Chapitre 12 : Normes Canadiennes pour la lutte antituberculeuse 7e édition – Le suivi des contacts et la gestion des éclosions dans le cadre de la lutte antituberculeuse

Normes Canadiennes pour la lutte antituberculeuse 7e édition

Annexes

La 7e édition des Normes canadiennes pour la lutte antituberculeuse est désormais obsolète.

Veuillez vous référer à l'édition actuelle : Normes canadiennes pour la lutte antituberculeuse, 8e édition

Chapitre 12 - Le suivi des contacts et la gestion des éclosions dans le cadre de la lutte antituberculeuse

Elizabeth Rea, MD, MSc, FRCPC
Paul Rivest, MD, MSc


Table des matières


Messages/Points clés

  • À quelques exceptions près, seule la tuberculose (TB) respiratoire est contagieuse; le suivi des contacts devrait être réalisé tant auprès des cas dont le frottis d'expectorations était positif que de ceux dont le frottis était négatif. Le suivi des contacts a pour but d'identifier et de traiter tous les cas secondaires et d'identifier les contacts atteints d'une infection tuberculeuse latente (ITL) afin de leur offrir un traitement préventif. La recherche du cas source est recommandée pour les enfants de moins de 5 ans atteints de TB active.
  •  Au cours de l'entrevue avec le cas contagieux visant à identifier les contacts, on devrait lui poser des questions au sujet des endroits où une exposition a pu se produire et des activités pratiquées à ces occasions et lui demander le nom de ses contacts. La partie concernant la recherche des contacts basée sur le lieu et les réseaux sociaux ainsi que la section sur le suivi des contacts parmi les sans-abri ont été augmentées par rapport à la 6e édition des Normes.
  • Il est recommandé d'établir un ordre de priorité pour le suivi des contacts selon la contagiosité du cas source, l'ampleur de l'exposition et la vulnérabilité immunitaire des personnes exposées. Ainsi, il convient de concentrer ses efforts sur les contacts qui présentent le plus grand risque d'infection ou qui risquent le plus de développer une TB active s'ils sont infectés.
  • L'approche classique en cercles concentriques pour le suivi des contacts n'est plus recommandée. Le suivi initial devrait plutôt englober dès le départ les contacts non familiaux lorsque la contagiosité du cas et la vulnérabilité du contact le justifient, plutôt que d'attendre.
  • Les contacts peuvent être regroupés comme suit :
  • Priorité élevée :
    • contacts familiaux en plus des contacts non familiaux étroits vulnérables sur le plan immunitaire, tels les enfants de moins de 5 ans.
  • Priorité moyenne :
    • contacts non familiaux étroits exposés au cas chaque jour ou presque, notamment à l'école ou au travail.
  • Priorité faible :
    • contacts occasionnels moins exposés.
  • Dans le cas de la TB à frottis positif, cavitaire ou laryngée, le suivi initial des contacts devrait porter sur les contacts de priorité élevée et ceux de priorité moyenne. Dans le cas de la TB pulmonaire non cavitaire à frottis négatif, le suivi initial des contacts devrait viser les contacts de priorité élevée seulement. Dans les deux situations, la recherche des contacts est itérative : elle devrait être étendue si les résultats du suivi initial indiquent qu'une transmission est survenue.
  • Une évaluation unique au moins 8 semaines après la fin de l'exposition (test cutané à la tuberculine [TCT] et évaluation des symptômes) est recommandée dans la plupart des situations où il ne s'agit pas d'un contact familial afin de favoriser au maximum la participation et de réduire au minimum le faux diagnostic de « virage » lorsque la réaction est attribuable à un effet de rappel. Un TCT initial et un TCT 8 semaines après l'exposition sont recommandés pour les contacts familiaux et les autres contacts de priorité élevée. Le TCT en deux étapes n'est pas recommandé pour la recherche des contacts.
  • Le TCT n'est plus recommandé comme outil d'évaluation primaire pour le suivi des contacts parmi les personnes âgées vivant dans un établissement de soins de longue durée, chez lesquelles il est moins fiable, et pour de nombreuses personnes âgées pour qui les risques associés au traitement de l'ITL l'emportent sur les bienfaits du traitement. Dans ces cas, l'accent devrait être mis sur la détection précoce des cas secondaires.

Introduction

La grande priorité des programmes de lutte antituberculeuse devrait toujours être la détection précoce et le traitement réussi de tous les cas de TB, car le traitement diminue rapidement le risque de transmission de la TB à d'autres. La deuxième priorité devrait être l'évaluation et le suivi des contacts étroits des cas actifs afin d'identifier les cas secondaires, les cas sources dans certaines situations et les cas ayant récemment contracté l'ITL et de leur offrir un traitementNote de bas de page 1-3 . Lors de la recherche des contacts, on détecte habituellement une TB active chez 1 % à 2 % des contacts étroitsNote de bas de page 4. De plus, environ 5 % des contacts récemment infectés développeront une TB active dans les 2 ans suivant l'expositionNote de bas de page 5-8 . Les programmes nord-américains de lutte antituberculeuse décèlent un nombre médian de quatre contacts étroits (six en moyenne) pour chaque cas de TB activeNote de bas de page 4 Note de bas de page 9.

La TB active est une maladie à déclaration obligatoire dans toutes les provinces et tous les territoires du Canada. L'une des raisons de cette obligation est de s'assurer que la recherche des contacts s'effectue rapidement et de façon organisée et concertée.

À quelques exceptions près, seule la TB respiratoire est contagieuse et nécessite une recherche des contactsNote de bas de page 10. Les patients atteints d'une maladie non respiratoire peuvent aussi présenter une atteinte respiratoire concomitante; il est donc important que tous les cas de TB subissent une radiographie pulmonaire (et une analyse des expectorations en présence de symptômes respiratoires ou d'anomalies à la radiographie) dans le cadre de leur bilan de santé. Les cas de TB miliaire obtiennent souvent un résultat positif à la culture des expectorations ou d'autres sécrétions respiratoires et parfois au frottisNote de bas de page 11. Jusqu'à 50 % des cultures d'expectorations induites sont positives dans la TB pleurale, et ce, même en l'absence d'anomalies à la radiographie pulmonaireNote de bas de page 12. Par conséquent, la TB miliaire et la TB pleurale devraient être considérées comme des maladies potentiellement contagieuses.

Les facteurs associés à la transmission de la TB sont décrits au chapitre 2, La pathogenèse et la transmission de la tuberculose. Les cas à frottis d'expectorations positifs et les cas de maladie cavitaire à la radiographie pulmonaire sont beaucoup plus contagieux que les cas à frottis négatif et les cas de TB non cavitaireNote de bas de page 2 Note de bas de page 8 Note de bas de page 9. L'adolescence, l'âge adulte, la toux, les éternuements et le chant augmentent aussi le risque de transmissionNote de bas de page 1. La transmission serait rare à l'extérieur; les milieux intérieurs mal ventilés, sombres et humides peuvent favoriser la survie de Mycobacterium tuberculosis et l'atteinte d'une concentration élevée du bacilleNote de bas de page 13 Note de bas de page 14. Chez les contacts infectés qui sont vulnérables à cause de leur jeune âge (moins de 5 ans), du VIH ou d'autres causes d'immunodépression majeure, l'infection peut évoluer rapidement vers la TB activeNote de bas de page 8; le diagnostic précoce dépend souvent d'un bon suivi des contacts.

La recherche des contacts demande souvent beaucoup de temps, d'expertise et de coordination. Ce sont les autorités de la santé publique/lutte antituberculeuse qui sont généralement le mieux à même de s'en charger, en collaboration avec le médecin traitant et d'autres dispensateurs de soins. L'anxiété, la stigmatisation et le manque de connaissances au sujet de la TB parmi les personnes exposées peuvent être des problèmes majeurs. Par ailleurs, il est important de fournir de l'information claire, crédible et uniforme au sujet de la TB et du plan de suivi des contacts.


Définitions

Cas index : premier cas ou cas initial de TB active à partir duquel débute le processus de recherche des contacts.

Cas source : personne à l'origine de l'infection du ou des cas secondaires ou des contacts. Le cas source peut être, mais n'est pas nécessairement, le cas index.

Contact : personne qui a été exposée à un cas de TB active. La proximité et la durée de l'exposition sont généralement corrélées au risque de contracter l'infection.


Objectifs de la recherche des contacts

La recherche des contacts comporte trois objectifs principaux, classés par ordre de priorité :

  1. identifier les cas secondaires de TB active et amorcer leur traitement;
  2. identifier et traiter le cas source qui a infecté le cas index, si ce dernier a moins de 5 ans;
  3. identifier les contacts atteints d'une ITL afin de leur offrir un traitement préventif.

Principes de la recherche des contacts

Classement par ordre de priorité

Il s'agit là du principe le plus important. Il est recommandé d'établir un ordre de priorité selon la contagiosité du cas source, l'ampleur de l'exposition et la vulnérabilité immunitaire des personnes exposées. Ainsi, il convient de déployer le plus d'efforts pour les contacts qui présentent le plus grand risque d'infection ou qui risquent le plus de développer une TB active s'ils sont infectés. La recherche des contacts est itérative : elle devrait être étendue si les résultats du suivi initial indiquent qu'une transmission est survenue.

Mise en route rapide de la recherche des contacts

Une évaluation rapide des contacts étroits permet d'identifier sans délai ceux qui présentent déjà une TB active ou, lorsque celle-ci a été exclue, d'amorcer le traitement de l'ITL chez les contacts récemment infectés avant que la maladie ne se manifeste.

Dès qu'un cas suspect de TB a été déclaré, les autorités de santé publique devraient s'assurer que tous les examens médicaux servant à confirmer le diagnostic et à déterminer le degré de contagiosité sont effectués (radiographie pulmonaire en plus d'un prélèvement d'expectorations au besoin, même pour les cas suspects de TB extrapulmonaire) et que le patient a été placé dans une chambre d'isolement des infections aéroportées. La mise en route d'un traitement antituberculeux adéquat est le moyen le plus efficace de réduire rapidement la contagiosité du cas et le risque pour les autres. Si les soupçons cliniques de TB pulmonaire sont assez forts pour que le traitement antituberculeux soit entrepris avant la confirmation microbiologique, la recherche des contacts familiaux devrait elle aussi débuter rapidement, en particulier chez tout enfant de moins de 5 ans, les contacts infectés par le VIH et les autres personnes chez qui l'infection, si elle est présente, risque fortement de progresser10. Un résultat positif au test d'amplification des acides nucléiques (TAAN) est un motif suffisant pour commencer la recherche des contacts (se référer au chapitre 3, Le diagnostic de la tuberculose active et de la pharmacorésistance). La recherche des contacts au-delà du groupe de priorité élevée (se référer ci-dessous) ne devrait débuter qu'après la confirmation microbiologique du diagnostic.

