Confidences de porteurs : épisode 6

Stanley G. Grizzle a travaillé comme porteur du Chemin de fer Canadien Pacifique pendant vingt ans. Ce grand militant a aussi travaillé comme fonctionnaire et juge de la citoyenneté. Passionné d’histoire, il n’a pas épargné les efforts pour documenter et préserver l’histoire des Noirs au Canada et ailleurs.

Sa collection, maintenant conservée à Bibliothèque et Archives Canada, a donné le ton à cette série. Dans le dernier épisode de « Confidences de porteurs », nous explorons comment les avancées syndicales ont pavé la voie vers un avenir plus prometteur pour les communautés noires au Canada. Cette lutte pour la reconnaissance des droits fondamentaux a joué un rôle clé dans l’édification d’un Canada plus fort et progressiste pour toutes et tous. (Épisode 6)

Durée : 1:01:15

Taille du fichier : 84.1 Mo Téléchargez MP3

Date de publication : 10 juillet 2025

Animateur : Richard Provencher, Chef relations medias, Direction générale des Communications et politiques

Avec les voix de : Helen Williams-Bailey, Aurelius Leon Bennett, Raymond Coker, Frank Collins, Melvin Crump, Oliver Charles Davis, Harold Osburn Eastman, Harold James Fowler, Charles Allen Milton Hog, Leonard Oscar Johnston, Raymond Lewis, Ivy Lawrence Maynier, Joseph Morris Sealy, and William C. Kingfish Wright

Invitées : Cheryl Foggo, Dr. Cecil Foster, Dr. Steven High, Dr. Saje Mathieu, Dr. Dorothy Williams, and Judith Williams-Graham

Pour le doublage français dans ce balado : Roldson Dieudonné, Gérard-Hubert Étienne, Gbidi Coco Alfred, Lerntz Joseph, Euphrasie Mujawamungu, Frédéric Pierre et Christelle Tchako Womassom

Biographies des narrateurs

Les intervieweurs

Stanley G. Grizzle, aîné d’une fratrie de sept enfants, naît à Toronto en 1918. Ses parents, ayant tous deux immigrés de la Jamaïque en 1911, travaillent dans le secteur des services – sa mère comme domestique et son père comme chef cuisinier pour la Compagnie du Grand Tronc de chemin de fer du Canada. En 1940, la pauvreté et le manque de débouchés conduisent M. Grizzle au Chemin de fer Canadien Pacifique, où il entreprend une carrière de porteur de voitures-lits qui s’échelonnera sur 20 ans. En 1942, il est appelé à servir par le gouvernement canadien et obtient le statut de caporal lors de son affectation comme assistant médical en Hollande. En 1962, M. Grizzle quitte le Chemin de fer Canadien Pacifique et devient le premier Noir canadien employé par le ministère du Travail de l’Ontario. Il se présente aux élections de la Fédération du Commonwealth coopératif, sans succès, avant d’être nommé juge à la Cour de la citoyenneté canadienne par le premier ministre Pierre Elliott Trudeau, en 1978. Militant dévoué, M. Grizzle fait campagne sans relâche pour la réforme des politiques canadiennes en matière de travail, d’immigration et de droits de la personne. Historien passionné, il se consacre aussi à la documentation et à la préservation de l’histoire des Noirs au Canada. Ses archives sont conservées à Bibliothèque et Archives Canada.

Les narrateurs / les narratrices

Helen Williams-Bailey est née en 1919 sur une ferme de la Saskatchewan, à environ 50 kilomètres de North Battleford. Elle a quatre frères (Tom, Roy, Lee et Carl). Peu après son déménagement à Winnipeg, en 1942, elle s’implique dans les auxiliaires féminines de la Fraternité des porteurs de wagons-dortoirs pour appuyer ses frères Tom et Roy, qui travaillent comme porteurs. Elle est la première présidente des auxiliaires, occupant ce rôle jusqu’à son mariage avec un porteur du Canadien National en 1944. (Source : 417401 [partie 1]; 417400 [partie 2])

Aurelius Leon Bennett naît à Memphis, dans le Tennessee, en 1925. Fuyant la violence raciale et la discrimination, il accepte un emploi au Chemin de fer Canadien Pacifique en 1944. D’abord basé à Toronto, il est ensuite muté à Winnipeg, où il travaille comme porteur de voitures-lits jusqu’à sa retraite, en 1986. Au cours de sa carrière, M. Bennett est secrétaire-trésorier de la division de Winnipeg de la Fraternité des porteurs de wagons-dortoirs. (Source : 417400)

