Maltraitance envers les personnes aînées : Définition stratégique fédérale - Document explicatif

Document rédigé par : Marie Beaulieu, Ph.D. et Kevin St-Martin, M.S.S/M.S.W.

Préparé à l’intention de : Gouvernement du Canada – Emploi et Développement social Canada

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1. Objectif de cette définition stratégique fédérale de la maltraitance envers les personnes aînées

Cette définition stratégique fédérale sur la maltraitance envers les personnes aînées se veut une opportunité d’exercer un leadership fédéral et de partager une compréhension commune de cet enjeu. Elle a pour objectif de servir de véhicule de changement de culture et de sensibilisation du public en soutien aux efforts visant à prévenir la maltraitance envers les personnes aînées ainsi que de contribuer à éclairer les politiques et les programmes fédéraux visant à lutter contre celle-ci.

Bien qu’une définition stratégique pourrait chevaucher d’autres types de définitions, son but diffère et conséquemment ses caractéristiques aussi. Une définition à des fins scientifiques aurait besoin d’être très précise afin d’être opérationnalisée puisqu’elle est produite à des fins de recherche et de collecte de données. Une définition légale quant à elle, devrait être plutôt complexe puisqu’il y a des variations et des contradictions à travers le pays résultant du chevauchement entre les pouvoirs provinciaux, territoriaux et fédéraux. Une définition légale peut aussi être implicite, plutôt qu’énoncée directement, et utiliser du langage juridique spécifique. Au sein des provinces et territoires, cela inclut différentes approches législatives dans plusieurs secteurs pertinents, incluant la protection des adultes, les relations familiales, le mariage, les droits de propriété, la santé et les droits humains. Au niveau fédéral ceci inclut le Code criminel.

À l’été 2021, le Gouvernement a tenu des consultations nationales pour récolter des commentaires sur l’idée d’une définition stratégique fédérale. La consultation incluait des séances de table ronde et un sondage en ligne. Ces activités d’engagements représentaient une opportunité importante pour le Gouvernement d’entendre les perspectives des intervenants, des experts, des organisations autochtones, et des Canadiens.

Le Gouvernement a aussi financé une étude exploratoire, Enrichir les données canadiennes sur la maltraitance envers les personnes aînées : Une étude exploratoire, sur les défis et les lacunes dans la collecte de données. Cette étude d’opinion publique était basée sur une recension de la littérature scientifique, des entrevues individuelles avec des chercheurs canadiens et internationaux ainsi que des représentants des gouvernements des provinces et territoires du Canada, et une entrevue de groupe avec des membres du Réseau Canadien pour la Prévention du Mauvais Traitement des Aînés.

Cette définition a été élaborée dans une perspective d’équité, de diversité et d’inclusion. Elle a été guidée par une série de facteurs d’influence. Afin d’éviter une longue liste de références, la priorité a été accordée aux synthèses des connaissances (dont une série rédigée par les auteurs) et à des documents reconnus comme des jalons.

2. Définition stratégique fédérale de la maltraitance envers les personnes aînées

S’appuyant sur l’analyse de définitions variées et à la suite de consultations avec des représentants des gouvernements fédéraux, provinciaux et territoriaux du Canada, ainsi qu’avec des experts nationaux et internationaux dans le domaine de la lutte contre la maltraitance (Beaulieu et St-Martin, 2022), les termes et la définition qui suivent (comprenant les éléments et les types) ont été élaborés.

La maltraitance envers les personnes aînées est un événement singulier ou répétitif qui se produit dans le cadre d’une relation où il devrait y avoir de la confiance et qui implique une personne, un groupe, une communauté ou une organisation. Elle se manifeste par un geste, une parole, une attitude ou une absence d’action appropriée qui cause ou risque de causer des conséquences négatives pour une personne aînée.

Cela inclut des événements de maltraitance physique, psychologique, matérielle ou financière et sexuelle qui peuvent s’exprimer sous la forme de violence (gestes, paroles ou attitudes) ou de négligence (absence d’action appropriée).

La définition établit clairement qu’un événement qui a ou qui est susceptible d’avoir un effet négatif sur une personne aînée peut constituer de la maltraitance même s’il ne s’est produit qu’une seule fois. Elle souligne également que la maltraitance est plus qu’un problème interpersonnel, car les auteurs de cette maltraitance peuvent être des personnes, des groupes, des communautés et des organisations avec lesquels une personne aînée entretient une relation de confiance. Par conséquent, elle exclut la violence (gestes, paroles ou attitudes) et la négligence (absence d’action appropriée) de la part d’étrangers. De plus, la distinction qu’elle fait entre violence et négligence précise que les types de maltraitance peuvent se manifester de plusieurs façons et qu’il est possible de maltraiter sans avoir posé de geste ou parlé contre une personne aînée. Le présent document vise à expliquer les différentes composantes des termes et de la définition (y compris les types et les formes de maltraitance), leur importance et les nuances entourant leur inclusion.

3. Terminologie utilisée dans la définition

3.1 Maltraitance

Il n’existe pas de façon unique de définir la maltraitance envers les personnes aînées. Depuis que le concept a été introduit dans la littérature scientifique au début des années 1970 sous l’appellation « dirty work with old folksNote de bas de page 1 (Stannard, 1973) et de « granny battering »Note de bas de page 2 (Burnston, 1975), de multiples noms lui ont été attribué en français, principalement maltraitance, mauvais traitement et abus. Généralement vu comme des synonymes les uns des autres, il importe de noter qu’abus dans ce contexte est une traduction littérale du terme anglais « abuse ». Sur le plan linguistique, abus renvoi plutôt à l’usage inapproprié d’une chose (Le Robert Dico en ligne, n.d.). Puisqu’une personne aînée n’est pas une chose, l’usage terme « abus » est inapproprié sauf pour désigner des abus financiers.