Évaluation du risque de transmission

Contagiosité du cas index

Le principal facteur qui détermine l'étendue de la recherche des contacts est le degré de contagiosité du cas index. Ni la pharmacorésistance ni la coinfection par le VIH n'augmentent la contagiosité; par conséquent, l'approche recommandée et l'ordre prioritaire de la recherche des contacts sont les mêmes. Cependant, l'agent employé pour le traitement de l'ITL chez les contacts devrait être choisi en fonction de l'antibiogramme réalisé chez le cas source.

Le résultat de l'analyse des expectorations est l'indicateur le plus fiable de la contagiosité. Le « pire » résultat (le plus fortement positif) est employé pour évaluer la contagiositéNote de bas de page 15. Les cas de TB laryngée sont considérés comme quatre à cinq fois plus contagieux que les cas de TB pulmonaire à frottis positif parce que le nombre de bactéries présentes peut être élevé à cause d'une TB pulmonaire étendue concomitanteNote de bas de page 1 Note de bas de page 16 Note de bas de page 17.

Les cavités à la radiographie pulmonaire ont été associées de façon répétée à une plus forte contagiosité, et ce, quel que soit le résultat du frottis. La tomodensitométrie (TDM) thoracique peut permettre de détecter des cavités précoces plus petites qui ne sont pas visibles à la radiographie pulmonaire; cependant, on ignore si les sujets dont les cavités ne sont visibles qu'à la TDM sont aussi contagieux que ceux dont les cavités sont visibles également à la radiographie pulmonaireNote de bas de page 10.

La toux est l'indicateur le moins fiable de la contagiosité, mais il est généralement associé à elle, en particulier dans les ménages. On a répertorié plusieurs agrégats bien documentés de cas de transmission de TB attribuable à des interventions médicales qui provoquent la toux ou à l'inhalation de fumée de crackNote de bas de page 18. Le chant et les activités analogues (p. ex. jouer d'un instrument à vent) sont aussi associés à un risque accru de transmissionNote de bas de page 19.

En général, les enfants de moins de 10 ans atteints de TB active ne sont pas considérés comme contagieux. Toutefois, dans des circonstances inhabituelles, même de très jeunes enfants peuvent transmettre la maladie, par exemple, s'il y a eu contamination et nettoyage inadéquat de l'équipement respiratoireNote de bas de page 20. Par contre, les adolescents peuvent transmettre très efficacement la TB, en partie parce qu'ils peuvent présenter une maladie étendue au moment du diagnostic, et particulièrement parce qu'ils peuvent avoir un grand nombre de contacts à l'écoleNote de bas de page 21 Note de bas de page 22. Il est recommandé de considérer comme un cas contagieux tout enfant atteint de la forme adulte de la TB pulmonaire (toux, cavités à la radiographie pulmonaire, frottis d'expectorations positif) et d'amorcer une recherche des contacts dans un tel cas.

Recherche du cas source

Lorsqu'une TB active (pulmonaire ou extrapulmonaire) est diagnostiquée chez un enfant de moins de 5 ans, il est recommandé de procéder immédiatement à une recherche d'un cas source contagieux parmi les proches de l'enfantNote de bas de page 10. Le plus souvent, le cas source est un adolescent ou un adulte du ménage ou encore un autre dispensateur de soins. La recherche du cas source est aussi recommandée lorsqu'un agrégat de cas de virage au TCT est décelé dans un établissement où il n'y a aucun cas source connu. Cependant, le rendement de la recherche du cas source est habituellement très faible; même chez les jeunes enfants, le cas source est identifié dans moins de la moitié des recherchesNote de bas de page 10 Note de bas de page 23. La recherche du cas source n'est pas recommandée pour les cas adultes de TB ni pour les enfants ou les adultes en bonne santé qui ont obtenu un résultat positif au TCT lors d'un dépistage régulier (pas dans le contexte décrit ci-dessus d'un agrégat de cas de virage au TCT dans un établissement).

La TB non respiratoire n'est pas jugée contagieuse dans la mesure où la présence d'une TB pulmonaire concomitante a été exclue, et elle ne nécessite pas le suivi des contacts. Elle peut toutefois être transmise exceptionnellement lors d'interventions médicales qui produisent des aérosols (autopsie, irrigation à haute pression pour le drainage d'abcès tuberculeux, etc.). La recherche du cas source dans les cas de TB non respiratoire n'est pas recommandée pour d'autres groupes que les enfants de moins de 5 ans, comme il a été mentionné précédemmentNote de bas de page 10.

Période probable de contagiosité

On considère généralement que les cas de TB pulmonaire deviennent contagieux lorsque débute la toux ou lorsqu'une toux existante s'aggrave. S'il n'y a pas de toux, ou si la durée de la toux est difficile à déterminer, on peut se fonder sur le moment d'apparition d'autres symptômes attribuables à la TB pour estimer le début de la contagiosité. En pratique, cependant, il est souvent difficile de savoir avec certitude à quel moment sont apparus les symptômes.

En général, la recherche des contacts devrait toujours viser prioritairement la période où le patient atteint de TB avait des symptômes respiratoires (p. ex. toux). Toutefois, selon les lignes directrices publiées par les Centers for Disease Control and Prevention des États-UnisNote de bas de page 10, le début de la période de contagiosité des cas de TB à frottis positif ou symptomatiques devrait être fixé à 3 mois avant l'apparition des symptômes respiratoires ou la détection du premier signe positif compatible avec une TB, selon la première de ces deux éventualités. Pour les cas asymptomatiques à frottis négatif sans cavité à la radiographie pulmonaire, le début de la période de contagiosité devrait être fixé à 4 semaines avant la date où la TB a été soupçonnée. Néanmoins, ces lignes directrices se fondent sur l'opinion d'experts plutôt que sur des données épidémiologiques non équivoques.

Aux fins du suivi des contacts, la période de contagiosité se termine lorsque le cas index est en isolement des infections aéroportées, que ce soit avant ou après le diagnostic, ou n'est plus contagieux (la première de ces deux éventualités). Le lecteur peut consulter le chapitre 15, La prévention et la lutte contre la transmission de la tuberculose dans les milieux de soins de santé et d'autres milieux, pour savoir quand l'isolement d'un cas suspect ou confirmé de TB peut être levé.

Degré d'exposition au cas index

L'entrevue d'un cas contagieux de TB pour la recherche des contacts est l'une des parties les plus importantes de l'enquête. Elle nécessite d'excellentes aptitudes et réussit le mieux lorsqu'elle est menée par du personnel qui connaît bien (grâce à sa formation ou à son expérience) les techniques d'entrevue en santé publiqueNote de bas de page 24. La confiance et les bonnes relations sont importantes pour que le cas divulgue toute l'information qu'il possède, et la première entrevue peut aussi donner l'impulsion requise pour l'observance de longue durée du traitement antituberculeux. Idéalement, l'entrevue devrait se faire face à face et en privé. Comme la plupart des cas de TB au Canada sont nés dans un pays où l'incidence de la TB est élevée ou dans une communauté des Premières Nations ou une communauté inuite (se référer au chapitre 1, L'épidémiologie de la tuberculose au Canada), la langue et les perceptions culturelles au sujet de la TB et de la santé revêtent une grande importance. Il est souhaitable de mener l'entrevue dans la langue que le patient connaît le mieux. Il est recommandé que les services d'un interprète professionnel ou une tierce partie objective (pas un membre de la famille) soient utilisés si possible, et celui-ci peut participer à l'entrevue soit en personne ou par téléphone. Les personnes qui mènent les entrevues devraient toujours être respectueuses envers les patients et sensibles à leurs préoccupations et à leurs croyances au sujet de la TB. Au cours de l'entrevue, elles devraient transmettre de l'information au sujet de la TB et souligner le fait que la recherche des contacts est confidentielle. Il faut toutefois noter que la loi peut permettre ou exiger la communication de renseignements au sujet du diagnostic du cas à certaines personnes (p. ex. les autorités de santé publique) ou dans certaines circonstances. Par exemple, même si des précautions peuvent être prises pour éviter de dévoiler le nom du cas au public ou aux contacts, il peut arriver que des renseignements doivent être communiqués à certaines personnes (p. ex. le directeur de l'école) afin d'identifier les contacts ou de communiquer avec eux et afin de s'assurer que les contacts feront eux aussi l'objet du suivi médical dont ils ont besoin.

Idéalement, le médecin traitant et le laboratoire devraient signaler tous les nouveaux cas et tous les cas suspects de TB aux autorités de santé publique compétentes dans les 48 heures. La première communication des services de santé publique avec un nouveau patient contagieux (ou les dispensateurs de soins si le patient est hospitalisé) devrait avoir lieu le lendemain du jour où le cas a été déclaré. Ce court délai vise à assurer un isolement adéquat des infections aéroportées, à offrir tout soutien urgent, à identifier les contacts familiaux et à aiguiller tout contact malade afin qu'il subisse une évaluation immédiate pour la TB. La première entrevue visant à retracer les contacts devrait avoir lieu dans les 3 jours ouvrables. Il est préférable de réaliser l'entrevue en deux séances (ou plus), à 1 semaine d'intervalle : le patient se sentira plus à l'aise avec le personnel des services de santé publique et le stress et l'anxiété qu'il vivait au départ à cause du diagnostic se seront atténués. Des entrevues supplémentaires avec la famille, des amis proches ou des collègues de travail (idéalement avec la permission du patient) peuvent être utiles. De telles personnes peuvent aussi être interrogées si le patient est incapable ou refuse de participer à l'entrevue. Il est important de poser des questions au sujet des endroits où le cas passe régulièrement du temps (pas seulement le nom de personnes) et d'obtenir des détails au sujet des contacts si possible (nom, surnom, numéro de téléphone, adresse, adresse de courriel, âge, nature des relations).

Au cours des entrevues visant à identifier les contacts, les renseignements suivants devraient être recueillis :

  • tout contact avec des enfants et l'âge de ces enfants;
  • tout contact avec une personne immunodéprimée (personne infectée par le VIH, patient cancéreux, etc.);
  • description du ménage/milieu collectif; contacts familiaux et leur âge (y compris toute personne qui dort régulièrement au domicile);
  • amis proches et parents que le cas voit au moins une fois par semaine (demander à quelle fréquence, pendant combien de temps);
  • endroit où est situé le lieu de travail ou l'école, et description du milieu (type de travail, taille de la pièce, ventilation, etc.);
  • transport pour se rendre au travail ou à l'école (autobus, covoiturage, etc.);
  • église fréquentée, clubs, équipes sportives, programmes récréatifs ou hobbys;
  • tout autre endroit ou groupe que le cas a fréquenté régulièrement pendant qu'il était contagieux;
  • tout contact malade qui présente des symptômes compatibles avec la TB ou est atteint de TB;
  • tout grand événement (mariage, funérailles, fête, etc.) auquel le cas a participé pendant qu'il était contagieux;
  • tout voyage récent ou tout visiteur qui a passé du temps au domicile dans les 2 dernières années (le cas échéant, obtenir les détails).

