Tests de libération d'interféron-gamma pour la détection de l'infection tuberculeuse latente - RMTC Vol.33 DCC-10
Relevé des maladies transmissibles au Canada
Volume 33 • DCC-10
le 1er Novembre 2007
Une déclaration d'un comité consultatif (DCC)
Comité canadien de lutte antituberculeuse†,††
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18 Pages - 721 KB
Préambule
Le Comité canadien de lutte antituberculeuse (CCLA) donne à l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) des conseils constants, à jour et fondés sur des données scientifiques en ce qui concerne les stratégies et les priorités canadiennes en matière de prévention et de lutte contre la tuberculose au pays. L’ASPC reconnaît que les conseils et les recommandations figurant dans la présente déclaration reposent sur les connaissances scientifiques et la pratique médicale les plus récentes. Elle diffuse ce document à des fins d’information aux intervenants en médecine et en santé publique qui cherchent à prévenir et à contrer la tuberculose.
Les personnes qui administrent ou utilisent des médicaments, des vaccins ou d’autres produits devraient bien connaître la monographie des produits ainsi que toute autre norme ou instruction approuvée concernant leur usage. Les recommandations relatives à l’usage des produits et les autres renseignements présentés ici peuvent différer de ceux figurant dans les monographies ou dans toute autre norme ou instruction approuvée pertinente qui a été établie par les fabricants autorisés. Rappelons que les fabricants font approuver leurs produits et démontrent l’innocuité et l’efficacité de ces derniers uniquement lorsqu’ils sont utilisés conformément à la monographie ou à toute norme ou instruction approuvée semblable.
Les recommandations qui suivent sont basées en général sur un survol de la littérature et sur l’opinion d’experts en date d’octobre 2006. Comme des études sur les tests de libération d’interféron-y ne cessent d’être publiées, c’est un domaine qui évolue rapidement. La présente déclaration du Comité consultatif sera donc périodiquement mise à jour au besoin. Les déclarations mises à jour, de même qu’une liste des études citées regroupées par catégorie, seront affichées sur le site Web de l’Agence de la santé publique du Canada à l’adresse www.santepublique.gc.ca/tuberculose.
Introduction
Des tests in vitro utilisant des lymphocytes T pour mesurer la production d’interféron-γ (IFN-γ) ont été mis au point récemment pour le diagnostic de l’infection tuberculeuse latente (ITL). Ces tests reposent sur le principe suivant lequel les lymphocytes T préalablement sensibilisés à des antigènes tuberculeux produisent des concentrations élevées d’IFN-γ lorsqu’ils sont réexposés aux mêmes antigènes mycobactériens(1). Pour le moment, deux types différents de tests de libération d’IFN-gamma (TLIG) sont homologués au Canada et offrent des solutions de rechange possibles au test cutané à la tuberculine (TCT). Il s’agit du test QuantiFERONMD-TB Gold In-Tube (Cellestis Limited, Carnegie, Victoria, Australie) et du T-SPOT.TBMD (Oxford Immunotec, Oxford, R.U.).
Le premier TLIG commercial a été le QuantiFERON-TB, et ce test utilisait comme antigène stimulant un dérivé de protéines purifiées (PPD). Il a été remplacé par le QuantiFERON-TB Gold (QFT-G) qui utilise des antigènes spécifiques de la TB. Le test T-SPOT.TB, le premier TLIG homologué au Canada, a également reçu le marquage CE; cette condition exigée pour mettre en marché un produit au sein de l’Union européenne (UE) indique que le produit respecte les exigences applicables des directives de l’UE. En janvier 2007, le T-SPOT.TB n’avait pas encore été approuvé par la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis. Comme ces tests évoluent rapidement et qu’il existe des variations dans les valeurs limites et les techniques employées, il importe de noter que la présente déclaration se fonde sur les études publiées concernant les tests QFT-G et QFT-G In-Tube, et les versions expérimentales et commerciales du test T-SPOT.TB.
Les TLIG plus récents utilisent des protéines spécifiques de Mycobacterium tuberculosis codées par des gènes situés à l’intérieur du segment appelé région de différence 1 (RD-1) du génome de M. tuberculosis. On ne retrouve pas ces antigènes dans le vaccin BCG (Bacille de Calmette-Guérin) ni dans de nombreuses espèces de mycobactéries non tuberculeuses (MNT)(1). Les antigènes immunogènes codés à l’intérieur de la RD-1 de M. tuberculosis sont présents dans M. leprae, le type sauvage de M. bovis et certaines des MNT (notamment M. kansasii, M. marinum, M. szulgai et M. flavescens). En théorie, la présence de ces espèces chez un hôte pourrait entraîner une réaction faussement positive à un TLIG. Bien que M. leprae et M. bovis soient des espèces peu répandues au Canada, et ne risquent pas ainsi de causer de réactions croisées, les MNT, M. kansasii, M. marinum, M. szulgai et M. flavescens (énumérées dans l’ordre approximatif de leur fréquence au Canada) ne sont pas aussi rares. Pour chaque 10 isolats de M. tuberculosis, jusqu’à 1 ou 2 isolats de ces espèces sont cultivés (Laboratoire national de microbiologie, Agence de la santé publique du Canada, communication personnelle).
