ARCHIVÉ - Imageurs thermiques pour détecter la fièvre chez les passagers d'avion, Vancouver et Toronto, 2003

 

 

Introduction

Durant l'épidémie de syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) en 2003, les déplacements rapides de populations ont facilité la propagation de la maladie d'un pays à l'autre. Afin de prévenir l'importation et l'exportation du virus, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a recommandé que les passagers internationaux fassent l'objet d'un dépistage(1). Elle a recommandé entre autres d'effectuer un examen de dépistage, sous forme de questionnaire ou d'entrevue, chez les passagers à leur départ d'une zone touchée; si un passager d'un vol en provenance d'une zone touchée se révélait malade, il devait être isolé et ses contacts devaient être identifiés.

Au Canada, les passagers arrivant de zones touchées devaient remplir un avis d'alerte médicale (AAM) comportant un questionnaire (fiches de couleur jaune) et ceux qui présentaient des facteurs de risque de SRAS devaient être évalués par une infirmière préposée au dépistage(2). Les passagers internationaux qui quittaient l'aéroport Pearson à Toronto ont également dû remplir un AAM (fiches de couleur rouge), et des affiches ont été placées dans les aérogares. Des imageurs thermiques servant à détecter chez les passagers une température élevée, symptôme d'appel du SRAS, ont été utilisés aux aéroports internationaux de Toronto et de Vancouver. Le présent rapport résume les données recueillies sur l'utilisation de ces imageurs thermiques.

Résultats

Douze imageurs thermiques ont été placés dans deux aéroports entre la mi-mai et la mi-décembre 2003; seulement 11 ont cependant été utilisés. Tous les passagers qui présentaient une température élevée à l'imageur ont été adressés à une infirmière préposée au dépistage pour faire l'objet d'une évaluation médicale, comportant une mesure de la température orale et l'administration d'un questionnaire normalisé pour le SRAS.

Les imageurs thermiques sont entrés en service à l'aéroport international de Vancouver le 16 mai 2003, et à l'aéroport international Pearson de Toronto, le 23 mai 2003, et ont été utilisés à l'arrivée et au départ des passagers. En tout, 4 569 759 passagers ont été évalués à l'aide de ces imageurs (tableau 1). Une température élevée a été détectée chez 1 435 personnes (0,031 %). Aucune personne évaluée n'était porteuse du SRAS.

Nous avons eu accès à des données additionnelles sur les passagers évalués à l'aéroport Pearson entre le 1er septembre et le 10 décembre 2003 (tableau 2). Sur les 733 passagers qui présentaient une température élevée à l'imageur, seulement 49 (6,7 %) avaient une température de > 38,0 °C (mesurée à l'aide d'un thermomètre oral). Aucune personne évaluée ne souffrait du SRAS.

Analyse

Un total de 438 cas de SRAS (251 cas probables et 187 cas suspects) a été signalé au Canada durant la période où a sévi l'épidémie, soit entre le 23 février et le 12 juin 2003(3). Cinq de ces cas sont survenus chez des voyageurs qui revenaient d'une zone touchée en Asie, seulement trois d'entre eux présentaient des symptômes durant leur vol(4). Le dernier voyageur atteint du SRAS est entré au Canada le 1er avril 2003. Or, les imageurs thermiques ne sont entrés en service dans les aéroports canadiens qu'après cette date. Parmi les personnes exposées au SRAS au Canada et qui se sont rendues dans un autre pays et y sont tombées malades, aucune n'était symptomatique à son départ du Canada(5).

À Hong Kong, 36,3 millions de personnes ont fait l'objet d'un dépistage par imageur thermique; 1 921 (0,00053 %) présentaient une fièvre; 40 de ces personnes ont été hospitalisées, mais aucun cas de SRAS n'a été diagnostiqué(6).