Une visite à domicile pour évaluer l'endroit est fortement recommandée, même si la première entrevue a lieu à l'hôpital. Elle vise entre autres à déterminer si l'isolement à domicile est possible, à identifier d'autres contacts familiaux et à déceler tout problème social ou pratique qui pourrait avoir une incidence sur l'observance du traitement. La visite de l'école ou du lieu de travail et d'autres endroits où une exposition a eu lieu peut aussi être très utile pour la prise de décisions concernant le suivi des contacts (caractéristiques de l'endroit telles que la taille, la configuration, l'utilisation de l'espace et la ventilation; une entrevue avec un superviseur direct peut aider à identifier les contacts possibles). La discrétion est de mise, car une visite des lieux peut susciter inutilement de l'anxiété et entraîner une violation de la confidentialité et des répercussions pour le cas. À cet égard, il est souhaitable d'organiser la visite directement avec un dirigeant, par exemple le directeur de l'école, le gestionnaire de division ou le gestionnaire de la santé au travail, et de lui indiquer à quel point il est important de préserver le plus possible la confidentialité. Se référer à la section sur la recherche des contacts basée sur le lieu, plus loin.

Tant de variables peuvent influer sur la transmission de la TB qu'il est très difficile de déterminer le degré d'exposition associé à un risque majeurNote de bas de page 25. En théorie, aucune exposition à un cas contagieux de TB n'est absolument sans risque; en pratique, chaque cas devrait être évalué en fonction des caractéristiques qui lui sont propres. Par exemple, une étude menée auprès de 3 000 contacts a montré que ceux dont le TCT était positif avaient été exposés en moyenne 65 heures de plus que ceux dont le TCT était négatifNote de bas de page 26. Par contre, lors d'une enquête sur une éclosion parmi des étudiants universitaires qui avaient été exposés à un cas index atteint de TB laryngée et de TB pulmonaire cavitaire, le risque d'infection par heure d'exposition dépassait 1 % dans de nombreuses classes; chez certains contacts, un virage au TCT était survenu après une exposition d'à peine 3 ou 4 heures par semaineNote de bas de page 27. L'exposition dans un endroit exigu et mal ventilé peut entraîner une transmission beaucoup plus rapidement, et les empreintes d'ADN ont parfois permis de découvrir une transmission manifeste après une exposition de près, mais très brève, au cas indexNote de bas de page 28.

Recherche organisée et systématique des contacts : contacts prioritaires

Une démarche organisée et systématique permettra au programme de lutte antituberculeuse de concentrer ses efforts sur les contacts les plus à risque. La 6e édition des Normes préconisait la méthode classique des « cercles concentriques » pour déterminer les priorités en matière de suivi des contacts. Cette méthode consiste à commencer par les contacts les plus exposés (p. ex. les contacts familiaux) et à étendre le suivi étape par étape à ceux de moins en moins exposés en présence de signes de transmission, et ce, jusqu'à ce que le taux d'infection tuberculeuse atteigne le taux de base. Cependant, cette méthode ne prend pas en considération les contacts qui peuvent avoir été moins exposés, mais qui ont une vulnérabilité immunitaire et peuvent donc, s'ils sont infectés, développer rapidement une TB active. Le suivi adéquat des contacts peut aussi être très retardé lorsque l'on sait déjà que le cas index est très contagieux. L'une des difficultés fondamentales est que la transmission peut être très difficile à évaluer lorsque le taux de base de la positivité au TCT est inconnu ou élevé (p. ex. parmi les immigrants au Canada originaires d'un pays où l'incidence est élevée). C'est souvent le cas au Canada, où la majorité des cas de TB (et bon nombre de leurs contacts étroits) sont nés à l'étranger; il en va de même dans de nombreuses communautés autochtones. La méthode des cercles concentriques seule peut aussi être difficile à appliquer dans les milieux collectifs complexesNote de bas de page 22 Note de bas de page 29.

L'édition actuelle des Normes recommande plutôt ce qui suit en ce qui concerne les priorités pour le suivi initial des contacts et les critères d'expansion de la recherche. Il s'agit de lignes directrices : il importe toujours de tenir compte des circonstances particulières, de travailler en s'appuyant sur les principes majeurs de la transmission de la TB et de réévaluer la démarche en fonction des résultats dès qu'ils sont disponibles.

Aux fins du suivi des cas de TB, les contacts peuvent être classés comme suit :

Les contacts familiaux sont ceux qui dorment régulièrement sous le même toit que le cas contagieux (p. ex. trois ou quatre fois par semaine). Il peut s'agir par exemple des membres de la famille élargie, de compagnons de chambre, de pensionnaires ou de « couchsurfeurs ». Les membres du ménage sont souvent les plus exposés au cas de TBNote de bas de page 8 Note de bas de page 22 Note de bas de page 26.

Les contacts non familiaux étroits sont ceux qui ont un contact régulier et étroit avec le cas index et respirent le même air quotidiennement ou presque, mais ne dorment pas sous le même toit la plupart du temps. Il peut s'agir des dispensateurs de soins, des partenaires sexuels réguliers, d'amis proches ou des membres de la famille élargie. Entrent aussi dans cette catégorie les contacts à la garderie ou à l'école primaire ou secondaire ainsi que les collègues du cas qui travaillent près de lui, en particulier si la pièce est petite. Le temps que les élèves d'une école secondaire passent dans la même pièce que le cas dépend du nombre de cours qu'ils ont en commun; la priorité devrait être accordée aux élèves qui passent le plus de temps avec le cas. De même, dans presque tous les milieux de travail, il est possible (et important) de définir le groupe de collègues qui passent le plus de temps à respirer le même air que le cas. Les contacts réguliers dans les milieux de soins de santé spécialisés tels que les unités de dialyse et les programmes de réadaptation peuvent aussi faire partie de cette catégorie. Ce n'est pas l'étroitesse du contact social avec le cas de TB qui importe le plus, mais plutôt le temps passé à respirer le même air. Par exemple, les travailleurs en informatique peuvent considérer qu'ils travaillent très étroitement avec d'autres dans leur groupe, mais passer en fait peu de temps ensemble dans une même pièce à respirer le même air si la plus grande partie du travail se fait par voie électronique.

Les contacts occasionnels sont les personnes qui passent régulièrement mais moins fréquemment du temps avec le cas contagieux. Il peut s'agir d'élèves du secondaire qui ont moins de cours avec le cas, d'étudiants d'un collège ou d'une université qui ont des cours en commun ou de collègues de travail moins exposés; des membres d'un club ou d'une équipe, du groupe de jeu hebdomadaire des enfants ou d'un autre groupe social, de loisir ou religieux; des membres de la famille élargie qui rencontrent le cas à l'occasion; ou d'autres élèves dans un autobus scolaire.

Les contacts sociaux regroupent les personnes qui vivent dans la même collectivité, qui fréquentent la même école sans avoir de cours dans la même salle ou qui travaillent au même endroit, mais dans une pièce différente. Les personnes exposées de façon passagère ou occasionnelle font partie de ce groupe.

Les contacts de priorité élevée sont ceux qui sont les plus exposés et ceux qui risquent le plus de développer une TB active s'ils sont infectés :

  • les contacts familiaux, y compris ceux exposés à titre de « membres du ménage » dans un milieu collectif tel qu'un refuge pour sans-abri, un établissement correctionnel ou un établissement de soins de longue durée (en général, les compagnons de chambre ou de cellule);
  • les contacts non familiaux étroits ou les contacts occasionnels qui, s'ils sont infectés, risquent fortement de développer une TB active, p. ex. les enfants de moins de 5 ans, les personnes infectées par le VIH, dialysées ou greffées ou les personnes souffrant de silicose (se référer au chapitre 4, Le diagnostic de l'infection tuberculeuse latente, et le chapitre 6, Le traitement de l'infection tuberculeuse latente);
  • les contacts exposés au bacille tuberculeux (sans masque N95) pendant une bronchoscopie, une induction de l'expectoration, une autopsie ou une autre intervention médicale qui génère des aérosols (se référer au chapitre 15).

Les contacts de priorité moyenne sont les contacts non familiaux étroits qui ne risquent pas fortement de développer rapidement une TB active. La plupart des contacts non familiaux étroits sont classés dans ce groupe.

Les contacts occasionnels sont de priorité faible. Il est généralement recommandé de n'étendre la recherche à ce groupe que s'il existe des signes de transmission ou si le cas est considéré comme extrêmement contagieux, par exemple s'il est atteint de TB laryngée (se référer au chapitre 2, La transmission et la pathogenèse de la tuberculose). Cependant, il faudrait toujours tenir compte des circonstances particulières. Par exemple, le risque pour une chorale se réunissant une fois par semaine peut être beaucoup plus grand que pour une équipe de soccer qui joue à l'extérieur une fois par semaine; les enfants qui font chaque jour de longs trajets en autobus, en hiver, alors que les fenêtres sont généralement fermées, peuvent être fortement exposésNote de bas de page 30.

Il est rare que la recherche doive s'étendre aux contacts sociaux (p. ex. une école entière, et non pas uniquement les élèves exposés dans les salles de classe, les clients d'une épicerie ou d'un restaurant à service rapide)Note de bas de page 31. Une recherche si étendue ne devrait être entreprise que dans des circonstances très particulières; dans un tel cas, il est recommandé de consulter des collègues des services de santé publique qui possèdent de l'expérience en la matière.

Pour les cas de TB respiratoire dont le frottis d'expectorations est positif ou qui sont atteints de TB cavitaire ou laryngée, la recherche initiale devrait porter sur les contacts de priorité élevée et de priorité moyenne. S'il y a des signes de transmission (se référer ci-dessous) dans ces deux groupes, on devrait envisager d'étendre le suivi aux contacts occasionnels. En présence d'une TB laryngée, on devrait aussi envisager d'entrée de jeu le suivi des contacts occasionnels (groupes sociaux, de loisir, etc.)Note de bas de page 10.

