Vidéo : Discours de clôture par Dilip Soman pour le Symposium sur la recherche en littératie financière

Transcription

Dilip : Nous avons quelque chose d’inhabituel, c’est-à-dire que j’ai préparé des diapositives pour le mot de la fin et je ne sais pas pourquoi je l’ai fait, mais les voici. Elles n’ont pas l’air terriblement compliquées, mais lorsque j’ai commencé hier, on me rappelait qu’il y a trois ans, nous avions organisé un événement ici même à la salle Desautels sur la littératie financière en partenariat avec vous, Jane. Vous et moi sommes levés à ce moment-là, John Lynch nous a présenté un exposé fabuleux à ce stade-ci avec ses méta-analyses sur l’efficacité des programmes de littératie financière. Il a commencé par montrer une corrélation de 0,1 % comme pour indiquer que la littératie ne fonctionne pas, mais c’est probablement un type très naïf de leçon à retenir de cette recherche. Nous avons ensuite dit : « Bien, réfléchissons au moment où cela fonctionne et réfléchissons aux conditions dans lesquelles cela fonctionne », et l’une des choses que nous avons dites à ce moment-là, il y a trois ans, c’est que nous devons réfléchir à la meilleure façon de tirer parti de la science du comportement pour aider à déterminer ce que nous pouvons faire en plus de l'éducation financière, à améliorer l'efficacité de la littératie financière et, au cours de la dernière année et demie, nous avons parcouru un long chemin depuis. Je veux dire, si vous pouvez simplement repenser à tout le beau travail que nous avons vu, il est absolument phénoménal.

Donc, ce que je pensais faire, c'est de donner quelques perspectives, une sorte de réflexion sur ce que j'ai entendu et, avant de faire cela, je veux commencer par parler de l'idée qu'au cours de la dernière année et demie, vous avez entendu beaucoup d'exemples de personnes qui font des bêtises en matière de finances. Elles font de mauvais choix en matière de crédit, s’endettent, font de mauvais choix en matière d’hypothèque, puis je me dis, ce sont les mêmes personnes qui sont allées sur la Lune, qui ont inventé le vol et qui ont découvert les vaccins et la théorie de la relativité. Alors, qu’est-ce qui arrive? Qu’advient-il des personnes qui sont vraiment bonnes? Je veux dire que nous avons une société incroyable et le genre humain a accompli beaucoup de choses. Pourquoi ratons-nous notre coup dans les choses simples?

Donc, une explication simple, c’est que tout cela a été inventé par les 5 % des personnes les plus intelligentes et que toutes les autres personnes ne sont pas aussi intelligentes, mais je ne pense pas que ce soit le cas. Nous sommes tous des personnes intelligentes, nous fonctionnons bien, nous espérons bien nous adapter, nous avons des familles, nous avons de bonnes relations sociales. Que nous arrive-t-il lorsque nous prenons des décisions financières? Et je pense que la réponse est simple. En fait, je ne pense pas que l’être humain ait été conçu pour prendre des décisions financières. Je ne pense pas que le système humain ait été conçu pour penser à la valeur actualisée nette des liquidités futures ou au calcul des flux de trésorerie actualisés pour nous aider à déterminer quelle hypothèque est la meilleure option ou pour examiner le TAP et déterminer quelle sera la valeur actualisée nette de futures liquidités de dette de carte de crédit – nous avons été conçus pour faire des choses simples et je pense que la difficulté est que nous avons rendu le paysage financier tellement inhumain que même les meilleurs humains luttent à l’intérieur de ce paysage.

C’est un peu comme si vous choisissiez un champion de tennis. En fait, je connais un joueur de tennis qui a représenté son pays à la Coupe Davis et qui est donc un très bon joueur. Il est venu me voir au Canada et nous étions au chalet en février. Le court de tennis ressemblait à ceci : c'était de la glace, et il s'est avéré qu'il était aussi bon ou aussi mauvais que moi lorsque nous jouions sur la glace. La glace est un excellent moyen de niveler les compétences de tennis. Je pense que le marché financier est également un excellent planificateur pour les humains en termes de répartition relative à l’intelligence. Les personnes vraiment intelligentes ratent leur coup quand il s'agit de prendre des décisions financières très simples.

