Vidéo : Utiliser le revenu et les actifs pour comprendre la vulnérabilité financière des familles canadiennes

Transcription

David Rothwell : Bonjour à tous. C’est un plaisir pour moi d’être ici aujourd’hui. Je tiens à remercier Brenda de nous avoir réunis, ainsi que l’équipe de l’ACFC d’avoir une fois de plus organisé une grande conférence ici. Normalement, je participe à des réunions formées d’un seul groupe de travail sur le sujet, c’est pourquoi je trouve que c’est formidable de passer une journée et demie à fouiller ces questions avec des collègues chercheurs et des décideurs. Je tiens également à souligner la contribution de ma collaboratrice, Jennifer Robson, qui a travaillé sur cette étude, et de Mohammad Khan, doctorant à McGill.

Je vais donc parler de la pauvreté et de la vulnérabilité au Canada, en mettant l’accent sur la classe moyenne. Mon exposé sera très descriptif. Je vais présenter quelques études qui, je l’espère, nous permettront de parler de vulnérabilité, et des sources de données dont personne d’autre n’a encore parlé et qui, je l’espère, ouvriront de nouvelles pistes de réflexion. Nous allons aussi parler de pauvreté. Je sais que c’est peut-être un peu hors sujet dans le contexte de la capacité et de la littératie financières, mais je pense que ce concept peut nous apporter de nouvelles perspectives. Il y a un débat de longue date sur la façon de définir et de mesurer la pauvreté, auquel certains d’entre nous participent. Mais l’idée de base de la pauvreté est qu’il s’agit d’une situation économique où les ressources sont insuffisantes pour joindre les deux bouts. Qu’il s’agisse de la pauvreté en termes de revenus, d’actifs ou de consommation, c’est l’idée de base.

Nous disposons aujourd’hui d’un certain nombre de moyens et de mesures permettant de mesurer la pauvreté. Nous avons, Jennifer et moi, travaillés sur des mesures de la pauvreté en actifs, dont nous parlerons dans un instant. L’OCDE a adopté ces mesures, et d’ailleurs je vous invite à consulter sa base de données pour connaître le pourcentage de la population qui est pauvre en actifs. Le Canada fait lui aussi référence à ces mesures de la pauvreté des actifs dans sa nouvelle Stratégie de réduction de la pauvreté. Il y a donc quelque chose à apprendre du concept de pauvreté, notamment en ce qui concerne la pauvreté dans la classe moyenne. Je ne vais pas, en raison du peu de temps qui nous est alloué, lire cette citation, mais je pense que notre gouvernement et la plupart des gouvernements et la plupart d’entre nous peuvent convenir que le bien-être d’une nation est en grande partie lié à la croissance de l’économie et de la classe moyenne. Il y a beaucoup de discussions en cours au pays sur la situation économique de la classe moyenne. D’accord?

L’idée ici est donc de relier cette notion de classe moyenne et de vulnérabilité financière à la situation économique du pays. Il s’agit d’une étude descriptive sur le sujet, qui ne montre pas d’évolution notable des tendances de la pauvreté; en fait, on observe que le nombre de ménages pauvres en actifs financiers a diminué au cours des trois vagues de données que nous avons étudiées, et la mesure du nombre de ménages à faible revenu indique que la pauvreté en revenus a diminué de façon relativement stable. La plupart des études portent sur ces indicateurs considérés isolément. Donc, nous n’avons que des documents portant sur la pauvreté en actifs et en revenus. Ce que nous allons faire, c’est de les regrouper afin d’examiner la relation entre la pauvreté en revenus et la pauvreté en actifs. Et comme le montre cette animation, il y a une intersection de pauvreté. Il y a un groupe de personnes dont nous pouvons dire d’un commun accord qu’il s’agit des plus vulnérables. Ce sont les ménages à la fois pauvres en revenus et en actifs. Mais il y a aussi les groupes de ménages pauvres en actifs, sans être pauvres en revenus, et inversement. Et nous avons, je suppose, des ménages qui tomberaient dans la région blanche, c’est-à-dire qui ne sont pas pauvres. Nous allons donc examiner l’évolution de ces quatre groupes au fil du temps au Canada au moyen des meilleures données disponibles.