En 2005, les US Centers for Disease Control and Prevention (CDC) ont recommandé que la version du test QFT-G approuvée par la FDA américaine puisse être utilisée au lieu du TCT pour toutes les indications, y compris les recherches de contacts, l’évaluation des immigrants et les tests en série effectués chez les travailleurs de la santé(2). En 2006, les lignes directrices pour la TB du National Institute for Health and Clinical Excellence (NICE) au R.-U. recommandaient l’adoption d’une approche hybride en deux étapes pour le diagnostic de l’ITL : un dépistage initial au moyen du TCT et un TLIG subséquent, si possible, chez ceux qui étaient positifs au TCT (ou chez lesquels le TCT peut ne pas donner des résultats fiables) afin de confirmer les résultats du TCT(3).
Description des tests
QuantiFERON-TB Gold In-Tube
Le test QFT-G se présente sous deux formes, une plaque de culture à 24 puits (approuvée par la FDA américaine et actuellement utilisée aux États-Unis) et un nouveau format simplifié In-Tube pas encore approuvé par la FDA américaine, mais disponible dans d’autres pays que les États-Unis). Au Canada, seul le test QFT-G In-Tube est offert. Ce dernier utilise des peptides de la cible antigénique sécrétés précocement de 6 kDa (ESAT-6), la protéine 10 du filtrat de culture (CFP-10) et une portion de TB7.7. Dans ce test, un millilitre (1 mL) de sang est versé dans chacun des trois tubes : un témoin négatif, un témoin positif qui renferme un agent mitogène et un tube qui contient les antigènes de la RD-1 spécifiques de M. tuberculosis CFP-10, ESAT 6 et TB7.7. Le plus tôt possible, soit dans les 16 heures suivant le prélèvement, les tubes sont incubés pendant 16 à 24 heures à 37 °C puis sont centrifugés. Le plasma est retiré et un dosage de l’IFN-y est effectué par une méthode immunoenzymatique (ELISA). Le plasma est stable jusqu’à 4 semaines à 4 °C ou peut être congelé à –20 °C pendant 3 mois. À l’aide du logiciel fourni avec la trousse commerciale, on utilise les résultats du dosage ELISA pour calculer la quantité d’IFN-y en unités internationales par millilitre. Après prise en compte des valeurs pour le témoin négatif, une valeur ≥ 0,35 UI/mL pour l’IFN-g est considérée positive.
T-SPOT.TB
Le T-SPOT.TB est un test diagnostique in vitro qui mesure la quantité d’IFN-g libérée après l’exposition des lymphocytes T à l’ESAT-6 et à la CFP-10. Ce test est offert en deux formats – une plaque contenant 96 puits (T-SPOT.TB 96) ou une bande de huit puits (T-SPOT.TB 8). Dans ce test, 8 mL de sang est recueilli dans des tubes de préparation cellulaire renfermant du citrate de sodium. Après avoir isolé et lavé des cellules mononucléées du sang périphérique (CMSP), on ajoute 2,5 x 105 cellules viables à chacun des quatre puits des microplaques : un témoin négatif (nul), un témoin positif et deux puits pour le sang testé du patient (contenant l’ESAT-6 et la CFP-10 respectivement). Le T-SPOT.TBcomporte une période d’incubation des CMSP avec des antigènes de M. tuberculosis et mesure le nombre de lymphocytes T produisant de l’IFN-γ à l’aide d’un test ELISPOT (enzyme linked immunospot). On interprète le résultat du test en comparant le nombre de spots produits dans les puits contenant le sang du patient avec celui dans les puits du témoin négatif et du témoin positif correspondants. C’est le nombre de spots produits dans le puits du témoin négatif qui détermine ce qui est considéré comme un résultat positif. Il convient de consulter la notice ou le site Web du fabricant pour obtenir plus d’information sur l’interprétation du test.
