Activités de surveillance menées par la Banque du Canada en 2008 en application de la Loi sur la compensation et le règlement des paiements
Walter Engert et Alexandra Lai
Le présent rapport fait état des activités de surveillance menées par la Banque du Canada en 2008, conformément à la Loi sur la compensation et le règlement des paiements. Il s'agit du quatrième d'une série de rapports annuels qui assurent la transparence et la reddition de comptes dans le cadre des activités de la Banque à cet égard1.
Depuis 1996, la Banque du Canada est officiellement responsable de la surveillance des systèmes de compensation et de règlement au pays2. La Loi lui confère cette responsabilité afin qu'elle puisse maîtriser le risque systémique. Dans ce contexte, on entend par « risque systémique » la possibilité que la défaillance d'un participant à un système de compensation et de règlement entraîne, à cause des activités du système, la défaillance d'autres participants ou systèmes.
Un système de compensation et de règlement regroupe divers agents du système financier à l'intérieur d'une structure commune (une chambre de compensation, par exemple), où ils sont interreliés explicitement, de sorte que le comportement de l'un peut avoir une incidence sur les autres. Dans une telle structure, chaque participant est exposé à des risques et à des obligations potentiellement élevés, selon la façon dont le système est conçu et dont les autres se comportent. Lorsqu'un système présente des lacunes de conception ou de fonctionnement, les problèmes peuvent se propager, par effet d'entraînement, dans l'économie en général.
Conformément à la Loi, la Banque a pour mandat de désigner les systèmes de compensation et de règlement au Canada dont l'exploitation pourrait générer un risque systémique. À condition que le ministre des Finances estime qu'il est dans l'intérêt public de le faire, la surveillance de ces systèmes est confiée à la Banque du Canada. Celle-ci doit alors s'assurer que les systèmes ainsi désignés sont dotés des mécanismes de contrôle nécessaires pour dissiper les appréhensions relatives au risque systémique3.
Trois systèmes ont été désignés par la Banque : le Système de transfert de paiements de grande valeur, par lequel transitent les gros paiements libellés en dollars canadiens; le CDSX, qui assure la compensation et le règlement des opérations sur titres; et la CLS Bank, système mondial qui prend en charge les opérations sur devises.
Dans les sections qui suivent, il sera question des divers aspects des activités de surveillance de la Banque pendant l'année écoulée. En 2008, les principaux systèmes de paiement, de compensation et de règlement ont poursuivi leur évolution dans une direction qui favorise la stabilité et l'efficience du système financier.
Exploité par l'Association canadienne des paiements (ACP), qui en est également propriétaire, le Système de transfert de paiements de grande valeur (STPGV) est en service depuis février 1999. En 2008, il a traité en moyenne 22 600 opérations par jour, d'une valeur de quelque 181,5 milliards de dollars. En dix ans d'exploitation, le STPGV s'est montré relativement stable, c'est-à-dire que sa conception et ses mécanismes de contrôle des risques ont subi peu de modifications majeures. Pendant l'année 2008, la Banque a toutefois revu des changements, de nature surtout technique, apportés à onze règles de ce système. Le changement le plus important tient à une augmentation du pourcentage global, qui est passé de 24 % à 30 %4. Avant d'approuver ce changement, la Banque du Canada s'est assurée qu'il n'en découlerait aucun risque systémique, car le STPGV doit demeurer à l'épreuve des risques quelle que soit la valeur du pourcentage global. La hausse de ce paramètre a également une incidence sur les risques auxquels la Banque elle-même s'expose, car elle est à la fois participante au STPGV et garante ultime des règlements au sein de ce système. Dans l'ensemble, la Banque continue d'estimer ces risques tout à fait gérables.
