résultat direct et indirect d’une combinaison de facteurs : l’âge, le sexe, l’hérédité et les comportements individuels. Bien qu’il s’agisse de choix personnels, les comportements sont également influencés par des facteurs sociaux et économiques, tels que le revenu, l’éducation, l’environnement et l’appartenance sociale. Ces facteurs sont aussi appelés déterminants sociaux de la santé, en raison justement de l’incidence qu’ils peuvent avoir sur la santéNote de bas de page 18-Note de bas de page 21. Des références aux déterminants sociaux de la santé, isolément ou globalement, sont présentées tout au long du rapport.

Bien que les effets des déterminants sociaux de la santé se fassent sentir à toutes les étapes de la vie, leur incidence cumulative est plus marquée avec l’âge. Des données probantes montrent que, habituellement, les personnes de statut socioéconomique faible sont en moins bonne santé que les personnes de statut socioéconomique supérieur, et que plus une personne vit dans des conditions sociales et économiques précaires, plus son état de santé est affectéNote de bas de page 22. Ces différences seront approfondies au chapitre 3.

Promouvoir un vieillissement en santé : Bref historique de l’expérience du Canada

Il n’est pas simple d’examiner l’expérience du Canada en ce qui concerne la promotion du vieillissement en santé. Cela exige, d’une part, que l’on tienne compte des principales améliorations en santé publique qui touchent l’ensemble de la population mais aussi celles qui concernent précisément les enfants, puisque, par effet cumulatif, elles ont entraîné des répercussions sur la santé qui se sont amplifiées avec les annéesNote de bas de page 6. D’autre part, il faut considérer les remarquables progrès qui ont été faits pour améliorer la santé et le bien‑être des aînés et pour leur assurer une meilleure santé le plus longtemps possible.

La présente section fournit un bref historique des nombreux succès et défis que le Canada a connus dans ses démarches pour favoriser le vieillissement en santé. Sans présenter un bilan exhaustif de tout ce qui a été réalisé jusqu’à maintenant, elle illustre, par des exemples, la façon dont les progrès en santé publique ont contribué à la santé et au bien-être des aînés. Ce survol historique permet de suivre l’évolution de la santé des aînés et d’établir les bases sur lesquelles s’appuyer pour planifier l’avenir. Pour un aperçu plus détaillé de la santé publique au Canada, veuillez consulter les deux rapports précédents : Rapport de l’administrateur en chef de la santé publique sur l’état de la santé publique au Canada 2008 : S’attaquer aux inégalités et Rapport de l’administrateur en chef de la santé publique sur l’état de la santé publique au Canada 2009 : Grandir sainement – Priorités pour un avenir en santéNote de bas de page 6 Note de bas de page 20.

De 1900 à 1950

Avant le 20e siècle, les politiques gouvernementales et les interventions communautaires au Canada n’abordaient que très sommairement la santé et la sécurité des aînés. Elles s’intéressaient plutôt à la santé et au bien-être de la population en général. Les efforts déployés durant cette période avaient comme objectif principal de combattre les nombreuses maladies infectieuses qui bien souvent touchaient une grande partie de la population. Au début des années 1900, la plupart des maladies d’origine hydrique avaient été éliminées grâce à des normes de traitement de l’eau et aux installations sanitairesNote de bas de page 23-Note de bas de page 25. Puis, la vaccination et l’adoption de nouvelles normes sur les aliments et les drogues ont contribué à réduire encore davantage les risques de maladieNote de bas de page 20 Note de bas de page 26. À mesure que l’on prenait conscience du lien qui existait entre la santé, la sécurité et les facteurs sociaux, comme l’éducation et l’emploi, on voyait s’améliorer le taux d’assiduité scolaire, les conditions de vie et de travail et les infrastructures publiquesNote de bas de page 27-Note de bas de page 29. Ces améliorations ont eu un effet déterminant sur la santé publique au Canada, au profit des générations qui ont suivi.

