ARCHIVÉ - NOTES INTERNATIONALES

 

Volume 31-21
le 1er novembre 2005

Éclosions d'infection à salmonella associées à la consommation de tomates Roma - États-Unis et Canada, 2004

Trois éclosions d'infection à Salmonella associées à la consommation de tomates Roma ont été détectées aux États-Unis et au Canada au cours de l'été 2004. De multiples sérotypes de Salmonella ont été isolés dans une éclosion survenue dans plusieurs États américains entre le 25 juin et le 19 juillet. Les cas étaient liés à la consommation de tomates Roma provenant de plusieurs établissements d'une chaîne de restaurants de type delikatessen. Chacune des deux autres éclosions étaient caractérisée par un seul sérotype de Salmonella : Braenderup, dans une éclosion survenue dans plusieurs États, et Javiana, dans une autre qui s'est produite au Canada. Cinq cent soixante et un cas d'infection liés aux trois éclosions ont été recensés dans 18 États américains et une province canadienne. Le présent rapport décrit les enquêtes menées par des organismes responsables de la santé publique et de l'innocuité des aliments par suite de ces éclosions. Même si les trois éclosions étaient reliées à un seul établissement de conditionnement de tomates de la Floride, il est possible que les tomates Roma à l'origine de quelques-unes des infections aient été fournies par d'autres entreprises de conditionnement ou cultivateurs. Les enquêtes environnementales se poursuivent. Comme on ne possède pas suffisamment de connaissances sur les mécanismes de contamination de la tomate et les méthodes d'éradication de Salmonella dans les fruits pour garantir l'innocuité des fruits et légumes frais, il faudrait que l'industrie agricole, les organismes responsables de l'innocuité des aliments et de la santé publique érigent en priorité la poursuite des recherches sur le sujet.

Éclosion d'infection à Salmonella de sérotypes différents - plusieurs États

En juillet 2004, 429 cas de salmonellose associés aux éclosions et confirmés par culture ont été recensés dans neuf États (le Maryland, le Michigan, le Missouri, la Caroline du Nord, le New Hampshire, l'Ohio, la Pennsylvanie, la Virginie et la Virginie occidentale). Ces cas sont survenus chez des clients d'une chaîne de restaurants A, les symptômes étant apparus au cours de la période du 2 au 27 juillet. L'âge médian des patients était de 35 ans (intervalle : 1 à 81 ans); 52 % étaient de sexe masculin. Aucun décès n'a été enregistré, mais 30 % des patients ont été hospitalisés. Divers sérotypes de Salmonella étaient en cause : Javiana (383), Typhimurium (27), Anatum (cinq), Thompson (quatre), Muenchen (quatre), et type indéterminé du groupe D (six).

Les départements de la santé des États et des collectivités locales ont entrepris, de concert avec les Centers for Disease Control and Prevention (CDC), une étude cas-témoins, à laquelle ont pris part 53 cas et 53 témoins bien portants, qui avaient aussi fréquenté les mêmes établissements. Parmi les 53 cas, 47 (90 %) avaient mangé des tomates Roma, contre 24 (48 %) des témoins. Une analyse multivariables a mis en évidence une forte corrélation avec la consommation de tomates Roma (rapport de cotes rajusté = 7,1; intervalle de confiance (IC) à 95 % = 1,5 à 34). La chaîne de restaurants A s'était procuré des tomates Roma prétranchées auprès d'un seul établissement de transformation, pour ses 302 restaurants répartis dans cinq États. Le sérotype S. Anatum, dont le profil électrophorétique ne pouvait être distingué de celui des cinq cas observés dans quatre États, a été isolé à partir d'échantillons de tomates prétranchées Roma, prélevés dans un établissement de la chaîne A le 13 juillet.

Les tomates Roma ont été retirées de tous les établissements de la chaîne A le 14 juillet. Au total, 22 patients (5 %) ont signalé l'apparition de l'infection après le 19 juillet, c'est-à-dire après la période d'incubation normale de Salmonella. Ces infections pourraient s'expliquer par des facteurs tels que l'emploi continu de tomates Roma, des erreurs de mémoire, une faible dose infectieuse, des aliments conservés et consommés plus tard ou une transmission secondaire.

Éclosion d'infection à S. Braenderup - plusieurs États

Au cours de l'été 2004, un nombre total de 125 cas confirmés d'infection à S. Braenderup, au profil électrophorétique non identifiable, ont été détectés dans 16 États (le Delaware, le Connecticut, la Géorgie, l'Iowa, le Kansas, le Maryland, le Massachusetts, le Missouri, le New Hampshire, le New Jersey, New York, l'Ohio, la Pennsylvanie, la Virginie, la Virginie occidentale et le Wisconsin). La maladie est survenue entre le 18 juin et le 21 juillet. L'âge médian des patients était de 30 ans (intervalle : 0 à 84 ans); 66 % étaient de sexe féminin. Aucun décès n'a été signalé, mais 20 % des patients ont été hospitalisés.