Pour les cas de TB respiratoire à frottis négatif, les membres du ménage devraient toujours être visés par la recherche des contacts initiale, ainsi que tous les contacts de priorité élevée. La recherche ne devrait cependant être étendue aux contacts de priorité moyenne (p. ex. les autres contacts non familiaux étroits) que s'il y a des signes de transmissionNote de bas de page 10 Note de bas de page 15.

Les contacts de priorité élevée devraient être évalués que le cas soit à frottis négatif ou positif. Dans la mesure du possible, l'évaluation initiale (TCT et évaluation des symptômes, puis évaluation du médecin et radiographie pulmonaire si le résultat du TCT est ≥ 5 mm ou si le patient est symptomatique, plus analyse des expectorations si le contact est symptomatique ou si la radiographie pulmonaire est anormale) des contacts de priorité élevée devrait débuter dans les 7 jours ouvrables suivant leur identification et se terminer dans le mois suivant. Les contacts de priorité élevée devraient idéalement être soumis à deux TCT (le deuxième au moins 8 semaines après le dernier jour d'exposition) pour qu'on puisse déceler un virage. Les taux de participation au TCT pourraient être plus élevés si celui-ci est effectué directement par le personnel du programme de lutte antituberculeuse, à domicile ou à la clinique de TBNote de bas de page 10.

On observe souvent, en particulier parmi les contacts non familiaux, une baisse majeure du taux de participation entre le TCT initial et le TCT après 8 semaines, l'inquiétude s'atténuant peu à peu. Par conséquent, dans la plupart des milieux non familiaux, il est plus pratique d'effectuer un seul TCT 8 semaines après la fin du contact. Dans le cas des populations comptant de nombreuses personnes ayant déjà été exposées à la TB ou vaccinées par le BCG (p. ex. immigrants originaires d'un pays à forte incidence), on évite ainsi les faux virages au TCT attribuables à un effet de rappel. Si les contacts occasionnels sont inclus dans la recherche, un seul TCT 8 semaines après le dernier jour d'exposition est recommandéNote de bas de page 32.

Expansion de la recherche des contacts

On considère qu'il y a eu transmission si un cas secondaire est découvert parmi les contacts, s'il y a eu virage au TCT, si le taux de prévalence d'un résultat au TCT ≥ 10 mm parmi les contacts est nettement plus élevé que prévu (p. ex. 60 % parmi les contacts lorsque le taux de prévalence attendu est de 40 %, se référer au tableau 1) ou si un enfant de moins de 5 ans est infecté sans qu'il existe une autre source probable. Les résultats du TCT chez les contacts nés au Canada, en particulier les enfants, peuvent être le renseignement le plus utile pour évaluer la transmission. Un résultat au TCT ≥ 5 mm est considéré comme positif chez les contacts; dans les cas de virage, le résultat est positif s'il y a eu une augmentation de 6 mm ou plus par rapport à un résultat antérieur de 5 à 9 mm. Des antécédents de vaccination par le BCG ne modifient pas l'interprétation du résultat du TCT (se référer au chapitre 4, Le diagnostic de l'infection tuberculeuse latente, pour en savoir plus). Lorsqu'il y a des signes de transmission, la recherche des contacts devrait d'abord viser tous les contacts de priorité élevée et de priorité modérée qui n'ont pas encore été évalués. On devrait ensuite envisager d'étendre la recherche aux contacts occasionnels. Un génotypage devrait être demandé pour qu'on puisse comparer le cas index et les cas secondaires, mais la recherche des contacts ne devrait pas être retardée en l'attente des résultats.

Tableau 1. Intervalle attendu de prévalence d'un résultat au TCT ≥ 10 mm dans diverses populations CanadiennesTable 1 - Footnote A
Population Intervalle attendu de prévalenced'un résultat au TCT ≥ 10 mm (%)
Statut à l'égard du BCG non précisé Vacciné par le BCG Non vacciné par le par BCG

s.o. = sans objet

ABasé sur le Compendium des taux de prévalence de l'infection tuberculeuse latente au Canada, Agence de la santé publique du Canada, 2012 (pour obtenir le Compendium en version électronique, prière de communiquer avec TB_surveillance@phac-aspc.gc.ca).
BBien que l'appartenance ou non à la population autochtone ne soit pas précisée dans l'étude, on a présumé que la grande majorité de la population de référence appartenait à la catégorie des non-Autochtones nés au Canada.
Enfants non autochtones nés au CanadaTable 1 - Footnote B s.o. s.o. 1-3
Adultes non autochtones nés au Canada 13 65 7
Enfants autochtones nés au Canada 5-29 6-25 0-5
Adultes autochtones nés au Canada 14-30 29-50 17-21
Enfants nés à l'étranger 15-23 s.o. s.o.
Adultes nés à l'étranger 53-61 73 25
Travailleurs de la santé 11-46 27-77 5-18
Résidents des établissements de soins de longue durée (de 60 ans et plus) 6-25 71 18
Résidents des refuges pour sans-abri 45 s.o. s.o.
Détenus dans les établissements correctionnels 12-72 90 63
Personnel des établissements correctionnels 5-33 s.o. s.o.
Utilisateurs de drogues par injection (TCT ≥ 5 mm) 31 s.o. s.o.
Utilisateurs de drogues par injection (TCT ≥ 10 mm) 66 s.o. s.o.
Personnes souffrant d'une condition médicale préexistante (TCT ≥ 5 mm) 14-24 s.o. s.o.
Personnes souffrant d'une condition médicale préexistante (TCT ≥ 10 mm) 18-26 s.o. s.o.
Collectivité en entier 6-36 s.o. s.o.

Des pressions sont souvent exercées sur les services de santé publique ou un médecin pour qu'ils entreprennent dès le départ une recherche des contacts à grande échelle, par exemple dans toute une école. Il est alors souvent impossible d'interpréter les résultats d'un TCT ou d'un test de libération d'interféron gamma (TLIG) positif chez un patient. Les contacts peuvent être considérés à tort comme ayant été infectés récemment, et la recherche peut être étendue encore davantage. Une telle situation peut aussi se solder par des inquiétudes généralisées au sujet du risque de transmission aux contacts sociaux. Si l'expansion de la recherche au-delà des groupes de priorité élevée et de priorité modérée est envisagée, la décision finale devrait reposer sur une évaluation de tout signe de transmission lors de la recherche initiale, la probabilité de découvrir des cas infectés parmi les contacts moins exposés et la probabilité que ces contacts occasionnels se soumettent aux recommandations relatives au dépistage et au traitement de l'ITL. Parmi les contacts moins exposés, le taux de prévalence du TCT positif est habituellement de quatre à huit fois moindre que parmi les contacts familiauxNote de bas de page 4 Note de bas de page 8 Note de bas de page 33 Note de bas de page 34. Par ailleurs, le taux de participation des contacts au dépistage de la TB, au suivi et au traitement de l'ITL est généralement plus faible parmi les contacts moins étroits, les contacts de cas moins contagieux et chez les adultes comparativement aux enfantsNote de bas de page 35.

Autres méthodes de recherche des contacts

Empreintes d'ADN

Tous les programmes canadiens de lutte antituberculeuse peuvent obtenir l'empreinte d'ADN des bacilles tuberculeux, sur demande ou de façon régulière, auprès des laboratoires de santé publique. Ces empreintes peuvent être un complément utile aux enquêtes épidémiologiques afin de confirmer ou d'infirmer un lien soupçonné entre des cas et pour évaluer la possibilité que des échantillons aient été intervertis avec d'autresNote de bas de page 36 Note de bas de page 37. Elles peuvent être particulièrement utiles pour les populations dans lesquelles le suivi des contacts est difficile et nécessite beaucoup de ressources, par exemple les sans-abri; le recours régulier aux empreintes d'ADN chez les cas sans abri peut permettre de déceler des liens qui ne seraient pas soupçonnés autrement et d'orienter la recherche étendue des contactsNote de bas de page 38 Note de bas de page 39. Les techniques rapides de détermination de l'empreinte d'ADN (spoligotypage, MIRU [Mycobacterium Interspersed Repetitive Units]) sont utiles pour identifier ou exclure rapidement un nouveau cas possible dans un agrégat croissant ou une éclosion. Les empreintes d'ADN peuvent aussi avoir une grande utilité, et être rassurantes, pour l'évaluation de possibles agrégats lorsque les résultats ne révèlent pas de lien autre qu'avec les cas secondaires familiaux connus.

Recherche des contacts basée sur le lieu et analyse des réseaux sociaux

Il convient de demander systématiquement à tous les cas où ils passent du temps. La détermination des endroits où le cas a passé du temps peut être plus productive que la méthode classique basée sur les noms, en particulier lorsqu'un cas contagieux ne veut pas ou ne peut pas nommer ses contacts ou lorsqu'un cas est répertorié sans qu'il soit possible de déterminer le risque d'exposition ou la sourceNote de bas de page 40. Les enquêtes ont permis de déceler une transmission qui s'était produite par exemple dans des bars ou des lieux où l'on consommait du crackNote de bas de page 41 Note de bas de page 42 Note de bas de page 43, endroits qui peuvent ensuite être ciblés pour des séances de dépistage à grande échelle sur place et où l'on peut offrir des séances d'éducation et des services spéciaux en matière de TB. Les liens épidémiologiques entre les cas peuvent être plus faciles à établir si, au cours de l'entrevue, on pose aux cas des questions au sujet des endroits communs qu'ils pourraient fréquenter.

L'analyse des réseaux sociaux consiste à examiner les relations sociales entre les cas et les contacts afin de déterminer les milieux et les comportements qui caractérisent la transmission. Cette méthode a été très étudiée dans les cas d'infections transmises sexuellement et, plus récemment, dans l'étude d'éclosions de TBNote de bas de page 40 Note de bas de page 43 Note de bas de page 44 Note de bas de page 45. Une analyse des réseaux sociaux structurée, à l'aide d'un logiciel spécial, peut être particulièrement utile lors des éclosions (se référer à: Pajek-Program for Large Network Analysis (disponible en anglais seulement)).

Dépistage sur place et milieux collectifs

Dans certains milieux, il est beaucoup plus simple et facile d'effectuer une recherche de contacts dans tout un groupe (p. ex. une classe à l'école ou les collègues de travail) que de tenter de trouver les personnes particulières qui ont été le plus exposées. Lorsqu'on décide de l'ampleur de l'enquête et du nombre de personnes à soumettre au test de dépistage, il faudrait tenir compte de certains facteurs pratiques comme la capacité de mesurer de façon fiable le degré d'exposition des différentes personnes dans le milieu en question, la capacité administrative à offrir des tests efficaces et de l'éducation sur la TB et les implications d'une recherche étendue ultérieure à un plus grand groupe s'il y a lieu. De même, dans certains milieux (p. ex. refuges pour sans-abri) où il est difficile d'identifier ou de trouver les contacts, il peut être utile d'effectuer d'entrée de jeu un dépistage à plus grande échelle.

