Les Ailes d’époque du Canada rendent hommage à Bill Carr, le père de la force aérienne moderne du Canada
Article de nouvelles / Le 20 janvier 2014
Dave O’Malley, Ailes d’époque du Canada
Le 2 novembre 2013 a eu lieu le gala de la victoire des Ailes d’époque qui célébrait les réalisations de l’année qui s’achève. Comme c’est la tradition, nous avons accroché une bannière en l’honneur d’un ancien pilote de la Deuxième Guerre mondiale toujours vivant.
Au cours des années, nous avons rendu hommage à des hommes tels que Max Ward, Stocky Edwards et Bill McRae. Cette année, année au cours de laquelle nous avons célébré le leadership sous tous ses angles, nous avons rendu un hommage depuis longtemps dû au lieutenant-général William Carr, qui a été pilote de Spitfire de photo reconnaissance durant la guerre.
Bill, qui était présent, a assisté à la cérémonie au cours de laquelle une affiche portant son effigie et son nom a été accrochée à un élément de la charpente du toit du hangar des Ailes d’époque, à Gatineau, au Québec, parmi d’autres affiches à l’effigie d’aviateurs canadiens – qui tous étaient de ses amis. Voici la version révisée de l’allocution que j’ai prononcée en l’honneur de Bill.
Le lieutenant-général William Kier Carr, Croix du service distingué dans l’Aviation, membre du très vénérable Ordre de Saint-Jean, commandeur de l’Ordre du mérite militaire, décoré de la Légion du Mérite et membre du Panthéon de l’Aviation du Canada, a été le premier commandant du Commandement aérien, et le vice-président de Canadair et de Bombardier. Beaucoup de gens le considèrent comme le père de la force aérienne moderne du Canada.
Bill est né à Terre-Neuve avant que le territoire devienne une province canadienne. Son père était gérant d’une pêcherie dans la petite ville de pêcheurs de Grand Bank dans la péninsule Burin.
Une des photographies montrées au cours du gala des Ailes d’époque a été prise en 1943 dans un studio sur l’île de Malte. C’est la photo que Bill, en poste dans l’île, avait envoyée à sa mère à la demande de celle-ci. Elle a dû sourire de joie en sortant la photo de l’enveloppe, mais verser aussi quelques larmes. Je l’imagine montrant avec fierté la photo de son fils à tous ses amis de Grand Bank.
Bill a été pilote de Spitfire de reconnaissance photographique dans le 683e Escadron de la Royal Air Force. Son aéronef était capable de voler à grande vitesse et à haute altitude, et pouvait fuir le danger qu’il ne manquait jamais d’attirer. L’appareil n’avait pas d’armement, ni de blindage et ses vitres n’étaient pas à l’épreuve des balles. Ses seules armes étaient ses appareils photo, sa vitesse et le courage du jeune Carr.
Sur la photographie du fils des Carr, on voit un jeune homme qui ressemble plus à tous les fils d’aujourd’hui que toutes les photos d’aviateur du temps de la guerre que j’ai vues. Le regard n’est pas inquiet, la mâchoire n’est pas tendue. Cette personne n’a pas voulu paraître plus âgée en arborant la moustache ou plus fringante en portant un foulard de soie. Malgré la fatigue engendrée par des sorties de vol successives durant deux années, son visage est comme un livre ouvert.
Ce garçon, nous le connaissons. C’est votre fils, il est celui qui a fréquenté votre fille. C’est le petit gars qui allait à la guerre, comme vous le disiez.
Ma femme et moi nous nous inquiétions quand notre fils de 20 ans prenait la 401 seul le soir pour se rendre à Toronto. Nous le suppliions de nous appeler une fois rendu à destination afin de pouvoir aller au lit sans nous inquiéter.
Le fils de 20 ans de Mme Carr, lui, s’attachait dans le siège d’un Spitfire et s’envolait loin dans le ciel d’une Europe dominée par les nazis, le plus grand fléau qu’a connu le monde moderne. Il survolait en plein jour, à 300 mi/h, les campements, les postes de défense antiaérienne, les usines, les villes et les aérodromes allemands sans être certain que son système d’oxygène continuerait de l’alimenter ou que le moteur de son aéronef continuerait de tourner dans l’air raréfié, et toujours à l’affût d’une possible attaque.
Il a fait cela à 142 reprises.
Mme Carr n’a jamais reçu d’appel la rassurant que son fils était rentré sain et sauf. Le meilleur signe qu’elle pouvait espérer était une lettre, écrite à la hâte, lui parvenant d’un endroit où elle ignorait que son fils se trouvait. La livraison d’un télégramme chez les Carr engendrerait une peur assez grande pour arrêter les cœurs de battre.
C’est dans ce climat d’angoisses et de menaces que le jeune sous-lieutenant d’aviation Bill Carr est devenu le chef qui sera reconnu plus tard comme le père de la force aérienne moderne du Canada.
Bill Carr a suivi l’entraînement élémentaire de pilotage sur des biplans Fleet Finch à l’École élémentaire de pilotage no 22 de L’Ancienne-Lorette, près de Québec. Il a suivi l’entraînement au pilotage militaire à l’École de pilotage militaire no 2 à Uplands, Ottawa, aux commandes du Harvard 2866. Cet aéronef est maintenant la propriété des Ailes d’époque du Canada. L’insigne de pilotage a été agrafé sur son uniforme par le Maréchal de l’air Billy Bishop lui-même.