Dans la francophonie internationale, maltraitance est le terme le plus utilisé, bien qu’au Canada, les trois termes, soit maltraitance, mauvais traitement et abus, soient encore en usage. On les retrouve notamment au sein des définitions officielles des provinces et territoires (Beaulieu et St-Martin, 2022). Les organisations proéminentes de lutte contre la maltraitance priorisent toutefois mauvais traitement ou maltraitance. La Chaire de recherche du Canada sur la prévention de la maltraitance envers les personnes aînées à Toronto, la Chaire de recherche sur la maltraitance envers les personnes aînées à Sherbrooke et le Réseau canadien pour la prévention du mauvais traitement des aînés en sont trois exemples notables.

Dans cette définition, c’est le terme maltraitance qui a été retenu pour référer au problème puisqu’il ne fait pas l’objet de débat particulier et qu’il s’agit du terme le plus utilisé dans la francophonie internationale et canadienne. Il comprend implicitement la violence et la négligence sans se limiter qu’à des dimensions physiques ou d’agression. De plus, ce terme est cohérent avec celui de la bientraitance qui gagne en popularité dans les pays de la francophonie et de langue latine. Finalement, il s’inscrit dans une perspective de continuité des violences et négligence à travers les âges puisqu’on utilise aussi « maltraitance des enfants » dans la francophonie.

3.2 Personnes aînées

L’utilisation de l’expression « personnes aînée » pour désigner les personnes touchées par la maltraitance véhicule un sentiment d’identité personnelle. Depuis 1989, l’Organisation des Nations Unies [ONU] utilise le terme « personne âgée » pour désigner la Journée internationale des personnes âgées (ONU, 2022) en soulignant le fait que d’être âgée est simplement une caractéristique supplémentaire au fait d’être une personne. Cependant, toute personne a un âge et, au sens littéral, l’appellation « personne âgée » n’a que peu de sens. Certains ont simplement un âge plus avancé que d’autres. Ce faisant, pour référer à la population touchée dans le cadre de cette définition, le terme « personnes aînées » a été retenu. Tout comme le terme « personnes âgées » son usage est courant dans la francophonie. De plus, il ne fait pas l’objet de critiques particulières. « Aîné » met mieux en évidence qu’il est question d’une personne plus âgée que d’autres au sens où elle est l’aînée de la majorité de la population. La notion de personne s’inscrit bien dans la réflexion sur le personhood, soit la reconnaissance d’une qualité de personne singulière à la fois semblable, mais différente des autres. Ainsi l’expression « personne aînée » engage la reconnaissance d’individus à part entière et non celle d’un groupe homogène (c’est-à-dire les aînés). De plus, en utilisant ce terme, il devient clair que toute personne peut être maltraitée, indépendamment de sa culture, de son sexe, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de ses expressions de genre et de son genre perçu, de ses croyances, de sa langue, de son origine ethnoculturelle, de ses capacités physiques et cognitives, etcetera (Beaulieu et St-Martin, 2022).

D’autres termes fréquemment utilisés pour désigner les personnes ciblées par la maltraitance ont également été pris en compte, mais ont été rejetés pour diverses raisons. Notamment, le terme sénior qui est un anglicisme et qui est souvent associé à l’âge de la retraite et des pensions et le terme « vieux / vieilles » qui est interprété par beaucoup comme étant trop familier, condescendant et péjoratif (Larousse en ligne, n.d.).

4. Éléments de la définition

4.1 Nombre d’occurrences : « Singulier ou répétitif »

La mention d’un événement « singulier » ou « répétitif » indique qu’une seule occurrence d’un geste, d’une parole, d’une attitude ou d’une absence d’action appropriée est suffisante pour considérer qu’il y a eu de la maltraitance si les autres critères sont présents.

Cependant, cette notion appelle à la prudence. La prise en compte systématique d’un seul événement comme de la maltraitance potentielle peut masquer la différence entre une simple querelle et de la maltraitance réelle (Beaulieu et St-Martin, 2022). À cet égard, il est important de se rappeler que des querelles occasionnelles, définies comme des « vifs désaccords entre personnes » ou « lutte d’idée » (Le Robert Dico en ligne, n.d.), sont des parties normales d’une relation, même si elles peuvent parfois dégénérer. Dans de tels cas, l’intensité, la répétition et les schémas habituels doivent être considérés.

4.2 Auteurs de la maltraitance : « personne, groupe, communauté ou organisation »

La définition précise qu’« une personne, un groupe, une communauté ou une organisation » peut être maltraitant(e). Elle ne se limite pas à une personne, comme c’est souvent le cas. Cet ajout vise à lutter contre la perception selon laquelle la maltraitance n’est qu’un problème interindividuel ou intrafamilial et ouvre la porte à une vision plus large et à une meilleure responsabilisation.

Cela est particulièrement utile pour cibler les changements qui doivent être apportés en vue de résoudre les cas de maltraitance. Par exemple, dans un contexte institutionnel, les interventions requises si un dispensateur de services ne répond pas aux besoins d’une personne aînée parce qu’il ne veut pas le faire sont différentes de celles requises si l’organisation ne fournit pas les ressources matérielles ou humaines nécessaires pour le faire.