Utilisation des tests de libération d’interféron-γ dans divers groupes
Les indications précises pour l’utilisation et l’interprétation des résultats des TLIG n’ont pas encore été établies. Les sections qui suivent visent à fournir des conseils sur l’utilisation et l’interprétation de ces tests dans divers groupes et milieux cliniques.
(1) Tests en série
Très peu d’études ont été publiées sur les résultats des TLIG en série. Plusieurs études de petite envergure ont examiné les résultats de TLIG répétés chez les patients qui suivaient un traitement contre la TB active(4-9) ou l’ITL(10,11). Ces résultats sont contradictoires – dans certaines études, les réponses au TLIG ont augmenté(5,6); dans d’autres, elles ont diminué(4,7,8) ou aucun changement n’a été observé après le traitement(10,11). On ne peut donc tirer aucune conclusion claire de ces études longitudinales. En outre, l’effet du traitement ne pouvait être distingué de la variabilité biologique ou due au hasard. La seule étude publiée sur les TLIG en série chez des personnes non traitées mais exposées a été effectuée chez des travailleurs de la santé en Inde(12). Dans cette étude, des virages, des négativations et des variations non spécifiques sont survenus lors de tests en série au moyen de QuantiFERON-TB Gold In-Tube, comme c’est le cas avec le TCT. Pour interpréter de façon utile les résultats de TLIG répétés, d’autres études doivent être menées pour déterminer les seuils optimaux permettant de distinguer les infections nouvelles (c.-à-d. les virages) des variations non spécifiques.
Recommandation
On ne dispose pas de suffisamment de données provenant d’études publiées pour recommander la réalisation de TLIG en série dans les populations exposées à la tuberculose, comme les travailleurs de la santé ou les employés et détenus des centres correctionnels. Le dépistage sérié de l’ITL devrait continuer d’être effectué à l’aide du TCT, tel que recommandé dans les Normes canadiennes pour la lutte antituberculeuse(13).
(2) Diagnostic de l’ITL chez les enfants
Il est particulièrement difficile d’évaluer les nouveaux tests pour le diagnostic de l’ITL chez les enfants à cause de l’absence de norme de référence, même chez les patients atteints de la maladie active. De même, presque tous les cas diagnostiqués d’ITL sont traités parce qu’ils risquent davantage de développer la maladie. Les études effectuées jusqu’à maintenant chez les enfants ont porté sur des sujets souffrant de différents problèmes de santé qui ont subi différents tests à la tuberculine et TLIG(14-21). Dans deux études, provenant de pays où l’incidence de la TB est élevée, une proportion égale de sujets était positive au TCT et aux TLIG(14,17), alors que dans deux études, les TLIG donnaient plus fréquemment des résultats positifs(20,21). Dans une étude, la proportion de sujets positifs n’a pas été signalée(18), et dans trois études le TCT était plus souvent positif – différence qui n’a pas été expliquée dans deux études(16,19), mais qui a été associée au BCG dans la troisième(15). Dans quatre études, les résultats au QFT étaient indéterminés chez 32 %(18), 17 %(16) et 0 %(17,19) des sujets; ces différences dans la performance du test n’ont pas non plus été expliquées. Les méthodes utilisées et les résultats étant hétérogènes, on ne peut tirer aucune conclusion valable. On ne peut même pas dire si les TLIG sont équivalents, meilleurs ou pires que le TCT dans cette population. Pour le moment, la solution la plus prudente consiste donc à attendre la publication d’autres évaluations des TLIG chez les enfants, car c’est un domaine très actif de recherche.
Recommandation
L’utilisation des TLIG n’est pas recommandée chez les enfants, tant qu’on ne disposera pas de données publiées qui démontrent systématiquement l’utilité et l’exactitude de ces tests chez les enfants.
(3) Dépistage chez les immigrants
Dans des déclarations déjà publiées, la Société canadienne de thoracologie n’a pas recommandé d’effectuer un dépistage systématique ou de masse de l’ITL chez les nouveaux immigrants à l’aide du TCT(22). La grande majorité des cas diagnostiqués d’ITL courent un faible risque de développer la maladie, ce qui fait que cette stratégie de prévention de la TB est beaucoup moins rentable que d’autres stratégies, telles que la recherche des contacts(23). En outre, dans des rapports publiés sur des programmes de dépistage à grande échelle, l’impact général de ces programmes était faible parce qu’une grande partie des patients et des soignants ne suivaient pas les recommandations relatives au dépistage, au suivi et au traitement de l’ITL(23‑28). Selon les données limitées publiées sur l’utilisation pratique de ces tests dans le cadre de programmes de dépistage systématique, il semble que l’utilisation des nouveaux TLIG n’améliorera pas grandement l’efficience des programmes(29).
