Le coquelicot : symbole du souvenir
Le 10 novembre 2025 - La Sentinelle de l’Ouest
« Au champ d’honneur, les coquelicots Sont parsemés… »
Ces mots, écrits il y a 110 ans par le Lcol John McCrae, sont finalement la source d’inspiration qui explique pourquoi le coquelicot rouge est le symbole officiel du souvenir au Canada depuis 1921.
Le coquelicot rouge est depuis longtemps un symbole des conflits en Europe. Cette plante est originaire de la région qui est devenue le front occidental pendant la Première Guerre mondiale, et même dès les guerres napoléoniennes du XIXe siècle, elle était considérée comme un symbole de mort et de renouveau. Des documents de l’époque indiquent que les coquelicots poussaient souvent en abondance sur les fosses communes laissées après les batailles.
Les graines de coquelicot peuvent rester en dormance pendant des années et fleurir lorsque le sol est remué. Les barrages d’artillerie de la Première Guerre mondiale ont retourné la terre, imprégnant le sol crayeux de chaux et créant les conditions propices à la floraison abondante du coquelicot. La mer rouge qui en a découlé contrastait avec le paysage dévasté et constituait un symbole ironique approprié du sang versé par les soldats dans ce qui n’était encore connu que sous le nom de Grande Guerre.
Pourtant, malgré cette histoire, il a fallu attendre la fin de la Première Guerre mondiale pour que le coquelicot s’impose véritablement comme symbole du souvenir. Moina Michael, membre de l’American Overseas YMCA, a été l’une des premières à l’adopter avant même la fin de la guerre, s’engageant à « toujours porter un coquelicot rouge du champ d’honneur en signe de souvenir et comme emblème de la foi envers toutes les personnes qui sont mortes ».
Le 9 novembre 1918, Moina Michael communiqua son engagement à ses collègues qui se joignirent à elle pour marquer cette commémoration.
Au cours des années suivantes, Moina Michael continua à porter un coquelicot et s’efforça d’en faire un symbole populaire du souvenir. En avril 1920, la National American Legion adopta le coquelicot comme emblème officiel du souvenir.
La campagne de Moina Michael en faveur du coquelicot a également traversé les frontières et l’océan Atlantique. La Française Anne Guérin, tout comme Moina Michael, a été inspirée par le poème du Lcol McCrae et est devenue une fervente défenseure du coquelicot. Elle a fondé la Ligue américaine et française des enfants qui vendait des coquelicots en tissu afin de recueillir des fonds pour les personnes souffrant dans une France déchirée par la guerre, en particulier les enfants orphelins.
En 1921, Anne Guérin franchit une nouvelle étape dans sa campagne et commence à militer pour que le coquelicot devienne le symbole officiel du souvenir tant en Grande‑Bretagne qu’au Canada. Elle se rend dans les deux pays et rencontre les représentants de la British Legion et de la Canadian Great War Veterans Association (CGWVA) – organisme précurseur de l’actuelle Légion royale canadienne – pour leur présenter son projet.
Avec l’aide de la philanthrope juive canadienne Lillian Freiman et des mécènes de la CGWVA, le gouverneur général Lord Julian Hedworth George Byng et Lady Marie Evelyn Byng, le premier « jour du coquelicot » au Canada a été célébré le jour de l’Armistice, le 11 novembre 1921.
Des millions de coquelicots ont été acheminés depuis l’organisation d’Anne Guérin en France pour l’occasion. Ce don a été complété par des coquelicots en tissu confectionnés par des Canadiennes, notamment des membres de l’Imperial Order Daughters of the Empire à Winnipeg.
Légende
Exemple non daté d’un coquelicot fait à la main. James Stanley Taylor, vétéran de la Première Guerre mondiale qui a servi dans les 14e et 174e bataillons d’infanterie, a fait don de ce coquelicot au Musée canadien de la guerre. Les magazines et les organisations de vétérans ont exhorté la population canadienne à acheter des coquelicots faits à la main par des vétérans, qui étaient de « véritables hommages commémoratifs », par opposition aux reproductions offertes sur le marché.
Photo gracieusement fournie par le Musée canadien de la guerre
Légende
Des membres des FAC portant leur coquelicot au Complexe commémoratif de la paix à Wainwright, en Alberta, lors de la cérémonie du jour du Souvenir de 2023. Les membres des FAC portent le coquelicot du dernier vendredi d’octobre jusqu’au jour du Souvenir.
Photo prise par le caporal Trevor Pomarenski
Légende
Un coquelicot se dresse au milieu d’un champ près du cimetière militaire canadien de Bretteville‑sur‑Laize, en France, lors d’une cérémonie marquant le 70e anniversaire du jour J et de la bataille de Normandie, le 7 juin 2014.
Photo prise par le caporal‑chef Marc‑André Gaudreault, Caméra de combat des Forces canadiennes
En 1922, des coquelicots fabriqués et distribués par des vétérans canadiens ont commencé à apparaître sur les revers des vestes.
En 1925, la Légion royale canadienne a été fondée et supervise depuis lors la campagne du coquelicot au Canada.
Au cours des 110 années qui se sont écoulées depuis que le Lcol McCrae a écrit Au champ d’honneur pendant la deuxième bataille d’Ypres en mai 1915, le coquelicot est passé d’une fleur poussant en abondance dans un paysage autrement inhospitalier à un symbole exhortant les Canadiennes et Canadiens ainsi que les peuples du monde entier à « ne jamais oublier ».
Aujourd’hui, des millions de Canadiennes et Canadiens se joignent aux membres des FAC pour porter le coquelicot du dernier vendredi d’octobre jusqu’au jour du Souvenir, le 11 novembre. Le coquelicot ne symbolise plus seulement le souvenir des vies perdues pendant la Première Guerre mondiale, mais aussi celles perdues pendant la Seconde Guerre mondiale, la guerre de Corée, la guerre en Afghanistan et les nombreux autres conflits où des Canadiennes et des Canadiens ont servi et perdu la vie. Porter un coquelicot est un geste simple, mais qui revêt une grande importance en raison de son histoire vieille de plusieurs décennies et des millions de vies qu’il représente.
N’oublions jamais.
Légende
La Tombe du Soldat inconnu à Ottawa est recouverte de coquelicots lors de la cérémonie du jour du Souvenir de 2019.
Photo gracieusement fournie par la Légion royale canadienne
Légende
Un coquelicot est déposé sur une tombe militaire par un artilleur du 1er Régiment, Royal Canadian Horse Artillery, après la cérémonie « Aucune pierre dans l’oubli » au cénotaphe du cimetière Elmwood à Winnipeg, au Manitoba, le 10 novembre 2015.
Photo prise par le caporal‑chef Louis Brunet, Affaires publiques de l’Armée canadienne