Éradication de la poliomyélite

RMTC

Volume 41-10, le 1er octobre 2015 : Vaccins

Commentaire

La phase finale de l’éradication de la poliomyélite : Pourquoi l’immunisation et la surveillance continue sont essentielles

Booth TF1,2*, Grudeski E1, McDermid A1,2, Rotondo J3

Affiliations

1 Division des maladies virales, Laboratoire national de microbiologie, Agence de la santé publique du Canada, Winnipeg (Manitoba)

2 Département de microbiologie médicale, Université du Manitoba, Winnipeg (Manitoba)

3 Centre de l’immunisation et des maladies respiratoires infectieuses, Agence de la santé publique du Canada, Ottawa (Ontario)

Correspondance

tim.booth@phac-aspc.gc.ca

DOI

https://doi.org/10.14745/ccdr.v41i10a03f

Résumé

Le poliovirus est bien près d'être éradiqué de la planète. À cette fin, les quatre objectifs principaux du Plan stratégique pour l'éradication de la poliomyélite et la phase finale 2013-2018 de l'Organisation mondiale de la Santé sont les suivants : détecter le poliovirus et interrompre sa transmission; renforcer les systèmes d'immunisation et retirer le vaccin antipoliomyélitique oral; confiner le poliovirus et certifier l'interruption de la transmission; et planifier la transmission des acquis concernant la poliomyélite. Il est nécessaire de maintenir la vigilance à l'égard des poliovirus circulants dérivés de souches vaccinales et de poursuivre la surveillance épidémiologique et en laboratoire de la poliomyélite à ce moment critique de l'histoire. Malgré l'élimination de la transmission de poliovirus sauvage au Canada, le risque d'importation du poliovirus sauvage de pays où la maladie est endémique et le risque d'importation de souches vaccinales circulantes demeurent. En raison de ce risque continu, la surveillance active de la paralysie flasque aiguë (PFA) chez les enfants de moins de 15 ans demeure importante. Au moins un échantillon de selles provenant de cas suspects de paralysie flasque aiguë doivent être envoyés au Laboratoire national de microbiologie de l'Agence de la santé publique du Canada aux fins d'isolement du poliovirus et d'analyses pour soutenir et vérifier la situation d'absence de la poliomyélite au Canada. Un avantage supplémentaire de cette mesure est le fait qu'elle peut également permettre d'identifier d'autres entérovirus non poliomyélitiques, comme l'entérovirus D68.

Introduction

La poliomyélite est une maladie virale très contagieuse qui peut causer une paralysie rapide et irréversible, particulièrement chez les enfants. Depuis l'introduction des vaccins antipoliomyélitiques dans les années 1950, et l'Initiative mondiale pour l'éradication de la poliomyélite en 1988, une stratégie a été élaborée afin d'éliminer et de finalement éradiquer l'infection à poliovirus de la planète grâce à l'utilisation de programmes d'immunisation intensifs et permanents dans chaque pays. Cette stratégie de vaccination s'est révélée très efficace. L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a énoncé qu'en raison de l'immunisation, 10 millions de personnes peuvent marcher aujourd'huiNote de bas de page 1 qui autrement seraient paralysées. Toutefois, des reculs ont récemment été enregistrés, et en mai 2014, l'OMS a déclaré la propagation internationale du poliovirus sauvage comme étant une « urgence de santé publique de portée internationale »Note de bas de page 2. Tout récemment, en septembre 2015, de nouveaux cas de poliomyélite ont été signalés au Mali et en UkraineNote de bas de page 3.

Le présent article vise à : résumer la situation actuelle, définir les obstacles récents à la stratégie d'élimination, indiquer les nouvelles recommandations émises par l'OMS au sujet des vaccins et souligner l'importance de la surveillance de la paralysie flasque aiguë partout dans le monde, y compris au Canada.