  • Par une personne, la définition fait référence aux personnes qui sont en relation avec la personne aînée. Il peut s’agir de parents, de membres de la famille, de partenaires de vie, de fournisseurs de services, d’amis, de voisins, etcetera.
  • Par un groupe, la définition fait référence à des groupes d’individus liés par des intérêts communs, une organisation, une culture ou un emplacement géographique. Il peut s’agir d’une association que les personnes aînées fréquentent, d’un groupe de danse, etcetera.
  • Par une communauté, la définition fait référence à « un ensemble d’individus interdépendants qui s’influencent et se perçoivent comme des membres de la même identité sociale » [Traduction libre] (Vallerand, 1993, p. 783-784). Il peut s’agir d’une communauté religieuse, etcetera.
  • Par une organisation, la définition renvoie à des événements qui découlent des pratiques et des méthodes de gestion d’une organisation ou d’une institution. Il peut s’agir d’un hôpital, d’un établissement de soins de longue durée, d’une entreprise, d’une institution bancaire, etcetera.

4.3 Lien entre la personne aînée et l’auteur de maltraitance : « une relation où il devrait y avoir de la confiance »

La maltraitance envers les personnes aînées est souvent présentée comme se produisant dans le cadre d’une relation de confiance. Cela indique que les étrangers ne peuvent pas être des auteurs de la maltraitance et mène à l’exclusion d’événements comme le vol et la fraude par une entité inconnue. Cette formulation est parfois critiquée, car dans certains cas, elle peut être utilisée pour laisser entendre que les personnes aînées sont responsables de la maltraitance qu’elles subissent parce qu’elles ont accordé leur confiance à une personne qui ne la méritait pas (Beaulieu et St-Martin, 2022).

L’utilisation de l’expression « relation où il devrait y avoir de la confiance » dans cette définition vise à contrer cette critique et à retirer le blâme aux personnes aînées. La clarification ajoutée indique que la maltraitance se produit dans les relations où il serait normal de s’attendre à la confiance. Par exemple, on s’attendrait à une relation de confiance avec un dispensateur de services, un soignant, un établissement bancaire, une communauté religieuse, un établissement de soins de longue durée, etcetera.

La majorité des experts conviennent que les notions de relations et de confiance sont très importantes dans une définition afin d’éviter que toutes les formes de victimisation soient couvertes par celle-ci. Cependant, il y a des débats sur la question de savoir si ces concepts devraient être formulés de manière à permettre l’inclusion de fraudes et d’escroqueries impliquant des personnes assumant faussement une identité ou un titre qui suscite la confiance. Par exemple, prétendre être un petit-enfant, un fonctionnaire, un technicien en informatique, etcetera. L’utilisation de l’expression « devrait y avoir de la confiance » permet d’inclure ce genre d’événements à un moment donné, mais dans sa forme actuelle, la définition ne les inclurait pas (Beaulieu et St-Martin, 2022).

4.4 Manifestation de l’enjeu : « un geste, une parole, une attitude ou une absence d’action appropriée »

La maltraitance est toujours caractérisée par une certaine forme de violence souvent décrite comme des « gestes ». Ce terme englobe généralement les manifestations physiques, verbales ou comportementales de la maltraitance, bien que cela ne soit pas toujours explicite (Beaulieu et St-Martin, 2022). Par conséquent, lorsqu’elle est utilisée dans le contexte de maltraitance, la notion de violence va au-delà du fait de blesser physiquement quelqu’un. Cela correspond à la définition de l’OMS qui décrit la violence comme suit :

 « La menace ou l’utilisation intentionnelle de la force physique ou du pouvoir contre soi-même, contre autrui ou contre un groupe ou une communauté qui entraîne ou risque fortement d’entraîner un traumatisme, un décès, des dommages psychologiques, un maldéveloppement ou une carence » (OMS, 2002a, p.5.).

De plus, « en psychologie, une attitude réfère à un ensemble d’émotions, de croyances, et de comportements envers un objet, une personne, une chose ou un événement particulier » [Traduction libre] (Cherry, 2023, n.p.). Des attitudes peuvent être positives, neutres ou négatives. Elles sont influencées par des expériences, des normes et rôles sociaux, le conditionnement classique et opérant ainsi que l’observation de gens dans l’environnement. Ce concept est plus large que des « gestes ou paroles » (tel que mentionné dans définition de maltraitance proposée), ajoute des nuances à la définition et élargit la notion de violence. Le scénario suivant démontre pourquoi cet ajout peut être important dans certains contextes :

Un membre du personnel dans un établissement résidentiel effectue son travail adéquatement, suit ses chartes et fournit des soins et médicaments appropriés aux résidents. Tout cela en montrant un manque total d’intérêt pour les personnes aînées autour de lui. Il ne fait rien d’autre que ses tâches requises, ne discute jamais avec les résidents et est à l’aise de parler avec les autres membres du personnel comme s’il n’y avait personne autour.

Dans cet exemple, ce qui est décrit ne peut pas vraiment être considéré comme un geste ou une parole, mais reflète quand même l’attitude d’une personne, un groupe ou une organisation qui peut amener des conséquences négatives pour les personnes aînées. À ceci, l’idée d’omission ou d’absence d’actions appropriées (souvent appeler négligence) est souvent ajoutée. Ce faisant, l’approche de catégoriser les manifestations sous les formes de violence ou négligence a été adoptée. Violence est utilisée pour référer à de la maltraitance active telle que des gestes, paroles ou attitudes, alors que négligence réfère à de la maltraitance passive ou une absence d’action appropriée (Beaulieu et St-Martin, 2022). Autrement dit ne pas fournir de soins à une personne aînée, les ignorer, ou ne pas répondre à leurs besoins quand cela est requis peut être de la maltraitance.

Cette façon de présenter les manifestations de la maltraitance indique explicitement qu’elle peut être exprimée de plusieurs façons et qu’il est possible d’être maltraitant sans avoir agi ou parlé contre une personne aînée. Elle permet aussi un regard plus approfondi sur les différentes manifestations de négligence puisqu’elle peut être examinée de différentes manières pour chaque type de maltraitance, contrairement aux définitions où la négligence est un type parmi tant d’autres.

