Étude effectuée à Calgary sur la vaccination des jeunes enfants contre la grippe : Opinions et comportements des parents

Relevé des maladies transmissibles au Canada

le 1er juillet 2006

Volume 32
Numéro 13

Introduction

La grippe impose un lourd fardeau aux enfants et à leur famille. Pensons notamment aux symptômes et aux complications de la maladie aiguë, aux consultations médicales, au coût et à l'administration du traitement et à l'absentéisme de la garderie ou de l'école, pour les enfants, et du travail, pour les parents(1-10). Les taux d'attaque de la grippe atteignent un sommet chez les enfants(11), particulièrement ceux qui fréquentent une garderie(9,12,13). L'incidence de la grippe varie d'une année à l'autre(14). D'après des études de surveillance récentes, de 9 % à 33 % des enfants, en moyenne, sont atteints de la grippe saisonnière entre les pandémies, et les taux d'infection les plus élevés sont enregistrés durant la première année de vie(1,4,10,15-18).

Bien que l'incidence élevée de l'infection grippale dans l'enfance soit reconnue, depuis quelques années, la gravité de cette infection chez les jeunes enfants attire de plus en plus l'attention(19,20). La grippe est associée à une morbidité considérable chez les enfants de < 5 ans; cette morbidité est particulièrement élevée chez ceux qui sont atteints d'une maladie sous-jacente(21), mais est tout de même importante chez les enfants par ailleurs en bonne santé. Elle comprend des maladies des voies respiratoires inférieures, des maladies fébriles non spécifiques, des infections bactériennes secondaires et des complications au niveau du système nerveux central(4,15,22,23). Plus particulièrement, chez les enfants en bonne santé de < 2 ans, la probabilité d'hospitalisation en raison d'une maladie associée à la grippe est élevée, les taux d'hospitalisation étant comparables, et souvent supérieurs, aux taux enregistrés chez les adultes de ≥ 65 ans(2,8,10,19,21,22,24-26). De plus, les enfants contribuent grandement à la transmission de la grippe en tant que réservoirs(4,6,11,15,17,19,27).

La vaccination des enfants contre la grippe réduit la morbidité chez les vaccinés en plus de diminuer grandement la transmission du virus à d'autres personnes, comme on l'a observé avec des modèles de simulation (17) et dans des situations réelles(9,17,27-30). Le vaccin trivalent à virus inactivé contre la grippe est administré par injection intramusculaire. Le vaccin trivalent à virus vivant atténué contre la grippe, actuellement homologué uniquement aux États-Unis pour les personnes de 5 à 49 ans, est administré par vaporisation intranasale(31).

Au Canada, le Comité consultatif national de l'immunisation recommande que tous les enfants de 6 à 23 mois qui ne présentent aucune contre-indication reçoivent chaque année(24) le vaccin trivalent à virus inactivé contre la grippe, qui est sûr(30,32,33) et efficace(30,34), pour prévenir la maladie, réduire la transmission et diminuer l'utilisation des soins de santé(15,21,28,30,32,35,36). De plus, la vaccination contre la grippe est conseillée, sans être officiellement recommandée, pour toutes les personnes de > 2 ans qui souhaitent se protéger contre la grippe. Pour la première fois, en 2004-2005, le ministère de la Santé de l'Alberta a financé un programme de vaccination universelle contre la grippe pour tous les enfants de 6 à 23 mois. La vaccination a aussi été offerte aux enfants plus vieux et aux adultes atteints d'une maladie associée à un risque élevé et à ceux ayant des contacts étroits avec des personnes à risque élevé. On a encouragé la vaccination de tous les autres enfants en bonne santé de > 2 ans, mais comme ces enfants n'étaient pas admissibles au programme public de vaccination, les familles devaient payer directement les coûts du vaccin.

Malgré toutes ces recommandations, l'acceptation des parents influe fortement sur la vaccination(37). On sait très peu de choses sur les opinions des parents relativement à la vaccination des enfants contre la grippe au Canada(38-40). Pour atteindre la couverture vaccinale ciblée, qui est de 90 % des personnes admissibles(24), il est essentiel d'explorer plus avant les opinions et les comportements des parents au sujet de la vaccination contre la grippe chez les enfants de < 5 ans.

Les objectifs de l'étude étaient les suivants :

  1. mesurer les taux de vaccination communautaire contre la grippe parmi les enfants fréquentant des centres de santé communautaire (CSC) durant la saison 2004-2005 à Calgary;

  2. préciser les motifs couramment invoqués par les parents pour justifier leur choix de faire vacciner ou non leur enfant contre la grippe;

  3. décrire les facteurs associés à la vaccination contre la grippe; et

  4. formuler des recommandations, si possible, concernant les moyens d'augmenter les taux de vaccination des enfants contre la grippe au cours des saisons à venir.

