Page 7 : Recommandations pour la qualité de l'eau potable au Canada : document technique – le sélénium

Partie II. Science et considérations techniques (continué)

6.0 Méthodes d'analyse

L'United States Environmental Protection Agency (U.S. EPA) a approuvé trois méthodes d'analyse (méthode 200.5 Rev. 4.2, méthode 200.8 Rev. 5.4 et méthode 200.9 Rev. 2.2) mesurant le sélénium dissous et le sélénium total dans l'eau potable (U.S. EPA, 2011). Le sélénium total est défini comme étant la somme de la concentration totale de la fraction dissoute ([sélénite-Se(IV)] et [sélénate-Se(VI)]) et de la fraction en suspension dans un échantillon d'eau. Les méthodes suivantes, mises au point par des organisations de normalisation consensuelles, ont été approuvées par l'U.S. EPA et peuvent être utilisées pour mesurer le sélénium : SM 3113 B et SM 3114 B (APHA et coll., 1992, 1995, 2005), version en ligne SM 3113 B-04, 99 et SM 3114 B-09, 97 (U.S. EPA, 2011) et ASTM - D3859-98 A,B, D3859-03 A,B et D3859-08 A,B (ASTM, 1998, 2003, 2008).

La méthode 200.5 Rev. 4.2, qui fait appel à un spectromètre d'émission atomique à plasma inductif à visée axiale, présente une limite de détection (LDM) de 1,3 µg/L. Ce type d'analyse requiert une préparation préalable des échantillons, telles qu'une digestion permettant la récupération et une concentration, avant l'analyse comme telle. Le fait de concentrer les échantillons avant de les analyser améliore la sensibilité de l'analyse (U.S. EPA, 2003). Les interférences possibles sont les suivantes : 1) interférences spectrales causées par une émission de fond, lumière diffuse provenant de la raie d'émission d'éléments présents en concentration élevée ou la superposition d'une raie spectrale provenant d'un autre élément; 2) interférences chimiques, par exemple la formation d'un composé moléculaire, effets de l'ionisation et effets de la vaporisation du soluté; 3) interférences physiques associées à la nébulisation de l'échantillon et au transport; et 4) interférences liées à la mémoire; c'est-à-dire lorsque les analytes d'un échantillon précédemment analysé produisent un signal mesuré dans le nouvel échantillon.

Les méthodes 200.8 Rev. 5.4 et 200.9 Rev. 2.2 de l'U.S. EPA fournissent un protocole permettant de mesurer le sélénium dissous et le sélénium total récupérable. Elles font appel aux mêmes étapes de préservation ou de prétraitement, selon le type de données que l'on cherche à obtenir. Elles se distinguent cependant par les appareils de mesure qu'elles requièrent.

La méthode 200.8 Rev. 5.4, qui fait intervenir la spectrométrie de masse à plasma à couplage inductif, présente une limite de détection de 7,9 µg/L. L'échantillon est atomisé et ionisé par un plasma induit par radiofréquence. Les ions extraits du plasma par une interface à pression négative sont séparés par un spectromètre de masse en fonction de leur ratio masse/charge. Un multiplicateur d'électrons ou un détecteur Faraday détecte les ions séparés (U.S. EPA, 1994). Les interférences peuvent provenir des sources suivantes : 1) isotopes de masse égale provenant de divers éléments présents dans l'échantillon; et 2) ions constitués de plus d'un atome ayant le même ratio masse/charge nominale que l'isotope d'intérêt. Il peut également survenir des interférences physiques associées au transport et à la conversion de l'échantillon dans le plasma, ainsi que des interférences liées à la mémoire, soit un signal émis par des isotopes d'éléments contenus dans un précédent échantillon que l'on mesure dans le nouvel échantillon.

