Récit des FAC | Le major (retraité) Bob Wade, pilote, se souvient de la guerre froide

Vidéo / Le 11 novembre 2025

Transcription

Nous avons perdu 937 membres du personnel de l’ARC pendant la guerre froide. Rien à voir avec le combat; ce n’était que le résultat des opérations quotidiennes.

Je m’appelle Bob Wade. Je me suis enrôlé dans l’Aviation en 1968 pour entamer ma formation de pilote. Mais en fait, je n’avais que 16 ans quand j’ai été recruté dans le cadre du programme de formation Venture. La guerre froide était bien enclenchée à l’époque. Je voulais être pilote de chasse quand j’ai obtenu mon diplôme, pour avoir mon brevet, mais il n’y avait pas d’affectation disponible pour le Starfighter, alors on m’a nommé instructeur à Moose Jaw.

Je me suis joint à l’équipe d’acrobatie aérienne des Snowbirds les deux premières années – c'était une équipe nationale – en 1973 et 1974. Puis j'ai enfin eu mon Starfighter.

Les Russes voulaient continuer de s’étendre à l’ouest, et prendre l’Allemagne de l’Ouest, puis la France, les Pays-Bas, la Belgique, et tous ces pays. L'OTAN a donc été formée en 1949 pour empêcher que ça se produise. Les tensions sont devenues très vives par moments. En 1962, il y a eu la crise des missiles de Cuba, dont la plupart des gens se souviennent. En fait, nous avons atteint un niveau DEFCON 2. Il y a cinq niveaux DEFCON, ou état de préparation à la défense : en temps de paix, nous sommes au niveau 5, et la guerre, c’est le niveau 1. Vous savez, ça vous montre à quel point les efforts se concentraient sur le maintien de ce statut et sur l’arrêt des Soviétiques.

Cet avion détenait le record du monde de vitesse : Mach 2,76. C’est très impressionnant, si l’on considère que c'est onze ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale. Vous savez, la technologie a fait un bond immense. Comme le Starfighter était si rapide et que tous les vols s’effectuaient juste en-dessous de 3, la seule menace pour nous était le système de missiles surface-air. Si nous restions suffisamment bas, le système de missiles surface-air ne pouvait pas nous abattre.

Quand nous avons fait l’acquisition du Starfighter en 1962 pour remplacer l’avion Sabre, il s’est vu confier un rôle nucléaire. L’avion transportait donc des bombes nucléaires de 1960... enfin, 1963, le temps qu’on le rende opérationnel, jusqu’à 1971. Et il jouait très bien ce rôle.

En 1971, le gouvernement nous a retirés le rôle de frappe nucléaire, et nous avons été forcés de jouer le rôle d’attaque au sol. C’était un travail très exigeant et beaucoup plus compliqué que l’était celui de frappe nucléaire. Quand vous volez à grande vitesse dans cette zone à basse altitude, vous croisez des oiseaux. Si vous heurtez un oiseau à une vitesse de 540 nœuds, et qu’il descend dans l’entrée d’air du moteur, ça va mettre ce moteur hors circuit. Il y a des arbres de 60 pieds dzans cette zone. Vous n’êtes qu’à 40 pieds au-dessus des arbres, volant à une vitesse de 510 nœuds, pour relâcher une arme. C'était donc un tout un défi; nous avions beaucoup de plaisir, mais il fallait faire attention à ce que nous faisions.

Généralement, lorsque vous pilotiez, vous teniez une carte de la main gauche, et vous vous en serviez pour naviguer. Comme ça, à chaque étape du parcours, vous pouviez vérifier si vous étiez à temps ou non, car vous deviez être capable d’atteindre la cible en plus ou moins 3 secondes. C’était essentiel, car lorsqu’un autre chasseur était derrière vous et que vous aviez du retard, vos armes l’abattaient alors que si vous étiez en avance, vous essuyiez les tirs de l’autre pilote. Et vous ne deviez jamais manquer votre coup. Je ne me souviens pas d’avoir raté la cible de plus d’une seconde environ. Et c’est devenu de banales opérations quotidiennes. Personne ne ratait son coup.

Nous n’étions pas des combattants aériens; nous étions pilotes de bombardiers. Mais ils n’arrivaient pas à nous attraper. Nous sommes devenus doués, vraiment doués sur ce plan. Nos compétences de pilotage étaient supérieures à celles qui avait pu être exigées auparavant, selon moi. Nous avons eu beaucoup d’accidents. Sur les 190 avions qui ont survolé l’Europe, 110 se sont écrasés. Un pilote sur 9 a dû s’éjecter de l’appareil, et un sur 19 a été tué. Tout ça simplement pour maintenir le mode de vie que nous avons au Canada. Je veux que les Canadiens en soient conscients. La paix n’est pas l’absence de guerre, mais la préservation de ces libertés durement gagnées.

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2025-11-11