Les poliovirus et les différents vaccins

Le poliovirus comporte trois souches principales ou sérotypes (PV1, PV2 et PV3) et fait partie du groupe C des entérovirus de la famille des picornavirus, un groupe diversifié de virus ARN à brin positif, qui comprend un bon nombre d'autres entérovirus non poliomyélitiquesNote de bas de page 4. Il se propage d'une personne à une autre principalement par la voie fécale-orale. Environ 90 % des cas sont asymptomatiques, 10 % présentent une infection bénigne (fièvre, malaise, céphalée, nausées et vomissements) et moins de 1 % des cas présentent une apparition aiguë soudaine de paralysie flasque qui touche habituellement les membres inférieurs. Lorsque les muscles respiratoires sont touchés, le virus peut être mortelNote de bas de page 5.

Il existe deux types de vaccins : le vaccin antipoliomyélitique oral (VPO) et le vaccin antipoliomyélitique injectable (VPI). Le vaccin antipoliomyélitique oral contenait au départ des versions atténuées des trois souches, mais le PV2 sera bientôt retiré en raison de l'éradication du PV2 sauvage. Le vaccin antipoliomyélitique injectable (inactivé) comporte des points faibles, notamment le fait d'être plus dispendieux et plus difficile à administrer sur le plan logistique et d'être moins efficace que le VPO Sabin. C'est la raison pour laquelle le VPO est encore utilisé dans la majeure partie du monde. Toutefois, l'inquiétude quant au VPO est que son utilisation peut entraîner la circulation de poliovirus dérivés de souches vaccinales (plus particulièrement dérivés du VPO) au sein des populations. Ces poliovirus dérivés de souches vaccinales circulent souvent de manière asymptomatique parmi les populations où les vaccins antipoliomyélitiques oraux sont encore utilisés et où l'assainissement de l'eau n'est pas optimal. Ces poliovirus circulants dérivés du VPO reviennent invariablement, grâce à la mutation, sous une forme ayant une neurovirulence accrue. L'infection par ces virus accroît le risque de poliomyélite, plus particulièrement chez les personnes qui sont immunodéprimées ou qui ont d'autres maladies sousjacentes.

La résurgence de la poliomyélite ne constitue pas un enjeu de premier plan au Canada, où le VPI est utilisé selon les doses recommandées à l'âge de 2, 4 et 6 mois et entre 12 et 18 mois, avec une dose de rappel entre l'âge de 4 et 6 ans. Il s'agit toutefois d'un problème mondial et, à la lumière de ces renseignements, une dose de rappel unique est maintenant recommandée pour les personnes qui présentent un risque élevé d'exposition au poliovirus (p. ex. les personnes qui voyagent ou qui prévoient travailler dans des régions qui connaissent des éclosions de poliovirus sauvage ou de poliovirus de souche vaccinale)Note de bas de page 6.

La poliomyélite refait surface

Une série de revers sont survenus dans la lutte pour débarrasser le monde de la poliomyélite, ce qui a entraîné une nouvelle propagation de la poliomyélite dans des régions où elle avait été éliminée. À ce jour, chaque fois que cela s'est produit, l'éclosion a été contenue grâce à une vaccination renforcée, mais la bataille n'est pas encore gagnée.

L'éclosion au Tadjikistan en 2010Note de bas de page 7 illustre la complexité de l'éradication de la maladie. Des analyses génétiques en laboratoire ont permis d'identifier l'agent causal comme étant la souche du poliovirus de type 1. Le virus a pris naissance en Inde et s'est propagé par la suite dans les pays voisins, à savoir le Kazakhstan, la Russie, le Turkménistan et l'Ouzbékistan. Cette importante éclosion de poliomyélite a entraîné 463 cas confirmés en laboratoire et 47 cas compatibles avec la poliomyélite, et souligne la nécessité d'une vaccination antipoliomyélitique continue, de campagnes antipoliomyélitiques et de la surveillance continue de cette maladie, même dans les régions où les taux de vaccination sont encore élevés.

Malgré ces éclosions attribuables aux virus importés, le nombre de régions où les poliovirus sauvages sont endémiques a constamment diminué. En 2012, seulement 223 cas de poliomyélite ont été répertoriés dans le monde entier, le nombre le plus bas jamais enregistréNote de bas de page 8 et en 2013, la poliomyélite a été reconnue comme étant endémique dans seulement trois pays, c'est-à-dire l'Afghanistan, le Nigéria et le Pakistan. Au début de 2014, la poliomyélite a été déclarée comme ayant été éliminée de l'Asie du Sud Est et était sur le point d'être éliminée de l'Afrique. Il est devenu évident que les risques d'éclosion de la maladie paralytique découlaient largement des virus circulants dérivés de souches vaccinales provenant du VPO et que ces risques devaient être gérés.