Méthodologie

Nous avons procédé à une étude analytique descriptive prospective de cohortes. Les données ont été recueillies à l'automne 2004 au moyen d'un bref questionnaire qui devait être rempli par la mère, le père ou un parentsubstitut (définis comme les parents). Cette enquête constituait une sous-étude d'une plus vaste étude en cours sur les répercussions de l'immunisation systématique au moyen du vaccin conjugué contre le pneumocoque sur les porteurs nasopharyngés de Streptococcus pneumoniae parmi les jeunes enfants(41). La population à l'étude était formée d'un ou des parents d'enfants âgés de 12 ± 2 mois, de 18 ± 2 mois et de 4,5 ± 0,5 ans qui fréquentaient l'un des cinq CSC de Calgary participants en vue de l'immunisation systématique ou pour d'autres consultations en santé communautaire. Les éventuels participants, parents et enfants, étaient exclus dans les cas suivants : il existait une barrière linguistique entre les parents et les infirmières affectées à l'étude; et une personne autre qu'un parent amenait l'enfant à la clinique et il était impossible d'obtenir par téléphone le consentement d'une personne ayant légalement la charge de l'enfant. L'étude principale comportait un écouvillonnage nasopharyngé chez les enfants participants, et les éventuels participants étaient exclus s'ils présentaient, ou étaient soupçonnés de présenter, une anomalie nasale ou un trouble de la coagulation, y compris des saignements de nez fréquents et la prise de médicaments renfermant des salicylates.

Un consentement éclairé par écrit a été obtenu de tous les parents des enfants participants. Les parents ont rempli un bref questionnaire renfermant des questions fermées et des questions ouvertes au sujet de l'enfant : âge, sexe, état de santé général; composition de la famille; fréquentation d'une garderie ou d'un groupe de jeu; statut vaccinal à l'égard de la grippe de l'enfant et de tous les membres du ménage; et raisons invoquées par les parents pour ou contre la vaccination antigrippale des jeunes enfants. Le statut vaccinal à l'égard de la grippe au moment du recrutement et à la fin de la saison grippale 2004-2005 a été vérifié au moyen des dossiers électroniques de tous les enfants. Le Conjoint Health Research Ethics Board de l'Université de Calgary et la Calgary Health Region ont approuvé l'étude.

Les données ont été saisies dans FileMaker Pro 7.0v3 (FileMaker, Inc., California, 2004), et les réponses des parents aux questions ouvertes ont été classées dans des catégories qui ne s'excluaient pas mutuellement. Les données catégoriques ont été analysées au moyen du logiciel SPSS 11.0 pour Mac OS X (SPSS Inc., Illinois, 2003). Des comparaisons entre les enfants vaccinés et les enfants non vaccinés ont été effectuées au moyen du test du chi carré de Pearson en vue de l'exploration des facteurs associés à la vaccination. Lorsque les questionnaires n'étaient pas complets, seules les questions auxquelles aucune réponse n'avait été fournie ont été exclues.

Résultats

Sur les 844 parents dont les enfants avaient l'âge requis, 30 ont été exclus. Parmi les 814 autres parents, 577 ont accepté de participer à l'étude (taux de participation de 70,9 %). Les caractéristiques des parents et des enfants sont présentées au tableau 1.

Tableau 1. Enquête sur la vaccination des jeunes enfants contre la grippe : caractéristiques des 577 parents recrutés et de leurs enfants

Caractéristiques Nombre (%)
Répondants
Mère 513 (88,9)
Père 61 (10,6)
Parent-substitut 3 (0,5)
Enfants
Sexe  
Féminin 259 (44,9)
Masculin 318 (55,1)
Âge  
12 ± 2 mois 239 (41,4)
18 ± 2 mois 227 (39,3)
4,5 ± 0,5 ans 111 (19,2)

Durant la saison grippale 2004-2005, 37,1 % des enfants (n = 214) ont reçu le vaccin contre la grippe, et 62,9 % (n = 363) ne l'ont pas reçu. Les taux de vaccination selon la catégorie d'âge et l'admissibilité au programme public de vaccination contre la grippe sont présentés au tableau 2. En tout, 41,0 % des enfants admissibles au programme avaient été vaccinés au moment de l'étude ou à la fin de la saison grippale 2004-2005. Parmi les enfants non admissibles au programme, le taux était nettement plus faible, seulement 15,7 % d'entre eux ayant été vaccinés. Pour les enfants vaccinés contre la grippe, les motifs des parents justifiant la vaccination sont présentés au tableau 3. Pour les enfants non vaccinés, les motifs justifiant la nonvaccination sont présentés au tableau 4.