Il convient de mentionner un autre changement notable : le déménagement des sites principal et de relève de l'ACP, associé au regroupement du personnel opérationnel au site principal. La Banque a approuvé ce déménagement, ayant jugé que la diminution potentielle du risque des opérations quotidiennes due à un meilleur échange des connaissances au sein du personnel opérationnel récemment regroupé semble l'emporter sur l'accroissement potentiel du risque en situation extrême. Il se pourrait que, dans certaines situations extrêmes, le déménagement ait plutôt pour effet d'augmenter le risque de retard en cas de panne au site principal, puisqu'il faudrait alors transporter le personnel au site de relève. D'autres dispositions, par exemple une possibilité d'accès à distance et de services de « reprise en cas de sinistre » offerts par le fournisseur de services d'hébergement du système central et de télécommunications de l'ACP, atténuent ce risque. Pour confirmer cette évaluation, l'ACP est tenue de présenter une évaluation des répercussions un an après le déménagement.
Par suite de la découverte et de la correction, en 2007, d'erreurs de programmation du STPGV (voir Engert et Maclean, 2008), la Banque et l'ACP se sont penchées, chacune de son côté, sur la manière dont cet épisode a été géré. La Banque a conclu que les communications internes et les connaissances de l'ACP étaient satisfaisantes et que son processus décisionnel lié à l'incident était adéquat. La démarche de l'ACP a incité sa direction à proposer divers changements aux membres de son conseil d'administration, notamment la mise en place d'un mécanisme de surveillance automatique des fonctions essentielles du STPGV. Cette surveillance automatique devrait entrer en vigueur en 2009.
L'un des principaux éléments du processus de surveillance de la Banque consiste en l'utilisation de protocoles d'entente avec les exploitants des systèmes désignés. Ces protocoles décrivent les rôles et les responsabilités des deux parties aux termes de la Loi et précisent comment celles-ci entendent joindre leurs efforts pour s'acquitter de ces responsabilités. Le protocole signé par la Banque et l'ACP en novembre 2006 est venu préciser et structurer leur relation et améliorer les activités de surveillance qu'elles exercent conjointement. Conformément à ce document, l'ACP se livre à une évaluation annuelle du STPGV en se reportant aux Principes fondamentaux pour les systèmes de paiement d'importance systémique5.
Un autre élément important du processus de surveillance du STPGV appliqué par la Banque tient au rapport de vérification sur les contrôles liés aux opérations effectuées au sein du système pour la période allant du 1er avril au 30 septembre 2008. La vérification, menée conformément au chapitre 5970 du Manuel de l'Institut Canadien des Comptables Agréés, a pour but de voir si le STPGV fonctionne comme ses concepteurs l'avaient prévu. En consultation entre la Banque et le vérificateur de l'ACP, on a ajouté plus de 25 contrôles à la vérification de 2008, y compris des contrôles visant explicitement la file d'attente de paiement centrale. Dans l'ensemble, les résultats de la vérification étaient encourageants, et le vérificateur a conclu que les contrôles évalués étaient assez efficaces pour fournir une assurance raisonnable que les objectifs de contrôle avaient été atteints pendant la période de vérification.
Aux termes du protocole d'entente, le mécanisme de surveillance concertée prend la forme, entre autres, de rencontres régulières entre l'ACP et la Banque. Celles-ci peuvent ainsi discuter de l'évolution générale des systèmes de paiement et envisager longtemps à l'avance les changements éventuels à apporter au STPGV. En 2008, la Banque et l'ACP ont tenu quatre rencontres de ce genre. De plus, toujours conformément aux termes du protocole d'entente, le sous-gouverneur de la Banque responsable de la surveillance a rencontré le conseil d'administration de l'ACP pour discuter de sujets d'intérêt commun.
Propriété de la société Services de dépôt et de compensation CDS inc. (la CDS), qui est également responsable de son exploitation, le CDSX assure la compensation et le règlement des opérations sur titres au Canada. En 2008, ce système a traité quotidiennement une moyenne de 770 200 opérations, d'une valeur approximative de 238 milliards de dollars. Le 18 septembre, le CDSX a atteint un volume record de 1 587 314 opérations.
La CDS a créé en 2008 une nouvelle filiale, Solutions de gestion de valeurs CDS
inc.