Lorsque la transmission a pu se produire dans une école, un lieu de travail ou un autre milieu collectif, il est habituellement préférable de procéder au dépistage sur place : le taux de participation des contacts sera plus élevé, la communication sera meilleure et l'anxiété sera moindre. Le dépistage sur place est généralement la méthode la plus efficace et efficiente et celle qui permet le mieux d'obtenir l'information nécessaire, mais il doit être bien organisé.

La démarche suivante est recommandée :

  • désigner une personne qui sera responsable des aspects organisationnels de la recherche des contacts et servira d'agent de liaison; la plupart du temps, il s'agit du directeur de l'école, du gestionnaire du milieu de travail ou du gestionnaire en santé au travail;
  • maintenir la confidentialité du cas index (la recherche des contacts devrait être effectuée conformément aux lois et aux exigences législatives qui s'appliquent et que la législation provinciale et territoriale peut autoriser la divulgation dans des circonstances particulières.) Le maintien de la confidentialité pourrait être difficile : une forte pression pourrait être exercée pour obtenir les détails et, dans bien des cas, certaines personnes pourraient être capables de déduire l'identité du cas. Demander l'aide d'un employé de l'endroit (p. ex. le directeur ou le gestionnaire) pour qu'il planifie la réintégration réussie du cas de TB lorsqu'il ne sera plus contagieux, en particulier si son identité est bien connue ou soupçonnée;
  • se rendre sur les lieux au préalable pour se familiariser avec l'endroit et pour organiser le dépistage; demander l'avis de l'agent de liaison pour s'assurer que le dépistage aura lieu à un moment et d'une manière qui offrent les meilleures chances de participation des contacts au dépistage;
  • s'assurer qu'il y aura assez de personnel disponible pour le dépistage;
  • s'assurer le concours de personnes clés sur place (p. ex. des employés des services de santé au travail, des ressources humaines ou d'autres services administratifs, et des représentants en santé et sécurité au travail du syndicat) pour qu'elles collaborent à la planification et aux communications; ces personnes pourraient bénéficier de renseignements sur la TB qui leur seraient communiqués avant la séance générale d'information, car les autres employés se tourneront probablement vers eux pour obtenir des conseils;
  • élaborer un plan de communication; désigner une personne qui sera responsable des relations avec les médias et des communications à la population générale au besoin; aviser le personnel des communications des services de santé publique;
  • offrir des séances générales d'information ou d'éducation au sujet de la TB et du suivi des contacts à l'intention des parents, employés ou résidents avant les séances de dépistage; si le nombre de contacts est relativement petit, une séance organisée expressément pour eux pourrait être utile;
  • concevoir un plan d'aiguillage des contacts symptomatiques ou dont le TCT est positif. Traiter de la même façon tous les contacts qui sont orientés en vue d'une évaluation médicale; la meilleure façon d'y parvenir est d'avoir recours à un petit groupe de dispensateurs de soins qui agissent en collaboration avec les services de santé publique. Si les contacts ne sont pas tous traités de la même façon (p. ex. dépistage, conseils sur le traitement), cela peut susciter chez eux de la confusion et de l'inquiétude;
  • s'assurer de fournir rapidement aux autorités de santé publique compétentes les résultats de l'évaluation médicale.

La recherche des contacts effectuée à l'école ou sur un lieu de travail peut être une source importante d'anxiété. Une bonne organisation, de bonnes communications et la transparence (dans la mesure du possible tout en protégeant l'identité du cas) sont des aspects essentiels de toute recherche des contacts étendue ou sur place. L'anxiété et la circulation d'information erronée peuvent être réduites en limitant la période entre la communication avec le lieu de transmission et la tenue du dépistage, en s'assurant que toutes les personnes clés sur place obtiennent la même information en même temps et en organisant des séances générales d'information au sujet de la TB et du plan de recherche des contacts. Les messages véhiculés par tous les employés qui participent à la recherche des contacts devraient être clairs, crédibles et cohérents, notamment en ce qui concerne le niveau de risque, l'interprétation du TCT et les décisions relatives au traitement de l'ITL.

Approche normalisée de l'évaluation des contacts visant à déceler la présence d'une TB active et les signes d'une infection récente

On devrait interroger systématiquement tous les contacts identifiés concernant leur exposition au cas, la présence de symptômes, les facteurs de risque de progression vers la TB active en cas d'infection et les antécédents de traitement contre la TB ou l'ITL. Si l'on soupçonne une infection chez un contact, on devrait procéder rapidement à une évaluation pour exclure une TB active. Une fois que celle-ci a été exclue, le contact devrait subir un TCT à moins d'avoir déjà été traité contre la TB ou d'avoir déjà obtenu un résultat positif attesté au TCT. Le TCT devrait être administré et interprété sans tenir compte du statut du sujet à l'égard de la vaccination par le BCG. Un résultat au TCT ≥ 5 mm est considéré comme positif chez les contacts. Se référer aussi au chapitre 4, le chapitre 6 et le chapitre 9, La tuberculose de l'enfant.

À noter que la recherche des contacts peut se faire à l'aide d'un TCT ou d'un TLIG (se référer au chapitre 4, Le diagnostic de l'infection tuberculeuse latente).

Le TCT en deux étapes n'est pas recommandé pour la recherche des contacts. Le virage tuberculinique peut se produire dès 3 semaines après l'exposition, et il sera habituellement impossible de distinguer un vrai virage d'un effet de rappel dans le cadre d'une recherche des contacts (se référer aux chapitres 2 et 4). C'est là une autre raison pour laquelle seules les personnes ayant été fortement exposées devraient être considérées comme des contacts.

Traitement de l'ITL pendant la période de latence sérologique pour les personnes les plus susceptibles. Les contacts qui, s'ils sont infectés, risquent fortement de développer une TB active (enfants de moins de 5 ans, personnes infectées par le VIH ou autres personnes immunodéprimées) devraient recevoir un traitement préventif dans l'intervalle compris entre un résultat négatif au premier TCT et le deuxième TCT, réalisé au moins 8 semaines après le dernier jour d'exposition. Se référer aux chapitres 6 et 9 pour en savoir plus.

Évaluation de la recherche des contacts

Les résultats de chaque recherche des contacts devraient être examinés dès qu'ils sont connus, car ils permettront de déterminer s'il y a lieu d'étendre la recherche ou de consacrer plus d'efforts au suivi. De plus, les résultats à l'échelle du programme devraient être examinés chaque année. Outre l'évaluation qualitative des réussites et des difficultés, il existe des éléments importants pour l'évaluation du programme et la planification future. Les principaux indicateurs devraient être les suivants :

  • liste initiale complète des contacts de chaque cas contagieux de TB dressée dans les 7 jours civils;
  • évaluation des contacts étroits terminée et traitement de l'ITL amorcé, s'il est justifié et n'est pas contre-indiqué ni refusé, dans les 28 jours civils;
  • proportion des contacts chez qui l'on a diagnostiqué une ITL qui commencent le traitement;
  • proportion des contacts qui commencent le traitement de l'ITL et le terminent;
  • proportion des contacts ayant terminé le traitement de l'ITL qui présentent une TB active dans les 2 années suivantes.

Points clés

Étapes recommandées de la recherche et du suivi des contacts
  1. Le médecin traitant et le laboratoire devraient signaler aux autorités de santé publique compétentes tous les cas nouveaux ou suspects de TB dans les 48 heures.
  2. Chaque nouveau cas actif devrait être interrogé par les autorités de santé publique pour qu'on puisse identifier rapidement les contacts familiaux et les autres contacts étroits. Les programmes de lutte antituberculeuse devraient établir un ordre de priorité pour la recherche des contacts selon la contagiosité du cas source, l'ampleur de l'exposition et le risque de développement d'une TB active si le contact est infecté.
  3. Chaque contact devrait être interrogé au sujet des circonstances et de la durée de l'exposition, de la présence de symptômes, des antécédents de TB, de l'exposition à la TB et des TCT passés.
  4. Les autorités de santé publique et le médecin traitant devraient collaborer en vue de s'assurer que les contacts qui n'ont aucun antécédent de TB et n'ont jamais eu de résultat positif attesté au TCT subissent un TCT et une évaluation de symptômes.
  5. Dans le contexte de la recherche des contacts, un résultat positif au TCT initial ou répété correspond à une induration de 5 mm ou plus ou à une augmentation d'au moins 6 mm par rapport à un résultat antérieur de 5 à 9 mm. Une vaccination antérieure par le BCG ne modifie en rien l'interprétation des résultats du TCT chez les contacts. Le TCT devrait être répété au moins 8 semaines après la dernière exposition chez tous les contacts de priorité élevée qui ont obtenu un premier résultat négatif. Se référer au chapitre 4, Le diagnostic de l'infection tuberculeuse latente, pour en savoir plus.
  6. Une évaluation médicale visant à exclure une TB active devrait être effectuée chez tous les contacts qui présentent des symptômes compatibles avec une TB ou obtiennent un résultat positif au TCT (avant l'exposition ou lors du TCT initial ou du deuxième TCT) et (quel que soit le résultat du TCT initial) chez tous les enfants de moins de 5 ans et chez tous les contacts infectés par le VIH ou sévèrement immunodéprimés pour une autre raison, conformément aux recommandations du chapitre 3, Le diagnostic de la tuberculose active et de la pharmacorésistance, du chapitre 9, La tuberculose de l'enfant, et du chapitre 10, La tuberculose et le virus de l'immunodéficience humaine. L'évaluation devrait comprendre une radiographie pulmonaire, en plus d'une analyse des expectorations s'il y a lieu.
  7. Une fois la TB active exclue, le traitement de l'ITL devrait être offert aux contacts conformément aux recommandations du chapitre 6, Le traitement de l'infection tuberculeuse latente, du chapitre 9, La tuberculose de l'enfant, et du chapitre 10, La tuberculose et le virus de l'immunodéficience humaine.
  8. Les autorités de santé publique devraient déterminer s'il y a lieu d'étendre la recherche des contacts en se basant sur la contagiosité du cas index, les résultats de la recherche parmi les contacts de priorité élevée et la nature de l'exposition des autres contacts.
  9. La recherche étendue des contacts devrait être systématique et organisée; les responsables de la santé publique/lutte antituberculeuse devraient coordonner une telle recherche.

Les résultats de la recherche des contacts devraient être évalués par le programme de lutte antituberculeuse.