Et je pense que nous devons réfléchir un peu – évidemment, la littératie financière est importante et nous devons mettre les gens au courant, mais nous devons également réfléchir longuement au paysage, le court de tennis. Tout comme les gens ont besoin de littératie financière, le secteur des services financiers a peut-être aussi besoin d'un peu de littératie humaine. Alors, que pouvons-nous faire pour rendre l’information plus humaine et conforme? Je veux dire que les organisations dépensent beaucoup de temps, d’énergie et d’efforts pour se conformer à la loi. Où est la conformité à l’égard du comportement humain? N’est-ce pas? Afin de satisfaire les avocats, nous avons conçu des brochures compliquées et nous veillons à tout mettre en annexe. Doug, votre clause de non-responsabilité était incroyable, mais elle montre simplement le genre de choses que nous faisons et qui rendent la vie difficile pour les humains. Je pense donc que nous devons réfléchir longuement à la façon de résoudre ce problème en plus de simplement éduquer les gens sur la manière de prendre de meilleures décisions.

Alors, laissez-moi simplement présenter quatre brefs éléments et ensuite je vais me taire et nous laisser tous aller où nous devons aller. Le point n° 1 que je veux faire valoir concerne l'utilité et la futilité des débats. Le point n° 2 est que je vais affirmer que la théorie de l’incitation au changement dont beaucoup de personnes parlent n’est pas une chose, c’est un ensemble de beaucoup de choses. Il existe une psychologie beaucoup plus nuancée qui permet de comprendre la théorie de l’incitation au changement. J'ai entendu dire que cela s'appelait l’économie de l’incitation au changement ou la théorie de l’incitation au changement ou autre chose. La troisième chose sur laquelle je veux mettre l’accent, c’est que la valeur de l'approche comportementale n'est pas dans les résultats. Ainsi, il est tentant d’entendre parler de l’excellente recherche qui a été effectuée au cours de la dernière journée et demie, puis de revenir en arrière et de dire : « Cela a bien fonctionné pour eux, cela fonctionnera probablement pour moi. ». Ce n’est pas si facile, je ferai donc un bref commentaire à ce sujet et je terminerai enfin par les concentrations éthiques.

Commençons par l’utilité et la futilité des débats. Nous avons assisté à un débat plus tôt. Je l’ai trouvé amusant, mais son intérêt n’est pas de savoir qui a gagné ou qui a raison et qui a tort. Ce qui est intéressant, c’est la convergence. C’est ce que nous pouvons tirer des deux côtés du débat et qui peut nous aider à optimiser, dans notre cas, l’innovation. Ça me fait penser à la conférence de l’ACFC et de l’OCDE à Toronto, en 2011, il y a maintenant sept ans. Je faisais partie d’un groupe d’experts qui ne devaient pas avoir de débat, mais il y a eu un débat quand même. La question était : est-il mieux d’éduquer les gens ou d’inciter les gens? Évidemment, la réponse n’était ni l’un ni l’autre. Il faut comprendre comment tenir compte des deux côtés, mais malheureusement, même aujourd’hui, des gens sont encore en train de débattre à ce sujet. Sur Twitter, on trouve des gens qui disent, par exemple, que « l’éducation fonctionne » ou que « l’éducation est responsabilisante, l’incitation est dégradante ».

Et ceux qui sont du côté de l’économie comportementale disent « l’incitation est clé, l’éducation ne sert à rien ». L’idée n’est pas de décerner des médailles aux gagnants. L’idée est de tirer des leçons de ces deux perspectives pour concevoir des interventions. Il y a de cela quelques années, à la conférence de Moncton, Avni a parlé de « Financial Literacy in a Box ». D’après sa présentation, l’éducation est une excellente méthode. Pouvons-nous utiliser l’architecture du choix pour, d’une façon quelconque, élever la valeur de l’éducation? Je crois que c’est là que nous devons commencer à penser aux débats comme celui-ci. Ce qui est important, ce n’est pas qui a tort ou qui a raison, c’est de combiner de multiples perspectives et de les adapter à nos besoins.