En 2014, les éclosions ont commencé à se produire dans des régions où la poliomyélite avait été éliminée auparavant, y compris au Cameroun, en Guinée équatoriale, en Éthiopie, en Iraq, en Israël, en Somalie et en SyrieNote de bas de page 2.

Au Moyen-Orient, les éclosions ont été causées par une souche du poliovirus de type 1 qui s'est propagée à partir du Pakistan. L'OMS a déclaré que la propagation internationale du poliovirus sauvage représentait une urgence de santé publique de portée internationale à la suite de la preuve d'un grand nombre d'exportations du poliovirus de pays où la poliomyélite est endémique (Pakistan, Afghanistan et Nigéria) dans des pays exempts de polio. Des campagnes de vaccination renforcée ont été lancées et des exigences concernant les voyages ont été mises en place pour contrôler la propagation de l'infection dans ces régions touchées. Veuillez consulter le Tableau 1 pour obtenir un résumé de la situation actuelle de la poliomyélite dans le mondeNote de bas de page 2.

Tableau 1 : Désignations réviséesTableau 1 - Note de bas de page * pour les pays infectés lors de la sixième rencontre du comité d'urgence sur le Règlement sanitaire international concernant la propagation du poliovirus sauvage à l'échelle internationale
Désignation Pays
Pays qui exportent actuellement le poliovirus sauvage Afghanistan et Pakistan
Pays qui ne sont plus infectés par le poliovirus sauvage, mais qui demeurent vulnérables à la propagation à l'échelle internationale Nigéria, Somalie, Cameroun, Guinée équatoriale, Éthiopie, Iraq, Israël, Syrie

Les infections causées par le poliovirus est encore détecté chez des enfants au Canada

Depuis 2005, cinq d'importations du poliovirus dérivé d'une souche vaccinale au Canada ont été confirmées par le Laboratoire national de microbiologie (LNM) de l'Agence de la santé publique du Canada (Annexe). Quatre d'entre eux étaient des infections fortuites, du fait que les enfants avaient été échantillonnés pour des examens virologiques en raison d'une maladie non paralytique et que le poliovirus a été mis en culture à partir des échantillons des patients. Ces individus ont été infectés par des souches vaccinales au cours d'un voyage dans des régions où les vaccins oraux étaient encore utilisés, soit en recevant directement le vaccin ou possiblement par la contamination environnementale. Un cas de poliomyélite paralytique associée au vaccin a été identifié, lequel correspondait à un enfant ayant voyagé en Chine pour des vacances et ayant reçu le VPO pendant son séjour, et qui a présenté une paralysie flasque peu de temps après.

La stratégie de la phase finale

Afin de remédier aux reculs enregistrés par rapport à la poliomyélite, l'OMS a élaboré le Plan stratégique pour l'éradication de la poliomyélite et la phase finale 2013-2018 qui comprend quatre objectifs principaux : détecter le poliovirus et interrompre sa transmission, renforcer les systèmes d'immunisation et retirer le vaccin antipoliomyélitique oral, confiner le poliovirus et certifier l'interruption de la transmission ainsi que planifier la transmission des acquis concernant la poliomyéliteNote de bas de page 1. Nous mettrons l'accent sur les recommandations au sujet des vaccins et sur la nécessité de détecter toutes les transmissions de poliovirus.