La fin de la Première Guerre mondiale (1914-1918) a marqué le début d’une nouvelle ère sociale et économique au Canada. Les besoins en temps de guerre entraînaient un accroissement de la production industrielle et déplacaient la main‑d’oeuvre vers les centres urbains. Les emplois habituellement occupés par des adultes plus âgés ont été remplacés par de nouvelles usines et des travailleurs plus jeunesNote de bas de page 30. période d’économie florissante ne favorisait pas tous les secteurs de la société. Même si les aînés du Canada pouvaient espérer vivre plus longtemps, c’était souvent au prix d’une piètre qualité de vie et, dans certains cas d’une extrême pauvreté. En raison de leur âge et de leur état de santé, les hommes âgés qui avaient travaillé toute leur vie n’étaient généralement plus aptes à faire partie de la main‑d’oeuvre rémunérée. Dans les régions urbaines, les femmes âgées travaillaient principalement en milieu familial en tant que femmes au foyer ou aidantes non rémunérées. En milieu rural, les hommes et les femmes occupaient aussi des emplois non rémunérés, effectuant des travaux agricoles manuels ou des tâches domestiquesNote de bas de page 30-Note de bas de page 32. Ainsi, les aînés, particulièrement les femmes célibataires et les veuves, risquaient davantage de souffrir d’insécurité financière et de pauvreté.

Sans sécurité financière, les aînés avaient peu de moyens pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille. Malgré les pensions de survivant et d’invalidité auxquelles avaient droit les vétérans de la guerre et leur famille, le besoin d’aider les aînés restait pressant. Profitant de l’enthousiasme populaire que suscitaient la lutte contre la pauvreté et l’aide aux aînés à faible revenu, le gouvernement du Canada a formé un comité spécial chargé d’évaluer le besoin d’instaurer un régime de pensions national. C’est ainsi qu’en 1927 la Loi des pensions de vieillesse a été adoptée. Cette loi garantissait une aide financière aux sujets britanniques âgés de 70 ans ou plus qui vivaient au Canada depuis au moins 20 ansNote de bas de page 30.

Dans les années 1930, une crise économique a frappé le Canada; l’économie canadienne s’est effondrée et le taux de chômage a explosé, entraînant une dégradation des conditions sociales, notamment sur le plan du logement et la sécurité alimentaire. À mesure que les fermiers faisaient faillite et que les industries s’écroulaient, les Canadiens perdaient leur maison et leur moyen de subsistance. Bon nombre d’entre eux arrivaient difficilement à combler leurs besoins essentielsNote de bas de page 33. La Loi des pensions de vieillesse, adoptée quelques années auparavant pour offrir une aide financière aux plus démunis, ne profitait pas à la majorité et était réservée à certains segments de la population, dont ne faisaient partie ni les Indiens inscrits ni les nouveaux immigrantsNote de bas de page 30. Par conséquent, les aînés étaient encore nombreux à connaître des conditions de vie difficiles et, dans certains cas, de souffrir de pauvreté absolue.

De 1950 à aujourd’hui

Après la Seconde Guerre mondiale, la santé publique a connu de profonds changement. À mesure que s’amélioraient les taux d’emploi, les niveaux de revenu et les normes en matière de logement et d’éducation, la plupart des Canadiens voyaient leur niveau de vie augmenter, entraînant du coup une amélioration des conditions de vie et des habitudes alimentaires. Puis, la santé des Canadiens a atteint un nouveau sommet grâce à la vaccination massive des enfants contre les maladies infectieuses et à des découvertes scientifiques révolutionnaires, telles que l’insuline et la pénicilline, qui permettaient de traiter le diabète et les infectionsNote de bas de page 20. Outre les conditions sociales et économiques qui changaient pour le mieux, la famille canadienne traditionnelle, elle, s’agrandissait : c’était le baby‑boom, période marquée par un pic de la natalité au milieu des années 1940 (voir la figure 2.1)Note de bas de page 34 Note de bas de page 35.

Figure 2.1 Taux de natalité brut au Canada, de 1921 à 2007* Note de bas de page 36-Note de bas de page 40

Figure 2.1 Taux de natalité brut au Canada, de 1921 à 2007

* Les données de 1997 à 1999 ne sont pas disponibles
Source: Statistique Canada.

[Figure 2.1, Équivalent textuel]

Résumé : De 1921 à 2007 le taux de natalité brut est passé de 29,3 à 11,2.

Source : Statistique Canada.