En revanche, parce que les personnes nées à l’étranger affichent un plus haut taux de prévalence de l’ITL, elles DEVRAIENT être ciblées pour le dépistage de l’ITL si elles souffrent de problèmes de santé qui accroissent le risque de réactivation de l’ITL(30,31), notamment les suivants(13) :
- infection à VIH
- transplantation (problèmes liés au traitement immunosuppresseur)
- silicose
- insuffisance rénale chronique nécessitant une hémodialyse
- carcinome de la tête et du cou
- infection tuberculeuse récente (≤ 2 ans)
- anomalies à la radiographie pulmonaire – maladie fibronodulaire ou granulome
- traitement par des glucocorticoïdes
- traitement par des inhibiteurs du facteur de nécrose tumorale (TNF)-alpha
- diabète sucré (tous les types)
- insuffisance pondérale (aux fins de la TB, indice de masse corporelle < 20 pour la plupart des personnes)
- usage de la cigarette
- enfants de moins de 15 ans qui ont vécu dans un pays où l’incidence de la TB est élevée et ont immigré au cours des 2 dernières années
- personnes âgées de 15 ans et plus qui ont vécu dans un pays où l’incidence de la TB est élevée, ont immigré au cours des 2 dernières années et ont soit vécu, soit été en contact avec un cas de TB ou courent un grand risque de développer une TB active.
Nota : Un pays est considéré comme présentant une incidence élevée de TB si le taux d’incidence de la TB pulmonaire à frottis positif estimé par l’Organisation mondiale de la santé est de 15/100 000 ou plus (moyenne sur 3 ans). Pour voir les taux actuels, prière de consulter : http://www.santepublique.gc.ca/tuberculose.
Recommandation
Le dépistage systématique ou de masse de l’ITL chez tous les immigrants – soit au moyen du TCT ou d’un TLIG – n’est PAS recommandé. On recommande cependant d’effectuer un dépistage ciblé de l’ITL après l’arrivée au Canada des personnes nées à l’étranger qui présentent des problèmes de santé pouvant accroître leur risque de réactivation de l’ITL. Il convient d’utiliser dans ces cas le TCT.
(4) Contacts d’un cas de tuberculose infectieuse active
Sept rapports ont été publiés comparant les TLIG au TCT dans le cadre de la recherche de contacts(32-38). Deux études ont évalué le QFT-G par rapport à une réaction au TCT de ≥ 10 mm comme résultat positif chez les contacts des cas de TB(33,35). Ces deux études semblent indiquer que les résultats du QFT-G étaient similaires à ceux du TCT chez les contacts non vaccinés par le BCG, mais qu’ils étaient davantage associés à une exposition que le TCT chez les contacts ayant reçu le BCG. Cinq études ont également comparé les tests ELISPOT et le TCT chez les contacts(32,34,36-38). Une a eu recours au Heaf Test(33) et les quatre autres ont fait appel au test de Mantoux, deux utilisant une induration de ≥ 5 mm(36,37) et deux une induration de ≥10mm(34,38) comme indication d’un résultat positif. En général le T-SPOT.TB était similaire au TCT chez les contacts, sa performance étant meilleure chez les personnes ayant reçu le BCG. Chez les non-vaccinés, les TLIG et le TCT semblaient donner les mêmes taux de positivité, bien qu’on ait observé des discordances. Chez les vaccinés, le nombre de résultats positifs dans le groupe faiblement exposé était beaucoup moins élevé avec les TLIG qu’avec le TCT. Cela concorde avec les résultats de nombreuses études qui montrent que les TLIG ont une plus grande spécificité.
Comme plusieurs études ont fait ressortir une discordance importante entre les résultats au TCT et aux TLIG (tant TCT+/TLIG- que l’inverse, TCT-/TLIG+) et comme on ne connaît pas les fondements biologiques de cette discordance, le recours aux TLIG devrait être dicté par le contexte clinique. Lorsque la probabilité d’infection avant le test est élevée, comme chez un contact étroit d’un cas actif de TB infectieuse, il importe de ne pas rater l’occasion d’identifier les personnes qui ont été infectées récemment. Dans ces constances, un TCT (ou le TCT et un TLIG) devrait être utilisé, et si l’un ou l’autre est positif, on devrait considérer que le contact souffre d’une ITL. Toutefois, dans le cas des contacts qui, avant le test, risquent peu d’avoir contracté une ITL et qui ne présentent aucun autre facteur de risque important de progression vers la maladie active s’ils sont infectés (prière de se reporter à la section précédente « Dépistage chez les immigrants » pour une description de ces facteurs de risque), un TLIG peut être combiné au TCT pour améliorer la spécificité du TCT. Lorsqu’il existe une raison connue pour qu’un contact obtienne un résultat faussement positif au TCT (p. ex. antécédents de vaccination par le BCG après la première année de vie), le résultat du TLIG peut être utilisé pour réduire la probabilité d’administrer un traitement de l’ITL à des personnes qui ont obtenu des résultats faussement positifs à des TCT.
