Transcription – La contribution des soldats noirs dans la lutte pour le Canada
Durée de la vidéo : 10:16 minutes
[Le logo de Patrimoine canadien apparaît.]
[On entend une musique de fond.]
[L’affiche du Mois de l’Histoire des Noirs remémorant la contribution des soldats noirs lors de la guerre de 1812 apparait, la caméra s’éloigne de l’affiche permettant de la voir de haut en bas sur un fond d’écran beige, le plancher est délimité par du gris.]
[L’angle de vue change; on voit maintenant l’affiche de haut en bas sur un fond d’écran beige, le plancher est délimité par du gris.]
[Au bas de l’écran, dans le coin droit un homme tracé au crayon entre en « scène ». Il monte une marche et se dirige vers le devant de la scène; il est face à nous, les bras derrière le dos. Il commence à parler. La musique s’adoucit.]
Narrateur : « La Providence se présente à l’homme de façons merveilleuses et inattendues. Un homme peut tout avoir dans la vie, et tout perdre en un instant. Un homme peut endurer 20 ans de servitude. Mais tout est à la grâce de Dieu.
J’ai été capturé à l’âge de 16 ans, et je n’ai jamais revu ni ma maison ni ma famille. J’ai traversé l’océan à bord d’un vaisseau négrier dans des conditions effroyables. J’ai été acheté au marché comme n’importe quelle autre marchandise. C’est un officier britannique de la Nouvelle‑Angleterre qui m’a acheté. Il m’a donné son nom de famille, Pierpoint, et m’a baptisé Richard. »
[L’homme dessiné devient graduellement réel – Richard Pierpoint.]
Narrateur : « Depuis 1760, je m’appelle Richard Pierpoint.
Voici mon histoire.
Vingt ans ont passé et j’ai rempli mon devoir de serviteur et de valet auprès de mon maître et, celui-ci en retour, a rempli ses devoirs en m’habillant et en me logeant. J’ai remercié la Providence pour ce que la vie m’avait apporté. Mais un jour, la Providence m’a visité en m’offrant un salut inattendu… qui s’est présenté sous la forme d’une guerre.
Lorsque les colons américains se sont soulevés contre la Couronne britannique et ont déclaré la guerre en 1775, les hommes devaient choisir entre deux camps : les rebelles ou les loyalistes.
Les rebelles voulaient l’indépendance de la Couronne britannique, alors que les loyalistes restaient fidèles à la Couronne. Le roi a promis une terre et la liberté pour tous ceux qui se battraient pour lui. Par la grâce de Dieu et du roi, j’ai choisi la liberté. J’ai servi au sein des Rangers du lieutenant-colonel John Butler, au Fort Niagara. Avec le temps, plusieurs centaines de volontaires noirs ont rejoint les Rangers et c’est ainsi que je suis devenu soldat, et vivant une vie de soldat au milieu d’une guerre sanglante.
La guerre ne s’est pas bien terminée pour la Couronne dans les Treize colonies. Mais elle a quand même conservé le Canada, au nord des Lacs, et en 1784, j’étais un homme libre! Dieu soit loué! Jamais je n’avais été aussi libre depuis ma tendre jeunesse. Je n’avais plus de maître ou d’officier pour me dire quoi faire. Je pouvais aller où bon me semblait quand je le voulais, sauf aux nouveaux États-Unis où l’esclavage existait.
J’ai reçu 200 acres de terre au Haut-Canada. Le travail de la terre était difficile : il fallait transformer une épaisse forêt en une terre agricole, construire une maison, une clôture… tout ça par moi-même! Tous mes voisins ont fait la même chose. Ce n’est pas facile de construire un pays. Finalement, j’ai vendu mes 200 acres et je suis allé travailler pour mes voisins, des fermiers blancs. Les gens m’appelaient « Black Dick » ou « Captain Dick ». Il paraît qu’il y a encore un ruisseau qui porte mon nom : Dick’s Creek, un affluent du Twelve Miles Creek près de St. Catharines.