Raymond Coker était un chimiste industriel également doué pour la musique. Le racisme de l’époque l’empêchant de trouver un emploi stable dans l’une ou l’autre de ces disciplines, il se tourne vers la section de Toronto du Canadien Pacifique. Il y travaille comme porteur de voitures-lits et de voitures-buffet jusqu’à ce que la modification de la convention collective, rendue possible grâce à l’adoption de la Loi canadienne sur les justes méthodes d’emploi (1951), l’autorise à devenir chef de train. (Source : 417381)

Frank Collins est né à Vancouver en 1915. Il devient porteur de voitures-lits à la division de Vancouver du Canadien Pacifique en 1933 et demeure en poste jusqu’à sa démission en 1956. En collaboration avec Ernie Lawrence, il s’emploie à organiser la section de Vancouver de la Fraternité des porteurs de wagons-dortoirs à partir de 1939. La section obtient son accréditation en 1944 et signe sa première convention collective en 1945. Lui et Lawrence réussissent à convaincre 96 % des porteurs de la ville à se joindre au syndicat, malgré les risques que comporte l’adhésion. (Source : 417402)

Melvin Crump naît à Edmonton, en 1916, de parents homesteaders qui avaient immigré d’Oklahoma à Keystone, en Alberta, en 1911. Peu intéressé par l’agriculture, il devient porteur de voitures-lits pour le Chemin de fer Canadien Pacifique en 1936, au plus fort de la Grande Dépression. Il travaille à la division de Calgary jusqu’en 1954, avant d’être nommé président du comité de sécurité de la Fraternité des porteurs de wagons-dortoirs. (Source : 417403)

Oliver Charles Davis naît en 1917. Il devient porteur pour le Chemin de fer Canadien Pacifique en 1939, juste avant le début de la Deuxième Guerre mondiale. (Source : 417387)

Harold Osburn Eastman naît à la Barbade, en 1922. Il vient au Canada en 1942 pour s’engager dans l’armée canadienne, mais une condition médicale l’empêche de servir. Il travaille chez Canadian Tube and Steel jusqu’à son embauche comme porteur de voitures-lits par la division de Montréal du Chemin de fer Canadien Pacifique, en 1944. Lorsque VIA Rail reprend l’exploitation du Chemin de fer Canadien Pacifique et de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada en 1978, il est promu gestionnaire des voitures-restaurants. M. Eastman prend sa retraite en 1984, après quarante années de service. (Source : 417405)

Harold James Fowler naît dans le canton de Dover, dans le comté de Kent, à environ 10 kilomètres de la ville de Chatham. Son premier trajet comme porteur de voitures-lits pour le Chemin de fer Canadien Pacifique, en juin 1939, le mène de Toronto à Vancouver. Membre fondateur de la Fraternité des porteurs de wagons-dortoirs, M. Fowler en préside le comité des divertissements pendant quelque temps. Dans le train, il se fait un point d’honneur de soutenir et de conseiller ses confrères. Souffrant d’arthrite lombaire, M. Fowler est contraint de prendre sa retraite en 1976, mais il aura accumulé suffisamment d’années de service pour toucher une pleine pension. (Source : 417393)

Charles Allen Milton Hog naît à Montréal, en 1921. À l’âge de trois ans, il quitte le Canada avec sa famille pour la Jamaïque natale de ses parents. En quête d’aventure, M. Hog revient au Canada en 1946. L’année suivante, il devient porteur de voitureslits à la section de Montréal du Chemin de fer Canadien Pacifique et il passe les dixhuit années qui suivent à sillonner les voies ferrées. Inspiré par les efforts du People’s National Party de la Jamaïque pour syndicaliser les ouvriers agricoles de canne à sucre, il se rallie à la Fraternité des porteurs de wagons-dortoirs de la section de Montréal, dès ses balbutiements. Membre de son comité local des griefs, il prodigue régulièrement des conseils à Arthur Robinson Blanchette, qui voit aux affaires de la section canadienne de la Fraternité des porteurs de wagons-dortoirs et qui rend directement compte à A. Philip Randolph, organisateur et premier président du pendant américain de l’organisation. M. Hog représente aussi la Fraternité des porteurs de wagons-dortoirs à la Fédération provinciale du travail du Québec. Plus tard, il milite activement en faveur des droits de l’homme en tant que membre fondateur de la Negro Citizenship Association à Montréal. (Source : 417405)

