ARCHIVÉ - Relevé des maladies transmissibles au Canada

 

Relevé des maladies transmissibles au Canada

1 décembre 2007

Volume 33
Numéro 13

Processus pour établir et mettre en œuvre des recommandations et des buts nationaux pour les maladies évitables par la vaccination au Canada dans le cadre de la stratégie nationale d'immunisation

Introduction

La première d'une série de conférences nationales de concertation sur les maladies évitables par la vaccination (CNC‑MEV) s'est déroulée à Québec du 12 au 14 juin 2005. L'objectif de cette conférence était d'examiner les cibles et les buts nationaux existants pour la réduction de la maladie et la couverture vaccinale et de faire de nouvelles recommandations pour six maladies évitables par la vaccination : les infections invasives à méningocoque (IIM), les infections invasives à pneumocoque (IIP), la varicelle, la coqueluche, l'influenza et la rubéole. Le présent document est le troisième d'une série de trois articles publiés dans le Relevé des maladies transmissibles au Canada (RMTC)(1, 2) à propos de cette conférence. Il décrit le processus qui a présidé à l'organisation de la conférence passant des recherches préalables et de la préparation au suivi ultérieur qui a conduit à l'adoption et à la mise en œuvre des résultats de la conférence, grâce aux règles de consensus ainsi que du déroulement de la conférence.

Contexte

La Stratégie nationale d'immunisation (SNI), approuvée en 2004, est un moyen pour les instances fédérales, provinciales et territoriales de travailler en partenariat à l'amélioration de l'efficacité et de l'efficience des programmes de vaccination au Canada. L'une des principales composantes de la SNI est l'élaboration de cibles et de buts nationaux pour ce qui est de la prévention de la maladie et de la couverture vaccinale.

Le Comité canadien sur l'immunisation (CCI) a été créé en 2004 pour coordonner toutes les activités liées à la SNI, notamment l'établissement de buts nationaux. Son premier projet d'envergure nationale a consisté à demander à la Division de l'immunisation et des infections respiratoires (DIIR) de l'Agence de santé publique du Canada (ASPC) de coordonner une série de conférences nationales de concertation visant à établir des cibles et des buts nationaux axés sur la prévention et la lutte contre les maladies évitables par la vaccination. Les paragraphes qui suivent exposent le processus fondé sur les résultats qui a présidé au déroulement de cette première conférence de concertation. Ce processus a été approuvé par le CCI et fera l'objet d'un examen avant la prochaine conférence.

Préparation avant la conférence

Le CCI a recommandé d'examiner six maladies évitables par la vaccination (MEV) au cours de la première conférence de concertation. Le gouvernement fédéral a choisi d'accorder aux provinces et aux territoires des fonds publics pour la somme de 300 millions de dollars (Cdn) pour quatre maladies, soit les infections invasives à méningocoque (IIM), les infections invasives à pneumocoque (IIP), la coqueluche et la varicelle. Cette somme était destinée à l'achat de vaccins après l'approbation de la SNI en 2004. On a ajouté la rubéole pour soutenir le but régional d'élimination de la rubéole indigène et du syndrome de rubéole congénitale dans les Amériques fixé par l'Organisation panaméricaine de la santé (OPS)(3). L'influenza a été ajoutée, car, pense‑t‑on, il était opportun de le faire.

Un comité de planification a été constitué 6 mois avant la tenue de la conférence. Il lui incombait de mettre sur pied le processus d'examen fondé sur les résultats pour chacune des six maladies et de superviser l'étude du contenu technique et de la liste de participants à la conférence. Le comité de planification comptait des membres du CCI, de l'ASPC, du Comité consultatif national de l'immunisation (CCNI), d'autres organismes fédéraux ainsi que des représentants des provinces et des territoires. Compte tenu du peu de temps pour la conférence proprement dite et du nombre important de maladies à examiner, il fallait mener d'importantes recherches préparatoires. Les membres du comité de planification ont dû choisir et diriger des équipes composées de trois ou quatre experts en la matière provenant du milieu universitaire, de la santé publique et des laboratoires. Ces groupes d'experts ont passé 3 mois à travailler à la préparation de la conférence. Chaque groupe a examiné les données disponibles, les buts existants à l'échelle nationale et internationale, ainsi que les recommandations et les cibles. Ils ont déterminé et discuté des enjeux d'actualité et constitué les bibliographies des documents pertinents. Chaque groupe a également élaboré des recommandations préliminaires pour les cibles et les buts nationaux révisés ou nouveaux. Ces composantes ont été compilées dans des guides de discussion propres à chaque maladie pour aider les groupes de travail à orienter les discussions au cours de la conférence.

