Transcription
(Extrait sonore : Ryan Jeddore)
« D’une certaine façon, je regarde encore le tout de l’extérieur. Je prends part à certaines des cérémonies et autres activités, mais je ne me sens pas tout à fait…; je ne fais pas encore partie de cette culture. Je n’ai pas l’impression… que cela m’appartient. Et je crois qu’il s’agit peut-être de l’un de mes regrets; ne pas avoir de véritable culture. »
(Musique : « Hoka » de Boogey The Beat)
Perspectives Autochtones. Récits des employé(e)s Autochtones.
« Tansi. »
Ceci est Perspectives Autochtones, un programme dans le cadre duquel nous comptons explorer les expériences et les points de vue de fonctionnaires autochtones, en plus de découvrir ce que la réconciliation signifie pour eux et ce qu’elle peut représenter pour le Canada.
(Musique : « Bear Song » de Boogey The Beat)
S’il y a quelque chose que je trouve dommage, c’est le fait d’être contraint par la langue anglaise. Malgré tous ses avantages, elle est limitée. L’anglais est un contenant. J’y suis habitué, car je n’ai rien connu d’autre, mais je dois me rappeler périodiquement que, même s’il semble me convenir, c’est seulement parce que j’y ai grandi. Je n’ai pas façonné le contenant, c’est lui qui m’a façonné.
La langue et la culture sont inexorablement liées.
La langue écrite est une boîte à souvenirs. Une capsule historique. Un véhicule qui transporte la culture du passé au présent, et vers le futur.
Louis Riel, enseignant et porte-parole métis et fondateur du Manitoba, a déclaré :
« Nous devons chérir notre héritage. Nous devons préserver notre nationalité pour la jeunesse à venir. Notre histoire devrait être écrite afin d’être transmise. »
Cependant, les histoires sont profondément façonnées par la langue dans laquelle elles sont écrites, car fondamentalement, une langue incarne la façon dont une culture donnée perçoit la réalité. L’anglais décrit la réalité de la même manière que je la perçois. Ce n’est toutefois pas un contenant adéquat, ou le véhicule approprié, pour d’autres histoires de cultures différentes qui ont leur propre réalité.
Tomson Highway, survivant des pensionnats, travailleur social, pianiste classique, auteur et dramaturge, parle couramment le français, l’anglais et sa langue autochtone, le cri. Il a mentionné ce qui suit :
« L’anglais est si hiérarchique. En cri, nous ne faisons pas de distinction entre les objets animés et les objets inanimés. Tout comme nous, les animaux ont une âme. Les rochers ont une âme. Les arbres ont une âme; ils sont des « qui », pas des « quoi ». »
Il s’agit d’une révélation profonde, et c’est pourquoi le retrait des langues autochtones a été si cruel. Sous prétexte de favoriser le progrès, notre pays a retiré l’essence même de civilisations fières et d’une grande beauté. En imposant l’anglais aux enfants autochtones, nous avons non seulement exigé qu’ils parlent une langue différente, mais nous les avons forcés à restructurer en profondeur leur façon de penser. Nous leur avons imposé une façon de voir les choses qui correspondait au regard d’un étranger sur leur réalité.
Nous avons pris des enfants qui appartenaient à des cultures trop complexes, vastes et subtiles pour entrer dans le contenant rigide qu’est la langue anglaise, puis nous nous sommes plaints quand leur adaptation ne s’est pas déroulée sans heurt.
Il n’est toutefois pas trop tard pour se réapproprier ce patrimoine, pour favoriser l’alphabétisation dans les langues traditionnelles, pour élargir nos manières de penser et de nous exprimer, et pour rétablir la perception appropriée de la réalité, de l’égalité, de l’interconnectivité et de l’interdépendance; la sagesse qui nous aurait permis de prévenir la catastrophe environnementale qui nous guette aujourd’hui.
Et maintenant, des fonctionnaires canadiens nous font part de leurs réflexions et de leurs sentiments, dans leurs propres mots, en ce qui concerne leur cheminement d’auto-découverte culturelle.