Remarque concernant l’ordre d’administration des TCT et TLIG simultanés :
Lorsqu’un TCT et un TLIG doivent être effectués en même temps, il importe de tenir compte de l’ordre dans lequel ils seront réalisés. Bien qu’une étude menée chez les humains ait montré qu’un TCT antérieur n’influait pas sur les résultats subséquents d’un test ELISPOT(39), des études animales semblent indiquer que le TCT peut amplifier les résultats du dosage subséquent de l’IFN-γ (40,41). Vu qu’on dispose de peu de données sur la question, il est recommandé que, dans la mesure du possible, le sang soit prélevé pour le TLIG avant le TCT ou le même jour. On évitera ainsi tout effet potentiel de la sensibilisation à la PPD sur les mesures subséquentes de l’IFN-y.
Recommandations
1. Les TLIG peuvent être utilisés comme tests de confirmation d’un TCT positif chez les contacts qui, après évaluation de la durée et du degré de contact avec un cas contagieux de TB active, semblent présenter avant le test une faible probabilité d’avoir contracté récemment une ITL et qui ne possèdent aucun autre facteur de risque élevé ou accru de progression vers la maladie active s’ils sont infectés(13).
2. Dans le cas des contacts étroits ou des contacts qui présentent un risque élevé ou accru de progression vers la maladie active s’ils sont infectés, un TCT (ou un TCT de même qu’un TLIG) devrait être effectué, et si l’un ou l’autre de ces tests est positif, on devrait considérer que le contact souffre d’une ITL.
3. Si l’on utilise tant le TCT que le TLIG, il est recommandé de prélever le sang pour le TLIG avant l’administration du TCT ou le même jour.
(5) Sujets immunodéprimés
On ne dispose que de données publiées limitées sur l’utilisation des TLIG dans des populations immunodéprimées. Deux études ont examiné la sensibilité du test T-SPOT.TB dans cette population(42,43). Dans une étude, le T-SPOT.TBdétectait avec une grande sensibilité la TB active chez des Zambiens adultes infectés par le VIH et non infectés(42). Les résultats du T-SPOT.TB, comparativement à ceux du TCT semblaient également indiquer que ce premier test avait une plus grande sensibilité que le TCT chez les sujets positifs pour le VIH. Dans une étude récente comparant la performance du T-SPOT.TB par rapport à celle du TCT et au diagnostic posé par un comité de médecins experts (qui incluait une enquête épidémiologique sur la TB, une radiographie pulmonaire et un TCT en deux étapes chez des patients souffrant d’insuffisance rénale terminale qui étaient hémodialysés), le T-SPOT.TB était plus étroitement corrélé que le TCT aux facteurs de risque connus de TB, comme une maladie active antérieure et une radiographie pulmonaire anormale(43).
Dans une étude portant sur 590 personnes positives pour le VIH, le QFT-G In-Tube a été utilisé pour détecter l’ITL(44)– mais n’a pas été comparé avec le TCT. En général, 4,6 % des personnes positives pour le VIH ont obtenu un résultat positif au TLIG, 78 % présentaient des facteurs de risque d’ITL. Seulement 20 sujets (3,4 %) dans la population étudiée ont obtenu des résultats indéterminés, les taux étant supérieurs chez ceux dont le nombre de CD4 était < 100. Dans une deuxième étude(45), 318 patients hospitalisés ont subi un test QFT-G et un TCT. La concordance entre les résultats du QFT-G et du TCT était beaucoup plus faible chez les personnes ayant reçu le BCG. Le fait que le QFT-G ait donné un résultat indéterminé chez 68 personnes (21,4 %) était particulièrement préoccupant.
Recommandations
1. Chez une personne immunodéprimée, le TCT devrait être effectué en premier pour détecter l’ITL. Si le TCT est positif, on devrait considérer que la personne souffre d’une ITL.