Soixante‑deux représentants d'organisations et d'organismes nationaux, internationaux, fédéraux, non gouvernementaux et professionnels, dont au moins deux représentants pour chacun des 13 ministères de la Santé provinciaux et territoriaux, étaient conviés à la conférence de concertation. Des représentants de toutes les provinces et de tous les territoires ont participé à la conférence, y compris des médecins hygiénistes en chef de la santé publique, des épidémiologistes provinciaux et territoriaux ainsi que des experts de programmes, des experts techniques et spécialisés dans l'élaboration de programmes du gouvernement fédéral, des experts internationaux ainsi que des groupes clés non gouvernementaux. En tout, 82 personnes ont participé à cette conférence de concertation.

Avant la conférence, chaque participant a dû indiquer les trois groupes de travail sur les maladies auxquels ils souhaitaient participer. On s'est efforcé de respecter les préférences tout en s'assurant une représentation équitable dans tous les groupes de travail sur les maladies. On a réparti les experts en la matière dans les groupes de travail et la présidence a été choisie parmi les membres du comité de planification.

Les guides de discussion et les documents pertinents ont été remis aux participants selon leur groupe de travail avant la conférence. On leur a remis un CD‑ROM contenant les documents de référence et les exposés pour toutes les maladies après la conférence. Ce CD‑ROM est disponible sur demande à la DIIR, Section des programmes, par courriel [Programs.IRID-DDIR@phac-aspc.gc.ca].

Termes et définitions

Pour les délibérations de cette conférence, voici des définitions de termes :

But : Déclaration générale portant sur un résultat désiré dans un laps de temps précis. Il n'est pas requis que les buts soient quantitatifs ou mesurables.

Objectifs/recommandations : Déclarations d'intention précises, mesurables, atteignables, réalistes et limitées dans le temps. Un objectif peut se composer d'une cible. À l'occasion d'une réunion subséquente du CCI, il a été recommandé que l'utilisation du terme « objectif » soit réservée aux instances provinciales et territoriales afin qu'elles déterminent individuellement la meilleur façon de travailler afin d'atteindre les buts pour lesquels il y a eu consensus à l'échelle nationale dans un laps de temps acceptable, compte tenu des exigences qui leur sont propres. Par conséquent, dans ces documents, le terme « objectif » a été remplacé par « recommandation ».

Cibles : Éléments mesurables qui précisent l'ampleur des progrès à faire et le délai.

De plus, les délais associés aux recommandations et aux buts nationaux doivent être raisonnables et réalisables. On suggère un délai de 5 ans comme plage de planification convenable.

Admissibilité au vaccin : Dans le cadre de l'élaboration des recommandations en vue de fixer des buts nationaux, les participants se sont entendus sur le fait que l'admissibilité au vaccin devait s'appuyer sur les recommandations du CCNI plutôt que sur les programmes de santé publique des provinces et des territoires.

Déroulement de la conférence

La conférence s'est tenue sur 2 jours. Après le préambule et les exposés de la première journée, les participants se sont réunis en séance plénière pour étudier et voter les recommandations en vue de l'élimination de la rubéole. Puis, les participants ont passé le reste de la première journée à travailler dans les groupes de travail portant sur des maladies précises qui leur avaient été assignées. Dans chaque groupe se sont déroulés des exposés sur la surveillance, l'épidémiologie, les difficultés auxquelles font face les laboratoires et les programmes de vaccination ainsi que sur la couverture vaccinale. Le groupe de travail, dirigé par un président aidé de spécialistes en la matière, d'un rapporteur et d'un secrétaire, a examiné les données portant sur une maladie en particulier, cerné les problèmes clés développé et fourni les justifications pour chacune des recommandations.

Le deuxième jour, les recommandations faites par les groupes de travail des cinq maladies restantes ont été présentées en séance plénière par des groupes d'experts choisis dans chaque groupe de travail sur une maladie précise. Après la présentation des recommandations et de leurs justifications, les participants ont posé des questions pour obtenir des éclaircissements, puis ont voté en utilisant un système de vote électronique fourni par le Laboratoire national de microbiologie (LNM), conformément aux règles énoncées ci‑dessous. Après avoir déterminé le niveau d'entente initial, c'était le temps des commentaires et des discussions. Si l'on ne parvenait pas à un consensus au premier vote ou si l'on y parvenait à la minorité, il y avait un deuxième vote après la période de commentaires et de discussions.

Les participants ayant le droit de voter étaient les représentants des provinces et des territoires, notamment les directeurs en chef de la santé, les épidémiologistes et les experts des programmes, les experts de la DIIR et du LNM, les membres du CCI ne remplissant pas des fonctions de suppléants, les membres du comité de planification de la conférence, les représentants des organismes non gouvernementaux et des associations professionnelles de la santé ainsi que les coprésidents de la conférence (dans les situations où les résultats ne seraient pas autrement décisifs). Les experts internationaux, les membres du personnel de l'ASPC agissant à titre de rapporteurs et d'aides à la conférence, les représentants de l'industrie ou les participants étant en conflit d'intérêts ne disposaient pas du droit de vote.

