John Edwin Gardiner, un exemple de courage pendant le raid contre Dieppe
Article de nouvelles / Le 16 août 2019
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Par le major (à la retraite) William March
Le sous-lieutenant d’aviation John Edwin Gardiner naît à Lemberg, en Saskatchewan, le 8 juillet 1919. Il est l’aîné de James Garfield Gardiner et de sa seconde femme, Violet (McEwen). La carrière politique de son père, d’abord député à l’Assemblée législative, puis premier ministre de la Saskatchewan et, enfin, député libéral, fait en sorte que John doit fréquenter plusieurs écoles à Lemberg, à Regina et à Ottawa. Cependant, c’est lors de son séjour à Regina qu’il se découvre une passion pour l’aviation, pendant son apprentissage du vol à l’aéro-club près de chez lui.
Après avoir obtenu son diplôme du Glebe Collegiate d’Ottawa, il poursuit ses études à l’Université de Toronto en ingénierie. Désireux de détenir un diplôme en aéronautique, il choisit plutôt de s’enrôler dans l’Aviation royale canadienne le 19 novembre 1940.
Il suit alors une formation qui le mène à la 2e École élémentaire de pilotage à Fort William (aujourd’hui Thunder Bay), puis à la 11e École de pilotage militaire à Yorkton, en Saskatchewan. Il reçoit son brevet de pilote le 7 octobre 1941. Moins d’un mois plus tard, il s’embarque pour l’Angleterre. Affecté à la 8e École de pilotage militaire à la base de la Royal Air Force (RAF) de Montrose, en Écosse, M. Edwin entreprend son instruction de pilote de chasse à bord du Hawker Hurricane, avant de passer à l’Unité d’entraînement opérationnel de la RAF située à Hawarden, au pays de Galles, où il apprend à piloter le Supermarine Spitfire.
Pendant l’affectation de M. Gardiner au 403e Escadron « City of Calgary » en avril 1942, situé à la base de la RAF de North Weald, dans le comté d’Essex, le commandant de l’Unité d’entraînement note que le jeune Canadien promet de « devenir un dirigeant efficace, vu sa passion et sa grande fiabilité. Il possède une aptitude naturelle supérieure à la moyenne, qui, conjuguée à son sens bien défini des responsabilités au sol, devrait faire de lui un atout dans n’importe quel escadron. » [Traduction libre]
Au cours des mois suivants, John accumule de l’expérience aux commandes de Spitfire Mark Vb dans le ciel mortel au-dessus de l’Europe occupée. Il entreprend sa première mission opérationnelle le 8 mai 1942 où, avec le reste de son escadron, il escorte six bombardiers légers Boston menant une attaque contre le port français de Dieppe.
Les missions de ratissage opérationnel et d’escorte sont entrecoupées d’intenses séances d’instruction qui peuvent, parfois, valoir des ennuis à un pilote excessivement enthousiaste. Le 1er août, pendant que l’escadron est établi à la base de la RAF de Catterick, dans le comté de North Yorkshire, on inscrit ce qui suit dans le registre des opérations de l’escadron : « Le sous-lieutenant d’aviation J. E. Gardiner a été accusé de vol en basse altitude. Il revenait d’un exercice de tir contre des cibles aériennes et d’enregistrement cinématographique (…) le 27 juillet, et a été aperçu volant à basse altitude (…). Il ne volait pas trop près du sol délibérément; il se contentait d’observer le terrain qu’il survolait (…) en vue de se familiariser avec l’apparence du sol en vol à basse altitude. » En dépit de ce « terrible » méfait, l’entrée dans le registre note aussi : « Le sous-lieutenant d’aviation Gardiner est assurément le pilote le plus stable de l’escadron. Il ne boit pas d’alcool, adore particulièrement voler, est très consciencieux et prend temporairement la place du numéro second en vol. » [Traduction libre]
En fait, le sort veut que la dernière mission opérationnelle du sous-lieutenant d’aviation Gardiner ait lieu au même endroit que sa première. Le 16 août 1942, le 403e Escadron décolle de la base de la RAF de Manston, dans le comté de Kent, pour se préparer à appuyer l’opération Jubilee : le raid contre Dieppe. À 6 h 45, le 19 août, douze aéronefs du 403e Escadron s’envolent pour mener la première de leurs quatre missions de la journée. Une demi-heure plus tard, à son arrivée au-dessus des plages, l’escadron prend immédiatement d’assaut des chasseurs allemands. Le combat est bref et intense, et plusieurs pilotes perdent la vie. En dépit des deux aéronefs ennemis abattus par les pilotes de l’escadron, ils découvrent, à leur retour au champ d’aviation, à 8 h 20, que trois pilotes de leur unité manquent à l’appel, dont John Gardiner.
Pendant le combat, le Spitfire du sous-lieutenant d’aviation Norman Monchier, de Dartmouth, en Nouvelle-Écosse, subit des dommages graves qui nuisent grandement à sa manœuvrabilité. John amène alors son aéronef aux côtés de celui de son ami, tentant du mieux qu’il peut de protéger ce dernier, pendant qu’ils sont pris en chasse par un aéronef allemand. Incapables d’échapper à l’ennemi, les deux aéronefs entrent en collision, puis s’écrasent au sol.
Dans sa lettre du 25 août adressée à la mère de John, le commandant d’aviation Leslie Sydney Ford, de Shelburne, en Nouvelle-Écosse, commandant du 403e Escadron, s’efforce de réconforter la famille, décrivant John comme l’un de ses meilleurs pilotes, « un homme de peu de mots, sérieux, qui a su gagner l’affection de l’ensemble des officiers, qui étaient tous très attachés à lui. » [Traduction libre] Chacun espère qu’il a survécu et a été fait prisonnier de guerre. Or, en novembre 1942, la Croix-Rouge internationale, citant des sources allemandes, confirme que le sous-lieutenant d’aviation Gardiner a perdu la vie le 19 août.
En octobre 1944, la douleur ressentie par la mère de John étant devenue trop grande, elle s’enlève la vie.
En 1945, le père de John apprend que son fils et le sous-lieutenant d’aviation Monchier reposent dans un petit cimetière du village français de Saint-Aubin-le-Cauf, à quelques kilomètres au sud-est de Dieppe. En 1946, il visite la tombe de son fils, et apprend de gens de la région que John et son ami ont succombé aux blessures qu’ils ont subies lors de l’écrasement. Les Allemands s’étaient rendus rapidement sur les lieux et avaient d’abord interdit aux villageois d’enterrer les aviateurs alliés, puis avaient changé d’idée trois jours plus tard, si bien que les deux Canadiens ont été inhumés dans le cimetière local.
L’un des deux villageois a écrit à l’officier chargé des pertes militaires de l’ARC en février 1946. Dans sa lettre, il avait inclus des photos des tombes, et demandait à l’officier de bien vouloir les remettre aux familles et d’exprimer à celles-ci ses plus sincères condoléances. « Les tombes de leurs fils, qui ont sacrifié leurs jeunes vies pour leur pays et pour le nôtre, ne seront pas oubliées, et grand soin leur sera accordé. »
« Tout ce que nous avons fait et pouvons faire est si peu en comparaison de ce qu’ils ont fait pour nous. Que leurs âmes reposent en paix. » [Traduction libre]
John Edwin Gardiner avait 23 ans.
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