4.5 Impacts de la maltraitance : « cause ou risque de causer des conséquences négatives pour les personnes aînées »

La majorité des définitions traitent de façon générale de la notion de conséquences, mentionnant que la maltraitance cause du tort ou de la détresse, mais certaines définitions cherchent à être plus précises, en détaillant les types de conséquences qui sont semblables aux types de maltraitance (Beaulieu et St-Martin, 2022). Aucune de ces approches n’a été utilisée pour la définition. D’une part, les notions de tort et de détresse seraient restrictives, car elles laissent entendre qu’un événement qui n’a pas atteint le seuil de tort ou de détresse ne peut pas être considéré comme une maltraitance. D’un autre côté, le fait de mentionner tous les types de conséquences mènerait à une définition beaucoup trop volumineuse. Par conséquent, l’idée simple des « conséquences négatives » est utilisée pour décrire implicitement les conséquences physiques, psychologiques, sociales et financières qui pourraient avoir une incidence sur la santé, la sécurité et le bien-être des personnes aînées (OMS, 2022b). Chacune de ces quatre catégories de conséquences est souvent documentée dans des études démographiques sur la maltraitance sans être explicitement citée dans des définitions (Gingras, 2020). Le tableau qui suit présente quelques exemples des conséquences possibles de la maltraitance.

Tableau 1 : Exemples des conséquences possibles de la maltraitance
Types de conséquences Exemples
Physiques
  • Répercussions physiques temporaires ou permanentes
  • Détérioration de la santé
  • Déclin fonctionnel
  • Augmentation du taux de morbidité
  • Mortalité
Psychologiques
  • Anxiété
  • Dépression
  • Mauvaise estime de soi
  • Tristesse, déprime, mécontentement et un sentiment d’insatisfaction
  • Idées suicidaires
  • Sentiment accru d’insécurité
  • Honte
  • Culpabilité
  • Méfiance
Matérielles ou financières
  • Perte de ressources financières
  • Perte de biens matériels
  • Privation de biens essentiels
  • Dettes
  • Insolvabilité
  • Faillite
Sociales
  • Solitude
  • Perte de contact avec des connaissances
  • Conflits
  • Dépendance accrue

Source: Beaulieu et coll., 2022a

Souvent jumelée au concept des conséquences, la notion de risque indique que la maltraitance peut se produire même si les conséquences négatives ne se sont pas encore concrétisées. Bien que cela introduise une certaine subjectivité dans la définition, cela est essentiel en vue d’éviter d’exclure les événements qui touchent des personnes aînées en situation de vulnérabilité. Il s’agit notamment des personnes atteintes de troubles neurocognitifs, de quadriplégie ou qui sont inconscientes, car elles ne subissent peut-être pas directement les conséquences de la maltraitance.

4.6 Intention : « événements intentionnels ou non-intentionnels »

Bien que la définition n’inclue pas la notion d’intentionnalité, elle fait référence au fait qu’il peut y avoir de la maltraitance non intentionnelle et que ces événements nécessitent aussi de l’attention. Sur le plan social, les gens ont tendance à considérer uniquement les événements intentionnels comme une maltraitance et à considérer les événements non intentionnels comme des accidents ou des gaffes. Pourtant, même si un événement n’est pas intentionnel, il peut quand même être inacceptable et entraîner des conséquences importantes pour la personne qui le vit (Beaulieu et St-Martin, 2022).

5. Types de maltraitance

La définition et les exemples donnés pour chaque type de maltraitance ont été développés à la suite d’une minutieuse analyse de plusieurs définitions de la maltraitance envers les personnes aînées, incluant d’anciennes et d’actuelles définitions stratégique, juridiques et de rechercheNote de bas de page 3. D’autres définitions en usage dans le domaine de la violence interpersonnelle, comme la maltraitance des enfants ont aussi été une source d’inspiration. Elles ont mené à l’introduction d’une mise en garde quant à la négligence physique qui devrait être considérée en prenant compte des ressources disponibles pour la personne ou groupe qui est vu comme maltraitant puisque « les valeurs culturelles, les normes de soins dans la communauté, et la pauvreté peuvent contribuer à ce qui est perçu comme de la maltraitance » [Traduction libre] (Childwelfare Information Gateway, 2019, p.3). Au Québec, par exemple, la Loi sur la protection de la jeunesse définit la négligence physique comme :

« [...]soit sur le plan physique, en ne lui assurant pas l’essentiel de ses besoins d’ordre alimentaire, vestimentaire, d’hygiène ou de logement compte tenu de leurs ressources » (Art 38).

En effet, dans le contexte de la maltraitance envers les personnes aînées, il est aussi possible que la personne ou le groupe n’arrive pas à subvenir aux besoins de la personne de qui ils prennent soin, malgré leur meilleure intention parce qu’ils ne sont pas en mesure d’accéder aux ressources requises pour faire mieux. Donc, une exception à cet effet a été ajoutée à la définition.

À noter, les exemples énoncés ci-dessous ne sont pas exhaustifs. Leur but est de donner une idée générale de comment la maltraitance envers les personnes aînées peut se manifester à travers chaque type, mais il y a plusieurs événements potentiels qui ne sont pas décrits qui pourrait être de la maltraitance.

5.1 Maltraitance psychologique

La maltraitance psychologique est caractérisée par des gestes, des paroles, des attitudes ou un défaut d’actions appropriées qui constituent une atteinte à l’intégrité psychologique, émotive et morale, la santé ainsi qu’à la sécurité et au bien-être d’une personne aînée.