Leonard Oscar Johnston est né à Toronto en 1918. Comme d’autres hommes noirs, il voit ses possibilités d’emploi très limitées à cause du racisme. Il devient donc porteur de voitures-lits à la section torontoise du Canadien Pacifique en 1940. Il doit mettre fin à sa carrière après 37 ans à cause des maux de dos chroniques provoqués par son travail. Heureusement, il parvient à recevoir une pension d’invalidité, bien que celle-ci soit très réduite. Tout au long de sa carrière, Leonard Oscar Johnston est un syndiqué de la base de la Fraternité des porteurs de wagons-dortoirs, mais son adhésion au Parti communiste du Canada complique la situation. Le syndicat n’a pas confiance en lui et se dissocie de ses actions. La vision du monde de Johnston est fondée à la fois sur l’idéologie et sur ses expériences, qui l’incitent à inscrire l’exploitation des travailleurs dans le contexte de la lutte des classes et des races. (Source : 417394 [partie 1]; 417396 [partie 2])

Raymond Lewis naît à Hamilton, en Ontario, en 1910. Il est porteur de voitures-lits pour le Chemin de fer Canadien Pacifique à la division de Toronto entre 1930 et 1952. Il est aussi président de la Porters’ Mutual Benefit Association avant la création de la Fraternité des porteurs de wagons-dortoirs. M. Lewis est aussi un coureur exceptionnel. Après que le Canadien Pacifique lui ait refusé un congé, il renonce à un mois de salaire pour participer aux essais olympiques canadiens en 1932 et réussit à se tailler une place au sein de l’équipe. Il devient alors le premier athlète noir né au Canada à remporter une médaille olympique – une médaille de bronze pour sa performance au relais 4 x 400 mètres. (Source : 417395)

Ivy Lawrence Maynier naît de parents guyanais à Montréal, en 1921. Son père, Alexander Lawrence, étudie l’ingénierie et connaît une carrière longue et distinguée comme porteur de voitures-lits pour le Chemin de fer Canadien Pacifique. Il est aussi président et vice-président de la division montréalaise de la Fraternité des porteurs de wagons-dortoirs. Maintes fois boursière, Mme Maynier obtient son diplôme de l’Université McGill. Elle fait ensuite son droit à l’Université de Toronto et devient la première femme noire canadienne à réussir le programme. Brimée dans sa carrière au Canada par le racisme à l’égard des Noirs, elle devient membre du Inns of Court à Londres, puis est appelée au barreau de l’Angleterre en 1947. Après cinq ans au Service de renseignements des États-Unis à Paris, Mme Maynier s’établit à Trinité-et-Tobago. Là-bas, elle instaure des programmes d’éducation aux adultes, en particulier pour les membres marginalisés de la communauté. En 1959, Mme Maynier épouse un diplomate et s’installe en Jamaïque, où elle poursuit sa carrière en éducation à l’University of the West Indies. (Source : 417387)

Joseph Morris Sealy naît à Halifax, en Nouvelle-Écosse, en 1910. Il devient porteur de voitures-lits pour le Chemin de fer Canadien Pacifique en 1928 et travaillera pour l’entreprise pendant 46 ans. Fier syndicaliste, M. Sealy est président et vice-président de la division montréalaise de la Fraternité des porteurs de wagons-dortoirs durant sa carrière. (Source : 417386)

William C. Kingfish Wright naît à Toronto en 1915. Musicien de talent, il fait partie du seul orchestre de la ville composé de personnes de couleur. Adolescent, la fin de semaine, il joue dans divers hôtels de villégiature du sud de l’Ontario avec le groupe Harlem Aces. Le racisme qui sévit dans l’industrie de la musique et la pénurie d’emplois l’amènent à devenir porteur. Embauché par le Chemin de fer Canadien Pacifique en 1936, il travaille pour sa division torontoise pendant 30 ans. Il est un membre fondateur de la Fraternité des porteurs de wagons-dortoirs et il lutte activement pour l’amélioration des conditions de travail. (Source : 417394)

Les chercheurs et les chercheuses, conteurs et gardiens du savoir communautaire

Cheryl Foggo est une conteuse canadienne noire primée qui a reçu l’Ordre d’excellence de l’Alberta en 2022. Elle est autrice, réalisatrice de films documentaires, scénariste et dramaturge. Ses travaux portent sur l’histoire des Noirs, plus particulièrement dans les Prairies. Parmi ses ouvrages notables, citons Pourin’ Down Rain : A Black Woman Claims Her Place in the Canadian West (finaliste pour le prix de la culture de l’Alberta pour les études et essais); One Thing That’s True (finaliste pour le Prix littéraire du Gouverneur général); et John Ware Reclaimed (mis en lice pour le prix du meilleur scénario de la Writer’s Guild of Canada). Mme Foggo est issue de la Migration noire de 1910, au cours de laquelle ses arrière-grands-parents maternels ont quitté l’Oklahoma pour s’installer près de Maidstone, en Alberta. Son grand-père était porteur, tout comme plusieurs de ses oncles.