Élimination progressive du vaccin oral

Au début de 2014, l'OMS a recommandé à tous les pays d'utiliser au moins une dose du VPINote de bas de page 8. Cette recommandation vise à prévenir les éclosions de poliovirus circulants dérivés du VPO, qui peut entrainer des cas de poliomyélite lié au VPO. En 2013, on a découvert que le poliovirus sauvage circulait en Israël, pays qui présente un niveau élevé de couverture de la population par le VPI. Même si le VPI procure une bonne immunité humorale et protège contre la poliomyélite, il offre une moins grande immunité intestinale. Par conséquent, environ 90 % des enfants qui reçoivent le VPI sont encore susceptibles d'éliminer le virus après avoir reçu le VPO. Ainsi, l'utilisation du VPI seul sera probablement insuffisante pour éradiquer les virus circulants dérivés du VPO. Il a été démontré que le fait d'administrer d'abord une dose du VPI aux enfants, puis une dose de rappel du VPO, réduit grandement l'élimination du virus dérivé du VPO dans les selles : les résultats étaient bien meilleurs que lorsque l'on administre d'abord une dose du VPO, puis une deuxième dose de rappel du VPONote de bas de page 9.

L'OMS a également recommandé que le PV2 ne soit plus inclus dans le VPONote de bas de page 10. Cette recommandation est basée sur les données qui montrent que le poliovirus sauvage PV2 a probablement été exterminéNote de bas de page 11 et que le poliovirus sauvage PV3 n'a pas été détecté depuis 2012Note de bas de page 12. Le retrait du PV3 du VPO pourrait suivre celui de la composante PV2.

Surveillance de la paralysie flasque aiguë (PFA)

La surveillance du poliovirus dépend de deux choses : la détection, la déclaration et l'analyse des selles des cas de paralysie flasque aiguë chez les enfants ou des cas de paralysie chez toute personne soupçonnée d'être infectée par le poliovirus; et un laboratoire qui peut identifier positivement le poliovirus et distinguer le poliovirus sauvage du virus dérivé d'une souche vaccinale. La surveillance de la paralysie flasque aiguë à l'échelle nationale est le système de référence de l'OMS pour la détection des cas de poliomyéliteNote de bas de page 13.

En tant que membre du Global Poliovirus Laboratory Network, le LNM est responsable des examens virologiques sur les échantillons de selles provenant de cas de poliomyélite soupçonnée à la lumière des signes cliniques observés. L'OMS stipule que les échantillons de selles provenant d'au moins 80 % de ces cas de paralysie flasque aiguë chez les enfants de moins de 15 ans doivent être soumis à des examens virologiques des selles visant à détecter le poliovirus. Malheureusement, depuis une dizaine d'années, environ 30 % seulement de ces cas ont été soumis à des tests de laboratoire, et très peu de ces tests ont été effectués par un laboratoire accrédité. Il s'agit du maillon faible de notre système de surveillance actuel.

Pour avoir un solide système de surveillance de la paralysie flasque aiguë au Canada, il est important de signaler les cas de PFA chez les enfants de moins de 15 ans et de soumettre les échantillons de selles au Laboratoire national de microbiologie, lequel est le seul laboratoire accrédité par l'OMS pour les examens visant à détecter le poliovirus au Canada. La marche à suivre pour soumettre les échantillons au LNM pour être testés est énoncée plus bas. C'est un processus important à suivre même lorsque l'on trouve une autre cause plausible de la maladie. Un volume suffisant de tests aide à maintenir les compétences et l'assurance de la qualité, et à accroître la confiance en notre situation exempte de poliomyélite. Pour diagnostiquer une infection à poliovirus, la culture du virus à partir des selles (dans une lignée cellulaire spéciale qui est très sensible au poliovirus) est encore la norme la plus sensible recommandée par l'Organisation mondiale de la Santé pour identifier la poliomyélite. De plus, des tests moléculaires, y compris la transcription inverse suivie d'une réaction en chaîne de la polymérase pour détecter le génome viral, et un séquençage génétique sont effectués pour établir le type et l'origine des poliovirus qui sont détectés.

Ce que les cliniciens doivent savoir

La paralysie flasque aiguë (PFA) est définie comme l'apparition aiguë d'une faiblesse localisée ou une paralysie de type flasque (tonus réduit) sans cause évidente (p. ex. trauma) chez les enfants de moins de 15 ansNote de bas de page 14. La PFA doit être déclarée à l'échelle nationale. Tout médecin traitant qui diagnostique la PFA chez un enfant de moins de 15 ans devrait signaler le cas au Programme canadien de surveillance pédiatrique (PCSP) et à l'autorité de santé publique locale des provinces et territoires où la PFA est déclarée par la loiNote de bas de page 15. Le PCSP est récemment révisé son protocole et son questionnaire de PFANote de bas de page 14. C'est une pratique exemplaire de fixer un suivi de 60 jours.

