ARCHIVÉ - Conseil pour considération du vaccin conjugué quadrivalent contre le méningocoque (A, C, Y, W135) pour utilisation par les provinces et territoires

 

Acceptabilité des programmes

La théorie de perception du risque de Slovic (1987) prédit que le niveau d'anxiété et la probabilité que l'on prenne des mesures pour réduire un risque sont plus élevés si la source n'est pas bien connue des personnes exposées ou des experts; si l'exposition est involontaire et difficile à contrôler; et, finalement, si les conséquences sont dévastatrices. La méningococcie invasive possède toutes ces caractéristiques; il n'est donc pas étonnant de la retrouver dans les priorités de prévention au sein de la population. Une étude menée auprès de parents ayant des enfants de moins de sept ans au Canada a révélé que la méningite était la pathologie évitable par la vaccination la plus redoutée (Ipsos Reid, communication personnelle, 2001). Dans la même étude, la possibilité de prévention, les recommandations des professionnels de la santé, ainsi que l'innocuité et l'efficacité du vaccin ont été citées comme les facteurs les plus importants entrant dans la décision de faire vacciner son enfant. L'occurrence d'une éclosion augmente l'anxiété et le besoin d'intervenir, comme on l'a observé au Québec en 1990-1993 et en 2001 (De Wals et coll., 2003). Une étude réalisée en 2002 dans la région de Sherbrooke, Québec, a montré qu'une grande majorité des personnes interrogées approuvaient la campagne d'immunisation systématique qui venait de s'achever, alors que près de 80 % appuyaient l'inclusion du vaccin méningococcique dans le calendrier régulier de vaccination (De Wals et coll., 2002). On peut donc logiquement prédire que l'inclusion d'un vaccin sûr et efficace contre la méningococcie invasive dans le calendrier régulier de vaccination des adolescents au Canada serait bien accueillie par la majorité de la population et des professionnels de la santé. L'expérience a démontré que les groupes opposés à la vaccination sont moins actifs lorsqu'il existe un consensus social et une absence de controverse sur un vaccin donné.

Il est important d'être proactif et de faire circuler des informations objectives sur l'occurrence d'une grappe de cas du syndrome de Guillain-Barré suivant l'administration de MenactraMC. On peut faire l'analogie avec le vaccin inactivé contre l'influenza. En 2004, une étude de l'Institute of Medicine révélait que les données sur la relation entre les vaccins contre l'influenza autres que le vaccin contre l'influenza porcine n'étaient pas concluantes (Stratton et coll., 2004). L' information sur ce risque potentiel de très faible magnitude, le cas échéant, est incluse dans les monographies données aux sujets vaccinés (MSSS, 2004). Mais une étude menée dans la région de Sherbrooke en 2000 a montré qu'aucun des répondants, dont 59 % avaient été vaccinés, n'avait cité le SGB comme un des effets secondaires possibles du vaccin contre l'influenza, ce qui donne à penser que l'information n'a pas été transmise oralement (De Wals, 2000). Durant les entrevues, il fut relativement facile de décrire le syndrome et son risque de mortalité (environ 10 %). En revanche, il fut beaucoup plus difficile d'expliquer l'indice 10 000 : 1 qui existe entre le risque de mortalité annuel lié à l'influenza si l'on n'est pas vacciné (environ 1/1 000) et le risque de mortalité du SGB après avoir été vacciné contre l'influenza (environ 1/10 000 000). Quant à savoir si l'information communiquée sur le risque de contracter le SGB pourrait influencer leur désir d'être vacciné l'année suivante, 89 % des répondants ont répondu non, 7 % ont répondu oui et 4 % ne savaient pas. Parmi ceux qui n'avaient pas été vaccinés, le seul fait d'être informés de l'existence d'un tel risque renforcerait leur décision de ne pas être vaccinés dans 35 % des cas. Les personnes de 65 ans et plus peuvent accepter davantage un certain risque associé à un vaccin efficace, mais la réaction des adolescents et de leurs parents peut être complètement différente. Tout en informant les sujets vaccinés au MenactraMC, il serait important d'établir l'équilibre entre le devoir d'obtenir un consentement éclairé avec le danger de soulever des inquiétudes non fondées et l'absence d'une intervention préventive efficace.