Recherche des contacts dans des milieux spéciaux

Sans-abri et personnes mal logées et personnes souffrant de toxicomanie

La recherche des contacts parmi les sans-abri, les grands consommateurs de drogues illicites ou d'autres personnes très marginalisées est très difficile en plus d'exiger beaucoup de ressources. Il est facile de se sentir frustré et dépassé par la tâche. On peut aplanir ces difficultés et en venir à bout si l'on reconnaît qu'il ne s'agit pas là de cas courants, si l'on garde à l'esprit les priorités, si l'on forme le personnel et si l'on consacre à la recherche des ressources suffisantes.

De nombreux sans-abri atteints de TB peuvent souffrir d'alcoolisme, de toxicomanie ou d'une maladie mentale, ce qui complique leur prise en chargeNote de bas de page 46. Ils peuvent avoir un accès limité aux services de santé et souffrir de plusieurs comorbidités, ce qui retarde le diagnostic de la TB, aggrave la maladie, allonge la période de contagiosité et fait en sorte qu'un grand nombre de contacts devront être évalués. Le fait que les taux de prévalence de base de la réactivité au TCT soient élevés signifie également qu'un grand nombre de contacts devront être évalués de façon plus approfondie et peut-être recevoir un traitement contre l'ITLNote de bas de page 47-51.

Lorsqu'on traite avec des sans-abri, il peut s'avérer très difficile de recueillir de l'information par ailleurs facile à obtenir chez d'autres personnes atteintes de TB. Ils peuvent ignorer le nom de leurs amis ou compagnons, ou ne connaître que leur surnom, ou ignorer où ils se trouvent; leur mémoire peut être très limitée par la toxicomanie ou une maladie mentale ou parfois par la méfiance à l'égard des autorités. Les consommateurs de drogues peuvent être très réticents à « vendre » ceux avec qui ils consomment de crainte des poursuites judiciaires. Le mieux serait peut-être d'essayer d'identifier leurs amis proches par leur nom et de procéder à un suivi sur les lieux mêmes de fréquentation. Les cas peuvent être très mobiles, et l'exposition peut se produire à de nombreux endroits. Les refuges peuvent avoir des registres des lits qui pourraient servir à identifier les compagnons de chambre; dans les dortoirs, les contacts prioritaires devraient être ceux qui ont passé le plus de nuits avec le cas et ont dormi le plus près de lui. Il ne faut pas oublier que la ventilation, y compris les ventilateurs, peut influer sur la transmission. Les maisons de chambres sont souvent très exiguës et mal ventilées. De plus, comme les refuges pour sans-abri peuvent être fermés pendant le jour, il faudrait poser des questions au sujet des repas, des centres de jour offrant des services aux sans-abri, des bibliothèques, des bars, des parcs, etc. Les employés des refuges et des organismes de services sociaux pourraient connaître les habitudes quotidiennes, les amis ou la famille du cas. Si les va-et-vient du cas ne sont pas connus pour une partie de la période de contagiosité, il pourrait valoir la peine de vérifier si le cas a pu être hospitalisé ou avoir séjourné dans un établissement correctionnel. Il sera extrêmement utile de faire appel à du personnel qui connaît le secteur dans lequel évoluent les sans-abri locaux pour le suivi des contacts.

Il est souvent difficile de localiser les contacts sans abri et d'obtenir d'eux qu'ils se soumettent au dépistage, à l'évaluation médicale et au traitement préventif de l'ITLNote de bas de page 52. Le recours à du personnel de lutte antituberculeuse qui ne porte pas de jugement, qui soutient les sans-abri et qui utilise de façon judicieuse les incitatifs et les mesures facilitatrices pourrait augmenter les taux de participation. La participation active et les encouragements d'employés du refuge ou du programme de jour (p. ex. centre de jour, soupe populaire) en qui les sans-abri ont confiance sont particulièrement utiles pendant les séances de dépistage. La persistance et la souplesse sont essentielles : une personne qui ne collabore pas une journée pourrait accepter de le faire un autre jour. De plus, les interventions sur place ou lors d'une même séance ont généralement plus de succès que celles qui exigent une visite supplémentaire ou des déplacements (p. ex. prélèvement d'expectorations sur place, radiographie pulmonaire à l'aide d'un appareil portatif, administration et lecture du TLIG ou du TCT)Note de bas de page 53-55. L'accent devrait généralement être mis sur la détection précoce des cas secondaires; l'ITL ne devrait être évaluée et traitée que si la personne répond aux critères médicaux et sociaux du traitement de l'ITL.

Le lecteur peut aussi consulter le chapitre 15, La prévention et la lutte contre la transmission de la tuberculose dans les milieux de soins de santé et d'autres milieux, pour en savoir plus concernant la prévention de la TB chez les sans-abri.

Établissements correctionnels

Les résidents des établissements correctionnels affichent souvent une prévalence plus forte d'ITL et de TB active que la population générale; de vastes éclosions de TB sont survenues dans des prisons des États-Unis, de Russie et d'ailleursNote de bas de page 56-58. Les vieux établissements, en particulier, sont souvent surpeuplés et mal ventilés, ce qui augmente le risque de propagation de la maladie. De plus, certains résidents souffrent d'une maladie concomitante, telle l'infection à VIH, qui accroît le risque de progression de l'infection vers la TB active. Les maladies mentales et la méfiance à l'égard des autorités peuvent quant à elles rendre difficile l'évaluation clinique.

Lorsqu'un cas contagieux de TB est identifié dans un établissement correctionnel, ses contacts peuvent être les autres détenus, les employés de l'établissement, le personnel de transport, les visiteurs, les personnes qui ont pu être exposées au palais de justice, ainsi que les membres de la famille et de la collectivité qui ont pu être exposées avant l'incarcération du cas. L'exposition a pu se produire dans plusieurs établissements correctionnels, car tant les détenus sous responsabilité provinciale que ceux sous responsabilité fédérale sont souvent déplacés d'un établissement à l'autre, et tant le cas que les contacts ont pu être incarcérés plusieurs fois pendant la période de contagiositéNote de bas de page 45. Toutefois, si les détenus ont été soumis à un TCT à l'admission ou annuellement, les résultats peuvent servir de valeurs de référence pour le suivi des contacts. Pour faciliter l'identification des contacts, les établissements correctionnels devraient retracer les transfèrements, les mises en liberté et les déplacements des détenus à l'intérieur d'un établissement et au sein du système.

Pendant une enquête sur un cas de TB, l'anxiété peut être très forte parmi le personnel des services correctionnels et a parfois entraîné des fermetures d'établissement ou des arrêts de travail. Des communications soutenues avec le personnel local du programme de santé publique/lutte antituberculeuse peuvent atténuer cette anxiété. Il est extrêmement profitable de faire appel dès le départ à un dirigeant de l'établissement, en particulier au chef ou directeur des services de santé, et à un représentant en santé et sécurité du syndicat pour la planification et les communications; si plusieurs établissements sont concernés, des représentants provinciaux/territoriaux ou des hauts représentants des services correctionnels devraient participer à l'enquête. Si des cas suspects sont identifiés pendant le suivi des contacts, ils devraient être retirés des espaces communs et des cellules partagées jusqu'à ce que le diagnostic soit confirmé. Chaque cas contagieux suspect ou confirmé devrait être placé dans une chambre d'isolement des infections aéroportées de l'établissement, s'il en existe une, ou être transféré à l'hôpital.

Service correctionnel Canada a élaboré des lignes directrices pour la prévention et la lutte contre la TB dans les établissements où sont incarcérés des détenus purgeant des peines de 2 ans ou plus. On peut s'en procurer un exemplaire en envoyant un message à publichealth@csc-scc.gc.ca.

Établissements de santé

Le suivi des contacts d'un cas de TB en milieu hospitalier bénéficie d'une coordination et d'une collaboration étroites entre le personnel du programme de santé publique/lutte antituberculeuse et le personnel en prévention des infections ou en santé au travail de l'hôpital. Bien qu'une transmission nosocomiale ait eu lieu dans presque chaque type d'établissement de santé, les études publiées sur le suivi des contacts en milieu hospitalier qui pourraient orienter les enquêtes sont très peu nombreusesNote de bas de page 59-61. Si la recherche des contacts n'est pas menée de façon organisée et systématique et ne tient pas compte des principes de base de la transmission, on peut se retrouver avec des centaines de « contacts » dont l'exposition est limitée ou inconnue et obtenir des taux de participation et d'achèvement du suivi très décevants. Il est souvent très utile de mesurer les échanges d'air à des endroits précis de l'hôpital où l'exposition s'est produite afin de déterminer qui sont les contacts prioritaires. Il est aussi important de confirmer si des interventions générant des aérosols ont été réalisées sans protection, par exemple l'intubation d'un cas contagieux pendant laquelle le personnel ne portait pas de masque N95. Certains groupes de patients sont extrêmement vulnérables (p. ex. les greffés), et une exposition même courte peut comporter des dangers (se référer au chapitre 6). Les visiteurs du cas ou de ses compagnons de chambre peuvent avoir été fortement exposés. Les services de prévention des infections et de santé au travail de l'hôpital profitent souvent d'une exposition à la TB pour faire passer un TCT au personnel, mais, parmi le grand groupe d'employés soumis au test, il importe de distinguer ceux qui ont été le plus exposés au cas contagieux, en particulier si des virages ont été observés. Le regroupement des résultats du suivi des contacts à l'intérieur et à l'extérieur de l'hôpital peut aider à orienter la recherche des contacts et à déterminer s'il y a lieu de l'étendre. Les contacts peuvent être avisés de leur exposition par l'hôpital ou les autorités de santé publique, et le test peut être réalisé par l'hôpital, les autorités de santé publique ou le médecin du service de santé des employés; cependant, le plan devrait être accepté par toutes les parties concernées pour éviter la confusion et les manquements.

Les personnes immunodéprimées infectées courent un risque beaucoup plus grand de voir leur infection évoluer vers une TB active; par conséquent, l'exposition à la TB dans un service ou une clinique spécialisée peut être particulièrement dangereuse. Par exemple, parmi les patients dialysés en Colombie-Britannique, le taux annuel de TB était 25 fois plus élevé que celui observé dans une population témoin appariée selon l'âgeNote de bas de page 62. Des cas bien établis de transmission nosocomiale de la TB à des personnes infectées par le VIH ont été répertoriés tant au cours d'une hospitalisation qu'en consultation externeNote de bas de page 63 Note de bas de page 64. Se référer au chapitre 4, Le diagnostic de l'infection tuberculeuse latente, le chapitre 6, Le traitement de l'infection tuberculeuse latente, et le chapitre 10, La tuberculose et le virus de l'immunodéficience humaine, pour en savoir plus au sujet de l'évaluation et de la prise en charge de ces contacts. Se référer aussi au chapitre 15, La prévention et la lutte contre la tuberculose dans les milieux de soins de santé et d'autres milieux.