Voici donc nos questions. Et rapidement, qu’est-ce que l’intersection des revenus et des actifs peut révéler sur la vulnérabilité? En quoi cela a-t-il changé au fil du temps? Après avoir répondu brièvement à ces questions, nous allons examiner la classe moyenne et la classe ouvrière et présenter quelques graphiques. Je vais devoir passer rapidement là-dessus. Nous allons utiliser l’Enquête sur la sécurité financière de 1999, de 2005 et de 2012. Il y a eu une enquête en 2016, mais c’est un peu difficile pour moi d’y avoir accès, car je suis maintenant à l’extérieur du pays, alors je dois me fier aux données disponibles.

D’accord. Alors la mesure de la pauvreté en revenu que nous utilisons correspond à la mesure de faible revenu, qui est une mesure relative. Vous êtes considéré comme pauvre en revenus si le revenu de votre ménage est inférieur à 50 % du revenu médian. D’accord. Pour ce qui est de la pauvreté en actifs, nous utilisons le seuil de pauvreté de revenus sur une période de trois mois. Donc, nous disons que vous êtes pauvre en actifs si vous n’avez pas suffisamment d’actifs pour subvenir à vos besoins si vous vous retrouvez sur le seuil de pauvreté pendant trois mois. Si nous avons 24 000 $ comme seuil de pauvreté, cela signifie que vous ne disposez pas de 6 000 $ en actifs financiers ou en valeur nette. C’est ainsi que vous pouvez interpréter cette ligne. Nous examinons les lignes qui se joignent. L’accent est mis sur le ménage parce que le bien-être financier n’est pas un concept individuel; c’est un concept lié au ménage et à la famille; donc, ce que nous voyons ici, ce sont des familles et des ménages.

Qu’entend-on par actifs? Parlons-en brièvement. Il s’agit de la valeur marchande de l’épargne, des comptes de dépôt, de l’argent comptant et d’autres actifs financiers, des liquidités et des biens qui peuvent être liquidés. En ce qui concerne la valeur nette, Brenda a mentionné qu’il s’agissait de la valeur nette totale moins la dette totale. Qu’est-ce que la classe moyenne? Je pourrais faire un exposé d’une semaine sur ce qu’est la classe moyenne. Mais, nous allons nous contenter d’une définition simple en disant que la classe moyenne est constituée des ménages des quintiles de revenus deux, trois et quatre. Et pour ce qui est de la classe ouvrière, nous allons la définir comme un groupe de personnes qui ont moins de quatre années d’études postsecondaires et un revenu familial inférieur à la médiane. D’accord?

Voici donc le premier graphique. Je vais prendre un peu de temps pour l’expliquer parce que le reste de l’exposé en découle. Il y a donc quatre barres ici. À partir du haut, la barre rose ou rouge représente le groupe des ménages qui ne sont pas pauvres. Il s’agit donc du pourcentage de familles canadiennes qui ne sont ni pauvres en revenus ni pauvres en actifs. Ils ne tombent pas dans ces cercles qui se superposent, que j’ai montrés tout à l’heure. D’accord? Les autres groupes sont constitués de ménages pauvres selon certaines mesures. Donc, si nous partons du haut en descendant, nous voyons qu’environ 4 % des ménages canadiens sont pauvres en revenus, sans être pauvres en actifs. D’accord? Le groupe suivant très important est composé des familles qui ne sont pas pauvres en revenus, lesquelles représentent 41 % des familles canadiennes. Elles ne figurent pas dans nos mesures classiques de pauvreté en revenus, bien qu’elles soient financièrement vulnérables dans le sens où elles n’ont pas suffisamment d’actifs financiers pour subvenir à leurs besoins si elles devaient vivre au seuil de la pauvreté pendant trois mois. Il s’agit en quelque sorte d’une vérification de la validité des sondages sur la capacité financière qui vous demandent si vous disposez de suffisamment de fonds pour effectuer une dépense d’urgence de 2 000 $. Le groupe inférieur, qui constitue 14,8 % des ménages canadiens, est le plus vulnérable. Ces ménages sont à la fois pauvres en revenus et en actifs. À ma connaissance, personne d’autre n’a utilisé cette méthode qui consiste à superposer ces graphiques.