2. Toutefois, comme on sait que le TCT peut donner des résultats faussement négatifs chez les sujets immunodéprimés, un clinicien peut effectuer un TLIG s’il soupçonne toujours la possibilité d’une ITL chez une personne immunodéprimée qui a obtenu un résultat négatif au TCT initial. Si le résultat au TLIG est positif, la personne peut être considérée comme un cas d’ITL. Si le résultat au TLIG est indéterminé, le test devrait être répété pour exclure toute erreur de laboratoire. Si le résultat au test répété est également indéterminé, le clinicien devrait soupçonner une anergie et s’appuyer sur les antécédents de la personne, les caractéristiques cliniques et tout autre résultat de laboratoire pour prendre une décision quant à la probabilité d’une ITL. Si l’on accepte comme positifs les résultats obtenus à l’un ou l’autre test (TCT ou TLIG), on pourra détecter avec une plus grande sensibilité l’ITL chez les sujets immunodéprimés, ce qui semblerait être un objectif souhaitable. Dans une méta-analyse portant sur cinq essais randomisés menés dans des pays où l’incidence de la TB est élevée, l’isoniazide n’a cependant apporté aucun bienfait aux adultes infectés par le VIH qui étaient négatifs au TCT. Le clinicien doit donc soupeser, d’une part, l’avantage potentiel d’identifier un plus grand nombre de personnes ayant obtenu des résultats positifs et, d’autre part, l’absence de données démontrant que le traitement à l’isoniazide apporte des bienfaits à ces personnes.
(6) Personnes « à faible risque » ayant obtenu un résultat positif au TCT
Les adultes (personnes > 14 ans) immunocompétents positifs au TCT qui courent un risque relativement faible d’infection tuberculeuse et de progression vers la maladie active s’ils sont infectés peuvent être adressés à un médecin ou à une clinique spécialisée en prévention de la TB où la possibilité d’un traitement de l’ITL sera examinée. Ce groupe comprend (i) les personnes qui ont obtenu un résultat positif au TCT lors d’un dépistage durant leurs études postsecondaires, mais qui n’ont aucun antécédent de contact avec la TB, aucun problème de santé susceptible d’accroître le risque de réactivation, et dont la radiographie pulmonaire est normale, et (ii) les immigrants issus de pays où l’incidence de la TB est élevée qui ont obtenu un résultat positif au TCT (voir la section « Dépistage chez les immigrants » pour une définition des pays où l’incidence de la TB est élevée) mais qui n’ont aucun problème de santé susceptible d’accroître le risque de réactivation et dont la radiographie pulmonaire est normale. Leurs TCT pourraient être faussement positifs à cause du vaccin BCG ou d’une exposition à des mycobactéries non tuberculeuses. Un TLIG peut être effectué pour diagnostiquer avec une plus grande spécificité l’ITL et réduire la probabilité de traiter pour une ITL des personnes dont les résultats au TCT sont faussement positifs.
Recommandation
Un TLIG peut être effectué chez des adultes immunocompétents positifs au TCT qui courent un risque relativement faible d’infection tuberculeuse et de progression vers la maladie active s’ils sont infectés. Un traitement de l’ITL peut être envisagé si les personnes ont obtenu un résultat positif à un TLIG.
(7) Diagnostic de la TB active
Il importe d’évaluer les TLIG chez les patients atteints de TB active pour deux raisons : (i) pour utiliser la TB active comme critère de substitution pour l’ITL (la plupart des études se classeraient dans cette catégorie); et (ii) pour déterminer si les TLIG faciliteraient le diagnostic de la TB active en soi. Ces deux approches comportent des limites. La première raison repose sur l’argument selon lequel toute personne qui présente une TB active doit souffrir d’une infection tuberculeuse – mais non latente. Du point de vue immunologique, une TB active se déclare lorsque la réponse immunitaire de l’hôte ne parvient pas à contenir l’infection latente; il est donc possible que la sensibilité avec laquelle les TLIG détectent la maladie active ne reflète pas leur sensibilité à l’égard de l’ITL. La deuxième raison s’appuie sur l’hypothèse qu’une preuve d’une infection tuberculeuse (c.-à.-d. un résultat positif à un TLIG) est utile pour diagnostiquer la maladie active. Ce n’est pas sûr, parce que les TLIG, comme le TCT, ne permettent pas de distinguer l’ITL de la maladie active et que la plupart des cas de TB active surviennent dans des populations où la prévalence de l’ITL est élevée.