Soins de longue durée

De nombreux aspects qui s'appliquent au milieu hospitalier s'appliquent aussi aux établissements de soins de longue durée. Pour les résidents qui sont des contacts d'un cas contagieux de TB, le suivi le plus essentiel est la recherche d'une TB active à l'aide d'une évaluation approfondie des symptômes, d'une radiographie pulmonaire et d'une analyse des expectorations. Le diagnostic de TB active chez les personnes âgées peut être difficile à poser, et il pourrait s'avérer nécessaire de faire voir le cas à un spécialiste de la TB. Chez les personnes très âgées ou souffrant de démence, il peut être plus facile de procéder à un lavage gastrique pour obtenir un échantillon que de prélever des expectorations spontanées ou de procéder à une induction de l'expectoration. Le TCT n'est pas recommandé comme premier outil de recherche des contacts parmi les résidents de plus de 65 ansNote de bas de page 65 : l'interprétation des résultats de ces personnes est souvent difficile à cause d'une dépression immunitaire et de la possibilité d'un effet de rappel dû au BCG ou à une exposition lointaine à la TBNote de bas de page 66-69. Par ailleurs, pour bien des contacts âgés, les risques du traitement de l'ITL l'emportent sur ses bienfaits possibles. Cependant, les contacts parmi le personnel et les visiteurs de 65 ans ou moins devraient subir un TCT. En l'absence de cas secondaires, leurs résultats constitueront probablement un indicateur plus fiable de la transmission dans l'établissement.

Collectivités éloignées

Le suivi des contacts dans une collectivité éloignée peut être particulièrement ardu. L'accès aux tests diagnostiques, la dotation en personnel, l'expertise en matière de TB et les ressources peuvent être difficiles à obtenir. Dans les communautés éloignées des Premières Nations ou des Inuits, des barrières linguistiques et culturelles importantes peuvent empêcher de mener à bien la recherche des contacts. Nulle part l'organisation, l'éducation, la communication et une approche fondée sur la collaboration et l'absence de jugement ne sont-elles plus importantes. Le programme provincial/territorial de lutte antituberculeuse, le programme local de santé publique/lutte antituberculeuse, la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits de Santé Canada (si elle participe à la prestation ou au financement des services de santé dans la collectivité), les dispensateurs de soins de santé locaux et la collectivité devraient travailler en étroite collaboration pour identifier rapidement les cas secondaires et les contacts et pour s'assurer ensuite qu'ils sont pris en charge adéquatement pendant la durée de l'enquête médicale et du traitement. Un appareil de radiographie mobile ou portatif pourrait devoir être apporté sur place, et la réalisation à grande échelle d'analyses des expectorations pourrait aussi être utile, en coordination avec le laboratoire de santé publique. Si c'est impossible, des efforts particuliers devraient être consentis pour faciliter le transport en temps opportun des cas suspects de TB vers un centre médical plus grand en vue d'une évaluation. Le traitement préventif sous observation directe peut être envisagé pour les contacts récemment infectés dans les communautés des Premières Nations ou les communautés inuitesNote de bas de page 70. Se référer aussi au chapitre 14, La prévention de la tuberculose et les soins aux tuberculeux chez les membres des Premières Nations, les Inuits et les Métis.

Contacts pendant un voyage par avion et par un autre moyen de transport

L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a publié des lignes directricesNote de bas de page 71 indiquant les méthodes pour aviser certains contacts de cas contagieux de TB qui étaient sur le même avion que le cas lors d'un vol international d'au moins 8 heures dans les 3 derniers mois. Cette durée est basée sur des études épidémiologiques passées en revue dans les lignes directrices de l'OMS. Au Canada, les rapports sur les cas de TB qui indiquent avoir fait un vol pendant qu'ils étaient contagieux devraient être présentés à l'Agence de la santé publique du Canada (ASPC) par l'entremise du programme provincial/territorial de lutte antituberculeuse (même si le vol a eu lieu il y a plus de 3 mois, car le registre des passagers est encore disponible habituellement). Le formulaire de déclaration et des directives détaillées peuvent être obtenus sur le site de l'Agence de la santé publique du Canada, Formulaire de déclaration. La déclaration à l'ASPC devrait être faite dès que possible (même si les résultats de la culture et de l'antibiogramme n'ont pas encore été obtenus), car elle accélère l'évaluation du risque et permet d'obtenir l'information nécessaire au sujet des passagers auprès de la compagnie aérienne. Cependant, une revue systématique de 12 études laisse croire que le dépistage actif chez les passagers des avions a une utilité limitéeNote de bas de page 72.

Les quelques rapports publiés sur la recherche des contacts après une exposition à la TB à bord d'un autobus ou d'un train indiquent que la transmission est parfois possible lors d'une exposition quotidienne répétée (p. ex. à bord d'un autobus scolaire) ou pendant un long trajetNote de bas de page 73. Une telle transmission semble rare, le cas devant être extrêmement contagieux et les conditions environnementales devant être particulières (p. ex. long trajet quotidien dans un autobus scolaire bondé en hiver). Aucune preuve ne démontre l'utilité de la recherche des contacts après une exposition dans un moyen de transport public local, vu notamment les difficultés logistiques et la grande inefficacité de la recherche dans de telles circonstancesNote de bas de page 73.

Contact possible avec des cas contagieux de TB pendant un séjour ou un voyage dans un pays où l'incidence de la TB est élevée

Le lecteur est prié de se reporter au chapitre 13, La surveillance et le dépistage de la tuberculose dans les populations à haut risque.


Gestion d'une éclosion de TB

Les éclosions de TB durent généralement plusieurs années, et l'intervention et le contrôle sont des entreprises majeuresNote de bas de page 74-76. De plus, les éclosions sont plus fréquentes dans des populations déjà difficiles, tels les sans-abri, les pauvres et d'autres populations marginalisées, et dans les communautés isolées des Premières Nations et des InuitsNote de bas de page 44 Note de bas de page 54.

Définition

On dit qu'il y a éclosion d'une maladie lorsque le nombre de cas qui surviennent dans une population donnée au cours d'une période donnée est supérieur aux prévisions. Des associations spatiales ou temporelles peuvent évoquer une transmission continue et une éclosion. Dans certains cas, les éclosions de TB seront détectées après coup, une fois qu'on aura découvert des liens épidémiologiques entre les cas ou une association par génotypage des souches en cause. Un tel agrégat recensé au cours des 2 dernières années devrait évoquer une possible éclosion et susciter une enquête.

La définition de travail suivante de l'éclosion aux fins de la planification des enquêtes est basée sur celle proposée par les Centers for Disease Control and Prevention des États-UnisNote de bas de page 22 :

  • au cours d'une recherche des contacts et à cause de cette recherche, un diagnostic de TB active secondaire est posé chez deux des contacts identifiés ou plus; ou
  • un lien est découvert entre deux cas ou plus survenus à 1 an ou moins d'intervalle, mais ce lien est établi en dehors d'une recherche des contacts. Par exemple, deux patients qui ont reçu indépendamment un diagnostic de TB en dehors d'une recherche des contacts travaillent dans le même bureau, mais n'avaient jamais été considérés comme des contacts l'un de l'autre. Un autre exemple plus extrême est celui d'une deuxième transmission déjà survenue au moment où le cas index est diagnostiqué, c'est-à-dire que les cas secondaires ont déjà produit leurs propres cas secondaires. Le lien entre les cas devrait être confirmé par génotypage si l'on dispose de cultures.

Cette définition met l'accent sur le rythme auquel surviennent les cas secondaires et la capacité du programme de lutte antituberculeuse de tenir compte de plusieurs recherches des contacts. En pratique, il importe de prendre en considération la capacité du programme local de lutte antituberculeuse de gérer en temps opportun un agrégat croissant de cas de TB et la recherche simultanée des contacts, en plus de ses opérations régulières, au moment de déterminer s'il faut considérer ou non la situation comme une éclosion à des fins d'intervention. La plupart des situations considérées comme des éclosions de TB comportent des chaînes de bien plus que deux cas secondaires, ou un lien non reconnu auparavant avec un cas secondaire, et une transmission sur plusieurs années. La définition ci-dessus est une définition opérationnelle qui a pour but d'aider à repérer et à contenir les agrégats qui croissent rapidement. Il faut noter qu'un agrégat de cas liés qui s'est constituée plus lentement, sur plusieurs années, pourrait aussi exiger de la part du programme de lutte antituberculeuse une intervention énergique auprès d'un groupe identifiable de la population sans nécessairement correspondre à la définition ci-dessus d'une « éclosion ».

Objectifs

Les objectifs de la recherche des contacts et de la gestion des éclosions de TB sont les suivants :

  • identifier sans tarder le ou les cas sources afin de réduire rapidement le risque de transmission continue de l'infection, et ce, par l'isolement et la mise en route d'un traitement approprié;
  • identifier rapidement les nouveaux cas de TB active dans la population à risque, les mettre en isolement et amorcer le traitement;
  • identifier les cas d'ITL récents afin de pouvoir mettre en route un traitement préventif avant que la maladie active ne se développe.

Gestion d'une éclosion

Organisation et ressources

Vu l'ampleur et la durée de la plupart des éclosions de TB, il est important de disposer de ressources et de personnel suffisants pour l'enquête et la prise en charge dès le début de l'intervention. Il peut être nécessaire d'obtenir de l'aide à l'extérieur du programme de lutte antituberculeuse. Les conseils donnés par des collègues qui ont déjà géré une éclosion de TB peuvent s'avérer précieux.