Les imageurs thermiques déterminent la température d'un objet en mesurant la quantité de rayons infrarouges émis par cet objet; plus la température est élevée, plus le nombre de rayons infrarouges émis est élevé. Ces imageurs sont principalement employés en médecine pour diagnostiquer le cancer du sein(7). Ils mesurent la température cutanée et non la température centrale. Leur exactitude est de plus ou moins 2 °C et peut être altérée par l'activité physique, le stress, la prise d'alcool et de drogues, la nicotine, la caféine, les troubles circulatoires et les blessures, de même que par la formation et l'expérience des opérateurs, et, enfin, par des facteurs environnementaux comme la température de l'air et les courants d'air.

Les imageurs thermiques n'ont jamais été utilisés auparavant pour le dépistage de la fièvre dans des populations, et aucune donnée clinique n'a été publiée sur la sensibilité et la spécificité des imageurs employés à cette fin.

Tableau 1. Nombre de passagers dont la température élevée a été détectée à l'aide d'un imageur thermique et qui étaient soupçonnés de souffrir du SRAS, aéroports internationaux de Vancouver et Pearson, de mai à novembre 2003

Aéroport

Pearson

Vancouver

Total

Nbre de passagers examinés

3 920 407

649 352

4 569 759

Nbre de passagers présentant une température élevée à l'imageur

1 365 (0.035%)

70 (0.011%)

1 435 (0.031%)

Nbre de passagers atteints du SRAS

0

0

0


Tableau 2. Caractéristiques des passagers présentant une température élevée à l'imageur thermique, aéroport Pearson, du 1er septembre au 10 décembre 2003

Total

Température
médiane (°C)

Essoufflement

Toux

Évalué comme
atteint du SRAS

Température < 38,0 °C

684

37.2 (33.6-37.9)

2 (0.3%)

21 (3.1%)

0

Température >= 38,0 °C

49

38.3 (38.0-40.6)

0

4 (16%)

0


Bien qu'ils permettent d'évaluer la température chez un grand nombre de personnes, les imageurs doivent faire l'objet d'études plus approfondies avant que leur usage ne puisse être recommandé. En outre, il convient de déterminer si un dépistage de masse de la fièvre constitue le moyen le plus efficace de détecter la maladie chez des voyageurs durant une épidémie ou si d'autres approches plus simples, telles qu'une éducation plus poussée de la population, ne seraient pas plus utiles.

Références

  1. OMS. Mesures recommandées par l'OMS à l'intention des voyageurs provenant de zones touchées par le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS). Relevé épidémiologique hebdomadaire de l'OMS 2003;78:97-9.

  2. Santé Canada. Dépistage du SRAS chez les voyageurs au Canada et en provenance du Canada, 31 mars 2003. Disponible à : « http://www.hc-sc.gc.ca/français/protection/misesgarde/sras/information2.html » visité le 16 janvier 2004.

  3. Santé Canada. Chiffres pour le SRAS au Canada, le 3 septembre 2003. Disponible à : « http://www.phac-aspc.gc.ca/sars-sras/cn-cc/ 20030903_f.html » visité le 16 janvier 2004.

  4. Flint J, Burton S, Macey J et coll. Évaluation du risque de transmission du SRAS, lors de voyages aériens-résultats de la recherche des contacts, Canada. RMTC 2003;29:105-10.

  5. Santé Canada. Sommaires des cas du SRAS potentiellement exposés au Canada et diagnostiqués dans un autre pays. Le 26 avril 2003. Disponible à : « http://www.phac-aspc.gc.ca/sars-sras/pef-dep/sars-se-int2003042 6_f.html » visité le 16 janvier 2004.

  6. SARS Expert Committee. SARS in Hong Kong: From experience to action. October 2003. Disponible à : « http://www.sars-expertcom.gov.hk/english/reports/reports/files/e_app4.pdf » visité le 16 janvier 2004.

  7. Parisky Y, Sardi A, Hamm R et coll. Efficacy of computerized infrared imaging analysis to evaluate mammographically suspicious lesions. Am J Roentgenol 2003;180:263-69.

Source : Centre de mesures et d'interventions d'urgence, Direction générale de la santé de la population et de la santé publique, Santé Canada.

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