ARCHIVÉ - Lignes directrices pour la prévention et le contrôle des éclosions d’oreillons au Canada

 

7.0 Immunisation

7.1 Vaccin contenant le virus ourlien et programmes d’immunisation au Canada

Le vaccin contre les oreillons est un vaccin à virus vivant, atténué qui est combiné avec celui de la rougeole et des oreillons. Le vaccin RRO de Merck, qui utilise la souche Jeryl Lynn du virus des oreillons, est employé au Canada depuis son approbation dans les années 70. Il existe deux vaccins à composant anti-ourlien différents au Canada : M-M-RMD II, manufacturé par Merck Frosst Canada ltée, et PriorixMD, fabriqué par GlaxoSmithKline Inc. Les deux produits contiennent la souche Jeryl Lynn du virus ourlien. Il n’existe actuellement aucun vaccin monovalent contre les oreillons au Canada(1,16).

TrivirixMD, fabriqué par l’Institut Armand-Frappier, à partir de la souche Urabe Am9 du virus des oreillons, a été homologué au milieu des années 80, mais il a été retiré à la fin des années 80 parce que la souche Urabe Am9 était associée à une méningite aseptique.

En date de 1983, toutes les provinces et tous les territoires vaccinaient systématiquement les nourrissons au moyen du RRO. Pour éliminer la rougeole, un calendrier à deux doses de RRO a été adopté en 1996 afin de réduire la proportion d’enfants réceptifs par suite d’un échec de la primo-vaccination. La plupart des provinces et des territoires ont mené des campagnes de rattrapage contre la rougeole en 1996-1997. Certains d’entre eux ont utilisé un vaccin monovalent contre la rougeole, alors que d’autres ont employé un vaccin contre la rougeole et la rubéole pour le rattrapage. Deux provinces (N.-É. et N.-B.) n’ont pas lancé de campagne de rattrapage contre la rougeole. Toutes les provinces et tous les territoires utilisent maintenant un vaccin RRO dans leurs programmes d’administration systématique de deux doses. Le calendrier de vaccination dans toutes les provinces et tous les territoires prévoit une première dose du RRO à l’âge de 12 mois. Dix provinces/territoires offrent la seconde dose à l’âge de 18 mois, et trois autres (N.-É., Manitoba et Alberta) l’offrent à l’âge de 4 à 6 ans.

Bien qu’il existe plusieurs génotypes (souches) du virus des oreillons, l’opinion communément admise est que les virus ourliens appartiennent à un seul sérogroupe. Les données montrent que l’immunité induite par une souche du virus protège contre l’infection causée par d’autres souches(7). Rubin et ses collègues(29) ont montré que les sérums provenant de 74 personnes différentes qui étaient positives pour les anticorps dirigés contre le virus ourlien à un test commercial par dosage immuno-enzymatique étaient capables de neutraliser les virus des oreillons appartenant à deux génotypes différents. Seulement 10 % des sérums pouvaient neutraliser un seul virus et non l’autre. Ainsi, bien que les différences dans les titres de neutralisation dénotent une certaine variation antigénique, le fait que 90 % des sérums pouvaient neutraliser les deux virus corrobore la perception passée que tous les virus des oreillons appartiennent à un même sérotype.

Certaines données, par contre, donnent à penser que la réponse immunitaire dirigée contre un génotype peut ne pas conférer une protection absolue contre l’infection due à des virus d’autres génotypes(30). Les antisérums de neutralisation produits par le vaccin contenant la souche Jeryl Lynn (génotype A) pourraient en effet ne pas assurer une protection contre les infections par les génotypes C et D du virus des oreillons(31).

Comme nous l’avons décrit à la section 3.0, les souches virales dans les deux éclosions canadiennes survenues en 2007 (Maritimes et Alberta), les éclosions de 2005-2006 en N.-É., les éclosions dans de nombreux États américains en 2006 et l’épidémie au R.-U. en 2004-2006 étaient du même génotype. Ce génotype G n’est pas inhabituel ni rare et, comme les autres génotypes connus des oreillons, il circule dans le monde depuis des décennies, voire plus longtemps. Les génotypes A à L sont au nombre de ceux qui sont identifiés couramment(32).

Les vaccins RRO sont sûrs, immunogènes et efficaces, et ils sont recommandés par le CCNI et l’ASPC pour la primo-vaccination contre la rougeole, la rubéole et les oreillons. Le vaccin RRO combiné devrait être administré même aux personnes qui peuvent déjà être immunisées contre des virus contenus dans le vaccin et il peut servir à immuniser les adultes réceptifs contre les oreillons. La vaccination après une exposition au virus des oreillons peut ne pas prévenir la maladie. Si l’exposition n’entraîne pas d’infection, le vaccin pourrait conférer une protection contre des expositions futures. S’il y a lieu, une deuxième dose du vaccin RRO peut être administrée un mois ou plus après la première(1).