  • Sous forme de violence, elle peut se manifester par le chantage émotionnel, la manipulation, l’humiliation, l’insulte, l’infantilisation, le rabaissement, les menaces verbales et non verbales, la privation de pouvoir, l’excès, les commentaires xénophobes, capacitistes, sexistes, homophobes, biphobes, transphobes, l’invalidation des croyances de la personne par la moquerie et la critique des pratiques spirituelles (par exemple, les prières), les accusations de sorcellerie, l’utilisation des croyances spirituelles de quelqu’un pour le tromper ou l’amener à faire quelque chose qu’il ne ferait pas autrement, le bris de symboles spirituels, etcetera.
  • Sous forme de négligence, elle peut se manifester par le rejet, l’indifférence, l’isolement social, le désintérêt, l’insensibilité, ne pas tenir compte des besoins spirituels de la personne, ne pas fournir des conditions favorables à l’exercice de sa spiritualité, etcetera.

N.B. Des gestes ou paroles qui dévalorise les autres basés sur leurs sexe, sexualité, orientation sexuelle, identité ou expression de genre sont considérés comme de la maltraitance psychologique plutôt que de la maltraitance sexuelle puisque leurs conséquences principales affectent l’intégrité psychologique, émotive et morale, la santé ainsi qu’à la sécurité et au bien-être d’une personne aînée. Néanmoins, dans le cas d’événement qui affecte ces aspects de la vie d’une personne aînée, il peut y avoir du chevauchement entre les deux types.

5.2 Maltraitance physique

La maltraitance physique est caractérisée par des gestes, des paroles, des attitudes ou un défaut d’actions appropriées qui constituent une atteinte à l’intégrité physique, émotive et morale, la santé ainsi qu’à la sécurité et au bien-être d’une personne aînée.

  • Sous forme de violence, elle peut se manifester par la bousculade, le rudoiement, les coups, la brûlure, l’alimentation forcée, l’administration inadéquate de la médication, l’utilisation inappropriée de contentions (physiques ou chimiques), etcetera.
  • Sous forme de négligence, elle peut se manifester par la privation de conditions raisonnables de confort, la non-assistance à l’alimentation, à l’habillement, à l’hygiène ou à l’administration de la médication lorsqu’on est responsable d’une personne en situation de dépendance.

N.B. Ne pas fournir ce qui est nécessaire en matière d’alimentation, d’habillement, d’hygiène ou de logement devrait être considéré comme de la négligence seulement dans les cas où la personne ou groupe était en mesure d’accéder et d’utiliser les ressources requises pour faire mieuxNote de bas de page 4.

Les événements de nature médicale, comme l’administration inappropriée de médicaments et l’utilisation de contentions physiques et chimiques, sont parfois classés dans un type distinct (maltraitance médicale). Ce type n’a pas été retenu pour cette définition. Par conséquent, la plupart de ces événements seraient classés dans la catégorie de maltraitance physique.

5.3 Maltraitance sexuelle

La maltraitance sexuelle est caractérisée par des gestes, des paroles ou des attitudes non consentis, indésirables ou forcés, ou à un défaut d’actions appropriées qui cause ou risque de causer des conséquences négatives à l’intégrité sexuelle, à la santé, à la sécurité et au bien-être d’une personne aînée.

  • Sous forme de violence, elle peut se manifester par (mais n’est pas limitée à), des blagues ou des commentaires dégradants à connotation sexuelle, des avances sexuelles, des contacts ou comportements qui vont à l’encontre du consentement ou qui devraient raisonnablement être reconnu comme inappropriés, des agressions sexuelles, etcetera.
  • Sous forme de négligence, elle peut se manifester par (mais n’est pas limitée à) le manque d’intimité, le fait de traiter les personnes aînées comme des êtres asexués ou de les empêcher d’exprimer leur sexualité, etcetera.

N.B. Étant donné que les gestes visés par ce type peuvent entraîner des conséquences de nature physique et psychologique, il est parfois difficile de déterminer sous quel type ils devraient être classés. C’est le cas, entre autres, des commentaires sexistes, homophobes ou transphobes qui sont parfois de nature psychologique et parfois de nature sexuelle.

5.4 Maltraitance matérielle ou financière

La maltraitance matérielle ou financière est caractérisée par des gestes, des paroles, des attitudes ou un défaut d’actions appropriées qui constituent une atteinte à l’intégrité financière, à la santé, à la sécurité et au bien-être d’une personne aînée ou à son bien.

  • Sous forme de violence, elle peut se manifester par la pression pour modifier un testament, d’opérations bancaires sans le consentement de la personne (utilisation d’une carte de débit, transaction bancaire en ligne, etcetera), de détournement d’argent ou d’actifs, de prix excessifs facturés pour les services fournis, d’opérations contractuelles ou d’assurance forcée ou dissimulée, de vol d’identité, de signature d’un bail sous pression, etcetera.
  • Sous forme de négligence, elle peut se manifester par le défaut de gérer les biens de la personne dans son intérêt ou de fournir les biens ou les services nécessaires, par le défaut d’évaluer les capacités, la compréhension et la littératie financière de la personne, etcetera.

N.B. Les cas de vol d’identité sont habituellement considérés sous ce type, car leurs conséquences sont généralement de nature financière.

6. Principaux facteurs d’influence

Pour développer la définition stratégique, le Gouvernement a pris en considération les différentes réalités de vies pour s’assurer qu’elles peuvent être applicables à toutes personnes aînées, peu importe leurs caractéristiques démographiques. La définition stratégique doit être vue d’une manière intersectionnelle qui prend en compte les expériences variées des personnes aînées s’identifiant à différentes identités socioculturelles.

6.1 Âge chronologique : À quel moment une personne est-elle « aînée » ?