Figure 2.1 – Taux de natalité brut au Canada, de 1921 à 2007Note de bas de page 1
Année Nombre de naissances vivantes pour 1 000 habitants
1921 29,3
1926 24,7
1931 23,2
1936 20,3
1941 22,4
1946 27,2
1951 27,2
1956 28,0
1961 26,1
1966 19,4
1971 16,8
1976 15,3
1981 14,9
1986 14,2
1991 14,3
1996 12,2
2001 10,7
2007 11,2
Note de base de page
1Les données de 1997 à 1999 ne sont pas disponibles.

Le baby‑boom a pris fin au milieu des années 1960 lorsqu’une nouvelle dynamique sociale a commencé à s’implanter dans les familles et dans les collectivités. Pendant et après la Seconde Guerre mondiale, les femmes ont fait une entrée massive sur le marché du travail, et les méthodes de contraception, plus efficaces et plus accessibles, permettaient de retarder le moment de fonder une familleNote de bas de page 35 Note de bas de page 41. On assistait également à un exode rural, les villes présentant un attrait pour tous ceux, nombreux, qui cherchaient un emploi et un accès plus facile à une formation de meilleure qualité. Les jeunes adultes retardaient le moment de se marier et d’avoir des enfants, entraînant une baisse du taux de natalité au CanadaNote de bas de page 35 Note de bas de page 41. Les effets du baby‑boom sont plus perceptibles aujourd’hui, puisque les premiers baby-boomers franchissent tout juste le cap des 65 ans. Avec le temps, la génération du babyboom formera la plus importante population d’aînés de l’histoire. D’ici 2038, on prévoit qu’environ 25 % de la population sera âgée de 65 ans et plus (voir la figure 2.2)Note de bas de page 42 Note de bas de page 43.

Figure 2.2 Population canadienne, 1978, 2038* Note de bas de page 42 Note de bas de page 43

Figure 2.2 Population canadienne, 1978, 2038

* Population prévue
Source: Statistique Canada.

[Figure 2.2, Équivalent textuel]

Résumé : Selon la projection pour la période de 1978 à 2038, la population du Canada devrait augmenter et compter près de 25 % de personnes âgées de 65 ans et plus.

Source : Statistique Canada.

Figure 2.2 – Population canadienne, de 1978 à 2038Note de bas de page 1
Groupes d'âge  Population (en millions)en 1978 Population (en millions) en 2038
0 à 4 1,8 1,8
5 à 9 1,9 1,9
10 à 14 2,1 2,0
15 à 19 2,4 2,1
20 à 24 2,3 2,2
25 à 29 2,1 2,3
30 à 34 1,9 2,4
35 à 39 1,5 2,5
40 à 44 1,3 2,7
45 à 49 1,3 2,8
50 à 54 1,2 2,7
55 à 59 1,1 2,6
60 à 64 0,9 2,4
65 à 69 0,8 2,3
70 à 74 0,6 2,3
75 à 79 0,4 2,2
80 à 84 0,2 1,6
85 à 89 0,1 1,0
90+ 0,1 0,6
Note de base de page
1Population prévue.

La guerre terminée, les revenus réels au pays ont atteint des sommets, ce qui profitait principalement aux populations plus jeunes, qui formaient la majorité de la main‑d’oeuvre. Appauvris par la guerre et les difficultés économiques de l’époque, les Canadiens qui arrivaient à la retraite avaient, quant à eux, peu d’économies en poche pour leurs vieux joursNote de bas de page 8. Ils étaient alors plus susceptibles de connaître l’insécurité alimentaire et de vivre dans des logements insalubres, mettant ainsi à risque leur santé et leur bien‑être. C’est à cette époque que s’est amorcée au Canada une lutte contre la pauvreté des aînésNote de bas de page 30 Note de bas de page 33. Les nombreuses initiatives sociales menées jusqu’à maintenant s’adressaient à l’ensemble de la population, et non pas spécifiquement aux aînés. Même que, dans l’ensemble du Canada, il y avait un manque d’initiative, publique ou privée, à l’intention des aînés. C’est ce qui a mené à l’adoption d’une série de politiques et programmes fédéraux de nature à aider les aînés et à améliorer leur qualité de vie.

