Discours par la ministre Joly concernant la motion sur « Les actions du Canada pour promouvoir la paix au Moyen-Orient. »

Discours

Le 18 mars 2024 – Ottawa (Ontario)

Sous réserve de modifications. Ce discours a été traduit en conformité avec la Politique sur les langues officielles du gouvernement du Canada et révisé aux fins d’affichage et de distribution conformément à sa politique sur les communications.

Monsieur le Président, je me réjouis de la tenue de ce débat en cette période charnière pour la région et le monde.

Je me lève en cette chambre alors que je reviens tout juste d'une visite au Moyen-Orient, où j'ai rencontré mes homologues de l'Arabie saoudite, du Koweït, des Émirats arabes unis, d'Israël et de l'Autorité palestinienne.

Bien entendu, la guerre actuelle entre Israël et le Hamas et la voie vers la paix étaient au cœur de nos préoccupations.

Ces conversations n'ont pas toujours été faciles. Nous n'avons pas tous la même perspective, mais nous partageons tous l'objectif de la paix et de la stabilité dans la région. Nous devons donc faire preuve de pragmatisme et trouver ensemble un moyen d'avancer.

Alors que nous étions en Israël, nous avons visité Yad Vashem, le mémorial dédié aux victimes de l'Holocauste, l'un des chapitres les plus sombres de l'histoire mondiale.

Monsieur le Président, il est important de se rappeler que la persécution du peuple juif n'a ni commencé ni pris fin avec l'Holocauste.

Avant la création d'Israël, les communautés juives du monde entier luttaient pour trouver un endroit où se sentir chez soi. Un endroit où elles pouvaient se sentir en sécurité.

Un endroit où elles pourraient vivre en sécurité. Un endroit où leurs droits humains seraient respectés. Un endroit où elles pourraient vivre dans la dignité, fonder une famille et construire leur avenir sans crainte.  

Pour le peuple juif, Israël est cette maison.

Le 7 octobre dernier, les Israéliens ont vu leur sentiment de sécurité et de confiance envers leurs institutions ébranlée. Et pour plusieurs, ce fût tout simplement brisé.

L'attaque terroriste du Hamas a été la plus meurtrière contre Israël depuis sa création en 1948. 1 200 personnes ont été tuées par le Hamas et plus de 240 ont été enlevées.

À ce jour, environ 134 d'entre elles sont toujours en captivité à Gaza. Ce sont 134 familles qui attendent désespérément leur retour afin de pouvoir les serrer dans leurs bras.

Monsieur le Président, il est impossible de trouver une seule personne en Israël qui ne connaisse pas de près ou de loin quelqu'un qui a été tué ou enlevé lors de ce jour fatidique. Et croyez-moi, on peut sentir le poids de ce traumatisme collectif partout à travers le pays.

C’est donc sans équivoque que nous condamnons à nouveau le Hamas pour ces attaques terroristes du 7 octobre dernier contre Israël.

Nous avons également voyagé vers le sud jusqu'au kibboutz Kfar Aza, l'une des premières communautés à avoir été attaquées par le Hamas le 7 octobre.

J'y ai rencontré Ayelet, la mère de Netta, un Canadien qui a été tué en protégeant son fiancé. Ayelet nous a fait visiter son quartier et nous a raconté les massacres atroces du 7 octobre.

Elle a décrit le chaos découlant de l'incompréhension de ce qui se passait. Les amis et les familles couraient à perdre haleine d'une maison à l'autre, passant devant celles qui avaient été incendiées, à la recherche de leurs proches.

Mais dans de nombreux cas, il était trop tard. Ils avaient déjà été tués.

Et tandis que nous étions témoins des horreurs du 7 octobre, nous pouvions entendre et ressentir le frissonnement des bombes tombant sur Gaza à proximité, suivis par de nombreux coups de feu.

Ce moment, la dualité de la tragédie qui s'abat sur les peuples israélien et palestinien, était profond.

Ce moment restera à jamais gravé dans ma mémoire.

Depuis le 7 octobre, plus de 31 000 Palestiniens ont été tués à Gaza. Environ 70 % d'entre eux sont des femmes et des enfants.