En 1812, les Américains attaquent le Canada. L’alerte à la guerre se fait entendre d’un bout à l’autre de la colonie. Si les Yankees gagnaient, je retournais esclave. J’ai vu mon lot d’horreurs de guerre, mais il vient un moment où un homme doit prendre les armes pour défendre sa liberté et sa dignité.
J’ai envoyé une pétition au gouverneur du roi, le major-général Sir Isaac Brock, lui demandant la permission d’organiser un corps d’armée formé de Noirs pour repousser l’ennemi et se battre épaule à épaule. Le général a accepté; le « Coloured Corps » est né. On était à peu près 30 hommes — mais c’était beaucoup si on considèraient que dans la colonie, il n'y avait que 100 hommes noirs libres au Haut-Canada.
Bien que le « Coloured Corps » fût mon idée et que j’avais de l’expérience, je n’en ai pas reçu le commandement. Tous nos officiers étaient blancs. Mais quoi qu’il en soit, nous avons combattu ensemble pour repousser l’ennemi et nous nous sommes battus comme des hommes. Et sur le champ de bataille, ce n’était pas le sang d’un Noir ou d’un Blanc qui coulait : le sang de tout le monde est rouge et c’était cette couleur qui a maculé nos champs et nos rivières. »
[Les yeux de Richard Pierpoint se remplissent d'émotion.]
Narrateur : « Le major-général Brock a perdu la vie au cours de l’une de nos plus sanglantes batailles, à la hauteur de Queenston, et a rejoint le rang des héros immortels.
Le « Coloured Corps » s’est battu avec courage, détermination et sang-froid, et en 1813, on nous a confié une tâche dangereuse, celle de construire le fort Mississauga directement en face du fort ennemi de l’autre côté de la rivière. Avec ce fort, on empêcherait les Américains d’utiliser le Lac Ontario pour ravitailler le fort Niagara. C’était une tâche très difficile et souvent, il fallait qu’on travaille la nuit pour éviter d’essuyer les tirs ennemis. Mais quoiqu’il en soit, on a réussi, et le fort Mississauga se tient fièrement, avec sa tour de pierres et de briques entourée de ses murs et d’une fosse de six pieds, avec ses quatre grands canons.
En 1815, la paix est revenue, et le Canada n’a pas été occupé par les Américains. Ce printemps-là, le « Coloured Corps » a été dissout et le gouvernement nous a offert 100 acres de terre à Oro, près du lac Simcoe.
Mais j’étais fatigué, et j’avais trop vu de guerres. Bien que libéré des fers de l’esclavage, je connaissais le lot de tous les fils d’Adam, qui travaillent la terre jour après jour, pour eux-mêmes ou pour les autres. Plus que jamais, j’espérais revoir ma terre natale. Alors, j'ai demandé au gouverneur Maitland de me renvoyer en Afrique.
Il a refusé. Il m’a offert 100 acres à Garafraxa, près de cette ville qu’on appelle maintenant Fergus, et c’est donc ici, sur cette terre qui m’a redonné ma liberté, que j’ai passé le reste de mes jours. Tout est grâce.
Je suis fier de mon pays; je suis fier d’avoir porté la glorieuse bannière de l’homme libre. Notre pays est bâti sur la liberté et sur le refus de la servitude. Tout est grâce! J’ai rempli les volontés du roi, et celles de notre magnifique pays, le Canada! »
[Graduellement, l’image réelle de l’homme redevient un dessin, il met son chapeau et recroise les bras derrière le dos.]
[La musique s’éteint graduellement.]
[Fondu au noir.]
[L’adresse du site Web Canada.ca/mois-histoire-des-noirs apparaît à l’écran.]
[Le mot-symbole « Canada » apparaît, dont le dernier « a » est surmonté d’un drapeau canadien flottant au vent.]