  • La Sécurité de la vieillesse, premier régime universel de pension au Canada, a été créée en 1952 pour aider financièrement les Canadiens à la retraite (y compris les Indiens inscrits), dont la qualité de vie était nettement inférieur à celui du reste de la populationNote de bas de page 30.
  • Le Régime de pensions du Canada et le Régime de rentes du Québec, créés en 1966, sont des régimes de pension transférables d’un emploi à un autre, qui offrent une protection aux travailleurs canadiens contre la perte de revenu due à un départ à la retraite, une invalidité ou un décèsNote de bas de page 44-Note de bas de page 46.
  • Le Supplément de revenu garanti a été introduit en 1967 pour éliminer la pauvreté chez les aînés et aider ceux qui, en raison d’une retraite prématurée, ne sont pas encore admissibles au Régime de pensions du CanadaNote de bas de page 30 Note de bas de page 44.

Ces programmes fournissaient un revenu de retraite aux travailleurs et à leur famille, offraient une aide financière à plus grande échelle aux plus démunis et contribuaient, de ce fait, à une meilleure qualité de vieNote de bas de page 8,Note de bas de page 30. Jusqu’au milieu des années 1960, la pension de sécurité de la vieillesse était versée à 70 ans; à partir de 1966, l’âge d’admissibilité a été réduit peu à peu, pour atteindre 65 ans en 1970Note de bas de page 8. Au fil du temps, le Canada a laissé tomber les critères de retraite fondés sur l’approche d’un âge clairement défini pour la retraite. Il est même allé jusqu’à inclure au Régime de pensions du Canada des plans de retraite adaptés. Certaines provinces ont adopté des lois sur les droits de la personne et les droits du travail afin d’abolir la retraite obligatoire (sauf dans le cas de certains postes soumis à un âge limite)Note de bas de page 8,Note de bas de page 47. Cela signifiait qu’à 60 ans les travailleurs accédaient à une variété d’options en matière d’emploi et de retraite. Au début des années 1970, les programmes provinciaux de prestations de revenu ont commencé à se populariser : le Régime de revenu annuel garanti de l’Ontario et l’Alberta Seniors Benefit Program (programme de prestations aux aînés de l’Alberta) ont été créées pour offrir aux aînés un revenu minimal garanti en plus des prestations prévues par la Sécurité de la vieillesse, le Régime de pensions du Canada et le Supplément de revenu garantiNote de bas de page Note de bas de page 48,Note de bas de page 50. En somme, les programmes d’aide au revenu et les régimes de retraite ont aidé les aînés à sortir de la pauvreté. Avec ces prestations de revenu supplémentaires, la qualité de vie, la santé et le bien-être des personnes touchées se sont améliorés. Ces programmes ont profité aux générations suivantes d’aînés et de retraités au CanadaNote de bas de page 8,Note de bas de page 51

Dans les années 1950, la science de la gérontologie suscitait davantage d’intérêt, surtout en ce qui concerne la sensibilisation à la santé et le bien‑être des aînés et de promouvoir la recherche et la formation dans ce domaine. Durant les décennies suivantes, ont vu l’éclosion de plusieurs organisations canadiennes vouées à la promotion de la santé des aînés grâce à la recherche, la sensibilisation et la défense des droits des aînés et, parmi elles, l’Association canadienne de gérontologie (1971), la Société canadienne de gériatrie (1981), l’Association canadienne des infirmiers et infirmières en gérontologie (1985) et l’Académie canadienne de psychiatrie gériatrique (1991)Note de bas de page 52-Note de bas de page 54.

Grâce aux investissements sociaux et aux progrès en santé publique, les aînés gagnaient des années de vie en bonne santé et étaient, par le fait même, plus nombreux qu’auparavantNote de bas de page 10 Note de bas de page 55. La Loi sur l’assurance-hospitalisation et les services diagnostiques (1957) leur donnait désormais accès à des services de soins actifs et la Loi sur les soins médicaux (1966) leur permettait d’obtenir des services médicaux couverts par le régime d’assurance maladieNote de bas de page 56. L’avancement des techniques médicales et les progrès dans le milieu pharmaceutique permettaient aussi de poser des diagnostics plus exacts, plus rapidement, de soulager la douleur, de faciliter la réadaptation, de prolonger la vie et de préserver l’autonomie des personnes souffrant de blessures ou de maladies chroniquesNote de bas de page 57. Jumelées aux campagnes de vaccination, ces initiatives en santé publique aidaient à contrer de nombreuses maladies infectieusesNote de bas de page 26. Cependant, les blessures et les maladies non transmissibles, comme les maladies cardiovasculaires, le cancer, l’arthrite et le diabète, demeuraient une cause importante d’invalidité et de décèsNote de bas de page 8 Note de bas de page 10 Note de bas de page 55 Note de bas de page 58. Les facteurs de risque de ces maladies étaient pourtant bien connus, mais les mesures de prévention ou de réduction des risques se faisaient raresNote de bas de page 8 Note de bas de page 55.

