Nouveau!

Presses de l’UBC, 2018

Ligne de mire

Invisible Scars: Mental Trauma and the Korean War (1950-1953)

  Le 24 Mars 2022 - Meghan Fitzpatrick

Soldier on the Radio

La guerre de Corée (1950-1953) a été un conflit féroce qui a fait plus de quatre millions de victimes en trois ans à peine. Malgré cela, elle est plutôt absente de la plupart des récits faisant état de maladies mentales et de traumatismes de guerre. De plus, on en parle souvent comme d’un conflit des États Unis, en faisant peu de cas des autres participants clés, dont les forces du Commonwealth qui y ont été déployées. Invisible Scars comble cette lacune en examinant les expériences vécues par la 1st British Commonwealth Division. Il s’agit de la première étude approfondie des systèmes de soins psychiatriques en place pour les milliers de soldats de la Grande Bretagne, du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle Zélande. Le livre se concentre sur plusieurs questions principales. Premièrement, comment les soldats étaient-ils traités pour des troubles psychiatriques sur le terrain et quels efforts a-t-on déployés pour renforcer la santé mentale? Deuxièmement, quel était le degré de réussite des médecins du Commonwealth à traiter les personnes affectées mentalement dans le théâtre? Enfin, quelles indemnités et quels systèmes de soins ont été mis en place pour aider les vétérans du conflit et les soutenir à long terme?

Le texte est divisé grosso modo en deux parties. Les quatre premiers chapitres traitent des événements avant et pendant la guerre. Le chapitre 1 porte sur la façon dont les soldats en détresse psychologique étaient traités durant la Première et la Deuxième Guerres mondiales et se penche sur les concepts changeants de traumatisme. En outre, il décortique les problèmes auxquels étaient confrontées les forces armées dans leurs efforts de préserver des connaissances médicales durement acquises et la mémoire institutionnelle en périodes de démobilisation et de réductions budgétaires, ainsi que les répercussions que cela a eues au moment où la guerre a éclaté en 1950. Le chapitre 2 décrit la façon dont les forces du Commonwealth étaient organisées dans le théâtre, la raison pour laquelle la division a été formée en premier lieu et l’incidence des relations interalliées sur la qualité des soins de santé. Le chapitre 3 examine les démarches adoptées par les hauts dirigeants pour protéger la santé mentale et le bien être des soldats grâce à des décisions clés du commandement et l’élaboration minutieuse de politiques de bien être. Le chapitre 4 examine directement les problèmes de santé mentale les plus communément rencontrés en Corée et évalue l’efficacité des soins psychiatriques de première ligne fournis en réaction. Les autres chapitres sont une réflexion sur les événements survenus depuis la fin de la guerre de Corée. Le chapitre 5 décrit l’évolution du système de pension de l’après guerre et les difficultés auxquelles ont fait face les vétérans atteints de maladie mentale pour demander et obtenir des indemnités. La conclusion se penche de façon plus vaste sur l’héritage de la guerre de Corée pour les vétérans qui y ont participé et dans la mémoire populaire.

Fitzpatrick démontre que les forces du Commonwealth parvenaient avec beaucoup de succès à faire reprendre du service à des militaires psychologiquement traumatisés lors de leur déploiement dans le théâtre. Elles ont connu un taux faible de troubles mentaux (un cas sur 20 blessés ou malades) et les médecins militaires excellaient à faire reprendre du service actif aux militaires, le taux de retour à l’unité s’élevant à des niveaux entre 50 et 83 pour cent. De plus, la division était bien connue pour son efficacité au combat et le moral élevé face aux privations constantes et à un environnement opérationnel difficile.

Toutefois, les responsables du Commonwealth ont échoué, à long terme, à soutenir les vétérans de façon significative. Les systèmes de rémunération étaient complexes, il était difficile de s’y retrouver et ils n’étaient pas conçus pour répondre efficacement aux besoins des vétérans ayant subi une blessure psychologique. Un manque d’intérêt du public à l’égard de la guerre a aussi contribué à l’incompréhension répandue et a privé les vétérans d’espaces où faire leur deuil et confronter leur propre expérience de conflit et de perte. Le livre aborde les problèmes actuels en matière d’invalidité, de pensions et d’indemnisation qui demeurent fortement contestés et présente une réflexion sur le pouvoir de la commémoration dans le processus de guérison.

Invisible Scars, c’est une histoire à propos de la nature et des limites de la résilience humaine. À ce jour, il reste des stigmates entourant la maladie mentale et ceux qui en sont atteints. À l’échelle mondiale, les collectivités militaires nourrissent et célèbrent une culture de force, de courage et de ténacité. Dans ce contexte, les problèmes psychologiques peuvent facilement être interprétés comme de la faiblesse ou un manque de volonté et, même si des progrès ont été réalisés pour remettre en question cette interprétation, il reste encore beaucoup de travail à faire. En étudiant les victimes psychologiques de la guerre, nous pouvons en apprendre beaucoup sur tous les aspects, allant des conditions sur la ligne de front à la façon dont la culture et les institutions ont façonné les expériences traumatiques. Ce livre sera intéressant pour les étudiants et les universitaires qui étudient l’histoire militaire et médicale, ainsi que pour ceux qui s’intéressent aux conséquences humaines de la guerre.


Détails de la page

Date de modification :