Lettres à la rédaction (La Revue de l'ARC - HIVER 2016 - Volume 5, Numéro 1)
Note du rédacteur : Bien qu’il ne s’agisse pas strictement d’une lettre à la rédaction, les commentaires ci-dessous reflètent une lecture réfléchie de l’article intitulé « Le professionnalisme dans la maîtrise de la culture de la puissance aérienne et l'Aviation royale canadienne : Repenser l'éducation et le perfectionnement professionnel en matière de culture de la puissance aérienne », du présent numéro de la Revue. J’espère bien qu’il s’agira des premiers commentaires et observations d’une longue série sur le sujet.
Paragraphe 2. J’estime que la première phrase est trop axée sur les opérateurs. À mon avis, lorsque nous discutons de l’importance du capital intellectuel de l’Aviation royale canadienne (ARC), les personnes qui lisent l’article doivent comprendre que c’est important dans tous les aspects du fonctionnement de l’ARC (communications, logistique, maintenance, etc.) et non seulement au niveau des leaders. Le paragraphe porte également sur la façon dont les questions sont nuancées, que les problèmes sont différents du point de vue stratégique et que des compétences différentes sont requises. Je dirais qu’il faut des compétences et expériences diverses et que l’article doit les définir. Qui plus est, l’institution devra s’ajuster pour s’assurer que le perfectionnement de ces compétences est valorisé et récompensé. Il s’agira du plus grand défi selon moi. On discute également des difficultés de l’ARC à justifier l’acquisition de nouvelles capacités et des ressources connexes. Je pense qu’il faut inclure ici le thème intégré de votre Puissance aérienne (agilité, intégration, portée, puissance) et de développer le sujet au paragraphe 3.
Paragraphe 3. Le paragraphe porte sur la compréhension du fonctionnement et des activités de l’ARC. Encore une fois, j’estime qu’il est important de comprendre cela aussi en fonction d’autres éléments et domaines. Là où je veux en venir, c’est que les membres de la force aérienne doivent non seulement comprendre le fonctionnement et les activités de l’ARC, mais aussi ceux de l’Armée canadienne, de la Marine et des Forces d’opérations spéciales; les membres de la force aérienne doivent également comprendre les domaines spatiaux et cybernétiques pour faire en sorte que les concepts que nous développons soient utiles et qu’ils rayonnent dans l’ensemble des Forces armées canadiennes. Je comprends qu’il faut se concentrer sur la doctrine et à la mentalité aéronautique dans l’ARC, mais je pense que nous devons soumettre l’idée qu’il est important de comprendre toutes les personnes avec lesquelles nous interagissons dans le cadre de diverses opérations. Il s’agira d’un investissement lorsque nos leaders passeront à des niveaux plus stratégiques.
Paragraphe 4. Dans le même ordre d’idées, j’ajouterais à la fin du paragraphe un commentaire sur les échanges, soit avec d’autres éléments ou d’autres pays, puisqu’il est avantageux de miser sur divers types d’éducation, d’expérience et de points de vue. Nous devons définir les compétences requises, mais ne pas être trop normatifs pour ce qui est de la façon d’acquérir ces compétences. Nous devons laisser place à l’innovation.
Paragraphe 6 c. Même commentaire sur l’intégration que le commentaire susmentionné.
Paragraphe 11. Je pense que les quatre priorités soulignées par le commodore de l’air Wait sont toujours très pertinentes de nos jours et témoignent d’un officier qui avait la bonne vision de ce qui était avantageux pour l’ARC. Son troisième point souligne l’importance de comprendre les forces armées dans leur ensemble, leurs opérations et la façon dont l’ARC peut y contribuer.
Paragraphe 15. Excellent. Je crois en l’importance d’établir une base solide et de maîtriser les compétences de base de notre métier. J’estime que cela commence avec le recrutement, puis je pense que la période de perfectionnement (PP) 2 de l’ARC est absolument essentielle.
Paragraphe 16. Il fait le point sur les études intéressées par opposition à celles dictées/récompensées par le commandement. Je me demande si cela a changé. Il semble y avoir des efforts déployés pour accomplir cela maintenant, ce qui est excitant. Nous devons nous assurer que les compétences recherchées par les leaders de l’ARC sont celles qui sont récompensées. Cela est plus facile à dire qu’à faire, mais c’est absolument essentiel. Cela permettra de déterminer quels seront les leaders de demain et ainsi la culture de l’institution. De plus, lorsque les bons leaders seront en place, cela donnera lieu à un cercle vertueux où la culture attirera et générera le type de personnes que nous recherchons. Cela me rapporte à mon commentaire du paragraphe 15, où il faut mettre l’accent sur le recrutement des bonnes personnes, et s’assurer qu’après la PP 2, nous avons mis en place de bonnes bases au niveau du capitaine sur lesquelles nous pouvons miser.
Paragraphe 17. Je n’aime pas la première phrase sur le leadership et la gestion. J’estime qu’il y a une très grande différence entre ces deux concepts. Lorsque je parle du type de personnes que nous devons recruter et ce que nous voulons générer et identifier à la PP 2, je pense que nous ne devons pas tant mettre l’accent sur les gestionnaires, mais plutôt sur les leaders. C’est de cette façon que l’ARC formera ses futurs commandants et, si j’ai bien compris, la culture que vous souhaitez.