Tableau 2. Vaccination des enfants contre la grippe (n = 577) selon l'âge et l'admissibilité au programme public de vaccination

Enfants Proportion d'enfants vaccinés (%)*
Tous les enfants 214/577 (37,1)
12 ± 2 mois† 105/239 (43,9)
18 ± 2 mois† 84/227 (37,0)
4,5 ± 0,5 ans 25/111 (22,5)
Admissibles‡ 11/22 (50,0)
Non admissibles 14/89 (15,7)
Tous les enfants de 6 à 23 mois† 189/466 (40,6)
Tous les enfants admissibles†‡ 200/488 (41,0)

* Vaccinés durant la saison grippale 2004-2005, avant le recrutement ou plus tard.
† Le ministère de la Santé de l'Alberta a financé un programme de vaccination annuelle contre la grippe pour tous les enfants de 6 à 23 mois.
‡ Admissibilité au programme public de vaccination contre la grippe en raison d'un problème de santé diagnostiqué ou d'un contact étroit avec une personne à risque élevé. Parmi les enfants de 4,5 ± 0,5 ans, ceux qui étaient admissibles au programme public de vaccination ont été vaccinés dans une plus grande proportion que ceux qui ne l'étaient pas (p = 0,001).


Tableau 3. Motifs des parents (n = 214) justifiant la vaccination contre la grippe de leur enfant

Réponses des parents ou des parents-substituts Nombre (%)
Prévention de la grippe et de ses complications 109 (50.9)
Risque élevé associé à l'âge ou à une exposition accrue* 68 (31.8)
Protection d'une personne à risque élevé en contact étroit avec l'enfant 28 (13.1)
Recommandations favorables† 24 (11.2)
Risque élevé en raison de problèmes de santé‡ 17 (7.9)
Commodité, y compris lemoment et le coût 7 (3.3)
Autres raisons positives 8 (3.7)
* Exposition directe ou indirecte.
† D'un professionnel de la santé, des médias ou de publications.
‡ Problèmes de santé diagnostiqués ou perçus.

Tableau 4. Motifs des parents (n = 363) justifiant la non-vaccination contre la grippe de leur enfant

Réponses des parents ou des parents-substituts

Nombre (%)

Inutilité*

133 (36.6)

Indécision ou manque d'information

50 (13.8)

Inquiétudes concernant l'innocuité, dont les effets secondaires, les risques et la douleur

47 (12.9)

Inconvenience, including timing and cost**

28 (7.7)

Désagréments, y compris lemoment et les coûts**

16 (4.4)

Inquiétudes concernant l'efficacité de la protection conférée par le vaccin

16 (4.4)

Recommandations défavorables†

16 (4.4)

Préférence pour le développement de l'immunité naturelle ou utilisation d'autres moyens

15 (4.1)

Attente‡

9 (2.5)

Autres raisons négatives

27 (7.4)

* Enfant en bonne santé, risque faible d'exposition directe ou indirecte, expérience limitée de la grippe ou méconnaissance de la gravité de la grippe.
** Si l'enfant n'est pas admissible au programme public de vaccination.
† D'un professionnel de la santé, des médias ou de publications.
‡ Pour un rendez-vous, le rétablissement à la suite d'unemaladie ou l'administration d'autres vaccins non à jour avant que le vaccin contre la grippe puisse être administré.


Nous avons effectué des comparaisons entre les enfants vaccinés et les enfants non vaccinés afin d'étudier certains facteurs qui pourraient être associés à l'immunisation (tableau 5). Les enfants vivant dans un foyer dont un ou plusieurs autres membres avaient reçu le vaccin contre la grippe étaient proportionnellement plus nombreux à avoir été vaccinés que les enfants d'un ménage dont aucun des autres membres n'avait été vacciné contre la grippe (69,1 % c. 23,2 %, p < 0,001). De plus, les enfants dont au moins un des parents était âgé de ≥ 35 ans étaient proportionnellement plus nombreux à avoir reçu le vaccin contre la grippe que les enfants dont les parents étaient plus jeunes (63 % c. 50,9 %, p = 0,01).