Les injections multiples peuvent être problématiques pour tous les groupes d'âge. Pour réduire au minimum ces impacts potentiels, il est important de planifier le calendrier de vaccination des adolescents de façon à ne pas devoir administrer plus de trois injections par visite. La récente introduction de plusieurs nouveaux vaccins au Canada a considérablement augmenté la charge de travail des vaccinateurs. Pour éviter l'insatisfaction du personnel suivant l'annonce d'un nouveau programme, il est essentiel de préparer le terrain longtemps à l'avance et de fournir les ressources adéquates aux personnes et aux organisations impliquées pour les aider à accomplir cette tâche. Si toutes ces conditions sont réunies, on peut s'attendre à ce que les taux de couverture soient élevés au sein de la population cible, comme c'est le cas dans la majorité des programmes de vaccination publique au Canada (Santé Canada, 1997).

Faisabilité des programmes

Idéalement, la vaccination contre la MI ciblant les adolescents devrait être effectuée entre 11 et 13 ans, avant que les changements à leur style de vie ne causent une augmentation des taux d'hébergement asymptomatique de N. meningitidis, qui culminent entre 15 et 20 ans (Cartwright, 1995). Le risque de maladie invasive augmente également à partir de 13 ans, devenant le plus élevé à 18 ans (Figure 1). L'administration de Men4-DT à l'âge de 9 ou 10 ans risquerait d'offrir une protection sous-optimale durant la période à haut risque qui dure jusqu'à l'âge de 24 ans. Néanmoins, la vaccination des élèves de neuvième année (ayant presque 14 ans), bien qu'elle soit un peu trop tardive, demeure une alternative acceptable. La couverture prévue du groupe d'âge cible est un autre facteur à considérer pour choisir la meilleure stratégie.

Toutes les provinces et territoires canadiens ont des programmes de vaccination pour les jeunes appartenant à ces catégories (Tableau 4). Jusqu'à maintenant, la priorité s'est portée sur l'immunisation des enfants en bas âge. La multiplication des vaccins disponibles pour les adolescents demande que l'on prépare plus soigneusement le calendrier de vaccination pour ce groupe d'âge. Il faut revoir le nombre et le moment des injections de rappel pour la diphtérie, le tétanos et la coqueluche. Un programme scolaire ciblant les étudiants de 12 ans en première année du secondaire présenterait certainement des avantages en ce qui touche la prévalence des sujets naïfs, la réponse immunitaire, la présence à l'école, l'obtention du consentement parental et l'acceptabilité de la vaccination, par rapport à un programme ciblant les étudiants de 14 ans et plus. Une étude quasi-expérimentale réalisée au Québec a permis de constater qu'un programme de vaccination scolaire constitue la méthode la plus efficace et la moins coûteuse pour atteindre ce groupe d'âge (Guay et coll., 2003). On peut naturellement s'attendre à ce qu'il soit difficile pour des parents d'amener leur enfant de 10 à 14 ans chez le médecin ou dans un centre de santé pour y être vacciné.

Il est donc nécessaire d'optimiser les vaccinations de ce groupe d'âge, en tenant compte des contraintes particulières et des programmes existants dans chaque juridiction. L'immunisation contre la méningococcie (1 dose), la diphtérie, le tétanos et la coqueluche (1 dose), les hépatites A et B (possiblement 2 doses) et le VPH (1 à 3 doses) pourrait être complétée en deux ou trois sessions concentrées dans la même année.


Tableau 4 : Programmes de vaccination pour les jeunes de 9 à 16 ans dans les provinces et territoires canadiens (ASPC 2007b)
  Hépatite B DCaT
Provinces
Alberta 5e année (3 doses) 9e année
Colombie-Britannique   9e année
Manitoba 4e année (3 doses) 8e ou 9e année
Nouveau-Brunswick   9e année
Terre-Neuve-et-Labrador 4e année (3 doses) 9e année
Nouvelle-Écosse 4e année (3 doses) 9e année
Ontario 7e année (2 doses) 14-16 ans
Île-du-Prince-Édouard   9e année
Québec 4e année (3 doses) 9e année (3e secondaire)
Saskatchewan 6e année (3 doses) 8e année
Territories
Territoires du Nord-Ouest   9e année
Nunavut   9e année
Yukon   9e année

Enfin, des problèmes d'approvisionnement en vaccins peuvent survenir, en particulier lorsqu'un seul vaccin est autorisé et qu'il est produit à un seul endroit sur une chaîne de fabrication unique. Au début de 2006, les États-Unis ont connu une pénurie de MenactraMC, ce qui a forcé les autorités à rationner le vaccin disponible (CDC 2006). Le fabricant avait fait savoir que la situation serait corrigée rapidement, mais il faut prévoir que ce type d'incident surviendra aussi longtemps qu'un seul vaccin méningococcique conjugué quadrivalent sera autorisé.

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