Les soins et les services aux aînés étaient de plus en plus sollicités en raison d’une multitude de facteurs, notamment le changement des valeurs culturelles, l’émergence d’une nouvelle dynamique familiale et le déplacement des populations rurales vers les villes, où l’accès à un emploi ou à une formation de meilleure qualité y était plus facile. Les aînés se retrouvaient loin de leur familleNote de bas de page 10. On a alors mis en place de nombreux programmes d’aide à l’autonomie et de services d’aide familiale afin de les assister dans les tâches domestiques, comme la planification et la préparation des repas, le ménage et la lessive. Les Infirmières de l’Ordre de Victoria du Canada et d’autres organisations bien établies ajoutaient également à leurs tâches celles d’offrir des soins à domicile, des services de soins personnels et des services communautairesNote de bas de page 59. De plus, un certain nombre de programmes de soins à domicile provinciaux ont été créés dans l’ensemble du pays. Puis, en 1981, Anciens Combattants Canada a inauguré le Programme pour l’autonomie des anciens combattants, un programme national de soins à domicile visant à aider les anciens combattants à garder la santé et à vivre de façon autonome dans le confort de leur foyer ou au sein de leur collectivitéNote de bas de page 60.

Pour favoriser le vieillissement en santé dans les foyers et les communautés, il fallait également améliorer les normes relatives à la qualité des soins et à la sécuritéNote de bas de page 10. La plupart des demeures n’étaient pas conçues pour répondre aux besoins changeants des aînés. De façon générale, les aînés n’avaient pas les moyens ni la capacité de réaliser tous les travaux nécessaires pour rendre leur demeure fonctionnelle et sécuritaire. Au début des années 1940, des changements avaient été apportés aux codes du bâtiment, notamment au Code national du bâtiment, afin d’assurer la santé et la sécurité des aînés, d’améliorer l’accessibilité et de prévenir les blessures. Une mise à jour de ces normes a alors été proposée dans les dernières décennies pour tenir compte des risques actuels et des nouvelles exigences de sécuritéNote de bas de page 61. La Société canadienne d’hypothèques et de logement a, pour sa part, lancé des programmes d’amélioration résidentielle, comme le Programme d’aide à la remise en état des logements pour personnes handicapées et le programme Logements adaptés : aînés autonomes; elle venait ainsi en aide aux aînés et aux familles à faible revenu qui devaient, par exemple, adapter leur logement ou le rendre plus accessibleNote de bas de page 62 Note de bas de page 63. Devant le besoin grandissant de logements supervisés pour les aînés, les maisons d’accueil et les établissements de soins de longue durée, privés et publics, ont commencé à se multiplier.

Sur la voie du progrès

À l’aube du 21e siècle, la question des aînés était toujours d’actualité. Le Canada voyait naître des organismes gouvernementaux et non gouvernementaux qui se destinaient à promouvoir un vieillissement en santé et à prendre position sur des questions d’intérêt pour les aînés, telles que les chutes et les blessures qui en résultent, la santé mentale, les mauvais traitements et la négligence, l’appartenance sociale, les modes de vie sains et l’accès aux soins et aux services. Le Conseil consultatif national sur le troisième âge a été créé en 1980 dans le but de fournir aide et conseil au ministre fédéral de la Santé pour toute question liée au vieillissement et à la qualité de vie des aînésNote de bas de page 51 Note de bas de page 57 Note de bas de page 64. Puis, en 2007, le gouvernement du Canada s’est adjoint l’aide du Conseil national des aînés pour les questions qui concernaient la santé et le bien‑être des aînésNote de bas de page 65. Ce mouvement de sensibilisation à l’égard des aînés, loin d’être unique au Canada, s’observait également à l’échelle internationale (voir l’encadré 2.1 Initiatives internationales sur le vieillissement).

