Retour sur l’Op AEGIS : récit du major Mathew Wilson
Le 28 novembre 2022 - Nouvelles de la Défense

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Un vol effectué par les Forces armées canadiennes en août 2021, à l’appui du transfert de membres à risque du personnel afghan ayant travaillé avec le gouvernement du Canada et de leur famille.
La dernière fois que des membres des Forces armées canadiennes (FAC) ont quitté l’Afghanistan remonte à plus d’un an. Cette fois-là, par contre, les membres déployés des FAC n’étaient pas seuls. L’opération (Op) AEGIS constituait la contribution des FAC aux efforts déployés par le Canada afin d’évacuer les Afghans ayant des liens importants ou durables avec le gouvernement du Canada, ainsi que les membres de leur famille qui les accompagnaient.
Le major Mathew Wilson (qui était alors capitaine) était un infirmier en soins intensifs (INF SI) qui venait de quitter l’Escadrille d’évacuation sanitaire aérienne des Forces canadiennes, située à Trenton, en Ontario, pour être affecté à la 1re Ambulance de campagne, à Edmonton. C’est le 28 juillet 2021, dernier jour de son congé de réinstallation, qu’il a reçu un premier message texte : « Salut, comment allez-vous? J’ai reçu un courriel du 1er Groupe des services de santé, me demandant de vérifier si vous êtes disponible pour un déploiement. » Il venait d’acheter un nouveau barbecue et rentrait à la maison pour l’installer. Il s’est rangé au bord de la route et a commencé à lire les messages textes qui se succédaient rapidement. Apparemment, il avait peut‑être une semaine pour se préparer. Ce n’était pas idéal puisqu’il venait de déménager, mais c’était faisable. Une semaine devrait suffire pour préparer la famille à son absence. Après environ quatre heures d’échanges avec sa chaîne de commandement, le Maj Wilson a appris qu’il partait le lendemain.
En compagnie de techniciens médicaux (Tech méd), d’officiers en soins infirmiers, de médecins militaires et d’un planificateur médical, le Maj Wilson et l’équipe ont entrepris leur voyage vers l’inconnu. En quittant le Canada, ils avaient une idée générale de ce qui allait se passer, mais ils ne savaient pas vraiment à quoi s’attendre. Leur mission était simple : fournir une escorte médicale aux personnes autorisées à venir au Canada dans le cadre de l’évacuation de l’Afghanistan.
Ils ne se doutaient pas que ce ne serait pas si simple.
Les premiers vols à quitter l’Afghanistan se sont faits à bord de CC-130 Hercules (des Hercs, comme on dit). Ils ont rencontré le premier groupe au Koweït à l’aérodrome de la base aérienne d’Ali Al Salem. Les évacués passeraient ensuite par l’Allemagne, avant de partir pour Toronto. Le Maj Wilson ne se rappelle pas exactement combien de personnes ont pris ce premier vol, mais elles n’étaient pas nombreuses. Il se rappelle avoir pensé : « Si le reste de la mission ressemble à ça, nous ne ferons pas sortir grand monde. » Environ les deux tiers de l’équipe médicale se trouvaient sur ce vol, pour passer par l’Allemagne, tandis que le reste était resté au Koweït pour se rendre en Afghanistan.
L’équipe devait soutenir trois étapes de vols transportant des évacués : de l’Afghanistan au Koweït, du Koweït à l’Allemagne, et de l’Allemagne à Toronto. Le Maj Wilson est resté en Allemagne pendant presque toute la mission en tant que commandant adjoint (cmdtA) de l’élément des services de santé (SS) pour l’Op AEGIS. Son rôle était avant tout un rôle de liaison et de planification. « L’Op AEGIS évoluait rapidement; il y avait peu de temps pour se préparer, ce qui représentait l’un des plus grands défis de cette mission du point de vue des SS. » Étant donné que l’information sur les dates et les moments des vols changeait rapidement, l’équipe médicale manquait souvent de temps pour se préparer à un vol. Les membres de l’équipe devaient alors trouver une solution rapide pour assurer le succès de la mission. Pour surmonter cette difficulté, l’équipe a communiqué directement avec les pilotes et les équipages tout au long de l’opération.

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Le Maj Mathew Wilson a participé à l’opération AEGIS, la contribution des Forces armées canadiennes aux efforts déployés par le gouvernement du Canada afin d’évacuer les Afghans ayant des liens importants ou durables avec le gouvernement du Canada, ainsi que les membres de leur famille qui les accompagnent.
Le Maj Wilson a pu établir des liens avec les militaires allemands pour s’assurer qu’un soutien médical pourrait être offert dans la petite aérogare militaire de Cologne. Sur place, les soldats allemands ont fourni des rafraîchissements, des collations et des jeux aux évacués afghans – généralement à leurs frais. Il fallait voir la réaction des enfants à ce premier sentiment de liberté! Leurs rires étaient très loin des émotions qu’ils vivaient sans doute moins de 24 heures auparavant.
Un moment donné, le personnel des SS était très peu nombreux à beaucoup d’endroits; le Maj Wilson est retourné au Koweït pour faciliter un vol en partance de l’Afghanistan. Alors qu’il se préparait à cette mission, le Maj Wilson a entendu parler des expériences qu’avait vécues un Tech méd en Afghanistan pendant la guerre. Afin d’aider cette personne à tourner la page, il lui a cédé sa place sur ce vol. Le Maj Wilson allait plutôt prendre un vol du Koweït vers l’Allemagne, pour ensuite rentrer au Canada.