Cecil Foster, Ph. D., est un écrivain et journaliste prolifique, titulaire d’un doctorat de l’Université York. Il est actuellement président du département d’études transnationales de l’Université de Buffalo. Les travaux de M. Foster portent depuis longtemps sur le multiculturalisme au Canada et sur le rôle de la race dans cette politique. Son dernier livre, They Called Me George: The Untold Story of Black Train Porters and the Birth of Modern Canada, raconte l’histoire de la première délégation de Noirs canadiens à rencontrer des membres du Cabinet fédéral pour discuter des pratiques discriminatoires du Canada en matière d’immigration. Ce voyage, qui s’inscrit dans une longue histoire de défense des droits des porteurs, a ouvert la voie à des changements dans les politiques liées à l’immigration, aux droits du travail et aux droits de la personne au pays.

Steven High, Ph. D., est professeur titulaire d’histoire à l’Université Concordia, où il a fondé le Centre d’histoire orale et de récits numérisés. Il est titulaire d’un doctorat en histoire canadienne de l’Université d’Ottawa. Le dernier ouvrage primé de M. High, Deindustrializing Montreal: Entangled Histories of Race, Residence, and Class, raconte l’histoire de deux quartiers, l’un à prédominance blanche et l’autre à prédominance noire, situés dans le sud-ouest de Montréal.

Saje Mathieu, Ph. D., est professeure associée d’histoire à l’Université du Minnesota. Elle est titulaire d’un doctorat conjoint en histoire et en études afro-américaines de l’Université Yale et a été boursière du Warren Center et du W.E.B. Du Bois Institute à l’Université Harvard, du Center for American Studies à l’Université de Heidelberg, du National Endowment for the Humanities et du Schomburg Center for Research in Black Culture. Son premier livre, North of the Color Line: Migration and Black Resistance in Canada, 1870-1955, détaille l’histoire des porteurs de voitures-lits afro-américains et antillais au Canada et les conséquences sociales, culturelles, juridiques et politiques de leur emploi. Les travaux actuels de Mme Mathieu portent sur les expériences à l’échelle mondiale des soldats noirs pendant la Première Guerre mondiale.

Dorothy Williams est titulaire d’un doctorat en bibliothéconomie et en sciences de l’information de l’Université McGill. Elle occupe actuellement un poste de chercheuse à l’Université Concordia au sein du Réseau de recherche sur les communautés québécoises d’expression anglaise. Elle a été distinguée par le prix Black Changemaker de la CBC en 2022 et un prix Bibliothèque et Archives Canada en 2023. Au printemps 2024, elle a reçu un doctorat honorifique de l’Université du Québec à Montréal ainsi qu’un insigne de l’Ordre de Montréal, la plus haute distinction de la municipalité, en reconnaissance de sa contribution exceptionnelle au développement et au rayonnement de la ville. Les ouvrages de Mme Williams, Les Noirs à Montréal : 1628-1986 et The Road to Now: A History of Blacks in Montreal, sont des références incontournables dans les études noires et l’histoire des Noirs au Canada. Mme Williams est également une pionnière de la pédagogie, elle qui élabore depuis de nombreuses années des programmes d’études sur l’histoire des Noirs au Canada, ainsi qu’une gardienne des connaissances de la communauté. La collection d’archives qu’elle conserve chez elle est l’une des plus vastes documentant l’expérience des Noirs à Montréal.

Judith Williams-Graham est une descendante des familles Williams et Carruthers. Originaires du Texas, les Williams s’établissent en Oklahoma pour cueillir du coton, un État où la famille Carruthers a de solides racines. Comme de nombreuses autres personnes d’origine africaine-américaine, les deux familles fuient la violence raciale qui sévit aux ÉtatsUnis et arrivent au Canada entre 1910 et 1914 dans le cadre de la Grande migration. La famille Williams s’installe d’abord à North Battleford, en Saskatchewan, puis élit domicile à Hillside. Les Carruthers érigent leur propriété familiale à Amber Valley, en Alberta. Le père de Mme Williams-Graham, Roy, commence à travailler comme porteur de voitures-lits à Winnipeg en 1936. Il est ensuite transféré à Calgary, où il rencontre Cordie, la mère de Mme Williams-Graham. Ils se marient en 1940. Ensemble, ils luttent pour la syndicalisation des porteurs du Chemin de fer Canadien Pacifique, une cause à laquelle Mme Williams-Graham est exposée dès son jeune âge. Plusieurs membres de sa famille élargie travailleront d’ailleurs sur les chemins de fer. Organisatrice et militante de longue date au sein de la communauté noire de l’Ouest du Canada, elle est déterminée à faire connaître ce pan de l’histoire. Elle rédige actuellement ses mémoires, qui documentent l’histoire de sa famille ainsi que les expériences des personnes noires de façon plus générale.

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