Le processus de vote sur des recommandations concertées se fonde sur la garantie que tous les participants ont l'occasion d'exprimer leur point de vue soit au cours de la séance plénière, soit au sein du groupe de travail.

  • Les choix disponibles pour le vote sont : « d'accord », « d'accord mais avec des réserves » et « en désaccord ».
  • Au moins 66 % de participants ayant le droit de voter doivent être présents pour que le quorum soit atteint.
  • Il y avait consensus quand au moins 75 % des participants ayant le droit de voter étaient soit « d'accord », soit « d'accord mais avec des réserves » sur une recommandation. Quand 50% à 74 % des participants ayant le droit de voter étaient d'accord sans réserve sur une recommandation, cela constituait un vote majoritaire, alors que, quand seulement 25% à 49 % des participants ayant le droit de voter étaient d'accord sans réserve sur une recommandation, cela représentait un vote minoritaire.
  • Si le nombre combiné des participants « d'accord » ou « d'accord mais avec des réserves » représentaient < 75 % des voix des participants ayant le droit de voter ou si > 33 % des participants ayant le droit de voter étaient absents au vote ou avaient refusé de participer au vote, on considérait que la recommandation n'était pas appuyée.

Résultats de la conférence de concertation

Trois buts et 52 recommandations ont été approuvés par consensus. Compte tenu des contraintes de temps, les groupes de travail n'ont pas élaboré de buts nationaux pour la varicelle, les IIM et la coqueluche. Par conséquent, aucun vote n'a eu lieu en séance plénière. En ce qui concerne l'influenza, il y a eu consensus sur l'adoption des cibles de couverture vaccinale nationale de 2001 et sur le report de l'élaboration de recommandations pour ce qui est de la réduction de la maladie à une future conférence. Les recommandations et les buts sont exposés dans le premier(1) et le deuxième(2) articles de la série consacrée à la CNC‑MEV.

À la fin de la conférence, les participants ont évalué le processus et ont fait des recommandations dont il faudra tenir compte à l'occasion de l'organisation des futures conférences de concertation.

Suivi et événements après la conférence

On a procédé à une révision des résultats de la conférence de concertation de 2005 pour s'assurer de la constance terminologique et du respect des normes de rapport imposées pour ce qui est de la couverture nationale(4). Pour que le contenu soit normalisé, on a proposé des buts nationaux pour les trois maladies restantes (varicelle, IIM et coqueluche). Ces révisions et ces ajouts ont été approuvés par le CCI en décembre 2005.

Suite à son agrément, le CCI a demandé à chaque administration d'évaluer la faisabilité et le caractère mesurable de chaque résultat de la conférence et d'instaurer un ordre de priorité à cet égard. Il a fait circuler un questionnaire et a analysé les commentaires reçus avant de déterminer les prochaines étapes. L'objectif de ce sondage était d'évaluer les répercussions des résultats de la conférence de concertation sur les programmes de vaccination et de faire ressortir les besoins et les lacunes dans les provinces et dans les territoires.

Neuf provinces et territoires ainsi que la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits ont répondu. On a estimé que les buts liés à la rubéole et aux IIP étaient réalisables (8/10) et mesurables (7/10), mais on n'a pas considéré que les buts étaient, de façon générale, une priorité (2/10). Les recommandations portant sur la réduction de la maladie et la couverture vaccinale se sont vu accorder une priorité légèrement plus élevée que les buts (3/10 et 4/10, respectivement). Les répondants ont considéré que les recommandations portant sur la réduction de la maladie tout comme celles axées sur la couverture vaccinale étaient passablement réalisables (5/10) et légèrement plus difficiles à mesurer (4/10). Les réponses ont indiqué que les ressources et les données en matière de surveillance permettant d'élaborer de nouveaux outils destinés à la collecte des données et des systèmes de surveillance pour suivre les nouveaux buts et les nouvelles recommandations étaient inadéquates. Les répondants ont également fait remarquer que certaines des cibles et des échéances recommandées étaient irréalistes en ce qui concerne leur administration.

Recommandations du CCI sur les résultats

Le but d'éliminer les cas de transmission indigène de la rubéole et du syndrome de rubéole congénitale (SRC) du Canada d'ici 2010 est le seul qui ait été approuvé par le CCI pour que le Réseau pancanadien de santé publique l'endosse à l'échelle nationale. Les commentaires recueillis à l'occasion du sondage et des discussions avec les représentants provinciaux et territoriaux ont fait ressortir que les limites soulignées par chaque province et territoire se répercuteraient clairement sur sa capacité d'appliquer pleinement les recommandations et les buts nationaux de 2005. Par conséquent, le CCI a accepté d'approuver les résultats restants de la conférence de concertation en tant que « normes » que doivent appliquer les provinces et les territoires pour se guider dans l'élaboration et la précision des objectifs des programmes provinciaux et territoriaux.