Encadré 2.1 Initiatives internationales sur le vieillissement

La fin du 20e siècle a été, à l’échelle internationale, une période intense de sensibilisation à la question des aînés. En 1982, l’Organisation des Nations Unies est devenue l’un des principaux artisans de la promotion du vieillissement en santé et de la protection des droits des aînés. Cette année-là, elle a organisé la première Assemblée mondiale sur le vieillissement, à Vienne, préparant la voie à de nombreuses initiatives à l’intention des aînés. Le Vienna International Plan of Action on Ageing a été la première initiative en son genre; il a permis d’établir une série de recommandations, de normes et de stratégies visant à accroître la recherche, la collecte de données, l’analyse, la formation et la sensibilisation. Le Plan mettait l’accent sur plusieurs secteurs clés, notamment la santé et la nutrition, la protection des consommateurs, le logement et l’environnement, la famille, l’aide sociale, la sécurité du revenu, le travail et l’éducationNote de bas de page 66.

En 1991, les Principes des Nations Unies pour les personnes âgées ont été établis pour assurer un traitement prioritaire à la question de la santé et du bien-être des aînés. Ils portaient sur cinq grandes questions : l’indépendance, la participation, les soins, l’épanouissement personnel et la dignitéNote de bas de page 66 Note de bas de page 67. À la fin du siècle, ces questions avaient pris suffisamment d’importance pour que 1999 soit déclarée Année internationale des personnes âgéesNote de bas de page 68. En 2002, l’Organisation des Nations Unies a organisé, à Madrid, la deuxième Assemblée mondiale sur le vieillissement afin de discuter des possibilités et des défis du vieillissement de la population et d’évaluer de nouveau les recommandations du Vienna International Plan of Action on AgeingNote de bas de page 66. Le Canada est signataire du Plan d’action de Madrid et s’est engagé à en respecter l’esprit et la lettre à l’aide d’une série de politiques et de programmes visant à promouvoir et à protéger la santé et le bien-être des aînés au CanadaNote de bas de page 69.

La question des aînés, loin de s’essouffler, gagne de plus en plus de sympathisants depuis les dernières décennies, et ce, en raison notamment d’une plus grande prise de conscience de l’évolution démographique qui se produit au Canada. En effet, comme c’est le cas dans beaucoup d’autres pays, le Canada connaît une croissance remarquable de sa population de 65 ans et plusNote de bas de page 12 Note de bas de page 51. Cependant, les aînés au Canada ne forment pas un groupe homogène et, par conséquent, ne connaissent pas les mêmes problèmes de santé ou de bien‑être. Ces problèmes varient selon le contexte historique, social et économique, le sexe, l’origine ethnoculturelle et le lieu de résidence (ville, milieu rural ou région nordique)Note de bas de page 51. (Voir l’encadré 2.2 Influences des événements historiques sur la peuples autochtones, pour mieux comprendre les répercussions de ces facteurs sur la santé des Autochtones.)

Encadré 2.2 Influences des événements historiques sur la peuples autochtones

L’histoire du Canada révèle, à bien des égards, que les conditions sociales, économiques et environnementales ont eu des répercussions majeures sur la santé des Autochtones au Canada. Des événements historiques, comme la colonisation, la négociation de traités, la perte de terres, la destruction de l’environnement et les pensionnats indiens, ont largement influencé la vie, les traditions et la santé des AutochtonesNote de bas de page 70 Note de bas de page 72.

L’espérance de vie des Autochtones s’est améliorée au fil des années, mais elle demeure faible comparativement à celle des populations non autochtonesNote de bas de page 73. De même, les taux de maladies et de blessures chez les membres des Premières nations, les Métis et les Inuit sont souvent plus élevés que ceux enregistrés dans l’ensemble de la population canadienneNote de bas de page 74. Ces inégalités, qui s’observent dans bien d’autres secteurs (notamment l’éducation, l’emploi, le logement, l’alimentation, l’assainissement de l’eau et l’accès aux services) ont eu, sur la santé des Autochtones, des répercussions individuelles et cumulatives qui se perpétuent de génération en générationNote de bas de page 71 Note de bas de page 72 Note de bas de page 75.

Parmi les membres plus âgées des collectivités autochtones, bon nombre ont vécu les tragiques épreuves qui ont marqué l’histoire de leur peuple, y compris les pensionnats indiens. Et malgré cela, ils continuent d’investir des efforts, au sein de leur collectivité, pour renforcer et préserver leur culture et leur langue et pour améliorer leurs conditions sociales et leur état de santé. Les Anciens sont considérés comme le point d’ancrage des collectivités autochtones; ils ont la responsabilité de transmettre leur sagesse, leur histoire, leur culture et leur langue, et ils jouent un rôle essentiel dans la santé et le bien-être de leur famille, de leur collectivité et de leur nationNote de bas de page 72 Note de bas de page 73 Note de bas de page 76.

