No 2009/55 - Ottawa (Ontario) - Le 23 février 2009
Sous réserve de modifications
Depuis plus de 70 ans, l’Université Carleton est au premier plan des études internationales au Canada, et c’est un honneur pour moi d’être ici.
De plus, notre rencontre survient à un tournant dans l’histoire du ministère des Affaires étrangères du Canada. En effet, le ministère entame cette année son deuxième siècle d’existence, à un moment où le monde qui nous entoure traverse une période de changement rapide et profond.
L’économie mondiale est en crise. Des signaux d’alarme suscitent des craintes au plan de la sécurité. Et de nombreux défis contemporains — la paix et la sécurité, les droits humains, la liberté politique, le développement économique, le changement climatique — ne peuvent être relevés par les pays de manière individuelle.
Par conséquent, il a rarement été aussi important de pouvoir compter sur un leadership fort en matière de politique étrangère.
Comme l’a dit récemment Derek Burney, qui a connu une carrière remarquable dans le domaine des affaires étrangères ainsi que dans d’autres fonctions de nature plus politique et qui enseigne maintenant ici, à l’École des affaires internationales Norman Paterson de l’Université Carleton, « Pour un gouvernement, avoir un programme clair et le sens des priorités peut être un atout aussi puissant que celui d’avoir une bonne idée. »
Sous la direction du premier ministre Stephen Harper, le gouvernement canadien a maintenant un programme clair et le sens des priorités.
Aujourd’hui, j’aimerais dire quelques mots au sujet de nos priorités en matière de politique étrangère. Permettez-moi d’en mettre quelques unes en lumière, soit :
- renforcer nos relations avec notre principal partenaire commercial, les États-Unis;
- assurer les débouchés économiques dans les marchés émergents, comme l’Asie;
- les Amériques;
- l’Afghanistan;
- l’Arctique.
Selon les propos de la gouverneure générale [Son Excellence la très honorable Michaëlle Jean], dans le discours du Trône, « Le premier point à l’ordre du jour doit être de repositionner le système financier international sur des bases plus solides. »
Il nous faut repenser les règles et les institutions sur lesquelles repose le système financier mondial.
Il y a quelques mois, à Washington, le premier ministre Harper a dit à ses collègues du G20 que sur le plan de la politique économique, notre approche serait basée sur ce qu’il a appelé « des fondements solides et des portes ouvertes ».
Le premier ministre a aussi déclaré : « Comme notre voisin immédiat et principal partenaire commercial est l’épicentre du séisme financier et du ralentissement économique mondial, les effets sont réels et l’urgence d’agir est particulièrement pressante. »
Les États-Unis sont nos voisins, alliés et partenaires commerciaux les plus proches. Le Canada et les États-Unis ont les plus importantes relations commerciales bilatérales au monde. Le commerce bidirectionnel des biens qui franchissent la frontière entre le Canada et les États-Unis représente 1,7 milliard de dollars par jour, soit plus de 1 million de dollars la minute. Plus de 7 millions d’emplois américains dépendent des échanges avec le Canada. La sécurité et la prospérité de nos deux pays sont des réalités indissociables.
Comme vous le savez sans doute, le président des États-Unis, Barack Obama, était à Ottawa jeudi dernier à l’occasion d’une visite de travail avec le premier ministre. Cette visite, qui souligne l’importance des relations canado-américaines, a offert aux dirigeants une occasion déterminante d’explorer diverses façons dont le Canada et les États-Unis pourraient collaborer plus étroitement à l’avancement de leurs objectifs bilatéraux et internationaux communs.
Cette rencontre a aussi été une occasion importante de donner à nos relations avec la nouvelle administration américaine une impulsion positive et tournée vers l’avenir. Les deux chefs d’État se sont entendus sur la nécessité de conjuguer leurs efforts pour amorcer la reprise économique nord-américaine, et ils ont établi le Dialogue États-Unis-Canada sur l’énergie propre. Ils ont aussi discuté de la sécurité en Amérique du Nord, notamment de la gestion de la frontière canado-américaine, de la protection de l’environnement et des dossiers de sécurité internationale prioritaires, comme l’Afghanistan et le prochain Sommet de l’OTAN.
Il ne fait aucun doute que la poursuite de nos bonnes relations est vitale pour notre prospérité. Tant le premier ministre Harper que le président Obama estiment que l’heure n’est pas au protectionnisme — une brève tentation qui a causé des dommages à long terme, comme on a pu le constater au cours de la grande dépression de la fin des années 1920 et des années 1930.
Comme nous, nos voisins américains savent qu’une frontière sûre et efficace doit être une priorité centrale pour assurer la circulation constante des biens, des services et des personnes ainsi que pour faire échec aux terroristes. C’est la clé de notre
Les Amériques
Les Amériques constituent une autre priorité de notre gouvernement, car elles représentent une zone de croissance économique très dynamique dans le voisinage immédiat du Canada.
Notre pays est le troisième investisseur direct dans les Amériques. Nous avons signé des accords de libre-échange avec la Colombie et le Pérou, les négociations avec le Panama progressent bien, et nous souhaitons collaborer avec d’autres partenaires régionaux afin de créer de nouveaux débouchés économiques pour les Canadiens.