(musique : Greg Reiter)
TODD :
Parlez-vous de votre cheminement pour comprendre vos origines et vos ancêtres, et de ce que vous avez appris et de ce que vous souhaitez apprendre... du type de force que cela vous donne et de ce que vous voulez faire de plus pour avoir ce lien avec votre passé.
FANNIE :
J’ai toujours su que j’avais une grand-mère ou une arrière-grand-mère du côté de mon père qui était Autochtone et dont le nom de famille était Arcou. Et je savais pour le côté de ma mère, simplement à cause de leur apparence, mais autre que ça, je n’ai vraiment jamais eu de connaissances précises sur le sujet. Récemment, mon oncle a été en mesure de regarder la situation de plus près et a découvert des preuves liées à la famille qui a signé le Traité sur la souveraineté. Fait intéressant à noter, la femme en question, qui était mon arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-grand-mère, a marié un loyaliste français qui était un descendant du Roi de France. Donc, je me suis dit que c’était vraiment un petit bout d’information intéressant. Mais le plus important pour moi quant à mes connaissances n’est pas nécessairement la connaissance de ma propre histoire, mais la connaissance de l’injustice sociale que nous essayons de réparer en tant que pays, et d’y regarder d’un peu plus près et d’y voir un peu plus clair. C’est ce qui m’inspire à continuer d’approfondir mes recherches sur le sujet et de renforcer ma détermination à faire partie de la solution.
RYAN :
Je pense que j’aimerais peut-être commencer par juste parler un peu de moi pour que vous puissiez comprendre ma perspective des choses.
TODD :
Oui.
RYAN :
J’avais l’impression d’être un « orphelin de culture » dans le sens où je n’avais pas vraiment de culture du côté autochtone de ma famille parce que même si mon arrière-grand-mère était complètement Algonquine, elle n’a jamais parlé d’autres langues que des langues autochtones. Je ne suis même pas certain de ce qu’étaient les circonstances. Elle a marié un Anglais. Un homme français-anglais. Et à partir de ce moment-là, nos liens avec la culture ont commencé à disparaître. La vaste majorité de ma famille est des Autochtones de sang ou inscrits. Donc, dans un sens, j’ai en quelque sorte grandi avec un mode de vie assez colonisé. À un tel point qu’en grandissant, je ne réalisais même pas que j’étais différent des autres et finalement que j’étais [inaudible] Autochtone. Donc, c’est quelque chose qui est comme... qui m’a toujours retenu en quelque sorte et parfois je n’en étais même pas réellement conscient. J’étais désavantagé. J’ai fait face à beaucoup de racismes en grandissant et je n’ai jamais vraiment vu ça comme du racisme. J’imagine que je croyais que les gens ne m’appréciaient pas. Mais en grandissant, en vieillissant, j’ai commencé à regarder en arrière et à penser que peut-être que ce n’était pas parce qu’ils ne m’appréciaient juste pas, c’était parce que j’avais cette idée préconçue de ce que je devais être et ne pas être, et cela a probablement affecté bon nombre de mes relations en grandissant.... avec mes amis et mes mentors, mes tuteurs et aussi d’autres personnes du genre. J’ai remarqué qu’au secondaire en particulier, j’étais toujours mis de côté en quelque sorte et qu’on ne s’attendait pas à ce que j’accomplisse de grandes choses.
TODD :
Que pouvez-vous me dire sur la différence entre les personnes qui ont grandi en comprenant leur identité et leur culture et les personnes qui ont grandi sans ces dernières, qui en ont appris davantage sur le sujet très récemment et qui sont en plein apprentissage, en plein processus pour découvrir leur culture, à laquelle elles n’ont pas été attachées pendant la majeure partie de leur vie?
