Déclaration spéciale lors de la cérémonie d'ouverture de l'Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones, 15e session

Discours

Notes pour une allocution de

L'honorable Jody Wilson-Raybould, C.P., députée
Ministre de la Justice et procureur général du Canada
Déclaration spéciale lors de la cérémonie d'ouverture de l'Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones, 15e session

Lieu : Assemblée générale des Nations Unies
New York, NY : 9 mai 2016
Heure : 12 h 45

L'allocution prononcée fait foi

Introduction

Chef Hill, Monsieur le Président et membres de l'Instance permanente, distingués représentants des Nations Unies, délégués de l'Instance permanente des Nations Unies.

Je salue nos hôtes autochtones et je les remercie de nous accueillir sur leurs terres ancestrales.

Mon nom traditionnel est Puglaas. Je suis descendante des peuples Musgamagw Tsawatineuk et Laich-Kwil-Tach de la côte ouest du Canada. Je fais partie du clan de l'aigle et mon père, Hemas Kla-Lee-Lee-Kla, est notre chef héréditaire.

J'aimerais vous remercier de m'avoir invitée à faire partie de l'ouverture de la 15e session de l'Instance permanente et je suis heureuse de vous transmettre les salutations de notre premier ministre, le très honorable Justin Trudeau.

Aujourd'hui, je m'adresse à vous en tant que ministre de la Justice et procureur général du Canada, une nomination qui en dit long sur le chemin que notre pays a parcouru, mais aussi sur celui que nous voulons parcourir.

Les Autochtones et la relation de nation à nation

J'ai également l'honneur de faire partie d'un nombre sans précédent de députés autochtones élus en octobre dernier. Je crois que ce nombre représente une réelle révolution par rapport à l'époque où l'on décourageait activement les Autochtones de participer pleinement à la société. Lors des dernières élections, on a vu les Autochtones voter en nombre record.

De plus, je suis extrêmement fière de faire partie d'un gouvernement dont le chef s'est solennellement engagé à amener un vent de changement avec un esprit de réconciliation véritable avec les peuples autochtones.

À cette fin, notre premier ministre a demandé à tous ses ministres de travailler à rétablir la relation, ce qui est énoncé dans chacune de nos lettres de mandat publiques, à savoir : « Aucune relation n'est plus importante pour moi et pour le Canada que la relation avec les peuples autochtones. Il est temps de renouveler la relation de nation à nation avec les peuples autochtones pour qu'elle soit fondée sur la reconnaissance des droits, le respect, la collaboration et le partenariat. »

Cela dit, il s'agit peut-être de l'enjeu le plus complexe de politique publique que les priorités de notre gouvernement cherchent à relever, mais il est essentiel, et ce, depuis longtemps. Nous devons terminer le travail inachevé entrepris avec la Confédération. Rebâtir la relation de nation à nation et parvenir à la réconciliation est au cœur de ce qui fait un Canada fort.

Nous devons trouver des solutions à long terme à des problèmes vieux de plusieurs décennies pendant que nous cherchons à déconstruire notre héritage colonial. Pour ce faire, il importera de mettre en œuvre les appels à l'action établis dans le récent rapport de la Commission de vérité et réconciliation qui a tenu compte de l'héritage des pensionnats indiens.

L'un des défis de taille de cette tâche est que, même si l'objectif consiste à renforcer la relation de nation à nation, en pratique, l'administration des affaires autochtones au Canada n'est pas vraiment organisée autour des nations autochtones. Dans l'ensemble, elle est organisée autour d'un système de gouvernance imposée. En ce qui concerne les Indiens, cela se fait au moyen de " bandes ", qui sont des émanations de la loi fédérale en vertu de la Loi sur les Indiens. Le système de la Loi sur les Indiens est l'antithèse de l'autonomie gouvernementale en tant qu'expression de l'autodétermination.

Autrement dit, nous devons aller au-delà de ce système de gouvernance imposée.

Je suis convaincue que nous avons les outils juridiques pour le faire, et que, pour les Amérindiens, les Inuits et les Métis, nous pouvons et allons donner vie à l'article 35 de la Constitution du Canada, qui reconnaît et affirme les droits ancestraux et issus de traités existants, en embrassant les normes minimales énoncées dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des Autochtones et guidées par les dizaines de décisions judiciaires qui donnes des instructions. Ma collègue et amie, l'honorable Carolyn Bennett, fera une allocution concernant la Déclaration demain.

À mon avis, le défi à relever à mesure que nous avancerons n'est pas de livrer des batailles déjà gagnées, mais plutôt de traduire ces droits pour lesquels on s'est durement battus en des avantages pratiques et significatifs sur le terrain, dans les collectivités.