, qui offre des services de compensation et de règlement non essentiels aux émetteurs de titres et au marché en général. La Banque a approuvé la démarche, considérant que les activités de cette filiale ne menacent aucunement la solidité financière de la CDS ni l'exploitation du CDSX. Également en 2008, la CDS a mis sur pied un service unidirectionnel sans contrepartie avec CAVALI, dépositaire central de titres pour le Pérou
6 . Le compte de CAVALI à la CDS servira à permettre et à faciliter l'échange de titres émis par des sociétés canadiennes et intercotés à la Bourse de Lima (
BVL
).
En 2008, certains changements ont été apportés aux ententes de financement pour imprévus de la CDS libellé en dollars É.-U. La CDS assure un service de règlement transfrontalier grâce auquel les adhérents peuvent procéder à la compensation et au règlement des opérations sur des titres émis aux États-Unis. En cas de défaillance d'un adhérent se livrant à des opérations transfrontalières, les garanties fournies par l'ensemble des adhérents suffisent à couvrir les obligations qu'ils contractent. Or, la CDS a besoin de liquidités en dollars É.-U. pour effectuer le règlement auprès de la Depository Trust Company (DTC). Pour satisfaire à de telles exigences en matière de liquidités, la CDS a conservé des facilités de liquidité que lui avaient consenties deux banques commerciales jusqu'à ce que l'une de ces deux facilités lui soit retirée en octobre 2008. La CDS était alors en pourparlers avec la DTC pour obtenir une facilité de remplacement, mais il n'a pas été possible d'arriver à un accord avant le retrait de la seconde facilité. C'est pourquoi, à la demande de la CDS, la Banque a accepté de celle-ci un dépôt de 80 millions de dollars É.-U. en guise de réserve temporaire de liquidités, compte tenu de la situation exceptionnellement défavorable des marchés financiers mondiaux. Ces fonds ont été déposés dans le compte général de la Banque à la Banque fédérale de réserve de New York et, pour ce service, la CDS a versé à la Banque des droits progressifs. Le 27 janvier 2009, la CDS a mis fin à son accord de dépôt avec la Banque et transféré les 80 millions de dollars É.-U. dans un compte dont elle est titulaire auprès d'une banque commerciale américaine.
Le rapport de vérification préparé conformément au chapitre 5970 au sujet des activités de la CDS pour l'année allant du 1er août 2007 au 31 juillet 2008 concluait que les contrôles internes de la société étaient décrits avec justesse et exactitude, qu'ils étaient conçus adéquatement pour répondre aux objectifs de la CDS en la matière et que les contrôles avaient été appliqués de façon assez efficace pour remplir les objectifs de contrôle pendant la période vérifiée. La CDS a également fait l'objet, en 2008, d'une évaluation effectuée par une entreprise privée qui examine les pratiques de garde et de gestion du risque, Thomas Murray, et elle a reçu la note AA, qui correspond à « un niveau de risque global très bas » (il s'agit de la note la plus élevée décernée à une organisation de dépôt et de compensation)7.
Les réunions bilatérales que tiennent la Banque et la CDS afin d'étudier un éventail de sujets liés à l'exploitation du CDSX constituent un aspect très précieux de la surveillance exercée par la Banque. Ces réunions permettent d'analyser sans tarder et avec efficience toute préoccupation ou question concernant les changements que l'on se propose d'apporter au CDSX. La Banque est ainsi informée en tout début de processus des modifications envisagées et, le cas échéant, elle peut exprimer ses appréhensions à la CDS afin que celle-ci les prenne en compte dès le départ. La Banque a tenu en 2008 deux rencontres de ce genre avec les autorités de la CDS. Parmi les sujets abordés, citons le rôle de la CDS dans la restructuration du papier commercial adossé à des actifs (l'accord de Montréal), l'examen de la politique de la CDS en matière de risque, son plan stratégique et ses dispositifs relatifs aux liquidités en dollars É.-U. En outre, le sous-gouverneur de la Banque responsable de la surveillance a rencontré le conseil d'administration de la CDS en juin pour échanger sur des sujets d'intérêt commun.