On ignore si l’échec de la primo-vaccination ou le déclin de l’immunité a été le principal facteur de risque d’oreillons chez des sujets vaccinés et lors d’éclosions d’oreillons ces dernières années(16). Dans des essais cliniques contrôlés, une dose du vaccin contre les oreillons réussissait à prévenir la maladie chez 95 % des vaccinés(33). Toutefois, dans des études d’observation menées lors d’éclosions d’oreillons, les estimations de l’efficacité du vaccin étaient plus faibles, oscillant autour de 70 % à 80 % pour les schémas à dose unique(34-39). Des éclosions d’oreillons ont été signalées dans des populations scolaires aux É.-U. dont la couverture par une dose de vaccin contenant le virus ourlien était très élevée (> 95 %), ce qui donne à penser qu’une seule dose n’est pas suffisante pour prévenir les éclosions d’oreillons en milieu scolaire(16,39,40). Un calendrier d’immunisation comportant deux doses du vaccin contre la rougeole, la rubéole et les oreillons utilisé en Finlande a eu pour effet d’augmenter les titres d’anticorps spécifiques contre les oreillons et le taux de séropositivité, et de ralentir le déclin des titres d’anticorps(41). On ne connaît pas la durée de l’immunité induite par le vaccin. De nombreuses études mettent en évidence une baisse des titres d’anticorps avec le temps (déclin de l’immunité) (16,38-40,42-44). La durée de persistance des anticorps demeure obscure dans les milieux où le degré de couverture vaccinale est élevé mais où la circulation du virus sauvage est faible ou nulle; on ne dispose actuellement d’aucune donnée permettant d’établir une corrélation entre les titres d’anticorps spécifiques et la réceptivité aux oreillons.

On connaissait les antécédents d’immunisation de moins de la moitié des cas d’oreillons signalés au Canada en 2007 (n = 586). De ce nombre, 45 (8 %) avaient reçu deux doses ou plus, 430 (73 %) avaient reçu une seule dose, et 111 (19 %) n’avaient pas reçu de doses de vaccin contenant le virus ourlien.

7.2 Comité consultatif national de l’immunisation : Déclaration sur le vaccin contre les oreillons

Le CCNI publie des recommandations détaillées concernant l’utilisation des vaccins au Canada(1). Ces recommandations figurent dans le Guide canadien d’immunisation; elles sont mises à jour pour tenir compte des nouvelles données disponibles. On peut avoir accès à des déclarations récentes et mises à jour sur l’immunisation à l’adresse suivante : <http://www.phac-aspc.gc.ca/naci-ccni/index-fra.php>.

Le CCNI a publié une déclaration révisée sur le vaccin contre les oreillons en août 2007, à la suite des éclosions récentes d’oreillons au Canada et à l’échelle internationale et après avoir examiné les données sur l’efficacité du vaccin et le déclin de l’immunité. Il préconisait autrefois l’administration systématique d’une dose du vaccin contre les oreillons mais recommande maintenant deux doses chez les nourrissons et les enfants. En outre, l’administration de deux doses est maintenant recommandée pour certains groupes d’adultes à risque élevé, notamment les étudiants des niveaux secondaire et postsecondaire, le personnel militaire et les travailleurs de la santé(16). Le CCNI suggère d’envisager l’administration d’une seule dose du vaccin RRO aux adultes à risque élevé comme les travailleurs de la santé et le personnel militaire nés avant 1970.

On s’attend à ce que les éclosions d’oreillons de grande envergure soient moins fréquentes une fois que les recommandations du CCNI en faveur de l’administration de deux doses auront été mises en oeuvre. Les cas éventuels pourront entraîner la transmission des oreillons, le plus souvent entre enfants et jeunes adultes qui n’ont pas reçu les deux doses du vaccin contre les oreillons ou qui n’ont pas été infectés naturellement. Durant les éclosions, une dose du vaccin contre les oreillons est donc recommandée dans le cas des populations à risque qui sont réceptives (nées en 1970 ou après qui ont reçu seulement une dose du vaccin contenant le virus ourlien). Il faudra définir les populations à risque d’après les groupes d’âge et les lieux d’exposition associés à l’éclosion. On ne recommande pas actuellement d’administrer plus de deux doses du vaccin RRO après le premier anniversaire(16).

7.3 Éclosions

7.3.1 Immunisation des populations réceptives

En réponse à des éclosions récentes d’oreillons au Canada, plusieurs provinces ou territoires ont entrepris des campagnes de vaccination ciblant des populations pouvant être réceptives à cette maladie. Au nombre de ces populations réceptives figurent les personnes nées au Canada en 1970 ou après qui n’ont pas reçu deux doses du vaccin contenant le virus des oreillons (à au moins 4 semaines d’intervalle) après leur premier anniversaire et qui n’ont pas souffert de la maladie confirmée en laboratoire ou ne peuvent prouver qu’ils sont immunisés contre les oreillons. L’âge exact des cohortes varie d’une province ou d’un territoire à l’autre, selon que des programmes d’immunisation à une dose et à deux doses ont été mis en oeuvre (figure 1). Dans le cas des personnes qui ne sont pas nées au Canada, il est possible de déterminer la réceptivité à partir des documents d’immunisation. Celles qui ne peuvent pas démontrer qu’elles ont reçu deux doses du vaccin contenant le virus des oreillons devraient être considérées comme réceptives.