JEANNETTE :
Eh bien, c’est un peu mon cas ici. Je vivais près de... à l’époque, c’était appelé des réserves. Je déteste ce mot. J’appelle ça des communautés. Mais je jouais toujours avec les enfants. Je parlais même saulteaux quand j’étais enfant. J’allais à l’église avec eux et je chantais les cantiques. J’allais à des pow-wow. J’allais aux célébrations. Ils venaient chez moi, mais ils étaient les Indiens, et nous n’avons jamais, dans notre famille, reconnu que nous étions Métis. Mais, vous savez, je l’ai su par mon père, mais personne d’autre n’en parlait vraiment dans notre famille. Et c’est ce qui est triste, vous savez, lorsque vous devez commencer à apprendre qui vous êtes. Lorsque vous auriez pu... et cela fait partie du processus de réconciliation. Nous devons nous réconcilier avec nous-mêmes, avec qui nous sommes intérieurement et extérieurement. C’est un travail difficile, mais c’est fantastique lorsque vous en découvrez davantage. C’est comme gagner à la loterie. Et c’est très important pour vous en tant qu’individu d’aller de l’avant et de faire des choses merveilleuses. Ça ne veut pas dire que vous devez devenir un directeur général. Ça n’a pas besoin d’être quelque chose comme avoir une plus grande maison ou une plus grosse voiture, mais il s’agit d’être vous-mêmes et de savoir au plus profond de votre cœur qui vous êtes et d’être heureux avec ça.
DANIEL :
Donc, j’ai principalement grandi loin de ma communauté traditionnelle, mais j’en connaissais beaucoup à son sujet, et j’étais très au courant des enjeux et des causes entourant les droits des Autochtones, de la discrimination à l’encontre des Autochtones et des défis auxquels les personnes dans les communautés devaient faire face. Ma mère militait très activement pour les causes liées aux droits de la personne et pour les causes contre la discrimination dans la ville de Montréal où je grandissais. En fait, elle a travaillé au Centre d’amitié autochtone de Montréal pendant un certain temps lorsque j’étais très jeune. Et par la suite, elle a travaillé comme chercheuse à la Commission royale sur les peuples autochtones. C’était alors le début des années 90 et j’étais au secondaire, puis lorsque je suis entré à l’université et que j’essayais de décider ce que je voulais faire, l’une des choses que j’ai fini par découvrir était le rapport de la Commission royale. Grâce à celui-ci, j’ai pu en apprendre beaucoup sur l’histoire du Canada, juste en ayant accès à ce document et cela a été un catalyseur réunissant de nombreux champs d’intérêt relatifs à mon histoire familiale et à ce que ma vocation allait être.
RYAN :
J’avais un très bon ami qui excellait à l’école; il était très intelligent, et nous passions tout notre temps ensemble. Nous avions des champs d’intérêt semblables et devions faire des projets semblables à l’école et souvent, ces derniers le faisaient avancer, lui ouvraient des portes. Et moi, je recevais mes notes, etc., mais c’était tout. Vous savez, personne ne s’attendait à ce que je fasse des études collégiales, ou même à que je cherche des possibilités d’éducation en fait. Donc, pour retourner à l’aspect culturel, à partir de ce moment-là, j’ai vécu dans la culture coloniale, la culture des personnes blanches — je ne suis pas certain du terme approprié pour ça —, mais je n’ai jamais vraiment été à ma place. Je n’étais jamais vraiment mis dans le secret ou mis au courant de toutes les blagues. Et comme j’ai dit, je ne comprenais pas vraiment en grandissant, et puis lorsque je suis devenu adulte, j’ai commencé à reconnaître le racisme dans ma vie adulte. J’ai aussi commencé à le reconnaître en regardant dans mon passé, et je n’éprouvais pas de la rancune ni rien du genre, mais il y avait certainement quelque chose, un moment où j’ai compris en tant qu’adulte que je n’avais pas vraiment cette culture autochtone. Et je ne pouvais vraiment pas dire que la culture colonisée canadienne-française de personnes blanches, peu importe ce que c’est, était vraiment ma culture non plus.