Tableau 5. Facteurs possiblement associés à la vaccination des enfants contre la grippe

Facteurs Proportion des enfants vaccinés (%) Proportion des enfants non vaccinés (%) Valeur p
Au moins un autre membre du ménage vacciné contre la grippe* 143/207 (69.1) 83/357 (23.2) < 0.001
Au moins un autre enfant vivant dans le même foyer 131/213 (61.5) 234/360 (65.0) 0.4
Au moins un des parents de ≥ 35 ans 126/200 (63.0) 176/346 (50.9) 0.01
Exposition à d'autres enfants† 135/212 (63.7) 226/361 (62.6) 0.8
Problème de santé (diagnostiqué ou perçu) 24/214 (11.2) 25/361 (6.9) 0.08
Prise d'antibiotiques par l'enfant actuellement ou dans les 2 derniers mois 46/162 (28.4) 61/362 (16.9) 0.15
Au moins une infection de l'oreille au cours des 12 derniers mois 59/212 (27.8) 89/360 (24.7) 0.41
* Durant la saison grippale 2004-2005.
† Par la fréquentation de groupes de jeu, de centres préscolaires, d'écoles maternelles ou de garderies.

Analyse

Dans le cadre de l'étude, durant la première saison d'un programme public de vaccination contre la grippe chez les enfants de 6 à 23 mois, 40,6 % des enfants de ce groupe d'âge ont reçu le vaccin contre la grippe. Ce taux de vaccination est de beaucoup inférieur au taux visé, qui était de 90 %(24), mais il n'est sans doute pas inattendu au cours de la première année d'un programme public. Les parents connaissent probablement peu le programme. Le taux de vaccination contre la grippe enregistré est comparable au taux de 48 % signalé dans le même groupe d'âge aux États-Unis pour la saison 2004-2005, année où l'Advisory Committee on Immunization Practices recommandait pour la première fois la vaccination systématique contre la grippe(42). Il est évident qu'il faut promouvoir davantage la vaccination contre la grippe dans ce groupe d'âge.

Parmi les parents qui ont choisi de faire vacciner leur enfant contre la grippe, les principales raisons invoquées étaient la prévention de la maladie et le risque accru en raison de l'âge ou de l'exposition. Il est encourageant de constater que certains parents reçoivent de l'information exacte et choisissent de faire vacciner leur enfant pour des raisons valables. Par ailleurs, il est intéressant de noter que seule une minorité de parents ont choisi de faire vacciner leur enfant à la suite de recommandations favorables de la part d'un professionnel de la santé. D'autres études ont montré que les parents étaient beaucoup plus nombreux à faire vacciner leur enfant lorsqu'ils avaient parlé de la vaccination contre la grippe avec leur médecin que lorsqu'ils ne l'avaient pas fait(40,43). Par conséquent, les professionnels de la santé devraient être en mesure de faire augmenter la couverture vaccinale en fournissant aux parents davantage d'information sur le vaccin contre la grippe et en recommandant la vaccination.

Parmi les parents qui ont choisi de ne pas faire vacciner leur enfant contre la grippe, l'inutilité de la vaccination était la principale raison alléguée. D'après d'autres études, nombreux sont les parents qui ignorent que la vaccination est recommandée pour les jeunes enfants en bonne santé, les enfants atteints d'une affection chronique et les enfants en contact étroit avec des personnes à risque élevé, et ce, en raison du risque accru et de la gravité de la maladie pour ces enfants ou pour les personnes à risque élevé avec qui ils entrent en contact(22,39,40,43,44). En outre, certains parents ont choisi de ne pas faire vacciner leur enfant parce qu'ils n'arrivaient pas à se décider ou avaient l'impression de ne pas en savoir assez sur le vaccin. Un manque de connaissances sur les vaccins de la part des parents a déjà été observé(45). Ensemble, ces résultats soulignent la nécessité de renseigner davantage les parents sur la gravité de la grippe et la vaccination des enfants. Pour être efficace, l'information communiquée devrait être objective, facilement accessible et facile à comprendre, et faire ressortir la nécessité de la vaccination(4,44,46-48).

Les inquiétudes relatives à l'innocuité étaient importantes dans la décision de certains parents de ne pas faire vacciner leur enfant. Des études antérieures ont révélé que les inquiétudes des parents relativement à l'innocuité des vaccins constituaient un obstacle important à la vaccination de leur enfant(18,39,40,46,47,49). Une meilleure information concernant la gravité de la grippe et l'innocuité du vaccin pourrait rassurer les parents à cet égard.