Satisfaire les besoins en santé des aînés autochtones est une responsabilité que se partagent les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux et les partenaires autochtones. Par exemple, l’Organisation nationale de la santé autochtone et d’autres organismes autochtones nationaux ont collaboré étroitement avec les collectivités afin d’améliorer la santé et le bien-être des Autochtones. Aidée de ses trois centres de recherche : le Centre des Premières nations, l’Inuit Tuttarvingat et le Centre des Métis, l’Organisation nationale de la santé autochtone répond aux besoins diversifiés des populations autochtones et met de l’avant des stratégies de soins de santé adaptées à la cultureNote de bas de page 77. De leur côté, les gouvernements s’efforcent d’améliorer le bien-être socioéconomique des Autochtones et de réduire les inégalités en matière de santé, de logement et d’éducation, notamment par des initiatives qui favorisent la santé et la viabilité des collectivités et par des partenariats solides à long terme avec les AutochtonesNote de bas de page 78 Note de bas de page 79. Ces initiatives axées sur la santé et le bien-être des Autochtones sont, en réalité, des efforts investis pour promouvoir le vieillissement en santéNote de bas de page 7 Note de bas de page 8.

Même si le Canada a mis beaucoup d’efforts pour aider les Canadiens à maintenir et à améliorer la santé des Canadiens vieillissants, le travail est loin d’être terminé. L’adoption de plus en plus répandue de comportements malsains et la prévalence des maladies chroniques viennent miner la santé physique et mentale de la population. La prévention et la gestion des nombreuses maladies chroniques liées à l’âge demeureront au coeur des priorités, non seulement pour le bien de la génération actuelle mais pour celui des générations à venirNote de bas de page 12.

Des obstacles environnementaux, systémiques et sociaux rendent difficile l’adoption de comportements sains. Tâche ambitieuse donc que de mener les Canadiens vers une vie plus saine, qui laisse place à la participation sociale, à l’activité physique, à l’alimentation équilibrée et à la réduction des risques de blessureNote de bas de page 12. Par ailleurs, les phénomènes météorologiques exceptionnels, l’éclosion de maladies infectieuses, la contamination de l’eau potable et la grippe saisonnière ont, par le passé, mis en péril la santé et la sécurité des aînés. Les situations de ce genre restent difficilement évitables. C’est pourquoi il est important de mettre au point des mesures d’urgence qui tiennent compte des besoins particuliers des aînés afin de réduire les risques de blessure et de décèsNote de bas de page 80 Note de bas de page 81. Il serait aussi profitable que les aînés au Canada puissent vivre dans un milieu adapté à leurs besoins, où ils ont la possibilité de rester socialement actifs et de faire des choix santé afin de rehausser leur sécurité, leur autonomie et leur qualité de vieNote de bas de page 12 Note de bas de page 82 Note de bas de page 83.

Le Canada doit songer à des moyens d’intégrer le vieillissement en santé au modèle basé sur la trajectoire de vie. En effet, le vieillissement en santé ne touche pas seulement les aînés, mais bien tous les groupes d’âge et toutes les générations. Si l’on veut encourager la population canadienne à garder la santé le plus longtemps possible, il faut lui donner les moyens, tout au long de sa vie, de se bâtir et de maintenir une bonne santé physique et mentale.

Résumé

Le Canada a fait des progrès notables dans le domaine de la santé publique, au point que la majorité des Canadiens vivent aujourd’hui plus longtemps et en meilleure santé. C’est le résultat de ses nombreuses initiatives mais aussi d’un contexte socioéconomique en perpétuelle évolution, qui a conduit à une série de changements et d’adaptations. Malgré ces progrès, il reste et restera toujours des défis à relever. Le chapitre 3 s’intéresse à l’état de santé actuel des aînés au Canada : leur santé physique, leur santé mentale, leur bien‑être économique et leur sentiment de bien-être, et explore les principaux facteurs ayant une incidence sur la santé des aînés.

Détails de la page

Date de modification :