Certains ont laissé entendre que les TLIG pourraient être utiles pour écarter la possibilité d’une TB active dans certaines populations (p. ex. enfants, sujets immunodéprimés) lorsque le diagnostic microbiologique est difficile à établir. Autrement dit, si un TLIG positif peut ne pas toujours indiquer la présence de la maladie active, un TLIG négatif peut révéler l’absence d’infection tuberculeuse et, partant, de la maladie. Pour que les TLIG puissent aider à exclure la maladie active, ils doivent être très sensibles chez les patients souffrant d’une TB active. Comme des études l’ont déjà montré(46,47), la sensibilité des TLIG pour la détection de la TB active est comparable à celle du TCT et, par extension, les deux tests ont une sensibilité sous-optimale chez les patients atteints d’une TB active. Cette observation rend compte de la diminution connue de la réponse immunitaire chez les cas de TB active au moment du diagnostic, en particulier si la maladie est plus avancée, si les patients souffrent de malnutrition ou sont âgés(48,49). Ainsi, un TLIG ou un TCT négatif ne peut à lui seul exclure un diagnostic de TB active2.
Recommandation
Les TLIG ne sont pas recommandés pour le diagnostic de la TB active. Les cliniciens qui soignent des patients soupçonnés d’être atteints d’une TB active devraient suivre dans leur pratique les Normes canadiennes pour la lutte antituberculeuse(13) et les Standards internationaux pour le traitement de la TB(50), et utiliser l’examen microscopique et la culture des expectorations comme méthodes d’investigation chez les patients soupçonnés d’être atteints d’une TB active.
Interprétation des résultats chez les personnes qui ont subi et un TCT et un TLIG
Bien que les recommandations actuelles relativement à l’utilisation des TLIG soient limitées, comme nous l’avons vu, un TLIG peut avoir été effectué dans des situations non prévues dans les recommandations ci-dessus. Si un TLIG de même qu’un TCT ont été effectués et si le clinicien ne sait pas comment interpréter les résultats, voici la marche à suivre recommandée :
Risque de développer la maladie si la personne est infectée par M. tuberculosis |
||||||
Élevé |
Faible |
|||||
TLIG positif |
TLIG négatif |
TLIG indéterminé |
TLIG positif |
TLIG négatif |
TLIG indéterminé |
|
TCT positif |
Envisager de traiter l’ITL |
Envisager de traiter l’ITL |
Le traitement de l’ITL n’est pas nécessaire |
Répéter le TLIG ou fonder l’interprétation sur le résultat au TCT |
||
TCT négatif |
Envisager de traiter l’ITL |
Le traitement de l’ITL n’est pas nécessaire si le sujet est immunocompétent |
Répéter le TLIG ou fonder l’interprétation sur le résultat au TCT |
Consulter un spécialiste de la TB |
Le traitement de l’ITL n’est pas nécessaire |
Déclaration de non-responsabilité : ce tableau est fourni dans le cadre de la présente déclaration et ne doit PAS être considéré comme un guide général pour la prise en charge de l’ITL. Pour des recommandations complètes sur la prise en charge de l’ITL, le lecteur est prié de consulter les chapitres 4 et 6 des Normes canadiennes pour la lutte antituberculeuse(13).
Rentabilité des tests de libération d’interféron-γ
Pour le moment, seules quelques études comparatives ont été publiées sur la rentabilité des TLIG et du TCT(51-53). Des analyses disponibles ont montré que si les coûts unitaires des nouveaux TLIG sont beaucoup plus élevés que ceux du TCT, ces nouveaux tests ne seront alors rentables que dans les situations où leur spécificité est beaucoup plus grande. Le prix de détail des fabricants pour le QFT-G In-Tube et pour le T-SPOT.TB variera selon le milieu clinique et le volume de tests commandé. À cela il faut ajouter 22 $ par test QFT-G In-Tube pour les coûts accessoires liés au prélèvement de sang, au transport des échantillons au laboratoire ainsi qu’à l’exécution du test et à la transmission des résultats par le technicien; ces estimations se fondent sur des données relatives à un programme qui ont récemment été publiées(29). Vu qu’il faut plus de temps au technicien pour effectuer le test T-SPOT.TB que le test QFT-G In-Tube, les coûts accessoires associés au T-SPOT.TB sont légèrement plus élevés. En revanche, le coût total du TCT s’élève à seulement 14 $ dans les services de santé publique(31,51,54,55), bien qu’il puisse être plus élevé dans les centres de soins primaires s’ils ne sont pas couverts par le régime provincial ou territorial d’assurance‑maladie. Le QFT-G In-Tube et le T-SPOT.TB seront donc rentables, par rapport au TCT, seulement dans les populations comptant une forte proportion de membres qui ont reçu le BCG après leur première année de vie(56).
Recommandation
Comme leurs coûts unitaires et leurs coûts de main-d’œuvre sont plus élevés, les nouveaux TLIG seront moins rentables que le TCT dans la plupart des groupes et des milieux cliniques. La stratégie la plus rentable dans les populations à faible risque qui ont reçu le BCG après leur première année de vie consiste à effectuer un TCT initial suivi d’un QFT-G In-Tube si les résultats au TCT sont positifs.