JANICE :
Il s’agit du processus de guérison d’une nation brisée. Et c’est mon processus de guérison, et pour moi, ce processus a commencé après une crise personnelle à la suite d’une semaine dans le service psychiatrique de l’hôpital général d’Ottawa. Lorsque j’y étais, mon mari m’a acheté un cadeau, un collier, et il m’a dit qu’il l’avait acheté d’un vendeur au centre commercial de la rue Sparks. Il était très inquiet et il a dit à l’homme que, vous savez, sa femme était à l’hôpital et qu’il voulait lui apporter un cadeau. Et l’homme a suggéré un collier avec des perles en bois et un pendentif d’ours, symbole de guérison. Mon mari me l’a apporté et je le portais constamment. Lorsque je suis retournée au travail dans le secteur privé après trois mois de congé de maladie pour une dépression, on m’a mise à la porte avec un avis de renvoi. D’un côté, je savais que c’était une bénédiction. Mais de l’autre, mon égo en a pris un coup et j’étais très fâchée. Ce mois de novembre là, j’ai commencé à travailler comme employée occasionnelle au sein d’Affaires autochtones et du Nord Canada (AANC). Avant cela, je n’avais jamais travaillé au gouvernement. Je suis arrivée le jour où le ministère se préparait à accepter le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones. Je préparais les documents de communication : des cartables et des cartables de questions et réponses, des messages clés avec des réponses aux questions sur la façon dont il répondrait aux 440 recommandations. Moins d’une semaine après mon arrivée à AANC, j’ai découvert le Kumik et ça m’a enchantée. Je me rappelle être retournée chez moi et avoir tout raconté à mon mari. Un pavillon traditionnel au beau milieu de bureaux gouvernementaux. C’était comme un sanctuaire pour moi, un lieu sacré où je me sentais chez moi et me sentais soutenue par les grands-pères et les arbres autour de moi me serrant fort. J’ai décrit le pavillon en détail à mon mari et lui ai dit que ça s’appelait le Kumik. Lorsque j’ai dit ce mot, il s’est retourné et m’a regardé avec étonnement et m’a demandé de répéter le mot. « Kumik », j’ai dit « K-U-M-I-K ». Il y a eu un moment de silence, puis il a dit « Tu sais ce collier que je t’ai donné lorsque tu étais à l’hôpital? » et j’ai hoché la tête. Et il a dit : « L’homme qui me l’a vendu m’a dit que tu devais trouver le Kumik. Je n’avais aucune idée de ce dont il parlait, mais quand tu as dit ce mot, je m’en suis souvenu ». C’est à ce moment-là, après qu’il a partagé cette information, que je savais que mon processus de guérison avait commencé.
RYAN :
J’ai grandi dans le nord de l’Ontario et il y a certainement beaucoup de préjugés là-bas, particulièrement contre les Autochtones des réserves. Et même si vous ne venez pas d’une réserve, vous savez, il y a des préjugés qui vous suivent partout. En grandissant, j’avais aussi quelques amis autochtones et nous étions comme coupés de nos cultures d’origine. Aussi, ils ont en quelque sorte adopté le mode de vie colonisé. En étant eux-mêmes visiblement et culturellement Autochtones, peut-être sans y être attachés, ils faisaient preuve d’une sorte de racisme. Contre eux-mêmes, contre leurs propres peuples. C’était vraiment troublant en quelque sorte. Et j’ai grandi de façon très idéaliste en quelque sorte. J’ai eu une assez belle enfance pour être honnête. Nous étions loin d’être riches, mais nous avions le nécessaire en tant que jeunes des années 80. J’aime vraiment des choses comme Star Trek et beaucoup de médias idéalistes de ce genre. En grandissant, je pensais que le futur ressemblerait à Star Trek : tout le monde serait multiculturel et les races n’importeraient pas. Et ce n’est vraiment pas comme ça. Ça m’a certainement, je ne dirais pas déçu, mais juste ébranlé par rapport à la façon dont les gens pensaient. Même des choses comme la politique de choses, comme la gauche et la droite. Ce n’est pas avant la fin de ma vingtaine, presque le début de ma trentaine, que j’ai même compris ce qu’étaient les points de vue de l’extrême gauche et de l’extrême droite. J’ai toujours pensé que tout le monde avait un esprit très positif, et était ouvert et tolérant. Mais c’est quelque chose qui... bref, on grandit. On se débarrasse de cette naïveté. Aujourd’hui, je ne peux pas dire que j’ai vraiment subi du racisme, autre que peut-être quelques idées préconçues de certains employeurs. Les employeurs, lorsque j’ai déménagé à Ottawa, ne s’attendaient pas en général à ce que je sois une personne intellectuelle. Ils s’attendaient à quelqu’un de manuel. Autre que cela, on n’a rien à offrir. J’ai en quelque sorte surpris beaucoup de personnes, mais même si j’ai vraiment donné une très bonne impression en allant de l’avant, je pense que les idées préconçues m’ont quand même retenu. Et c’était en fait l’une des raisons pour lesquelles j’ai décidé d’aller à l’école et d’obtenir un diplôme, car je savais que peu importe ce que je faisais comme travail manuel ou dans le service à la clientèle dans l’industrie des services, ou peu importe ce que c’était, j’allais toujours être cloué au sol à un niveau de débutant et que je ne grimperais jamais vraiment les échelons.