Il se rappelle que le lendemain matin, il était assis sur la rampe à la base aérienne d’Ali Al Salem, en attendant l’arrivée du vol en provenance de l’Afghanistan, avant de poursuivre sa route vers le Canada. Il faisait déjà 38 oCelsius lorsque l’avion est arrivé, à 8 h du matin. « Pendant que la rampe descendait, je regardais dans l’avion. C’était rempli de gens, côte à côte, à perte de vue. » Des représentants des gouvernements du Koweït, des États-Unis et du Canada étaient sur place pour superviser le déplacement des gens. On a commencé par faire monter une petite partie des gens dans des autobus en direction d’un camp de base, tandis que les autres, la majorité, embarquaient dans un aéronef CC-177 Globemaster, à bord duquel ils seraient escortés au Canada par le Maj Wilson et un Tech méd.
Le Maj Wilson raconte : « Pendant le chargement, un papa affolé m’a apporté un nouveau-né, une petite fille. J’étais inquiet pour sa santé. Elle était née moins de 48 heures avant, à l’aéroport de Kaboul. L’homme m’a dit que sa fille avait perdu du poids et qu’elle n’allait pas bien. J’ai fait une évaluation de son bien-être. La mère affirmait que le bébé mangeait, mais qu’elle-même (la maman) était épuisée. »
Après avoir examiné le bébé et confirmé qu’elle ne vivait pas le même stress que ses parents, le Maj Wilson a rassuré les nouveaux parents quant à la santé de leur petite fille et leur a dit que le meilleur endroit pour eux à ce moment-là était dans l’avion. Après le décollage d’Ali Al Salem, le Maj Wilson a vérifié l’état de la petite à plusieurs reprises, et à certains moments, en la tenant, en la regardant, il se rendait compte qu’elle grandirait dans un monde totalement différent de celui de ses parents. Elle grandirait sans connaître la violence et l’oppression que ses parents avaient connues. Elle aurait la possibilité de faire des études et de devenir ce qu’elle voudrait, qui elle voudrait. C’était exactement pour cela que les FAC contribuaient à l’évacuation de tant de personnes.
Lorsque cette phase de la mission canadienne a été terminée, les membres de l’équipe médicale sont rentrés à la maison; ils ont retrouvé leurs familles. Le Maj Wilson a enfin pu s’asseoir avec sa famille et lui expliquer exactement ce qu’il faisait et pourquoi il le faisait. Grâce à cet échange avec sa famille, peu après son retour de mission, il commençait à saisir l’ampleur de la mission accomplie. Beaucoup de personnes sont entrées dans le domaine des soins de santé pour faire du bien à leurs semblables. Le Maj Wilson a également pris part à deux autres missions : l’Op IMPACT, en Iraq, et l’Op PRESENCE, au Mali. Au sujet de cette expérience, il dit : « L’opération AEGIS est à elle seule l’expérience la plus enrichissante de ma carrière dans les FAC. Je n’ai jamais eu une incidence aussi importante sur la vie de tant de personnes, et j’en suis reconnaissant. J’ai hâte d’avoir une autre occasion de le faire. »
Tournons rapidement les pages du calendrier, pour nous retrouver neuf mois plus tard, le 31 mai 2022 : le Maj Wilson a été invité comme conférencier à la cérémonie de remise des diplômes en sciences de la santé de 2022 du Sault College. Lors de ce voyage qui devait conduire le Maj Wilson d’Edmonton à Sault Ste. Marie, son vol a été annulé, et il a dû loger dans un hôtel, près de l’aéroport de Toronto. Pendant le trajet vers l’hôtel, il a observé quelque chose qu’il n’avait jamais vu auparavant dans ce secteur : beaucoup de gens, assis à l’extérieur. Des enfants qui jouaient au soccer ou lançaient un ballon le plus haut possible, puis couraient après autour de l’hôtel. « C’est étrange », se disait-il.
Une fois installé à l’hôtel, il est sorti pour aller au dépanneur, et en marchant, il a pensé reconnaître certains traits culturels des personnes qu’il avait vues. Il a abordé quelques hommes qui étaient assis sur la pelouse et leur a demandé s’ils parlaient anglais. Ils parlaient anglais. Il leur a alors demandé d’où ils venaient. Leur réponse lui a instantanément donné la chair de poule : c’étaient des personnes évacuées de l’Afghanistan. Le Maj Wilson a parlé un peu avec eux, retenant certaines émotions. Il était heureux de les voir apprécier ce que nous tenons pour acquis au quotidien : la liberté. « Voir ainsi l’incidence que nous avons eue m’a permis de tourner une page. »
À l’heure actuelle, le Maj Wilson est commandant de la compagnie médicale à la 1re Ambulance de campagne. Il poursuit sa croissance personnelle et professionnelle. Conscient de la crise des soins primaires à laquelle le Canada doit faire face, il suit la formation des infirmières et infirmiers praticiens en soins de santé primaires à l’Université Laurentienne, à Sudbury, en Ontario. Ces études s’inscrivent dans le Programme ontarien de formation des infirmières et infirmiers praticiens en soins de santé primaires, qui s’efforce de faire en sorte que tous les résidents de l’Ontario aient accès à des soins de santé primaires. Pourquoi le Maj Wilson a-t-il choisi l’Université Laurentienne? Pour l’accent qu’elle met sur la santé dans les régions rurales et éloignées et pour l’occasion d’apprendre et de prodiguer des soins auprès de certaines des populations les plus mal desservies au pays.
Pour en savoir plus sur cette profession gratifiante, consultez la page de recrutement d’officières et officiers en soins infirmiers, ou envoyez un courriel à CFHS AttractionCell-CelluledattractionSSFC@forces.gc.ca.