L’âge chronologique, qui est souvent inclus avec les mentions de « personnes aînées » pour préciser à qui ce terme réfère, est absent de cette définition. Il a été exclu afin de s’assurer que la définition demeurerait applicable même si l’âge auquel une personne est considérée comme aînée venait à changer. De plus, les experts contestent souvent l’utilisation de l’âge chronologique comme indicateur du vieillissement, notant que les indicateurs physiques, psychologiques et sociaux sont plus appropriés (Morgan et Konkel., 2016).

Cependant, il est reconnu que l’âge chronologique est la méthode la plus simple pour définir les critères d’admissibilité aux programmes ou aux services. Au Canada, on utilise généralement l’âge de 65 ans pour qualifier une personne d’aînée, puisque c’est l’âge auquel la plupart des gens deviennent admissibles à la pension de la Sécurité de la vieillesse. Néanmoins, il est courant pour les personnes qui ont connu certains problèmes de santé physique, psychologique ou cognitive ou qui ont traversé des expériences de vie difficiles (incarcération, itinérance, violence, etcetera) de montrer des signes avancés de vieillissement et des caractéristiques associées aux personnes aînées à l’âge de 60 ans, 55 ans ou moins.

6.2 Diversité et intersectionnalité : Qui subit de la maltraitance ?

« Vieillir ne veut pas dire rompre avec son passé pour entrer dans une catégorie distincte de la population. Au contraire, le vieillissement fait le plus souvent partie de la continuité d’une existence marquée par son individualité et par son appartenance à des groupes différents » [Traduction libre] (Wallach, 2012, p.5).

Ainsi, les personnes aînées représentent une partie diversifiée de la population. Une partie ayant différents sexes, orientations sexuelles, identités de genre, expressions de genre et de genres perçus, croyances, langues, antécédents ethnoculturels, capacités physiques et cognitives et expérience vécue. Cette diversité, même si elle mérite d’être soulignée, peut créer des défis uniques pour certaines personnes aînées. En particulier celles qui appartiennent à un groupe marginalisé (par exemple, peuples autochtones, membres des communautés 2ELGBTQI+, groupes ethnoculturels, nouveaux immigrants et personnes en situation de handicap) (Walsh et coll., 2010; Owen-Williams, 2012; Haukioja, 2016; Cooper et coll., 2020; Gutman et coll., 2020; Penhale, 2020; Beaulieu et coll., 2022b). Cette diversité est également présente dans les divers milieux où vivent les personnes aînées (domicile, foyers multigénérationnels, établissements résidentiels, régions rurales et éloignées et prisons) (Beaulieu et St-Martin, 2022). Les facteurs individuels et environnementaux comme les barrières linguistiques, les services inadaptés, les disparités économiques, le manque de soutien social et les expériences de discrimination, entre autres, peuvent tous accroître le risque de maltraitance ou rendre plus complexe la recherche d’aide dans les cas de maltraitance. Par exemple, pour les peuples autochtones, il faut considérer les séquelles du système des pensionnats ainsi que de leurs différences géographiques, économiques et sociales.

La lutte contre la maltraitance signifie donc qu’il faut prendre en compte le rôle des facteurs structurels dans les difficultés rencontrées par les personnes aînées et l’intersection de leurs multiples caractéristiques et positions sociales (Wallach, 2012). Par conséquent, l’adoption d’une approche intersectionnelle afin de comprendre et contrer la maltraitance envers les personnes aînées nécessite d’étudier « les interactions avec d’autres facteurs sociaux tels que le genre, le sexe, la race, l’origine ethnique, l’identité autochtone, le handicap, l’orientation sexuelle, l’identité de genre, la religion, le statut social, le lieu d’origine et le statut d’immigration » [Traduction libre] (Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations Unies, 2023, n.p.).

6.3 Contexte : Qu’est-ce qui entoure la maltraitance ?

La maltraitance envers les personnes aînées est un enjeu complexe qui est influencé par divers facteurs individuels et environnementaux. Elle peut être liée aux antécédents familiaux, aux relations de voisinage, à l’état de santé, à la situation socioéconomique, à l’ethnicité, au milieu culturel, aux sexes, aux orientations sexuelles, aux genres, aux identités de genre, aux expressions de genre et aux genres perçus, et plus encore. C’est ce qui brosse un portrait du contexte dans lequel la maltraitance se produit et rend chaque maltraitance différente (Lindenberg et al, 2013).

Il est essentiel de tenir compte de ces éléments particuliers et de leurs répercussions pour tous les acteurs qui interviennent dans la lutte contre la maltraitance. Cependant, il est important de noter que différentes personnes peuvent avoir des interprétations différentes d’un événement et de son contexte. Par conséquent, pour trouver une solution appropriée et les meilleures mesures à prendre, une communication ouverte est nécessaire. Il ne s’agit pas seulement d’échanger avec les divers acteurs, mais aussi d’écouter les points de vue, les besoins, les préférences et les souhaits des personnes aînées.

6.4 Âgisme : Un enjeu mondial associé à la maltraitance

L’âgisme est un problème multidimensionnel qui touche à la fois l’individu et la société. Défini comme « les stéréotypes (la façon d’envisager l’âge), les préjugés (ce qu’inspire l’âge) et la discrimination (la façon de se comporter), dont on est soi-même victime ou dont autrui est victime en raison de l’âge » (OMS, 2021, encadré 1), il peut avoir des effets concrets sur divers aspects de la vie personnelle et sociale des personnes aînées. De plus, il peut agir comme un motif conscient ou inconscient ou comme un facteur légitimant la maltraitance. Par conséquent, la reconnaissance de l’âgisme et de ses répercussions et le maintien des efforts pour lutter contre l’âgisme sont essentiels dans la lutte contre la maltraitance. À cet égard, l’OMS a identifié la lutte contre l’âgisme comme la priorité mondiale numéro un pour lutter contre la maltraitance envers les personnes aînées au cours de la Décennie du vieillissement en bonne santé (2021 à 2030) (OMS, 2022a).