Il a piloté des Spitfire de reconnaissance photographique loin en territoire ennemi à partir de bases en Angleterre, à Malte et en Italie.
Au cours des trois paisibles étés qui ont suivi la guerre, Bill Carr et Bill McRae (dont la bannière est aussi accrochée dans le hangar des Ailes d’époque) ont piloté des avions de brousse en cartographiant le Nord canadien. Bien que le travail ait été stimulant, c’était sans doute la meilleure façon de décompresser après des années de vol périlleux et la disparition de beaucoup d’amis. Ils pouvaient s’adonner à la pêche et au camping et sillonner l’immense espace aérien libre – sans aéronef ennemi pour rompre le charme.
Après la guerre, Carr a continué de voler, a fait des études supérieures en chimie et en physique aux États-Unis et a fréquenté un collège d’état-major.
Il a continué de pratiquer la photocartographie aérienne, un métier dont il avait appris toutes les subtilités à Malte et en Italie – cette fois à bord d’avions Lancaster et Mitchell – jusqu’à sa nomination d’officier commandant du 412e Escadron à Uplands. C’est là, aux commandes d’un aéronef semblable au De Havilland Comet, le premier avion de ligne à réaction, qu’il a transporté des gens tels que Sa Majesté la reine Élizabeth II, la Princesse Margaret, le président de la France, Charles de Gaulle, et le premier ministre, John Diefenbaker.
Après son séjour dans le 412e Escadron, Carr a rapidement gravi l’échelle du commandement – il a été promu au grade de colonel d’aviation et a dirigé l’opération de transport aérien des Nations Unies au Congo, la station NAMAO de l’ARC, en Alberta, et le Collège de la Défense nationale. Il a ensuite été promu commodore de l’air et a commandé le Commandement de l’instruction au grade de major-général. Il a travaillé ensuite au quartier général du NORAD à Colorado Springs en tant que chef des opérations et, finalement, il a été promu lieutenant-général et il a occupé le poste de sous-chef d’état-major de la Défense.
Son dernier rôle de direction a été celui de premier commandant du Commandement aérien – une entité qu’il a créée en 1975.
Il a pris sa retraite en 1978 après 36 années dans la Force aérienne et a travaillé durant 16 années chez Canadair et Bombardier au poste de vice-président des ventes internationales.
Je crois qu’on peut affirmer que le garçon de Mme Carr s’est bien tiré d’affaire.
À la fin, le carnet de vol de pilote de Bill affichait un impressionnant total de 18 000 heures de vol – un plateau que très peu de pilotes militaires peuvent atteindre.
Au cours de la guerre, ce grand leader de la future force aérienne a eu un des meilleurs modèles de comportement en la personne de son officier commandant du 683e Escadron – le lieutenant-colonel Adrian Warburton, un des pilotes de guerre de la RAF les plus décorés. Warburton a reçu à deux reprises l’Ordre du service distingué et, à trois reprises, la Croix du service distingué dans l’Aviation!
Le jeune Carr a appris du lieutenant-colonel Warburton l’engagement envers les subalternes. Il a appris que les grands leaders inspirent la loyauté, l’acharnement au travail, le respect et l’amour.
C’est un des pilotes de De Havilland Comet commandant le 412e Escadron qui le premier m’a parlé de Bill Carr. Bob Fassold est devenu par la suite major-général et médecin-chef des Forces armées canadiennes.
En conclusion, je vais répéter les paroles du major-général Bob Fassold qui a connu personnellement M. Carr, qui a compris qui il était à l’époque et qui a bénéficié de sa présence. Je cite :
« Il avait des attentes et des standards de rendement très élevés et motivants pour tout le personnel navigant et les membres de l’escadron. Nous avons donc nous aussi atteint des niveaux élevés, ce qui a été source de fierté non seulement pour nous, mais aussi pour nos compagnons du 412e Escadron et surtout pour notre [officier commandant]. »
« Carr semblait à l’époque, et semble encore aujourd’hui, rayonner d’une compétence et d’une autorité discrètes … et il appréciait grandement l’importance de chacun pour les objectifs de l’unité. Il ne « commandait » jamais… il se contentait de « faire »… et attendait manifestement la même chose de vous. »
« Tout au long de sa carrière, de jour en jour et jusqu’à ce jour, il a affiché un brillant exemple de leadership pour faire les choses comme il se doit… en ayant recours parfois à des méthodes non orthodoxes. Ce faisant, il a contribué à la réussite et au plaisir de vivre d’un si grand nombre. »
Les Ailes d’époque du Canada ont rendu hommage à Bill Carr pour les services rendus au pays en temps de guerre et en temps de paix et dans les affaires. Mais avant tout, nous rendons hommage au merveilleux fils de Mme Carr pour son exemple de leadership qui nous inspire depuis tout ce temps.
Si nous étions la Ligue nationale de hockey, nous retirerions son chandail et le suspendrions du toit.
Les Ailes d’époque ont fait une chose équivalente en accrochant une bannière portant son effigie dans le panthéon des héros de la Deuxième Guerre mondiale.
(Note de l’éditeur : Cet article a d’abord été publié sur le site Web des Ailes d’époque du Canada. La longueur en a été modifiée et le texte a été traduit et reproduit avec autorisation.)
Détails de la page
- Date de modification :