Ces accords contribuent à renforcer la prospérité, la démocratie et la sécurité dans la région.
Mais si les États-Unis sont notre plus proche voisin, ils ne forment pas la totalité du voisinage. Au-delà des États-Unis se trouve le reste de l’hémisphère, les Amériques, une zone qui se trouve aussi dans le proche entourage du Canada et dont la croissance économique dynamique ne fait aucun doute.
Notre engagement dans les Amériques est une priorité cruciale pour notre gouvernement, et ce fait a été appuyé par la nomination du premier ministre d’État des Affaires étrangères (Amériques) du gouvernement canadien, mon collègue Peter Kent.
Le Canada est le troisième investisseur dans les Amériques, et il est particulièrement présent dans le secteur minier.
Nous voulons voir la région faire des progrès pour fortifier la démocratie, contrer les menaces à la sécurité, comme le trafic des stupéfiants, la criminalité et les maladies, et promouvoir la prospérité au moyen du commerce, de l’investissement et de l’innovation.
En forgeant des liens plus étroits au sein des Amériques, le gouvernement continuera de promouvoir les intérêts commerciaux du Canada dans la foulée des accords de libre-échange signés avec la Colombie et le Pérou.
Nous ouvrirons de nouvelles avenues afin de consolider les institutions démocratiques, d’appuyer la bonne gouvernance, de promouvoir le respect de la démocratie et des droits de la personne et de renforcer la capacité dans les domaines de la sécurité publique et de la gestion des catastrophes naturelles.
Nous ferons aussi la promotion de l’éducation et de la formation dans cette région en enrichissant les programmes de bourses et de mobilité des jeunes.
Nous serons aussi heureux de pouvoir jouer un rôle actif au Sommet des Amériques qui aura lieu l’an prochain et d’accueillir le Sommet Canada-CARICOM 2009.
Marchés émergents
Au cours de la période difficile que traverse l’économie mondiale, le Canada collabore aussi avec ses partenaires commerciaux, y compris l’Asie, pour s’assurer que les marchés demeurent ouverts et que les gains réalisés grâce à la mondialisation ne soient pas anéantis.
Notre gouvernement investit 50 millions de dollars par année pour l’avancement de la Stratégie commerciale mondiale du Canada, un élément central de notre politique commerciale internationale. Cette stratégie s’articule non seulement autour du commerce, mais aussi autour de l’investissement bilatéral, particulièrement dans les régions présentant d’intéressantes possibilités économiques, comme les marchés émergents et en pleine croissance partout dans le monde.
Nous entendons porter une attention particulière aux marchés émergents de l’Asie. L’Asie s’est imposée comme un moteur important de l’économie mondiale, produisant une part significative et grandissante des biens et services dans le monde. Comme je l’ai dit tout à l’heure, nous comptons accroître notre présence en Asie. Nous avons réussi à réserver 2 milliards de dollars pour nous assurer que l’initiative de la Porte de l’Asie-Pacifique ouvre la voie à de nouveaux échanges avec la Chine et l’ensemble de l’Asie.
En Chine, nous ouvrirons sous peu six nouveaux bureaux commerciaux afin de permettre aux entreprises canadiennes de tirer parti des formidables occasions d’affaires qui existent dans ce pays.
Le mois prochain, je me rendrai en Inde, pays avec lequel nous avons des liens bilatéraux de longue date, fondés sur des valeurs communes, la démocratie, le pluralisme et la primauté du droit, ainsi que sur de solides relations interpersonnelles.
Afghanistan
Notre engagement multilatéral transcende le volet commercial; il s’articule aussi autour des individus et des valeurs.
Les valeurs que nous partageons nous ont amenés aux confins de la terre, où le Canada travaille d’arrache-pied pour promouvoir la liberté, la démocratie, les droits de la personne et la primauté du droit, contribuant ainsi à la sécurité internationale.
Pour donner suite à son engagement de mieux cibler l’aide internationale ainsi que d’en accroître l’efficacité et la transparence, le gouvernement du Canada a annoncé la mise en œuvre d’un autre élément de son programme d’efficacité en matière d’aide. Il concentrera ses efforts dans 20 pays en mettant en commun les ressources, en ciblant les programmes et en améliorant la coordination.
Le Canada s’acquitte de l’engagement pris dans le cadre du G8, de doubler l’aide en Afrique. De plus, nous avons fait preuve de leadership en travaillant pour la paix au Soudan et en répondant aux besoins essentiels à la population dans la région du Darfour, au Soudan, en Somalie, en République démocratique du Congo et au Zimbabwe.
L’Afghanistan est sans doute le volet le plus visible de notre engagement en matière de politique étrangère. Ce pays est aussi le bénéficiaire de notre plus important programme d’aide étrangère.
La raison d’être de l’engagement du Canada en Afghanistan n’a pas changé : empêcher le pays de devenir un État défaillant qui serait incapable d’assurer le bien-être de sa population et qui servirait de refuge aux terroristes.