En 2008, la Banque du Canada a approuvé 25 changements touchant les règles et les procédures qui régissent le CDSX.
La CLS Bank assure la compensation et le règlement des opérations de change faisant intervenir 17 monnaies, dont le dollar canadien. La valeur des opérations de change qu'elle a traitées quotidiennement en 2008 s'élève en moyenne à 4 billions de dollars É.-U., dont 81 milliards de dollars CAN pour les opérations en dollars canadiens. La CLS Bank a enregistré des opérations d'une valeur record de 10,3 billions de dollars É.-U. le 19 mars, et un volume quotidien record de 1 554 166 instructions le 17 septembre. À l'heure actuelle, cinq des six grandes banques canadiennes utilisent entre autres la CLS Bank pour régler leurs opérations de change.
La surveillance de la CLS Bank est exercée en collaboration par les banques centrales émettrices des monnaies admises dans le système, et la Réserve fédérale des États-Unis assume la responsabilité première de la supervision (la CLS Bank est constituée sous le régime de la législation américaine, et la grande majorité des opérations sur devises font intervenir le dollar É.-U.).
L'une des grandes réalisations en 2008 tient à la création d'un nouveau protocole de surveillance concertée de la CLS Bank, entériné par les banques centrales concernées. Celles-ci ont mis sur pied un nouveau comité de surveillance de la CLS, lequel constitue le principal organe de surveillance commune du système pour les banques centrales participantes. La Réserve fédérale, en tant que dispensateur de la charte et autorité de supervision de la CLS aux États-Unis, est la première responsable de la surveillance aux termes du protocole, et le président du Conseil des gouverneurs de la Réserve fédérale a désigné un dirigeant de la Banque fédérale de réserve de New York pour présider le Comité. De leur côté, les différentes banques centrales participantes s'acquittent de leurs responsabilités de surveillance par le truchement des représentants qu'elles ont désignés pour siéger au Comité.
Les banques centrales participantes continueront de recourir aux Principes fondamentaux pour les systèmes de paiement d'importance systémique comme norme minimale aux fins de l'évaluation de la CLS Bank, bien que celle-ci soit également assujettie aux politiques des diverses banques centrales. Toute proposition de la CLS qui implique une modification importante des activités de la CLS Bank, de ses règlements ou de ses mécanismes de limitation des risques nécessite l'examen ou l'approbation de la Réserve fédérale. Dans le cadre de son processus d'examen et d'approbation, cette dernière consulte les banques centrales participantes afin de cerner et de résoudre tout problème qu'elles pourraient soulever relativement à la proposition. Le Comité se réunit plusieurs fois par année afin de se pencher sur des questions d'intérêt commun pour les banques centrales participantes, particulièrement en ce qui a trait aux dispositifs de gestion du risque de la CLS Bank et à ses plans stratégiques.
Le peso mexicain et le shekel israélien ont été admis au cycle de règlement de la CLS Bank en 2008. Dans le cadre du processus d'approbation, les banques centrales chargées de la surveillance ont analysé la suffisance des liquidités, la fiabilité des mécanismes de limitation des risques et l'état de préparation opérationnelle avant l'inclusion des nouvelles monnaies dans le cycle de règlement de la CLS, compte tenu de la conformité du système aux Principes fondamentaux pour les systèmes de paiement d'importance systémique et aux autres politiques applicables.
Pendant le second semestre de 2008, la crise financière mondiale s'est intensifiée et diverses institutions financières internationales très en vue n'ont pas survécu. Le 15 septembre 2008, Lehman Brothers Holding Inc. (Lehman) a demandé à être placée sous la protection du chapitre 11 de la loi américaine sur les faillites. Cette démarche concernait la société mère, et non la filiale de courtage Lehman Brothers Inc., mais elle a malgré tout mis en péril diverses infrastructures auxquelles Lehman appartenait. Néanmoins, aucun des systèmes désignés au Canada n'a vu son fonctionnement perturbé. De surcroît, leur bon fonctionnement s'est maintenu durant la période de turbulence des marchés financiers qui a suivi.