1,7 million de Palestiniens ont été déplacés et un nombre encore plus important est menacé par la famine, la maladie et la mort.

J'ai rencontré des travailleurs humanitaires qui ont décrit la crise à Gaza comme la pire qu’ils n’aient jamais vue au cours de leur carrière.

Ils ont vu des mères subir des césariennes sans anesthésie. Le désespoir des enfants qui leur demandent de la nourriture alors qu’ils passent devant eux en voiture. Et le désespoir des enfants qui sont maintenant orphelins.

Monsieur le Président, on peut dire que c’est maintenant chaque arbre généalogique palestinien qui a été coupé par la violence depuis le 7 octobre. C'est ce qui ressort clairement de nos conversations à Ramallah.

Au milieu de cette tragédie, les Palestiniens de Cisjordanie sont confrontés, de leur côté, à des actes de violence de plus en plus fréquents et intenses de la part de colons extrémistes.

Ces actes violents à eux seuls ont coûté la vie à plus de 300 Palestiniens et ils ont forcé le déplacement de plus de 1 000 autres depuis le 7 octobre.

Nous avons parlé à une famille qui a été forcée de quitter sa maison par des colons israéliens et qui s'est vu interdire l'accès à sa ferme, qui est nécessaire à sa survie.

Monsieur le Président, nous sommes fermement opposés à cette violence et nous sanctionnerons ceux qui en sont responsables. Les Palestiniens continuent de lutter pour leur autodétermination et la création d'un État palestinien. Un État où ils pourraient se sentir en sécurité. Un État où ils pourraient vivre en sécurité. Un État où leurs droits humains seraient respectés. Un État où ils pourraient vivre dans la dignité, fonder une famille et construire leur avenir.  

Les Palestiniens luttent pour un foyer qui leur appartient.

Monsieur le Président, cette crise a révélé les fissures et aggravé les blessures de la société des deux côtés.

Elle est alimentée par la déshumanisation.

Et lorsque nous ne voyons pas l'humanité des autres, l'injustice retombe sur les épaules d'innocents.

Cette douleur s'est étendue à toute la région, comme elle l’a été ici aussi.

Au Canada, nous pleurons la perte de 8 Canadiens tués le 7 octobre. D'innombrables familles canadiennes pleurent la perte de leurs proches en Israël, à Gaza et en Cisjordanie.

Au Canada et dans le monde entier, nous avons assisté à une forte montée de l'antisémitisme et de l'islamophobie.

Les communautés musulmanes et juives sont la cible d'attaques physiques et verbales.

Elles ont été harcelées dans la rue et en ligne, interdites d'accès à leurs lieux de culte et mises en danger dans leurs écoles.

Ce n'est pas la promesse de notre pays. 

Notre gouvernement continuera à dénoncer et à condamner fermement toutes les formes de discrimination et de racisme, qui n'ont pas leur place au Canada.

Au-delà de la montée de l'antisémitisme et de l'islamophobie, ce conflit a polarisé notre société et met à l'épreuve la force de notre cohésion sociale.

Nous sommes tous pris dans un engrenage de dévastation et subissons des pressions pour choisir notre camp.

Nous sommes forcés de croire que si nous prenons la défense d'un camp, nous sommes certainement contre l'autre.

Pour nous, ce n'est pas aussi simple.

Monsieur le Président, compte tenu de l'état de la situation, je doute qu'il y ait aucun vainqueur.

Il n'y aura que des victimes et des survivants qui pleureront à jamais leurs pertes.

Avec le niveau de destruction actuel dont nous avons été témoins, il faudra des années pour tout reconstruire.

La reconstruction de Gaza nécessitera notre aide. Le Canada sera là.

Le Canada sera là pour aider, particulièrement en ce qui a trait aux infrastructures de santé et des hôpitaux pour enfants. 

Il faudra des décennies, voire des générations, pour faire émerger et traiter les conséquences du traumatisme vécu autant par les Israéliens que par les Palestiniens.

C'est pourquoi, dans cette tragédie, je prendrai toujours le parti de la dignité humaine et de la protection des civils israéliens et palestiniens.