Conclusions
Pour le diagnostic de l’ITL, les TLIG offrent un certain nombre d’avantages potentiels par rapport au TCT. Les tests actuellement vendus dans le commerce qui combinent des antigènes de la RD-1, tels qu’ESAT-6 et CFP-10, ont une excellente spécificité, donnant un minimum de résultats faussement positifs dus au BCG et à une sensibilisation par certaines MNT. Ils offrent également l’avantage de pouvoir être effectués en une seule visite et ne présentent aucun risque de réaction cutanée grave.
Un des principaux avantages du TCT réside dans le fait que les résultats ont été validés par un suivi effectué dans d’importantes cohortes en vue de déterminer l’incidence subséquente de la TB active. À partir de ces études, on peut prédire avec une certaine exactitude le risque de maladie chez une personne présentant certains facteurs de risque et une réaction donnée au TCT. Jusqu’à présent, cependant, aucun des TLIG n’a été validé ainsi de façon prospective.
Le matériel initial et les coûts accessoires des TLIG sont plus importants que ceux du TCT, et les analyses de rentabilité ont montré qu’à cause de ces coûts, ces tests seront moins rentables dans la plupart des populations. La survenue de nombreuses réactions qui ne concordent pas avec les réactions tuberculiniques suscitent des préoccupations, parce que ce phénomène de discordance demeure en grande partie inexpliqué. Il sera donc difficile de prendre en charge adéquatement les personnes positives à un TLIG mais négatives à un TCT.
Il importe de noter que les TLIG, comme le TCT, ne sont pas recommandés pour le diagnostic de la TB active. Les indications précises pour l’utilisation et l’interprétation des résultats, notamment en ce qui concerne le risque futur de TB active n’ont pas encore été établies. D’autres recherches doivent être menées pour définir la mesure dans laquelle ces tests permettent de prédire le développement de la maladie active, pour démontrer leur reproductibilité et évaluer les répercussions sanitaires et économiques de leur utilisation. D’autres études, en particulier des études prospectives, où le TCT et des TLIG sont effectués simultanément seraient grandement utiles.
Remerciements
Les auteurs remercient les membres du Comité canadien de lutte antituberculeuse et les responsables des programmes provinciaux et territoriaux de lutte antituberculeuse pour leur contribution et leur participation au Système canadien de déclaration des cas de tuberculose :
Alberta Health and Wellness, Disease Control and Prevention Branch
Division of Tuberculosis Control, British Columbia Centre for Disease Control
Programme de lutte antituberculeuse du Manitoba
Ministère de la Santé et du Mieux-Être, Nouveau‑Brunswick
Department of Health and Community Service, Terre-Neuve-et-Labrador
Department of Health and Social Services, Government of Northwest Territories
Office of the Chief Medical Officer of Health, Nova Scotia Department of Health
Department of Health & Social Services, Government of Nunavut
Unité de prévention des maladies par vaccination et de lutte contre la tuberculose, ministère de la Santé et des Soins de longue durée de l’Ontario
Department of Health and Social Services, Île-du-Prince-Édouard
Direction de la protection de la santé publique, ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec
Tuberculosis Control Program, Saskatchewan Health
Department of Health and Social Services, Yukon
Association pour la microbiologie médicale et l’infectiologie Canada
Association pulmonaire du Canada
Réseau des laboratoires de santé publique du Canada
Société canadienne de thoracologie
Citoyenneté et Immigration Canada
Service correctionnel Canada
Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits, Santé Canada
Laboratoire national de microbiologie, Agence de la santé publique du Canada
Halte à la Tuberculose Canada
Section de la lutte antituberculeuse, Agence de la santé publique du Canada
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†Membres : Dr R. Long (président); Dre H. Akwar, Dr A. Al-Azem, Mme C. Case, Dr E. Ellis (secrétaire exécutif), Dr K. Elwood, Dr B. Graham, Mme C. Hemsley, Dr V. Hoeppner, Dr A. Kabani, Dr M. Lem, Mme J. Marshall, Dre P. Orr, Mme E. Randell, Dr P. Rivest, Mme S. Sarjesh, Dre L. Scott, Dre F. Stratton, Dr L. Sweet, Dre W. Wobeser et Mme J. Wolfe.
††La présente déclaration a été rédigée par les Drs M. Gardam, D. Kunimoto, R. Long, D. Menzies et M. Pai (le travail de secrétariat ayant été assuré par le Dr R. Stirling). Elle a été approuvée par le Comité canadien de lutte antituberculeuse.
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