6.5 Violation des droits : Un enjeu transversal constaté dans tous les types de maltraitance

Il est important de reconnaître que les personnes aînées ont les mêmes droits que tout autre adulte et que ces droits peuvent être violés dans tous les cas de maltraitance. La lutte contre la maltraitance exige une approche globale qui comprend la promotion et la protection des droits de la personne des personnes aînées. Il s’agit non seulement de s’attaquer au tort immédiat causé par la maltraitance, mais aussi de s’attaquer aux facteurs structurels sous-jacents qui contribuent à ces violations, comme l’âgisme, la discrimination et l’inégalité (ONU, n.d.; Chaire de recherche sur la maltraitance envers les personnes aînées et coll., 2022).

6.6 Violence interpersonnelle à tous les âges et dans tous les contextes

La maltraitance peut être vécue à différents âges de la vie (de la naissance à la mort) et dans divers milieux (maison, école, travail, établissements, prisons, etcetera). Selon la population d’intérêt, il est clair que le domaine d’études, la défense et les interventions prennent des formes légèrement différentes et sont désignés différemment. Par conséquent, nous sommes exposés à des concepts comme la violence envers les enfants ou la maltraitance, la violence entre partenaires intimes, la maltraitance des personnes aînées, la violence entre résidents, la violence en milieu de travail, l’intimidation, etcetera. Tous ces domaines partagent une préoccupation pour la violence interpersonnelle, et certains comprennent la maltraitance commise au sein de groupes, de communautés et même d’organisations. De plus, certains de ces domaines, notamment ceux qui concernent les enfants et les personnes aînées, comprennent explicitement la négligence.

Le dialogue entre tous les domaines qui s’intéressent à la violence interpersonnelle est essentiel, car ils interagissent, se recoupent ou se chevauchent en tout ou en partie. Un élément central afin d’ouvrir ce dialogue est l’adoption d’une approche de parcours de vie qui promeut la documentation des effets de la maltraitance à tout âge, à court et à long terme. Plusieurs études qui ont adopté cette approche ont déjà démontré une forte corrélation entre le fait d’être d’avoir subi de la maltraitance en tant que personne aînée et le fait d’avoir été victime de maltraitance en tant qu’enfant (McDonald et Thomas, 2013).

7. Annexe A - Aperçu général

Définition de la maltraitance envers les personnes aînées

La maltraitance envers les personnes aînées est un événement singulier ou répétitif qui se produit dans le cadre d’une relation où il devrait y avoir de la confiance et qui implique une personne, un groupe, une communauté ou une organisation. Elle se manifeste par un geste, une parole, une attitude ou une absence d’action appropriée qui cause ou risque de causer des conséquences négatives pour une personne aînée.

Cela inclut des événements de maltraitance physique, psychologique, matérielle ou financière et sexuelle qui peuvent s’exprimer sous la forme de violence (gestes, paroles ou attitudes) ou de négligence (absence d’action appropriée).Note de bas de page 5

Types de maltraitance

Maltraitance psychologique

La maltraitance psychologique est caractérisée par des gestes, des paroles, des attitudes ou un défaut d’actions appropriées qui constituent une atteinte à l’intégrité psychologique, émotive et morale, la santé ainsi qu’à la sécurité et au bien-être d’une personne aînée.

Sous forme de violence, elle peut se manifester par le chantage émotionnel, la manipulation, l’humiliation, l’insulte, l’infantilisation, le rabaissement, les menaces verbales et non verbales, la privation de pouvoir, l’excès, les commentaires xénophobes, capacitistes, sexistes, homophobes, biphobes, transphobes, l’invalidation des croyances de la personne par la moquerie et la critique des pratiques spirituelles (par exemple, les prières), les accusations de sorcellerie, l’utilisation des croyances spirituelles de quelqu’un pour le tromper ou l’amener à faire quelque chose qu’il ne ferait pas autrement, le bris de symboles spirituels, etcetera.

Sous forme de négligence, elle peut se manifester par le rejet, l’indifférence, l’isolement social, le désintérêt, l’insensibilité, ne pas tenir compte des besoins spirituels de la personne, ne pas fournir des conditions favorables à l’exercice de sa spiritualité, etcetera.

N.B. Des gestes ou paroles qui dévalorise les autres basés sur leurs sexe, sexualité, orientation sexuelle, identité ou expression de genre sont considérés comme de la maltraitance psychologique plutôt que de la maltraitance sexuelle puisque leurs conséquences principales affectent l’intégrité psychologique, émotive et morale, la santé ainsi qu’à la sécurité et au bien-être d’une personne aînée. Néanmoins, dans le cas d’événement qui affecte ces aspects de la vie d’une personne aînée, il peut y avoir du chevauchement entre les deux types.

Maltraitance physique

La maltraitance physique est caractérisée par des gestes, des paroles, des attitudes ou un défaut d’actions appropriées qui constituent une atteinte à l’intégrité physique, émotive et morale, la santé ainsi qu’à la sécurité et au bien-être d’une personne aînée.

Sous forme de violence, elle peut se manifester par la bousculade, le rudoiement, les coups, la brûlure, l’alimentation forcée, l’administration inadéquate de la médication, l’utilisation inappropriée de contentions (physiques ou chimiques), etcetera.

Sous forme de négligence, elle peut se manifester par la privation de conditions raisonnables de confort, la non-assistance à l’alimentation, à l’habillement, à l’hygiène ou à l’administration de la médication lorsqu’on est responsable d’une personne en situation de dépendance.

