Les mots qui réparent, les mots qui transforment
Le 30 octobre 2020 - Nouvelles de la Défense
Auteure : Micheline-Marie Filion, Bureau de l’engagement des partenaires stratégiques, Est du Canada, MDN

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Membres du comité de pilotage, conférence de presse - 20 août 2020
Photo : Claudia Arana
L’artiste Angèle Séguin – auteure dramatique, cofondatrice et directrice artistique du Théâtre des Petites Lanternes – était à mille lieux de penser qu’un jour, elle se lancerait corps et âme dans un projet de création abordant le fait militaire. Et c’est pourtant le cas depuis près de trois ans déjà, avec le Projet Monarques, qui aborde de façon humaine le traumatisme lié au stress opérationnel tel que vécu – et raconté – par les vétérans, leurs familles et leurs proches.
Cette collaboration atypique où se rencontrent le milieu militaire et le milieu des arts est née suite à un premier contact du Comité de vétérans des Cantons-de-l’Est en 2017. La proposition de départ : révéler les souffrances que vivent (trop souvent en silence) d’ex-militaires à travers le pays. « Devant ce drame humain, il ne s’agissait pas pour nous de donner une opinion sur la pertinence de la guerre ou de l’armée, mais de faire en sorte que notre travail artistique puisse aider à décadenasser la parole de celles et ceux qui n’osent pas dire. Nous avons donc choisi de partir d’une parole intime – la leur – pour créer une œuvre sensible permettant de nous attarder à ce qui nous rassemble. » explique Angèle Séguin.

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Photomontage : Micheline-Marie Filion
Crédits photo : Cpl Matthieu Racette (Camera combat FAC), et Alberto Bigoni (Unsplash)
Le processus créatif s’appuie sur une Grande Cueillette des Mots qui prendra son envol en janvier 2021; cette approche participative a été créée par la compagnie théâtrale et utilisée dans le passé afin de mettre en lumière des tragédies humaines qui ont affligé différentes communautés dans le monde (de la catastrophe du Lac-Mégantic à la violence endémique envers les femmes et les filles en République du Congo, en passant par le séisme de 2010 en Haïti). Ainsi, dès le début de l’année prochaine, ce sont près de 800 vétérans et leurs proches qui seront invités à participer à des ateliers d’écriture et recevront pour ce faire un carnet de parole dans lequel ils témoigneront librement et anonymement sur les thèmes du stress post traumatique, de la souffrance, de la stigmatisation, de la force et de la fragilité, de la résilience. L’exercice sera rendu possible grâce au soutien d’organisations relais, dans un premier temps au Québec et dans la Capitale-Nationale, et dans le reste du Canada quand les ressources le permettront. La Cueillette des Mots servira ensuite de matière brute pour la création d’une œuvre théâtrale bilingue artistique qui prendra l’affiche à la fin 2022.
En donnant une plateforme à leur voix, on souhaite permettre aux vétérans et à leur entourage de se réapproprier leur histoire, de susciter une réflexion et une compréhension de leurs réalités plurielles et d’établir une passerelle entre militaires et société civile. La parole comme medium de reconstruction et de transformation individuelle et collective.
Le projet Monarques implique plusieurs contributeurs de différents horizons (universités, milieu de la création, professionnels de la santé) et compte sur un comité de pilotage auquel participent une quinzaine de collaborateurs du milieu militaire : membres de comité de vétérans, de la Légion Royale, d’unité de transition, d’aumônerie, des services aux familles des militaires ainsi que d’autres représentants de la première réserve et des forces régulières du 35e Groupe-brigade du Canada.

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Photomontage : Micheline-Marie Filion
Crédits photo : Cpl Morgan LeBlanc (Camera combat FAC) et Victoria Quirk (Unsplash)
« Quand j’ai finalement compris que le projet servirait à dé-stigmatiser la blessure de stress opérationnel et du TSPT [trouble du stress post-traumatique] qui en fait partie et qu’il servirait à informer le public, à provoquer la discussion sociale d’un sujet qu’on connait mal, de sortir nos membres qui souffrent de l’isolement, et de favoriser peut-être leur rétablissement, je n’ai pas eu d’autres choix que d’embarquer dans le projet. » confiait le Major Luc Lacombe, Commandant adjoint de Unité de transition et membre du comité de pilotage, lors du lancement du Projet Monarques devant les médias le 20 août dernier.
Madame Séguin salue la grande collaboration du milieu militaire, qui rend cet ambitieux projet possible. Un souhait? Pouvoir enrichir la matière en obtenant les témoignages de vétérans de la diversité (femmes, Premiers Peuples, LGBTQ2+, ethnoculturelle) – on fait passer le mot. Pour en apprendre plus sur ce projet d’art social qui nous touche toutes et tous visitez le site web du Théâtre des Petites Lanternes.
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