Paragraphes 18/19/20. Malheureusement, c’est encore vrai de nos jours. Je suis tout à fait d’avis que l’accent mis sur l’éducation au sein de l’ARC doit être dirigé par le commandement. Je pense que nous travaillons tous très fort, mais nous devons travailler avec intelligence. Le paragraphe 20 est excellent. Mon ancien entraîneur de hockey disait : la vitesse tue si tu ne sais pas où tu t’en vas.
Paragraphe 23. Excellent paragraphe.
Paragraphe 24 b. Encore une fois, c’est un peu trop général, car il parle de comprendre nos activités et le système dans lequel nous travaillons. Il faudrait être plus précis pour que le lecteur comprenne ce que vous essayez de dire.
Paragraphe 25. La dernière phrase est très bonne.
Paragraphe 40. Je n’aime pas la partie qui parle de la concurrence avec l’Armée, la Marine et d’autres ministères pour des ressources. Je comprends l’intention, mais j’estime que ça va directement à l’encontre de votre message qui consiste à « voler en formation ». Je pense que nous devons penser en termes de mesures prospectives et non en termes de mesures de résultat; nous devons donc nous concentrer à offrir le meilleur de nous-mêmes en tant qu’officiers de l’ARC, puis espérer que cela nous permettra de réaliser nos objectifs.
Pour conclure :
Lieutenant-colonel Jeannot Boucher, MSM, CD
ARC―Aviation royale canadienne
PP―période de perfectionnement
La réflexion critique et analytique est ce qui distingue principalement les suiveurs des meneurs. Si nous voulons être des meneurs (même avant de penser à la « maîtrise de la culture de la puissance aérienne »), nous devons nous appuyer sur l’élément fondamental de la réflexion critique.
Selon moi, la réflexion critique est la première ligne de défense contre l’illogisme, le statu quo, la mentalité du cloisonnement et les arguments non étayés. La réflexion critique consiste à demeurer en contrôle et à ne pas suivre les autres comme un mouton. Elle vise à recueillir des informations avec impartialité et à savoir comment prendre des décisions en s’appuyant sur des faits plutôt que sur la mentalité « c’est ce que nous avons toujours fait ».
L’article intitulé « Le professionnalisme dans la maîtrise de la culture de la puissance aérienne et l’Aviation royale canadienne : Repenser l’éducation et le perfectionnement professionnel en matière de culture de la puissance aérienne » (inclus dans le présent numéro de la Revue) a raison en ce qui concerne une chose : nous avons un urgent besoin de réflexion critique au sein de l’Aviation royale canadienne. Quels sont les symptômes? Les erreurs répétitives et dangereuses, les mauvaises décisions, les projets infructueux, l’inaction lorsque l’action est justifiée, les hypothèses erronées, les programmes d’entraînement désuets, une formation de quatre ans pour les commandants de bord, une culture axée sur les grades, les taux d’attrition élevés et une mauvaise gestion des ressources financières. Cette liste devrait être suffisante pour susciter une réflexion, mais surtout, nous ne devrions jamais oublier qu’un manque de réflexion critique et analytique mène à une conséquence ultime : la perte de vies dans un domaine à risque élevé.
Ma propre réflexion critique m’indique qu’il est improductif d’affecter des ressources pour établir un lien élégant entre le déclin de la maîtrise de la culture de la puissance aérienne et la nécessité d’établir une réflexion critique. C’est un fait! Les véritables questions à se poser sont les suivantes : Que pouvons-nous faire? Comment réformer notre culture afin d’empêcher les employés qui ont un excellent rendement d’aller vers des milieux intellectuels plus intéressants? Comment demeurer compétent à l’ère de l’information lorsque le pouvoir décisionnel ne relève plus des dirigeants et qu’il est fermement cristallisé dans des processus et des procédures qui dégagent de toute responsabilisation et de la prise de risques calculés?
Si nous devons reprendre la maîtrise de la culture de la puissance aérienne grâce à l’utilisation de la réflexion critique, il nous faut commencer par utiliser de l’équipement moderne et efficace. Nos membres de la force aérienne doivent être compétents et voler tous les jours. Notre culture et nos superviseurs doivent reconnaître les compétences et favoriser l’excellence. Il faut mener des exercices et effectuer des échanges avec nos alliés afin d’optimiser le transfert de connaissances et d’acquérir des connaissances pratiques. Notre culture organisationnelle doit favoriser l’amélioration continue et la remise en question du statu quo. Notre culture doit être axée sur une réflexion moderne et simplifiée plutôt que sur la peur et sur une règle d’exception pour chaque résultat. Nos dirigeants ne doivent pas craindre d’argumenter et de poser des questions au gouvernement, et ils doivent faire confiance à leur équipe et leur laisser faire leur travail – même lorsqu’il y a des risques.
J’espère inciter à la réflexion et provoquer un sentiment d’urgence; je suggère de mettre l’accent sur des actions tangibles qui auront une incidence immédiate.
Capitaine Jean Le Bouthillier, MSc
Officier de liaison, Commandement des Forces d’opérations spéciales du Canada
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