N.B. Ne pas fournir ce qui est nécessaire en matière d’alimentation, d’habillement, d’hygiène ou de logement devrait être considéré comme de la négligence seulement dans les cas où la personne ou groupe était en mesure d’accéder et d’utiliser les ressources requises pour faire mieux. Les événements de nature médicale, comme l’administration inappropriée de médicaments et l’utilisation de contentions physiques et chimiques, sont parfois classés dans un type distinct (maltraitance médicale). Ce type n’a pas été retenu pour cette définition. Par conséquent, la plupart de ces événements seraient classés dans la catégorie de maltraitance physique.

Maltraitance sexuelle

La maltraitance sexuelle est caractérisée par des gestes, des paroles ou des attitudes non consentis, indésirables ou forcés, ou à un défaut d’actions appropriées qui cause ou risque de causer des conséquences négatives à l’intégrité sexuelle, à la santé, à la sécurité et au bien-être d’une personne aînée.

Sous forme de violence, elle peut se manifester par (mais n’est pas limitée à), des blagues ou des commentaires dégradants à connotation sexuelle, des avances sexuelles, des contacts ou comportements qui vont à l’encontre du consentement ou qui devraient raisonnablement être reconnu comme inappropriés, des agressions sexuelles, etcetera.

Sous forme de négligence, elle peut se manifester par (mais n’est pas limitée à) le manque d’intimité, le fait de traiter les personnes aînées comme des êtres asexués ou de les empêcher d’exprimer leur sexualité, etcetera.

N.B. Étant donné que les gestes visés par ce type peuvent entraîner des conséquences de nature physique et psychologique, il est parfois difficile de déterminer sous quel type ils devraient être classés. C’est le cas, entre autres, des commentaires sexistes, homophobes ou transphobes qui sont parfois de nature psychologique et parfois de nature sexuelle.

Maltraitance matérielle ou financière

La maltraitance matérielle ou financière est caractérisée par des gestes, des paroles, des attitudes ou un défaut d’actions appropriées qui constituent une atteinte à l’intégrité financière, à la santé, à la sécurité et au bien-être d’une personne aînée ou à son bien.

Sous forme de violence, elle peut se manifester par la pression pour modifier un testament, d’opérations bancaires sans le consentement de la personne (utilisation d’une carte de débit, transaction bancaire en ligne, etcetera), de détournement d’argent ou d’actifs, de prix excessifs facturés pour les services fournis, d’opérations contractuelles ou d’assurance forcée ou dissimulée, de vol d’identité, de signature d’un bail sous pression, etcetera.

Sous forme de négligence, elle peut se manifester par le défaut de gérer les biens de la personne dans son intérêt ou de fournir les biens ou les services nécessaires, par le défaut d’évaluer les capacités, la compréhension et la littératie financière de la personne, etcetera.

N.B. Les cas de vol d’identité sont habituellement considérés sous ce type, car leurs conséquences sont généralement de nature financière.

Principaux facteurs d’influence

À quel moment une personne est-elle « aînée »?

Au Canada, l’âge de 65 ans est typiquement utilisé pour qualifier une personne d’aînée, mais il est commun pour les personnes qui ont traversé des expériences de vie difficile de présenter des caractéristiques associées aux personnes aînées avant cet âge.

Qui subit de la maltraitance ?

Les personnes aînées représentent une partie extrêmement diversifiée de la population; ayant différents sexes, orientations sexuelles, identités de genre, expressions de genre et de genres perçus, croyances, langues, antécédents ethnoculturels, capacités physiques et cognitives et expérience vécue. La lutte contre la maltraitance signifie donc qu’il faut prendre en compte le rôle des facteurs individuels, environnementaux et structurels dans les difficultés rencontrées par les personnes aînées de même que l’intersection de leurs multiples caractéristiques et positions sociales.

Qu’est-ce qui entoure la maltraitance ?

La maltraitance envers les personnes aînées est un enjeu complexe qui est influencé par divers facteurs individuels et environnementaux. Elle peut être liée aux antécédents familiaux, aux relations de voisinage, à l’état de santé, à la situation socioéconomique, à l’ethnicité, au milieu culturel, aux sexes, aux orientations sexuelles, aux genres, aux identités de genre, aux expressions de genre, aux genres perçus et plus encore. C’est ce qui brosse un portrait du contexte dans lequel la maltraitance se produit et rend chaque maltraitance différente.

Âgisme : Un enjeu mondial associé à la maltraitance

L’âgisme est défini comme les stéréotypes, les préjugés et la discrimination, dont on est soi-même victime ou dont autrui est victime en raison de l’âge. Il peut avoir des effets concrets sur divers aspects de la vie personnelle et sociale des personnes aînées et peut agir comme un motif conscient ou inconscient légitimant la maltraitance. La reconnaissance de l’âgisme et de ses répercussions et le maintien des efforts pour lutter contre l’âgisme sont essentiels dans la lutte contre la maltraitance.

Violation des droits : Un enjeu transversal constaté dans tous les types de maltraitance

Les personnes aînées ont les mêmes droits que tout autre adulte et ces droits peuvent être bafoués dans tous les cas de maltraitance. Par conséquent, la lutte contre la maltraitance exige une approche globale qui comprend la promotion et la protection des droits des personnes aînées.

Violence interpersonnelle à tous les âges et dans tous les contextes

La maltraitance peut être vécue à différents âges de la vie (de la naissance à la mort) et dans divers milieux (maison, école, travail, établissements, prisons, etcetera.). Les concepts comme la maltraitance envers les enfants, la violence entre partenaires intimes, la maltraitance envers les personnes aînées, l’intimidation, etcetera. peuvent souvent interagir, se recouper ou se chevaucher en tout ou en partie. Ainsi le dialogue entre tous les domaines qui s’intéressent à la violence interpersonnelle est essentiel et l’adoption d’une approche de parcours de vie peut aider à ouvrir ce dialogue.

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