Nous avons fait de grands sacrifices en Afghanistan. Cela dit, il reste beaucoup de travail à faire. Nous entendons garder le cap et mener cette mission à bien.
Notre gouvernement a établi six priorités claires en Afghanistan :
- Le Canada aide le gouvernement de l’Afghanistan à maintenir un environnement plus sécuritaire et à établir la loi et l’ordre en renforçant la capacité de l’Armée nationale afghane et de la Police nationale afghane, ainsi qu’en appuyant les efforts complémentaires dans les secteurs de la justice et des services correctionnels.
- Le Canada aide le gouvernement de l’Afghanistan à fournir des emplois, de l’éducation et des services essentiels, tels que l’eau.
- Nous aidons le gouvernement de l’Afghanistan à offrir une aide humanitaire aux populations vulnérables, y compris les réfugiés.
- Le Canada contribue aussi à accroître la sécurité et la gestion transfrontalières entre le Pakistan et l’Afghanistan.
- Nous contribuons à renforcer les institutions afghanes qui appuient les processus démocratiques, tels que les élections.
- Nous facilitons les efforts déployés par les Afghans en vue d’une réconciliation politique visant à affaiblir l’insurrection et à promouvoir une paix durable.
Nous sommes présentement en train de transformer la nature de notre engagement en Afghanistan afin de mettre l’accent sur la gouvernance et la réforme démocratique, la reconstruction et le développement, et de préparer la fin de notre actuelle mission militaire de combat en 2011.
Nous continuerons à travailler à l’atteinte de l’objectif que nous partageons avec le gouvernement afghan, nos alliés de l’OTAN et nos partenaires au sein de la Force internationale d’assistance à la sécurité.
L’Arctique
Notre gouvernement est aussi déterminé à exercer la souveraineté du Canada dans l’Arctique. L’Arctique est non seulement un territoire qui fait partie intégrante du Canada, mais il constitue aussi une région qui est au cœur de notre identité en tant que pays nordique.
Sur le plan pratique, la région prend une importance grandissante. D’autres pays manifestent un intérêt croissant pour ses ressources potentielles et l’ouverture des eaux polaires à la navigation.
Fondamentalement, le Canada est une puissance arctique. L’objectif du Canada est de jouer un rôle de chef de file dans l’optique d’établir un dialogue pragmatique et productif pour faire face aux enjeux, aux défis et aux possibilités qui existent dans l’Arctique.
Au cours des mois à venir, je rencontrerai les membres du Conseil de l’Arctique afin de leur communiquer ce message et de discuter avec eux d’une collaboration future.
Nous avons déjà annoncé un certain nombre d’initiatives dans le Nord canadien et l’Arctique, notamment :
- la création d’une station de recherche arctique de calibre mondial;
- la construction de navires résistant aux glaces;
- l’augmentation du nombre de patrouilles;
- la délimitation du plateau continental étendu, ce qui permettra au Canada de présenter sa position aux Nations Unies, conformément à la Convention sur le droit de la mer;
- l’extension de l’application de la Loi sur la prévention de la pollution des eaux arctiques à 200 milles marins à partir des lignes de base des mers territoriales canadiennes au nord du 60e parallèle de latitude Nord, ce qui nous permettra d’élargir notre champ de protection de l’environnement;
- l’obligation pour tous les navires se dirigeant vers les eaux arctiques du Canada de signaler leur présence au NORDREG [Système de trafic de l’Arctique canadien].
Notre gouvernement a élaboré une Stratégie intégrée pour le Nord, axée sur quatre priorités :
- l’exercice de la souveraineté du Canada dans l’Arctique;
- la protection de notre patrimoine environnemental;
- la promotion du développement économique et social;
- l’amélioration et la délégation de la gouvernance dans le Nord.
Nous continuerons de travailler de façon bilatérale et multilatérale par l’entremise d’organisations telles que la Francophonie, l’APEC, l’Organisation des États américains, le Commonwealth et les Nations Unies, en vue d’élargir l’application des principes de bonne gouvernance et de renforcer les capacités.
Nous profiterons du rôle du Canada en tant qu’hôte de la réunion de 2010 du G8 pour influer sur l’action internationale à l’égard de nos enjeux clés.
Enfin, nous menons une campagne énergique en vue d’obtenir un siège au Conseil de sécurité des Nations Unies pour 2011-2012 afin de promouvoir nos dossiers sur la scène internationale.
Conclusion
Les Canadiens veulent jouer un rôle important dans le monde — un rôle clair et influent qu’ils veulent assumer en toute confiance. En tant que fiers citoyens, ils ne veulent pas d’un Canada qui se contente d’emboîter le pas; ils veulent que le Canada soit un chef de file. Ils veulent un Canada qui ne se borne pas à critiquer, mais qui apporte une contribution. Ils veulent un Canada qui reflète leurs valeurs et leurs intérêts, et qui exerce une grande influence dans les relations internationales.
Je suis convaincu que les priorités que je viens tout juste de résumer permettront au Canada de traverser cette période difficile que vivent notre pays, l’Amérique du Nord et la communauté internationale, et d’en ressortir encore plus fort ainsi que mieux positionné pour réussir sur la scène internationale.
Je vous remercie.