Les éléments suivants sont recommandés dans toute intervention suivant une éclosion de TB :

  • un gestionnaire désigné de l'éclosion, nommé pour toute la durée de celle-ci, chargé de la gestion et de la coordination globales de l'intervention;
  • du personnel du programme de santé publique/lutte antituberculeuse pour enregistrer les cas de TB et en assurer la prise en charge, établir la contagiosité, coordonner l'enquête et se charger des consultations et communications avec le personnel sur le terrain;
  • du personnel de terrain en nombre suffisant pour la recherche et le suivi des contacts; si l'éclosion touche plusieurs collectivités éloignées, la mise sur pied d'équipes spécialisées mobiles pourrait être utile pour appuyer le personnel local;
  • un soutien en matière de technologie de l'information et de bases de données et un soutien épidémiologique;
  • un soutien clinique et diagnostique, constant et coordonné, par des personnes ayant une expertise dans le domaine de la TB  :
    • un accès local rapide à des radiographies pulmonaires de qualité,
    • des médecins-conseils qui possèdent une expertise dans le domaine de la TB pour examiner les clichés radiographiques, évaluer les patients afin de détecter la présence d'une TB et les hospitaliser au besoin, et prendre en charge les cas suspects et les contacts de façon uniforme et sans délai; pour les collectivités éloignées, des liens de télémédecine (y compris l'examen de radiographies numérisées) peuvent être extrêmement efficaces,
    • des centres hospitaliers qui disposent de chambres d'isolement des infections aéroportées, qui peuvent se charger des analyses diagnostiques et qui peuvent traiter les patients dans les plus brefs délais,
    • des liens avec un laboratoire de santé publique pour un soutien spécialisé (qui se chargera des analyses s'il y a un grand nombre d'échantillons, déterminera les empreintes d'ADN, etc.),
    • un transport rapide et sûr des échantillons et, au besoin, des patients;
  • du personnel suffisant pour la prise en charge des cas et la TOD qui supervisera le traitement complet de tous les cas actifs (il peut être nécessaire de prévoir du personnel supplémentaire pendant au moins un an après la fin de l'éclosion);
  • du personnel chargé des communications qui informera régulièrement les médias et la collectivité de l'évolution de l'enquête;
  • du personnel et des ressources pour effectuer l'évaluation.
Rôles et responsabilités

Il est indispensable dès le départ de définir clairement le rôle de tous ceux qui participent à l'enquête et à la gestion de l'éclosion. Il peut être très utile de constituer un groupe de coordination de l'éclosion formé d'intervenants clés en santé publique/lutte antituberculeuse, de cliniciens experts, d'hôpitaux, d'un laboratoire, de la communauté touchée et de personnel de communication. La collaboration et la rétroaction régulière entre tous les niveaux de soins sont importantes. On devrait bien s'entendre sur les procédures à suivre pendant l'enquête et sur la prise en charge des cas suspects et des contacts; on devrait aussi disposer de protocoles écrits.

Communication avec les dispensateurs de soins de santé

Les dispensateurs de soins de santé locaux, en particulier ceux qui risquent d'être les premiers à voir les nouveaux cas de TB dans la population aux prises avec l'éclosion (service des urgences, soins primaires dans le voisinage où a lieu l'éclosion, etc.) sont des partenaires majeurs. Des exposés lors de conférences médicales, des avis écrits au sujet de l'éclosion et d'autres communications répétées augmenteront le degré de suspicion des cliniciens à l'égard de la TB, fourniront de l'information à jour au sujet du diagnostic et de la prise en charge de la TB et aideront à lever les obstacles aux soins, y compris l'hospitalisation précoce des cas qu'on croit contagieux au besoin.

Formation du personnel

Vu l'ampleur des éclosions de TB et de l'intervention qui s'ensuit, de nombreux employés pourraient ne pas avoir d'expérience de travail avec la TB. Pour cette raison, il peut être indiqué d'offrir de la formation et de l'éducation ou des conférences médicales à toutes les organisations qui jouent un rôle dans le plan d'intervention.

Isolement rapide et traitement des cas de TB active

Une éclosion devrait augmenter nettement le degré de suspicion des cliniciens à l'égard de la TB lorsqu'ils évaluent une personne de la collectivité qui présente des symptômes compatibles avec la TB, spécialement la TB respiratoire (c'est-à-dire contagieuse). Tous les cas soupçonnés d'être contagieux devraient être isolés rapidement (à l'hôpital si nécessaire) et faire l'objet d'une évaluation visant à confirmer le diagnostic et le degré de contagiosité. Les cas suspects ne devraient pas retourner dans un milieu collectif jusqu'à ce que la possibilité d'une TB contagieuse ait été écartée.

Recherche des cas, identification du cas source et recherche des contacts

Au cours d'une éclosion touchant des sans-abri ou d'autres populations marginalisées, des soins infirmiers offerts dans la rue, des soins primaires dispensés directement dans les refuges ou à d'autres endroits qui fournissent des services aux sans-abri et d'autres types de soins de base sont souvent essentiels pour un diagnostic précoceNote de bas de page 44 Note de bas de page 52 Note de bas de page 75 Note de bas de page 76. Comme les employés d'un refuge pourraient être les premiers à reconnaître qu'un résident est malade, on devrait leur offrir de la formation concernant la TB, les mesures de lutte contre les infections, le dépistage de base des symptômes de la TB à l'admission et les mécanismes pour isoler rapidement les cas suspects de TB et les adresser à un médecin en vue d'une évaluation médicale.

Si le ou les cas sources ne sont pas détectables, on devrait les identifier en enquêtant activement sur toutes les personnes symptomatiques dans la collectivité à risque. Une fois que l'enquête initiale est en cours, il est important de revoir l'histoire de la TB dans la collectivité. L'examen des « cas anciens » par les programmes provinciaux/territoriaux et locaux de santé publique/lutte antituberculeuse pourrait permettre d'identifier des cas qui n'ont pas été traités adéquatement dans le passé. Dans certaines circonstances, il peut être utile de localiser et de réévaluer des contacts à risque élevé identifiés précédemment qui ont été perdus de vue ou qui n'ont pas terminé le traitement contre l'ITL.

Dans les petites collectivités ou les milieux fermés, il peut être plus efficace d'effectuer au départ un dépistage chez tous les membres de la collectivité ou toutes les personnes qui se trouvent dans l'établissement, en particulier parce qu'il peut être difficile de déterminer le degré exact de contact dans une petite collectivité très liée. Dans certains milieux, notamment lorsque les membres sont très mobiles, le fait d'offrir le dépistage de la TB active sur place (analyse des expectorations et/ou radiographie pulmonaire ainsi que recherche des symptômes) de façon continue sur une longue période peut être le seul moyen de s'assurer que la plupart des contacts ont été identifiés et soumis à des testsNote de bas de page 53-55 Note de bas de page 75-77. Nombre de collectivités éloignées comptent des membres qui voyagent souvent d'une communauté à l'autre; le retraçage de ces personnes est particulièrement difficile mais essentiel, car elles peuvent propager l'éclosion dans d'autres collectivités. La coordination et des ententes de suivi prises avec le programme de lutte antituberculeuse dans ces autres collectivités peuvent s'avérer très profitables pour l'évaluation et la prise en charge des contacts et des cas mobiles.

Dans les populations pour lesquelles le traitement de l'ITL n'est pas une stratégie principale réaliste de lutte contre l'éclosion, l'accent devrait surtout être mis sur la détection précoce et le traitement à visée curative des cas de TB active, plutôt que sur l'administration du TCT. Figurent par exemple parmi ces populations les résidents âgés (de plus de 65 ans) des établissements de soins de longue durée et certaines populations de sans-abri (p. ex. les alcooliques âgés). Se référer aussi au chapitre 15.

Un degré de suspicion élevé de la part des cliniciens et, peut-être, des mesures de recherche des cas devraient être maintenus pendant plusieurs années après la fin de l'éclosion, car il subsiste généralement dans la collectivité un bassin de personnes récemment infectées. On pourrait suivre les contacts infectés qui refusent le traitement contre l'ITL ou n'y sont pas admissibles afin de déceler de façon précoce une TB active (p. ex. évaluation clinique régulière pendant les 2 années suivant l'exposition).

Gestion des données et soutien épidémiologique

La recherche et la prise en charge des contacts lors d'une éclosion de TB produisent une grande quantité de données. Le retraçage de centaines de contacts, souvent à plusieurs endroits et à l'aide de multiples évaluations, exige une bonne base de données et l'appui de personnel en technologie de l'information. L'évaluation rapide et réfléchie des résultats agrégés au fur et à mesure qu'ils deviennent disponibles exige le concours d'un épidémiologiste.

Détermination des causes fondamentales

Les éclosions de TB surviennent principalement dans des milieux où une transmission rapide est possible; les logements inadéquats (surpeuplés, à ventilation inadéquate) et une longue période de contagiosité sont souvent associés à un accès limité aux soins de santé. Une forte prévalence des facteurs de vulnérabilité parmi les contacts (présence de nombreux jeunes enfants, diabète ou autres causes d'immunodépression, tabagisme, malnutrition, etc.) accélère la survenue de cas secondaires. En ce qui concerne les éclosions qui se produisent dans un établissement (refuge pour sans-abri, hôpital, établissement correctionnel), une évaluation systématique des conditions et des pratiques, y compris de la ventilation, pourrait permettre de repérer des lacunes qui pourraient être corrigées (se référer aussi au chapitre 15). On peut traiter et guérir des cas individuels, mais il est très difficile d'endiguer une éclosion ou de réduire des taux endémiques de TB sans s'attaquer aux causes fondamentales. Ces causes devraient elles aussi être reconnues et, si possible, atténuées lors de l'intervention visant à contenir l'éclosion.

Intervention et éducation communautaires

Les éclosions de TB peuvent susciter beaucoup d'anxiété et mener à une stigmatisation. Elles surviennent souvent dans des milieux où l'information disponible au sujet de la TB est limitée ou inexacte et, parfois, où la maladie est associée de façon très négative à des situations culturelles ou historiques. Tous ces éléments peuvent prolonger l'éclosion en retardant le diagnostic si les personnes infectées ne reconnaissent pas la gravité de leurs symptômes ou craignent de recevoir un diagnostic de TB. Il est crucial d'offrir le plus tôt possible à la collectivité ou au milieu touché de l'information au sujet de la TB et de l'intervention visant à contrer l'éclosion et de lui fournir, ainsi qu'à la population locale en général, des bilans réguliers de la situation. L'information devrait être communiquée dans un style et sous une forme accessibles qui tiennent compte des réalités culturelles et pratiques des personnes touchées. Le matériel courant pourrait devoir être adapté, idéalement avec l'aide de membres de la collectivité. La participation de pairs peut être très utile, en particulier pour les personnes avec qui il est difficile d'entrer en contact. Ces mesures permettront de réduire l'anxiété et devraient aider à obtenir une meilleure collaboration et un plus grand respect des recommandations.

Évaluation du processus et du résultat de l'enquête sur l'éclosion

Une évaluation continue et une évaluation officielle à la fin de l'éclosion, concernant tant le processus de l'enquête que son résultat, sont primordiales. Le génotypage des isolats peut être utile pour établir l'existence d'une éclosion, déterminer son ampleur et évaluer les résultats de l'enquête sur l'éclosion et des mesures de contrôle. La détermination des principaux facteurs contributifs, souvent des déterminants sociaux de la santé, pourrait aider à relever des aspects non spécifiques de la TB pouvant faire l'objet d'une intervention.


Références

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