Nous le devons aux Palestiniens et Israéliens qui ont été abandonnés pendant des décennies parce qu'aucune solution durable n'a été trouvée à ce conflit.

Au-delà de cet échec, les terroristes et les voix extrémistes se font entendre sur toutes les tribunes et ils sapent l'avenir des Israéliens et des Palestiniens.

Et c'est sans mentionner les répercussions plus larges sur le Moyen-Orient. 

Nous n’avons pas le choix. Nous devons faire mieux.

Au Canada, notre position repose sur trois principes.

  1. le droit d'Israël d'exister et, par extension, de se défendre, conformément au droit humanitaire;
  2. la protection des civils; et
  3. le droit à l'autodétermination du peuple palestinien.

Nous reconnaissons pleinement que ces principes sont actuellement en tension les uns avec les autres, mais nous devons maintenir notre engagement envers chacun d'entre eux.

La violence doit cesser – un cessez-le-feu humanitaire immédiat est nécessaire de toute urgence. Et ce cessez-le-feu ne peut être unilatéral. Le Hamas doit déposer les armes et libérer immédiatement tous les otages.

Le besoin d'aide humanitaire à Gaza n'a jamais été aussi grand. Une aide humanitaire rapide, sûre et sans entrave doit être apportée aux civils, dès maintenant.

C'est pourquoi le Canada participera par tous les moyens à cette aide.

Compte tenu de l'urgence de la situation, nous avons repris le financement de l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), tout en soutenant les efforts de réforme de l'organisation. 

Nous contribuerons au corridor maritime humanitaire. Nous soutiendrons les largages de vivres par voie aérienne.

Nous reconnaissons que cela ne remplacera pas le besoin urgent d'un meilleur accès par voie terrestre, et nous continuerons à faire pression en ce sens. 

Nous sommes gravement préoccupés par le projet israélien d'offensive militaire terrestre à Rafah. Environ 1,5 million de Palestiniens se sont réfugiés dans la région, y compris un grand nombre de nos citoyens et leurs familles.

Monsieur le Président, ils n'ont nulle part où aller.

Nous avons clairement fait savoir au gouvernement israélien que nous lui demandons instamment de ne pas s'engager dans cette voie.

En ce qui concerne la Cour internationale de justice, nous reconnaissons pleinement que les mesures provisoires de la Cour sont contraignantes pour les deux parties.

La Cour a été claire : Israël doit assurer la fourniture des services de base, de l'aide humanitaire essentielle et doit protéger les civils.

Monsieur le Président, en ce qui concerne les exportations de marchandises contrôlées vers Israël, j’aimerais réitérer que le Canada dispose d'un régime de permis d'exportation très strict, dans le cadre duquel chaque demande est examinée au cas par cas.

Depuis le 7 octobre, nous n'avons approuvé que des permis pour des marchandises non létales.

Et compte tenu de l'évolution rapide de la situation sur le terrain, nous n'avons approuvé aucun permis depuis le 8 janvier.

Monsieur le Président, la seule façon de parvenir à une paix et une sécurité durable pour les Israéliens et les Palestiniens est une solution politique négociée.

Et je crois que le Canada a un rôle à jouer.

Notre héritage diplomatique est celui de Lester B. Pearson, Pierre Elliott Trudeau, Jean Chrétien et de Brian Mulroney. Celui du maintien de la paix et de la création de ponts pour favoriser les pourparlers.

Aujourd'hui, nous avons la responsabilité de bâtir sur cette tradition.

Le maintien de l’engagement du Canada envers une solution à deux États demeure, y compris la création d'un État palestinien, où Palestiniens et Israéliens vivent côte à côte dans la paix, la sécurité et la dignité.

La sécurité à long terme d'Israël, la normalisation des relations dans le monde arabe et la création d'un État palestinien ne peuvent être considérées séparément ou en opposition.

Elles sont indissociables. Nous devons le reconnaître et agir en conséquence.

Nous nous engageons à être pragmatiques et à jouer notre rôle.

Merci, Monsieur le Président.

Personnes-ressources

Isabella Orozco-Madison
Attachée de presse
Cabinet de la ministre des Affaires étrangères
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