Par contre, comme le savent tous ceux qui ont travaillé dans les collectivités autochtones au Canada, la décolonisation n'est pas facile; il n'est pas facile de se débarrasser des chaînes fixées par 140 ans du système de la Loi sur les Indiens, par exemple. Les collectivités autochtones sont manifestement en période de transition, une période d'édification et de reconstruction des nations. Notre travail en tant que gouvernement du Canada consiste à appuyer cette transition.

En ce qui concerne le travail fondamental de reconstruction des nations et de mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies, l'une des questions juridiques les plus importantes que nous devons étudier est celle de savoir comment mettre en œuvre le concept de « consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause ».

La Déclaration reconnaît que les Autochtones possèdent à la fois des droits individuels et des droits collectifs. La participation à la véritable prise de décisions est au cœur du concept de consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause de la Déclaration selon lequel les Autochtones doivent être en mesure de participer à la prise de décisions qui touchent leurs vies.

Le sujet revêt de nombreuses facettes, fait l'objet de perspectives divergentes et suscite plusieurs options. Tous ont besoin d'une nouvelle relation de nation à nation qui se reflète dans nos exigences constitutionnelles uniques.

Alors, comment pouvons-nous aller de l'avant? Comme nous l'a enseigné le regretté Nelson Mandela, au-delà du processus nécessaire de découverte de la vérité et de guérison, la réconciliation exige en réalité que les lois changent et que les politiques soient réécrites. Nous avons l'intention de le faire en étroit partenariat.

On a besoin d'un plan d'action national au Canada, quelque chose que notre gouvernement a appelé un cadre de réconciliation.

Conformément au cadre de réconciliation, nous avons besoin de façons plus claires et efficaces de reconnaître les nations autochtones et d'offrir du soutien à la transition pour ces nations qui sont prêtes, disposées et aptes à aller au-delà du statu quo. En même temps, nous devons veiller à ce que les collectivités continuent de recevoir les programmes et services nécessaires pendant la période de transition. Cette tâche inclut aussi nécessairement l'établissement d'une nouvelle relation financière avec les gouvernements autochtones.

Et il n'est pas nécessaire de réinventer complètement la roue. Il est important de comprendre ce qui a fonctionné et pourquoi, et de miser sur ces succès. Il y a déjà plusieurs mesures positives qui sont prises. Au Canada, il existe des traités modernes et des exemples d'autonomie gouvernementale, à la fois globaux et sectoriels. Il y a des établissements autochtones régionaux et nationaux qui appuient la reconstruction des nations, par exemple en gestion des terres et en administration financière.

Le moment est venu d'apporter des changements significatifs et systémiques, ainsi que de respecter et de reconnaître la place des nations autochtones.

Des nations autochtones légitimes et fortes changent et changeront de plus en plus la façon dont le Canada est gouverné, et pour le mieux. Il y a de la place dans notre pays pour différentes traditions juridiques et façons de gouverner, une approche qui respecte la diversité et appuie l'avancement social et économique des peuples autochtones dans le cadre de notre système en évolution de fédéralisme coopératif et de gouvernance à niveaux multiples.

Pour que cette vision se réalise, les peuples autochtones doivent être investis du pouvoir de reprendre le contrôle de leur vie en partenariat avec l'ensemble des Canadiens et avec le plein appui de ceux-ci. Pour que les changements se produisent, les collectivités doivent suivre leurs propres processus d'autonomisation et de transformation locale, grâce à la guérison, à la reconstruction et au développement des capacités. Ce faisant, nous pouvons continuer à faire de réels progrès.

Conclusion

Et cela ne vaut pas seulement pour les peuples autochtones du Canada. Les nations autochtones partagent des défis et des possibilités, peu importe où elles vivent dans le monde. Et c'est pourquoi l'Instance permanente des Nations Unies revêt une si grande importance. La réunion des États et des peuples autochtones en vue d'aborder des questions d'importance fondamentale au cours des 15 dernières années a eu une incidence considérable sur la reconnaissance des droits des peuples autochtones.

Il y a eu deux décennies internationales officielles des populations autochtones du monde. Je propose de faire du XXIe siècle le siècle des populations autochtones du monde, un siècle où, peu importe où ils vivent, les Autochtones déconstruisent leur héritage colonial et reconstruisent leurs collectivités. Que pendant ce siècle les États-nations et les peuples autochtones travaillent en partenariat afin de réaliser une réconciliation véritable qui appuie des populations autochtones solides et saines qui sont responsables et en contrôle de leurs propres destinées. Mes amis, voilà notre objectif : que la Déclaration et le travail accompli ici soient un moyen d'arriver à nos fins, et non pas une fin en soi, où la fin serait une meilleure qualité de vie pour les peuples autochtones avec des cultures pratiquantes et prospères.

Gilakas'la.


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