Les enfants de l'étude étaient proportionnellement plus nombreux à avoir reçu le vaccin contre la grippe lorsqu'au moins un autre membre du ménage avait aussi été vacciné. Une étude antérieure a établi une association similaire(40). On peut présumer que lorsque d'autres membres du ménage ont été vaccinés, les parents comprennent mieux l'utilité de la vaccination contre la grippe pour les enfants. La promotion de la vaccination contre la grippe dans la population en général pourrait faire augmenter les taux de vaccination des enfants ainsi que les connaissances des parents concernant le vaccin et son utilité pour leur famille.

Les enfants dont les parents étaient plus vieux étaient aussi plus nombreux à avoir reçu le vaccin contre la grippe. Ce phénomène s'explique mal, mais il pourrait mettre en lumière la nécessité d'axer plus précisément les programmes de sensibilisation sur les jeunes parents.

Parmi les enfants de 4 et 5 ans, on a observé une différence frappante entre la couverture vaccinale des enfants admissibles au programme public de vaccination en raison d'une maladie ou d'un contact étroit avec une personne à risque et celle enregistrée parmi les enfants non admissibles, la couverture étant plus de trois fois supérieure dans le groupe admissible. Bien que de nombreux facteurs aient pu contribuer à cette différence, l'absence de coûts directs constitue probablement un facteur clé. Au Canada, où il existe des programmes publics pour tous les vaccins administrés systématiquement dans l'enfance, sans coûts directs pour les familles, l'administration des vaccins qui sont offerts, mais dont les coûts ne sont pas assumés par l'État, risque d'être très faible. En plus d'être influencés par les coûts, les parents pourraient avoir l'impression que les vaccins qui ne sont pas payés par l'État ne sont pas nécessaires.

Finalement, on a observé une association presque statistiquement significative entre la vaccination contre la grippe et une maladie diagnostiquée ou perçue. La prévalence, parmi les enfants, d'une atteinte sous-jacente était relativement faible, et l'absence de signification statistique pourrait être en grande partie attribuable à une puissance insuffisante. Cependant, d'autres études ont fait état de taux de vaccination plus élevés parmi les enfants atteints d'une maladie sous-jacente perçue ou confirmée(40,42,43). Les professionnels de la santé, de même que les documents d'information destinés aux parents, devraient continuer de promouvoir la vaccination des enfants atteints d'une maladie sous-jacente ou ayant des contacts étroits avec une personne à risque élevé.

L'exposition à d'autres enfants par la fréquentation hebdomadaire de groupes de jeu, de centres préscolaires, d'écoles maternelles ou de garderies n'était pas associée à un taux plus élevé de vaccination. Ce résultat est comparable à celui d'une étude antérieure(40). Il est connu que les enfants exposés régulièrement à de nombreux autres enfants courent un plus grand risque d'infection, y compris d'infection grippale(9,12,13). La promotion de la vaccination chez ces enfants devrait devenir une priorité.

Limites

La population à l'étude était formée de parents et d'enfants fréquentant un centre de santé communautaire, et ce, presque exclusivement pour la vaccination systématique. Par conséquent, l'échantillon est probablement biaisé en faveur des parents ayant des opinions positives à l'égard de la vaccination. Aussi, le taux de vaccination contre la grippe observé dans l'étude pourrait-il ne pas être représentatif de la population en général.

De plus, comme nous avons mesuré le taux global de vaccination contre la grippe au moment du recrutement ou plus tard au cours de la saison grippale 2004-2005, certains parents ont pu être incités à faire vacciner leur enfant après avoir participé à l'étude, engendrant ainsi un biais d'observation. Toutefois, seuls six des participants qui ne prévoyaient pas faire vacciner leur enfant au moment du recrutement l'ont fait par la suite; le biais d'observation semble donc négligeable.

Conclusions

En conclusion, l'étude a permis de relever plusieurs facteurs importants associés à la vaccination des jeunes enfants contre la grippe. Pour atteindre les taux ciblés, il faudrait mieux informer les parents, surtout ceux qui sont jeunes, et inciter les professionnels de la santé à recommander la vaccination. La promotion de la vaccination contre la grippe dans la population en général pourrait contribuer à accroître les taux de vaccination parmi les jeunes enfants et les connaissances des parents à l'égard du vaccin lui-même et de ses avantages pour leur famille.

Remerciements

Le projet a été financé grâce à l'Alberta Children's Hospital Foundation et à une subvention de recherche illimitée de Wyeth Canada. Nous souhaitons remercier l'équipe de recherche CASPER : Stephanie Hui (coordonnatrice de l'étude), Linda Hastie (infirmière coordonnatrice de l'étude), Janice Pitchko (épidémiologiste de recherche) ainsi que Freda Anderson, Loy Bacon, Sue Smylie et Julie Zwicker (infirmières de l'étude).

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