Au moins un échantillon de selles doit être recueilli dans les 14 jours suivant l'apparition de la paralysie et si plus d'un échantillon sont recueillis, ils doivent prélevés à un intervalle de 24 à 48 heures. Aucun outil spécial n'est requis, les selles peuvent être recueillies dans n'importe quel contenant stérile étanche. Chaque échantillon doit contenir au moins 1 g de selles, mais idéalement il doit en contenir entre 5 et 10 g. Une chaîne du froid est nécessaire : les échantillons doivent être conservés congelés à ≤ -20 °C et ensuite être expédiés congelés sur de la glace sèche par les laboratoires qui respectent le Règlement sur le transport des marchandises dangereuses. Un autre moyen plus facile (qui ne nécessite aucun transport spécial) consiste à envoyer l'échantillon de selles entouré de blocs réfrigérants ayant été gardés toute la nuit dans un congélateur à -80 °C.

Les échantillons de selles sont habituellement envoyés par l'entremise du laboratoire provincial de santé publique, mais les échantillons peuvent également être expédiés directement au LNM à l'aide d'un compte d'expédition du LNM; ce dernier assumera les frais. Pour prendre des dispositions à cet effet, communiquez avec l'auteur-ressource par courriel ou par téléphone (204-789-6067). Un formulaire de demande peut être téléchargé. Il est très utile d'inclure les observations cliniques pertinentes, les antécédents de voyage et de vaccination ainsi que tout résultat pertinent d'analyses de laboratoire disponible.

Lorsque les échantillons arrivent à la Section du poliovirus et des entérovirus du Laboratoire national de microbiologie, plusieurs tests sont effectués, y compris l'isolement du virus dans une culture cellulaire, le typage des isolats du poliovirus, le dépistage de possibles poliovirus dérivés de souches vaccinales et le séquençage pour confirmer la présence de souches du poliovirus de type sauvage, de type Sabin ou dérivé d'une souche vaccinale. Le délai d'exécution total est de 28 jours.

Un avantage supplémentaire de la surveillance de la paralysie flasque aiguë

Les signalements et les examens systématiques des selles dans les cas de paralysie flasque aiguë au Canada peuvent faire plus que documenter notre situation exempte de poliomyélite. La paralysie flasque non poliomyélitique est fréquemment associée à des entérovirus non poliomyélitiquesNote de bas de page 16 et ces virus peuvent également causer l'encéphalite, la méningite et l'encéphalomyéliteNote de bas de page 17Note de bas de page 18Note de bas de page 19. Par exemple, l'entérovirus D71 (EV-D71) cause des éclosions périodiques de syndrome pieds-mains-bouche chez les enfants, particulièrement en AsieNote de bas de page 20Note de bas de page 21. Des entérovirus non poliomyélitiques et de nouveaux syndromes peuvent être associés aux entérovirus émergents. La plupart des entérovirus non poliomyélitiques touchent les enfants de manière disproportionnée, et certains peuvent être mortels.

Une éclosion d'entérovirus D68 (EV-D68) s'est produite au Canada et aux États-Unis, principalement en association avec des troubles respiratoires légers chez les enfantsNote de bas de page 22Note de bas de page 23Note de bas de page 24Note de bas de page 25Note de bas de page 26Note de bas de page 27. Il a été avancé que la myélite flasque aiguë (une maladie neurologique inexpliquée qui entraîne la faiblesse des membres chez l'enfant) pourrait être associée à l'EV-D68 étant donné qu'une plus grande incidence de ces cas observés aux États-Unis a coïncidé avec la détection accrue de l'EV-D68 en 2014Note de bas de page 28.

Ces éclosions soulignent la nécessité d'assurer une surveillance épidémiologique et en laboratoire de la paralysie flasque aiguë, de manière continue et renforcée.