TODD :
Voyez-vous qu’il y a différents problèmes pour les Autochtones vivant en milieu urbain et pour ceux en milieu rural?
JEANNETTE :
Eh bien, ils sont encore ségrégués. Ils vivent dans des endroits particuliers; on connaît la rue à Ottawa, ce coin de la ville. On sait où se trouvent ces ensembles résidentiels dans d’autres quartiers de la ville. Donc, c’est difficile d’oublier ce fait, et cela est aussi une étape de la réconciliation. C’est difficile d’aller de l’avant, et on n’entend que les histoires des partisans et les histoires plus tristes; on n’entend pas parler des bonnes nouvelles de toutes ces personnes qui apprennent ou réapprennent leur langue, qui en apprennent davantage sur leur culture, qui pratiquent les cérémonies, qui en apprennent davantage sur les cérémonies et qui écoutent les enseignements des aînés. On n’entend pas beaucoup parler de ça. C’est toujours « quelqu’un est allé en prison ». Ces ensembles résidentiels sont un gâchis. On n’entend pas parler des histoires comme Kahnawake qui va changer l’annonce dans sa communauté. Un peu, oui, mais pas beaucoup. Et toutes les autres communautés qui font la même chose, comme les peuples de St. Martin qui retournent finalement à leurs terres au Manitoba. Ils ont vécu à Winnipeg pendant six ans. Comme, c’est triste de vivre dans un hôtel pendant six ans. Eh bien, peut-être qu’ils ne vivaient pas dans des hôtels. Je ne sais pas. Mais ce qui est triste, c’est que nous prenons encore des territoires. Nous ne reconnaissons toujours pas les territoires. C’est triste.
JANICE :
Lorsque je travaillais à AANC, je passais de nombreuses heures de dîner au Kumik à écouter les enseignements des aînés. Écouter et apprendre. J’ai aussi pris des rendez-vous personnels pour discuter avec les aînés invités afin de comprendre mes sentiments et mes conflits personnels à la maison et au travail. J’ai travaillé au sein d’AANC pendant trois ans. Après, nous avons déménagé à Dubai. J’ai réintégré la fonction publique plusieurs années plus tard. Le retour était une difficulté que je n’avais jamais anticipée. Revenir chez nous était semé d’embûches. Mon adolescente m’a dit que j’avais gâché sa vie. Mon mari se cherchait un travail. Mon fils était déconcerté par le système d’écoles publiques et j’avais des difficultés à mon travail en tant que gestionnaire des communications stratégiques pour Diversification de l’économie de l’Ouest Canada. Je n’étais pas heureuse et je me sentais perdue et dépassée. En juin 2009, j’ai été mutée à Santé Canada. En août, j’ai participé à un atelier de fabrication de tambours et j’ai fait un tambour à main autochtone. Je voulais apprendre à en jouer. Quelqu’un m’a parlé d’un nouveau cercle de tambours au Pavillon situé dans le sous-sol du bâtiment Brooke-Claxton, le Pavillon Iskotew. Iskotew signifie « le feu en soi » et je suis allée au cercle de tambours, hésitante et incertaine de ce à quoi m’attendre. Mais lorsque je suis arrivée, on m’a accueillie chaleureusement. C’était comme revenir à la maison, et je suis devenue une participante habituelle, chérissant la chance de jouer du tambour et de chanter dans cet espace sacré. Apprendre les chansons et guérir. Plus je jouais du tambour, mieux je me sentais. Je jouais du tambour les jeudis à l’heure du midi et les lundis soir après le travail. Mes sœurs du cercle de tambours sont devenues mes amies et mon réseau de soutien. Comme lorsque je travaillais à AANC, j’ai commencé à passer mes heures du midi au Pavillon à écouter les aînés, à écouter et à apprendre, et je leur