Page 9 : Recommandations pour la qualité de l'eau potable au Canada : document technique – l'arsenic

8.0 Cinétique et métabolisme

8.1 Caractère essentiel

Selon les résultats de certaines études, l'arsenic pourrait être un élément essentiel pour plusieurs espèces animales (p. ex. les chèvres, les porcs miniatures, les rats, les poussins), mais rien n'indique qu'il soit essentiel pour les êtres humains. Un comité technique sur l'arsenic mis sur pied par la U.S. EPA a indiqué ne pas avoir connaissance de rapports signalant un besoin d'arsenic chez les êtres humains, ni d'études expérimentales ou épidémiologiques visant à déterminer si l'arsenic est essentiel ou non. Après avoir étudié les données existantes, le comité technique a conclu que si l'arsenic est un élément nutritif dont les êtres humains ont besoin, les expositions environnementales actuelles à l'arsenic ne semblent pas produire chez eux de carence en arsenic (U.S. EPA, 1988).

8.2 Absorption, distribution, métabolisme et élimination

L'arsenic élémentaire ingéré est mal absorbé et demeure en grande partie inchangé lorsqu'il est éliminé. Les oxydes d'arsenic sont facilement absorbés (>80 %) par voie gastro-intestinale (Fowler et coll., 1979) et, dans une moindre mesure, par les poumons et la peau (Wickström, 1972). Des expériences de récupération dans les matières fécales effectuées chez des volontaires humains montrent que l'As(III) et l'As(V) solubles, ainsi que l'arsenic organique, sont bien absorbés. L'As(III) a tendance à s'accumuler dans les tissus, mais l'As(V) et l'arsenic organique sont rapidement et presque complètement éliminés au niveau des reins (Bertolero et coll., 1987). L'arsenic tant organique qu'inorganique n'est pas bien absorbé par la peau. On a signalé que l'exposition par voie cutanée était de bien plus faible importance que l'exposition par ingestion. Le National Research Council (NRC des États-Unis, 1999) et la Agency for Toxic Substances and Disease Registry (ATSDR, 2000) ont examiné les données disponibles sur l'absorption par voie cutanée de l'arsenic et indiqué que celle-ci était suffisamment faible pour que l'on puisse considérer cette voie d'exposition comme peu susceptible de poser un risque pour la santé.

Après l'ingestion, l'arsenic inorganique se retrouve rapidement dans la circulation sanguine, où il se fixe principalement à l'hémoglobine (Axelson, 1980). Dans les 24 heures qui suivent, il se retrouve principalement dans le foie, les reins, les poumons, la rate et la peau (Wickström, 1972). Il s'accumule surtout dans la peau, les os et les muscles. L'accumulation d'arsenic dans la peau est probablement liée à l'abondance des protéines renfermant des groupes sulfhydryles, avec lesquels l'arsenic réagit facilement (Fowler et coll., 1979). Chez les êtres humains, l'arsenic inorganique ne semble pas traverser la barrière hémato-encéphalique. On signale toutefois qu'il y a transfert transplacentaire chez les humains (Gibson et Gage, 1982) et la souris (Hood et coll., 1987).

On a avancé des explications concernant les voies de conversion d'une forme d'arsenic en une autre (NRC des États-Unis, 2001). On croit que la méthylation de l'arsenic inorganique se produit après réduction de l'arsenic pentavalent en arsenic trivalent et que la méthylation de cette forme trivalente de l'arsenic découle ensuite de l'addition oxydante d'un groupe méthyle provenant de la S-adénosylméthionine par méthyltransférase. La réduction séquentielle et la méthylation des composés de l'arsenic produisent de l'acide monométhylarsonique (AMMAV) et de l'acide diméthylarsinique (ADMAV) pentavalents, ainsi que de l'acide monométhylarsineux (AMMAIII) et de l'acide diméthylarsineux (ADMAIII) trivalents (NRC des États-Unis, 2001).

Il semble exister, pour l'élimination de l'arsenic trivalent (As(III)) ingéré, deux procédés principaux qui se déroulent à des vitesses différentes (Lowell et Farmer, 1985). Le premier est celui de l'excrétion par voie urinaire rapide de l'arsenic inorganique sous les formes trivalente et pentavalente (près de 90 % de la totalité de l'arsenic excrété par voie urinaire pendant les douze premières heures). Le second est celui de la méthylation séquentielle de l'As(III) dans le foie sous les formes organiques AMMAIII, ADMAIII, AMMAV et ADMAV (Buchet et Lauwerys, 1985; Lovell et Farmer, 1985). L'excrétion des composés méthylés commence environ cinq heures après l'ingestion, mais elle atteint son niveau maximal deux ou trois jours plus tard. Parmi les voies d'élimination moins importantes de l'arsenic inorganique, mentionnons la peau, les cheveux, les ongles et la sueur (CIPR, 1975; Kurttio et coll., 1999). Chez les êtres humains, on estime que la demi-vie de l'arsenic inorganique se situe entre deux et quarante jours (Pomroy et coll., 1980).

Les résultats d'une étude au cours de laquelle on a administré de l'arsenic inorganique (125, 250, 500 ou 1 000 µg NaAsO2) par voie orale une fois par jour pendant cinq jours consécutifs à quatre volontaires indiquent que la capacité de méthylation de l'arsenic est saturée progressivement lorsque l'apport quotidien dépasse 0,5 mg (Buchet et coll., 1981a). Il ne semble toutefois pas entièrement saturé même lorsque les doses quotidiennes atteignent 1 mg. Les études réalisées sur des volontaires humains indiquent que la majeure partie de l'arsenic organique ingéré est excrétée rapidement et demeure inchangée (>80 % de la dose dans les quatre jours) (Buchet et coll., 1981b; Luten et coll., 1982; Tam et coll., 1982).

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