Les provinces ou les territoires qui envisagent une campagne de vaccination auprès des groupes réceptifs dans le cadre d’une stratégie de lutte contre les éclosions devraient songer à se servir de l’épidémiologie de l’éclosion pour définir le groupe réceptif cible. Lors d’éclosions antérieures, la participation à la vaccination a été faible, en particulier chez les étudiants de niveau postsecondaire et les jeunes adultes. Si la stratégie de lutte contre les éclosions prévoit la vaccination de ce groupe, des mesures spécifiques visant à accroître la couverture devraient être envisagées. On pourrait entre autres s’associer à des centres de santé des étudiants, offrir des encouragements et administrer le vaccin dans les lieux fréquentés par les étudiants, tels que les résidences, les centres de services aux étudiants, les bars et les discothèques(10).

Comme pour toute campagne de vaccination, l’approvisionnement en vaccins devrait être coordonné, en consultation avec les homologues FPT (voir la section 7.4 sur l’approvisionnement en vaccins).

7.3.2 Contacts communautaires de cas

L’immunisation des contacts réceptifs de cas peut ne pas prévenir la maladie si ces personnes sont déjà infectées(10). Elle peut être envisagée si l’on pense que l’exposition pourrait se répéter.

D’après l’expérience acquise durant les éclosions récentes, on constate toutefois que les services de santé ont été rapidement dépassés à cause des besoins en ressources pour la recherche et la prise en charge des contacts individuels. Il faut bien planifier la logistique entourant la vaccination des contacts et des groupes réceptifs. Voici certains des problèmes de gestion auxquels on a fait face durant les éclosions précédentes : approvisionnement en vaccins et coûts d’achat, faible participation de la cohorte en âge de fréquenter l’université, détermination exacte des groupes réceptifs compliquée par le fait que les dossiers d’immunisation n’existaient pas ou étaient incomplets, coûts associés à l’administration du vaccin et coûts connexes.

7.3.3 Travailleurs de la santé qui sont des contacts de cas

On devrait examiner l’état immunitaire des travailleurs de la santé qui sont des contacts d’un cas confirmé. S’ils peuvent démontrer qu’ils ont reçu deux doses du vaccin contenant le virus ourlien ou qu’ils sont porteurs d’anticorps contre les oreillons, ils peuvent être considérés comme immuns et peuvent retourner immédiatement au travail. S’ils n’ont reçu qu’une seule dose du vaccin contenant le virus des oreillons, une dose du vaccin RRO devrait être administrée et ils pourront ensuite reprendre immédiatement leur travail. Si les antécédents immunitaires ne sont pas documentés, il est recommandé de doser les IgG anti-ourliens et d’administrer une dose du vaccin RRO. En attendant les résultats de la sérologie, le travailleur de la santé devrait être retiré de son milieu de travail pendant la période de contagiosité, qui débute 10 jours après la première exposition. Si la sérologie IgG est positive, le travailleur de la santé peut être considéré comme immun et retourner au travail. Une deuxième dose du vaccin RRO devrait être administrée 28 jours après la première pour assurer une protection adéquate contre les oreillons. Si la sérologie IgG est négative, le travailleur de la santé devrait être considéré comme réceptif. Une seconde dose du vaccin RRO devrait être donnée 28 jours après la première, et le retrait du milieu de travail devrait se poursuivre du 10e jour après la première exposition jusqu’au 26e jour après la dernière exposition.

7.4 Approvisionnement en vaccins

Avant de lancer des initiatives d’immunisation pour lutter contre une éclosion, il faudrait tenir compte des stocks de vaccins RRO disponibles. Comme dans le cas de toute nouvelle initiative d’immunisation, l’approvisionnement en vaccins devrait être coordonnée en consultation avec les homologues FPT par l’entremise du Groupe de travail sur l’approvisionnement en vaccins et le CCI. Bien que l’approvisionnement en vaccins RRO ait été stable ces dernières années, certains facteurs comme l’introduction de programmes de vaccination de rattrapage au moyen du vaccin contenant le virus ourlien dans certaines provinces ou territoires, de programmes de vaccination contre la rougeole et l’introduction possible du vaccin RRO-V (rougeole, rubéole, oreillons et varicelle) pourraient tous influer sur l’accès au vaccin RRO.

Si une pénurie de vaccins RRO est constatée ou prévue durant une éclosion, il pourra être nécessaire d’identifier les groupes prioritaires. Au R.-U., l’ordre de priorité suivant a été considéré : vaccination systématique des nourrissons et des enfants, immunisation des femmes réceptives en âge de procréer et des travailleurs de la santé réceptifs (rougeole, oreillons ou rubéole) suivies de la vaccination d’autres personnes réceptives selon l’épidémiologie de l’éclosion(45). L’ordre de priorité devrait être établi en consultation avec le Groupe de travail sur l’approvisionnement en vaccins.

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