demandais des conseils et du soutien pour m’aider avec mes difficultés. Plus j’en apprenais, plus j’étais curieuse. Je me souviens d’une heure du midi lorsque grand-mère Malihatkwa de la Colombie-Britannique jouait du tambour et chantait. Alors qu’elle chantait, je me sentais flotter. J’étais sur le dos d’un aigle et je pouvais sentir la douceur du bas de son cou entre mes doigts. Lorsqu’elle eut fini et qu’elle a expliqué que c’était une chanson qui parlait d’un aigle, les larmes se sont mises à couler. Je me demandais comment je le savais. Partager ce que j’avais vécu avec les personnes dans le Pavillon a été transformationnel pour moi. Pendant que je décrivais ce que j’avais vécu, des larmes de joie coulaient sur mon visage. La fois suivante où grand-mère Malihatkwa a visité le pavillon, une chaîne d’événements s’est produite et a mené à une cérémonie de guérison personnelle et à une cérémonie de baptême. Encore aujourd’hui, lorsque je repense à cette semaine-là, j’ai de la difficulté à en saisir le sens. Encore une fois, c’était transformationnel et ça a amélioré mon engagement à comprendre la façon d’être des Anishinaabe. Mon processus de guérison continue. Tellement de moments magiques et de rencontres miraculeuses qui guérissent mon esprit. Je sais la guérison que les aînés, les enseignements, les cercles de tambours, les sueries et les cérémonies m’ont apportée et j’en suis tellement reconnaissante. Ma profonde gratitude me pousse à partager ce que j’ai appris et ce que je sais. Un lien très intime à ce mode de vie qui, parfois, semble défier toute explication rationnelle. Je ne peux pas expliquer pourquoi je me sens tellement comme une partie de ce monde — la façon dont il me berce et ses manières, m’enseignant comment aimer, rendre grâce pour toutes les bénédictions dans ma vie et toujours être consciente de mes liens avec tous ceux qui m’entourent. J’entends maintenant la sagesse de l’eau et je vois mes ancêtres parmi les roches et les arbres. Je parle aux corneilles et je comprends vraiment que je ne suis pas seule. Nous sommes tous liés les uns aux autres. Tous ceux qui m’entourent.
RYAN :
Je suis vraiment heureux dans ma vie en ce moment et je redécouvre ma culture et je le fais personnellement. Ça a en grande partie commencé avec la musique, qui est un puissant moteur pour n’importe qui. Et j’ai commencé à aller à des pow-wow et j’ai acheté des CD de certaines musiques traditionnelles et de certaines musiques plus modernes. Malgré tout, je suis encore en train de chercher. Je ne suis pas vraiment.... Je ne suis pas encore intégré à cette culture. Je ne fais pas partie... je participe à certaines cérémonies et des choses comme ça, mais je n’ai pas encore l’impression qu’elles sont liées à moi. Je pense que c’est peut-être une des choses que je regrette en quelque sorte, par rapport au fait de ne pas avoir de culture.
Perspectives Autochtones : Récits des employé(e)s Autochtones est une production d’Emploi et Développement social Canada.
Toutes les opinions exprimées dans le cadre de la série sont strictement celles des personnes qui les expriment et ne sont pas nécessairement partagées par leur employeur.
Les fonctionnaires que vous avez entendus dans cet épisode sont : Fannie Bernard, Janice Edgar, Jeannette Fraser, Ryan Jeddore, et Daniel Jette.
Notre musique thème est signée Boogey the Beat, et vous avez également entendu la musique de Greg Reiter.
Mon nom est Todd Lyons. Je suis animateur, auteur et directeur technique pour la série Perspectives Autochtones.
Merci de votre écoute.