Recommandations pour améliorer le processus de la conférence

On a recueilli, pendant et après la conférence, des recommandations visant à améliorer le processus auprès des participants et des représentants provinciaux et territoriaux, respectivement. La recommandation la plus fréquente pendant la conférence consistait à conseiller que les futures conférences de concertation se concentrent sur moins de maladies pour accorder suffisamment de temps à l'examen des données et à la prise de décisions éclairées. Le CCI a examiné les recommandations recueillies à l'occasion du sondage mené auprès des provinces et des territoires susmentionné. Les modifications terminologiques ont été intégrées, mais pas celles qui auraient modifié le contenu des déclarations concertées. Ces recommandations accompagnées de celles émanant des participants à la conférence et des membres du comité de planification de la conférence seront adressées au comité de planification des prochaines conférences de concertation.

Prochaines étapes

Les recommandations et les buts nationaux issus de la conférence de concertation de 2005 feront l'objet d'une réévaluation en 2010 et les futures conférences de concertation devront examiner, élaborer et mettre à jour les recommandations et les buts nationaux en matière de couverture vaccinale et de réduction de la maladie pour les maladies évitables par la vaccination restantes. Pour garantir le recours à des pratiques exemplaires, on a résumé les rapports d'évaluation et on procédera à un exercice des « leçons tirées » avant d'organiser les conférences suivantes.

Voici certaines des activités qu'entreprendra le CCI en collaboration avec le CCNI et d'autres intervenants en prévision des conférences futures : établir le nombre de maladies acceptables pour une seule conférence de concertation et évaluer les difficultés d'étudier plusieurs maladies de façon concomitante pour garantir que le temps accordé suffit à examiner toutes les données et à prendre des décisions éclairées. En outre, le CCI établira les critères de priorisation et de sélection des maladies évitables par la vaccination faisant l'objet des futures conférences de concertation. Dans certains cas, il conviendra peut‑être de consacrer une conférence entière à une seule maladie, l'influenza entre autres exemples.

Pour ce qui est du processus de fixation des buts et des recommandations, le CCI indiquera si les conférences de concertation devraient concentrer leurs efforts sur l'élaboration de buts « idéaux » ou « pratiques ».

Conclusion

En dépit des limites actuelles, il y a des avantages très nets à élaborer des recommandations et des buts nationaux pour les maladies évitables par la vaccination. Comme les provinces et les territoires tendent à la réalisation de la vision nationale, leurs programmes de vaccination s'amélioreront invariablement, et une meilleure couverture en résultera. À leur tour, ces améliorations permettront de justifier les fonds supplémentaires accordés à leurs programmes de vaccination. En outre, le fait d'établir des recommandations et des buts nationaux fournit une méthode de responsabilisation à l'échelle provinciale et territoriale. Pour finir, les recommandations et les buts issus de la CNC‑MEV 2005 ne doivent pas obligatoirement être appliqués par les provinces et les territoires. Pour les membres du Réseau pancanadien de santé publique ainsi que pour les partenaires provinciaux et territoriaux, c'est l'occasion d'établir les fondements permettant d'entamer des discussions qui conduiront à l'adoption et à la mise en œuvre de buts à l'échelle des administrations. Bien que les programmes et les objectifs puissent encore varier à l'issue de ce processus, ils seront toutefois désormais guidés par une vision commune.

Bibliographie

  1. Résumé des résultats de la Conférence nationale de concertation sur les maladies évitables par la vaccination. RMTC Sous presse.

  2. Rapport final sur les résultats de la Conférence nationale de concertation sur les maladies évitables par la vaccination. RMTC Sous presse.

  3. 44e Conseil directeur de l'OPS‑OMS, 55e session du Comité régional, résolution CD44.R1, Sustaining Immunization Program – Elimination of Rubella and Congenital Rubella Syndrome (CRS). 22‑26 septembre 2003.

  4. Normes nationales pour l'évaluation de la couverture vaccinale recommandations du Réseau canadien des registres d'immunisation, RMTC 2005;31(9):93-97.

Remerciements

Nous souhaitons remercier les experts nationaux et internationaux et les spécialistes du programme qui ont participé à la conférence de concertation, les coprésidents de la conférence, les membres du comité de planification, toutes les personnes qui ont donné de leur temps pour faire en sorte que les données présentées dans les guides de discussion soient les plus pertinentes et les plus à jour possible, ainsi que le personnel de la Division de l'immunisation et des infections respiratoires; grâce à vous, la conférence a été une réussite.


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