Discussion

La lutte mondiale pour éradiquer le poliovirus a atteint un point critique. Il y a toujours un risque d'introduction du poliovirus sauvage et du poliovirus dérivé du VPO au Canada et ailleurs provenant des pays où le virus est encore endémique. En raison de ce risque constant, la couverture vaccinale de toute la population et la surveillance active de la paralysie flasque aiguë chez les enfants de moins de 15 ans demeurent essentielles.

Trois choses sont indispensables pour éradiquer la poliomyélite : premièrement, le maintien d'un niveau élevé d'immunité de la population; deuxièmement, la vigilance continue ainsi que la déclaration et l'analyse des selles de tous les cas de paralysie flasque aiguë; et troisièmement, des diagnostics de laboratoire précis pour détecter les importations de poliovirus au Canada.

En plus de soulever le besoin d'effectuer de meilleures analyses de selles et de signaler les cas de paralysie flasque aiguë, cet article montre une lacune parmi les activités nationales de surveillance de la poliomyélite. Actuellement, les infections causées par le poliovirus non paralytique détectées chez les individus qui n'ont pas été vaccinés récemment avec le VPO ne correspondent pas à la définition nosologique nationale de la poliomyéliteNote de bas de page 29. Par conséquent, la liste des infections causées par le poliovirus (Annexe) que l'Agence de la santé publique du Canada connaît en ce moment peut être incomplète. Une révision des définitions nosologiques des provinces et territoires indique que les infections causées par le poliovirus non paralytique ne sont à déclaration obligatoire qu'en Ontario en ce momentNote de bas de page 30. Vu l'importance d'identifier et de signaler toutes les infections causées par le poliovirus, il peut être indiqué de réviser la définition nosologique nationale pour y inclure ce type de cas.

Même si un grand nombre de personnes croient que la fin de la poliomyélite est maintenant en vue, il peut encore prendre des années d'efforts acharnés et de surveillance vigilante avant que le PV1 sauvage et les poliovirus circulants dérivés du VPO puissent être finalement déclarés éradiqués. Après l'éradication, il y aura d'énormes avantages du fait que les coûts de la vaccination antipoliomyélitique continue dans le monde pourront être économisés et que l'infrastructure qui a été mise en place pour l'éradication de la poliomyélite pourra être consacrée à la gestion d'autres problèmes de santé.

Conclusion

Les nouvelles recommandations émises par l'OMS au sujet des vaccins et de la surveillance de la paralysie flasque aiguë sont essentielles à l'éradication de la poliomyélite. La surveillance épidémiologique et en laboratoire de la poliomyélite de façon continue au Canada est importante afin de maintenir la certification en tant que pays exempt de poliomyélite à un moment crucial de l'éradication de la poliomyélite dans le monde. Toutefois, ce résultat ne pourra être obtenu qu'en faisant preuve d'une vigilance clinique continue en ce qui concerne la paralysie flasque aiguë, laquelle devra comprendre des protocoles appropriés en matière de déclaration et d'analyses.

Remerciements

Les auteurs tiennent à remercier Susan Squires, Mary Louise Graham et Rukshanda Ahmad pour leurs contributions sur l'aspect clinique de l'article et Rhiannon Huzarewich, Lily MacDonald, Michelle Gusdal, Russel Mandes, Helen Bangura et Shelley Deeks pour leur excellente assistance technique.

Conflit d’intérêts

Aucun

Annexe : Infections de poliovirus signalées au Canada : de 2004 à 2015Annexe - Note de bas de page 1

Année Résultat du test de laboratoire de virologie Symptômes Provenance Récent historique de voyage Résultat/ diagnostic
2004Annexe - Note de bas de page 2 Polio Sabin 1 Diarrhée Coproculture Inde Infection fortuite
2005Annexe - Note de bas de page 2 Polio Sabin 3 Infection urinaire Coproculture Inconnu Infection fortuite
2009 Polio Sabin 3 Paralysie flasque aiguë Coproculture Chine Cas probable de poliomyélite paralytique associée au vaccinNote de bas de page 31
2009 Polio Sabin 3 Fièvre et toux Culture nasopharyngienne Inde Infection fortuiteNote de bas de page 32
2012Annexe - Note de bas de page 2 Polio Sabin 2 Diarrhée Coproculture Philippines Infection fortuite

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