Ma deuxième idée : mettons de côté la soi-disant théorie de l’incitation. En psychologie, il y a ce qu’on appelle les quatre « tions » du comportement humain. Les voici sur la diapositive. La motivation, la cognition, la perception et l’émotion. Ce sont quatre facteurs à garder à l’esprit lorsque nous concevons des interventions d’éducation ou des interventions d’architecture de choix. Nous avons tendance à trop accorder d’importance à la cognition. Et, en conséquence, à donner aux gens trop d’information. S’il y a un problème, nous nous disons que c’est parce que les gens manquent d’information, alors nous leur en donnons encore plus. Donc, ils reçoivent 20 pages d’information et décident de ne rien lire. Nous devons réfléchir à ces autres facteurs. Les gens ne voient peut-être pas le problème comme vous. C’est peut-être un problème lié à la perception ou à l’émotion. Ou bien à la motivation. Peut-être qu’ils ne tiennent pas à résoudre leur problème. Donc, vous pouvez leur donner autant d’information que vous le voulez, ça ne changera pas leur comportement. Il ne faut pas l’oublier.

La troisième idée dont je veux vous parler, c’est que les résultats ne sont pas ce qui compte le plus dans l’approche comportementale. L’une des leçons les plus importantes de l’économie comportementale est la notion de la dépendance au contexte. Les résultats sont influencés par le contexte. Si on change les extrants, on change les résultats. Il peut être tentant d’emprunter, de voler ou d’utiliser une idée qui a fonctionné pour quelqu’un, à un autre endroit ou un autre moment dans l’histoire et de dire « Je vais le faire. » L’équipe d’incitation du Royaume-Uni a fait une étude de comparaison sociale où elle a réussi à faire en sorte que les gens paient leurs impôts à temps. Vous pensez pouvoir faire la même chose, non? Mais vous êtes dans un contexte différent, vous travaillez avec d’autres gens. Vous êtes dans un autre moment dans le temps.

Je crois donc que nous devons nous souvenir qu’il est important de tout tester, de tester chaque intervention. La nature de nos recherches doit changer et la nature de notre façon de consommer la recherche doit changer aussi. Ce n’est pas parce que ça a fonctionné pour quelqu’un que ça fonctionnera pour tout le monde, alors nous devons continuer de tester selon le contexte dans lequel nous sommes.

Enfin – je vais sauter quelques diapositives – je veux parler brièvement de l’éthique. Beaucoup de questions ont été soulevées ici et lors de conversations sur l’information, à savoir : est-il éthique d’inciter, d’orienter les gens vers des décisions qu’ils n’auraient pas prises autrement? Quand j’ai une question complexe, ma meilleure méthode est de donner aux gens des exemples de ce que d’autres personnes ont fait. Donc ici, je vais vous référer à un merveilleux livre écrit par Cass Sunstein intitulé Ethics of Influence. L’auteur parle d’un code de conduite, d’une charte. Les gens qui font partie du milieu universitaire comme moi obtiennent une approbation éthique avant d’entreprendre une recherche. C’est une pratique que je recommande à tous, mais une autre façon de réfléchir à cette question est de se demander : est-ce qu’il serait éthique de ne rien faire? Donc Steve, plus tôt, vous parliez des prêts sur salaire et des prêts à des conditions abusives. Nous discutons des interventions avec le gouvernement pour aider les gens à prendre de meilleures décisions et quelqu’un a demandé « Eh bien, sur quoi repose l’éthique? » Sur quoi repose l’éthique de l’inaction quand des gens paient des intérêts de 47 %? Donc c’est l’autre manière dont nous devons penser à l’éthique.

Je termine sur cette note, parce que je pourrais continuer longtemps. J’aimerais vous remercier et remercier l’ACFC pour cette occasion. Ce fut un énorme plaisir et honneur de vous voir tous réunis ici. Continuez d’alimenter les discussions. Comme promis, nous allons tout mettre dans un site Web : vidéos, transcriptions, présentations PowerPoint et affiches. Accordez-nous quelques semaines pour le faire, mais nous tiendrons notre promesse. Merci beaucoup.

Détails de la page

Date de modification :