Les départements de la santé des États et des collectivités locales ont entrepris, de concert avec les Centers for Disease Control and Prevention (CDC), une étude cas-témoins, à laquelle ont pris part des personnes âgées de 15 à 60 ans. On a défini de la façon suivante un cas : une personne infectée par S. Braenderup, dont le profil électrophorétique correspondait à celui de l'éclosion, la maladie étant apparue après le 15 juin. Les témoins ont été recrutés à l'aide d'un composeur automatique de numéros qui a utilisé les codes régionaux des patients. Au total, 38 cas et 79 témoins ont pris part à l'enquête. Les cas étaient proportionnellement plus nombreux que les témoins à avoir mangé au restaurant à plusieurs reprises au cours des 5 jours précédant la survenue de l'infection (53 % contre 34 %) (rapport de cotes [RC] = 2,1; IC = 1,0 à 4,7). Une plus forte proportion de cas que de témoins avaient mangé du fromage, de la laitue et des tomates au restaurant, mais ces différences n'étaient pas statistiquement significatives. À lumière de renseignements sur les repas pris par 27 cas et 29 témoins, les enquêteurs ont posé aux directeurs de restaurants des questions sur les types précis de fromage, de laitue et de tomates utilisés dans les plats servis aux clients. Des tomates Roma consommées par 41 % des cas infectés, mais par 14 % des témoins seulement (RC = 4,1; IC = 1,1 à 15,3), étaient la seule source d'exposition significativement associée aux infections. Ces restaurants s'étaient procuré des tomates Roma entières auprès de distributeurs de tomates.

Éclosion d'infection à S. Javiana - Canada

Sept cas confirmés d'infection à S. Javiana, aux profils électrophorétiques non identifiables, mais distincts de ceux qui étaient associés à l'éclosion d'infection à Salmonella de sérotypes multiples, ont été détectés dans une province canadienne, l'Ontario. Les infections ont débuté entre le 4 et le 8 juillet 2004. L'âge médian des sujets infectés était de 28 ans (intervalle : 23 à 36 ans). Aucun décès n'a été signalé, mais 14 % des personnes ont été hospitalisées. Tous les patients avaient fréquenté le même restaurant. Même si aucune étude cas-témoins n'a été réalisée, les tomates Roma ont été considérées comme le véhicule suspect de l'éclosion, puisqu'elles étaient la seule source commune d'exposition alimentaire chez tous les patients.

Enquêtes de retraçage et enquêtes environnementales

La Food and Drug Administration (FDA), de concert avec des organismes de réglementation de la province et des États concernés et des départements de la santé des États, ont mené des enquêtes en vue de retracer les tomates Roma consommées par les patients infectés dans les trois éclosions. Afin de retracer les tomates incriminées dans chaque éclosion, les enquêteurs ont remonté la filière à partir des restaurants jusqu'aux distributeurs, aux entreprises de conditionnement ou aux cultivateurs aux État-Unis. L'enquête a établi qu'une entreprise qui emballait sur place les tomates et trois établissements de conditionnement de trois États pouvaient être à l'origine de l'éclosion d'infection à sérotypes multiples. Elle a aussi déterminé que, parmi ces quatre sources possibles, l'entreprise de conditionnement A de la Floride pouvait être impliquée dans les deux autres éclosions de salmonellose associées aux tomates Roma et survenues en même temps (soit celles mettant en cause les sérotypes S. Braenderup et S. Javiana).

Les enquêteurs ont inspecté, en cours de fonctionnement, les méthodes de contrôle de la qualité utilisées dans l'établissement qui tranche les tomates et qui était associé à l'éclosion d'infection à Salmonella de sérotypes multiples. Aucune source de contamination n'a été détectée. De plus, le sérotype S. Javiana est généralement associé au Sud-Est de la côte américaine, alors que l'entreprise qui tranche les tomates est installée dans le Nord-Est.

Une enquête environnementale menée auprès de quatre entreprises de conditionnement et cinq exploitations agricoles de la Floride et de la Caroline du Nord en août et en novembre 2004 n'a pas révélé clairement l'existence d'une source de contamination, et les entreprises de conditionnement semblaient observer les règles d'hygiène alimentaire. Toutefois, de ces neuf établissements, seules l'entreprise de conditionnement A de la Floride et une exploitation agricole connexe étaient en plein fonctionnement au moment de l'inspection. Les enquêtes se poursuivront au cours de la saison de culture correspondante de 2005.

Remerciements

Les conclusions de ce rapport ont été tirées en partie à la lumière des données fournies par les départements de la santé publique des États suivants : Connecticut, Delaware, Géorgie, Iowa, Kansas, Maryland, Massachusetts, Missouri, New Hampshire, New Jersey, New York, Ohio, Pennsylvanie, Virginie, Virginie occidentale et Wisconsin. Nous tenons à remercier M. Hoekstra, M. Balasegaram, M. Perch, C. Snider, de la Division of Bacterial and Mycotic Diseases, National Center for Infectious Diseases, et D. Burmeister, EIS Officer, CDC.

Références

  1. Committee on Varietal Pedigrees. Interim report of the Committee on Varietal Pedigrees. Report of the Tomato Genetics Cooperative [Appendix 36]. Gainesville, FL: University of Florida; 1961. Available at http://gcrec.ifas.ufl.edu/tgc/newsletters/vol11/v11p36.html.  
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