Ce que nous allons donc faire maintenant, c’est examiner comment cela a évolué dans le temps. À gauche, vous voyez les actifs financiers, et à droite, la valeur nette. D’accord? Ces graphiques montrent comment cela a évolué dans le temps. Il y a beaucoup d’informations à prendre en compte. Je suppose que la première constatation, c’est que la barre rouge s’allonge avec le temps. Il y a de moins en moins de familles qui ne sont pas pauvres. Pardon, je voulais dire qu’il y a davantage de familles qui ne sont pas pauvres. C’est un peu déroutant. C’est donc un progrès sur le plan de la vulnérabilité. Cependant, si vous regardez du côté des ménages à la fois pauvres en revenus et en actifs, qui sont les plus vulnérables, vous verrez que cette mesure n’a pas changé au fil du temps. D’accord?

Maintenant, qu’avons-nous au chapitre de la valeur nette? C’est pour l’ensemble de la population. Nous voyons que 71 % des familles canadiennes n’étaient pas pauvres au cours de ces années, et qu’environ 9 %, 10 % et 10 % des ménages étaient pauvres en revenus, en actifs nets, ou à la fois pauvres en revenus et en actifs respectivement. D’accord. J’espère avoir réussi à me faire comprendre. Je vais aller un peu plus vite.

Qu’en est-il du groupe à revenu moyen? Comment se portent les ménages des quintiles de revenu deux, trois et quatre? Eh bien, encore une fois, nous voyons des progrès. Nous voyons qu’il y a davantage de ménages qui ne sont pas pauvres, et que le nombre de ménages qui sont pauvres en actifs financiers, représenté par cette barre turquoise, est en baisse. Le nombre de ménages pauvres en actifs financiers est en baisse, passant de 57 % en 1999 à 49 % en 2012. D’accord. C’est un progrès. Si on considère la valeur nette, c’est plus difficile à dire. Nous voyons qu’il y a moins de progrès sur le plan de la valeur nette. Et je pense que c’est là que la dette entre en ligne de compte. Deborah et Brenda ont déjà mentionné que la dette est un facteur important de la valeur nette, et je pense que nos mesures tiennent compte de ce facteur.

D’accord. La classe ouvrière maintenant. Comment se porte la classe ouvrière? Voici le graphique pour l’ensemble des Canadiens et voici les chiffres pour ce qui concerne la classe ouvrière. Et ici, nous commençons à voir beaucoup plus d’inégalités. La première constatation, c’est que de 51 % à 56 % des familles canadiennes de la classe ouvrière sont à la fois pauvres en revenus et en actifs et, par conséquent, très vulnérables. Il y a eu des progrès au fil du temps, mais l’écart demeure important. Comment la classe moyenne se porte-t-elle au chapitre de la valeur nette? Pardon, je voulais dire comment se porte la classe ouvrière sur le plan de la valeur nette? Encore une fois, on constate d’importantes inégalités par rapport à l’ensemble de la population canadienne.

C’est ce que nous avons démontré jusqu’à maintenant. Ces données présentent ce qu’on appelle dans les milieux universitaires des points forts et des points faibles. Je tiens à souligner qu’il s’agit de données de Statistique Canada tout à fait représentatives à l’échelle nationale, qui ont été pondérées de manière à être représentatives de la population canadienne. Ce sont les meilleures données que nous ayons sur la richesse et les actifs au pays. Elles nous permettent de nous comparer à d’autres pays.

J’aimerais simplement vous donner quelques points à retenir. Je pense que le concept de pauvreté, qui est une forme de vulnérabilité, peut nous éclairer. Cette étude descriptive montre que la pauvreté est répandue. Selon ces indicateurs, de 30 % à 60 % des familles canadiennes sont vulnérables sur le plan de la valeur nette ou des actifs financiers. Le nombre de ménages à la fois pauvres en actifs et en revenus a peu diminué au fil du temps. Nous travaillons actuellement sur la façon dont les politiques peuvent changer tout cela. J’ai hâte de vous revoir pour vous en parler. Nous constatons des progrès au chapitre des ménages à revenus moyens, soit une baisse de la pauvreté en termes d’actifs financiers qui favorise la croissance de la classe moyenne. Le revenu médian a augmenté au cours de cette période. La pauvreté, telle que nous l’avons définie, diminue dans la classe ouvrière. Encore une fois, c’est un progrès. Toutefois, l’ampleur des écarts entre la classe ouvrière et le reste de la population canadienne est troublante. Je pense que cette inégalité représente un véritable enjeu pour les décideurs sociaux et les personnes qui se soucient de bien-être financier. J’ai terminé. Merci.

(Applaudissements)

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