La méthode 200.9 Rev. 2.2, qui fait appel à l'absorption atomique en four au graphite muni d'une plate-forme maintenue à température constante, présente une limite de détection de 0,6 µg/L. La technique comprend une série de trois étapes de chauffage : 1) une étape de séchage, 2) une étape de carbonisation destinée à réduire les interférences causées par des ions présents en concomitance; et 3) une étape finale dans laquelle la température du four s'élève pour atomiser le sélénium sur la surface en graphite pyrolytique dans une atmosphère d'argon d'une grande pureté. La lumière d'une longueur d'onde donnée traverse le nuage atomique, et l'on mesure la diminution de l'intensité lumineuse (U.S. EPA, 1994). Les sources d'interférence sont les suivantes : 1) interférences spectrales causées par la lumière absorbée par une molécule ou un atome différent de ceux de l'analyte d'intérêt; 2) interférence de la matrice inhibant le cycle d'atomisation; 3) interférence d'un élément en particulier; et 4) interférence liée à la mémoire résultant de l'analyse d'un échantillon contenant une concentration élevée d'un élément qui n'a pas été éliminé quantitativement à l'étape réalisée dans le four.

La méthode normalisée SM 3113 B qui analyse le sélénium par absorption atomique électrothermique a aussi été approuvée (APHA et coll. 1992, 1995, 2005). On a signalé un intervalle de concentrations optimales de sélénium allant de 5 à 100 µg/L, et un seuil de détection estimé à 2 µg/L (APHA et coll., 2005).

La méthode normalisée SM 3114 B, une méthode spectrométrique par absorption atomique produisant manuellement un hydrure, est optimale pour mesurer la gamme de concentrations de sélénium allant de 2 à 20 µg/L et présente une limite de détection de 2 µg/L (APHA et coll., 2005). Cette méthode peut être utilisée pour déterminer les niveaux de sélénium en utilisant un réactif de borohydrure de sodium pour convertir le sélénium en son hydrure pour le transporter dans un atomiseur d'absorption atomique. Le Se(VI) n'est pas réduit de façon mesurable par le borohydrure de sodium. La méthode réduit le Se(VI) en Se(IV) par un processus de digestion par un acide pour pouvoir mesurer le sélénium. Le Se(IV) présent dans l'échantillon d'eau filtrée est converti en hydrure de sélénium, lequel est volatile et est transporté dans l'atomiseur d'absorption atomique pour y être analysé. L'utilisation de l'étape de préparation pour convertir le Se(VI) en Se(IV) permet de distinguer les espèces de sélénium dans l'échantillon (APHA et coll., 2005).

Les méthodes citées dans la 22e édition des Standard Methods for the Examination of Water and Wastewater (APHA et coll., 2012) servent également à l'analyse du sélénium.

Les méthodes internationales de l'ASTM approuvées par l'U.S. EPA sont les versions de l'ASTM D3859 A et de l'ASTM D3859 B des années 1998, 2003 et 2008. Les deux méthodes font appel à l'absorption atomique. La méthode A (spectrométrie d'absorption atomique produisant un hydrure gazeux) est équivalente à la méthode SM 3114 B et convient pour des concentrations situées dans une plage de 1 à 20 µg/L. La méthode B (spectrométrie par absorption atomique en four au graphite) est équivalente à la méthode SM 3113 B, avec une plage de concentrations détectées allant de 2 à 100 µg/L.

Le seuil pratique d'évaluation quantitative (SPEQ) en vigueur, établi en fonction de la capacité des laboratoires à mesurer la concentration de sélénium dans des limites raisonnables de précision, est de 10 µg/L (U.S. EPA, 1991c). Récemment, dans le cadre de l'examen sur six ans effectué par l'U.S. EPA, on a évalué des données d'analyse sur le sélénium provenant d'un programme de vérification de la compétence. L'U.S. EPA a déclaré que les laboratoires avaient obtenu des notes élevées (supérieures à 75 %) pour ce qui est de l'analyse d'échantillons avec le SPEQ en vigueur. Toutefois, en raison de l'absence de données portant sur l'efficacité de l'analyse d'échantillons en deçà de la valeur en vigueur de 10 µg/L, l'U.S. EPA n'a pas recommandé d'abaisser le SPEQ actuel (U.S. EPA, 2009).

Une méthode récente utilisée à titre expérimental, soit la spectrométrie de masse à plasma d'azote induit par des micro-ondes, a permis d'obtenir une limite de détection de 0,01 µg/L pour ce qui est du Se(IV) et du Se(VI) présents dans de l'eau de robinet (Minami et coll., 2003).

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