L'incidence de la crise sur les systèmes désignés
Le STPGV
Bien que le ralentissement économique ait provoqué une baisse de la valeur des paiements traités par le STPGV, le volume des opérations a poursuivi sa croissance à un rythme modeste. Au quatrième trimestre de 2008, la valeur des paiements a reculé de 3 % par rapport à l'année précédente. En revanche, le volume quotidien des paiements s'est établi en moyenne à 24 000 au dernier trimestre, soit une progression de 6 % comparativement à la même période en 2007. La Banque adoptait en octobre 2008, à titre temporaire, une mesure destinée à appuyer la liquidité du système financier : elle a ainsi commencé à accepter, en guise de garantie pour l'obtention de crédits intrajournaliers dans le STPGV et pour les prêts à un jour consentis au titre de son mécanisme permanent d'octroi de liquidités, des portefeuilles de prêts non hypothécaires en dollars canadiens. De la sorte, les participants au STPGV peuvent réserver à d'autres fins les garanties plus traditionnelles.
Le CDSX
La volatilité accrue des marchés a entraîné une augmentation marquée du volume des transactions dans le CDSX au quatrième trimestre de 2008, portant ainsi la moyenne quotidienne à 1,1 million d'opérations. Il s'agit d'une hausse, en glissement annuel, de près de 60 %. Pendant quatre jours consécutifs en septembre, le volume des opérations dans le CDSX a établi un record inédit en passant chaque jour la barre du million. Le 18 septembre 2008, le volume atteignait son apogée absolu, le CDSX ayant traité 1 587 314 opérations. On n'a relevé aucun problème de capacité pendant cette période.
Ne participant pas à la CDS, Lehman Brothers n'a pas introduit de risque direct dans le CDSX. Cependant, les membres de la CDS inscrits aux services transfrontaliers Canada États-Unis utilisent également les services de la Depository Trust Company (DTC) et de la National Securities Clearing Corporation (NSCC) aux États-Unis. Ils auraient donc pu être soumis à une répartition des pertes si les garanties fournies par Lehman à la DTC et à la NSCC avaient été insuffisantes pour couvrir ses obligations de règlement. Cette possibilité ne présentait pas de risque direct pour la CDS ou le CDSX. Dans les faits, les garanties offertes par Lehman étaient suffisantes et les pertes n'ont pas été réparties entre les membres de la CDS inscrits aux services transfrontaliers. Une semaine avant la faillite de Lehman, la CDS a procédé à des décotes de 100 % des titres émis par Lehman déposés à la CDS, c'est-à-dire que de tels titres donnés en garantie étaient dépourvus de valeur dans le CDSX.
En 2008, la CDS a réagi de diverses manières à la tourmente des marchés; elle a notamment amélioré son programme de simulation de crise, elle a modifié plus fréquemment les taux de décote s'appliquant aux actions remises en garantie, elle a adopté des critères plus stricts pour la validation des prix servant à mesurer le risque de marché et à évaluer les garanties, elle a multiplié ses communications avec les adhérents au sujet des risques potentiels et des obligations qu'ils devraient assumer dans l'éventualité de la défaillance d'un adhérent et, enfin, elle a optimisé ses processus de gestion des défaillances.
La CLS Bank
Pendant la semaine du 15 septembre 2008, lorsque la turbulence des marchés a atteint son comble, la CLS Bank a réglé 4,4 millions d'instructions totalisant 26,9 billions de dollars É.-U. et, au cours de sa journée de plus fort volume, le 17 septembre, elle a enregistré 1,55 million d'instructions, en raison de la reconduction trimestrielle de contrats à terme de gré à gré et de contrats à terme standardisés. Le volume quotidien moyen des opérations traitées par la CLS a réalisé un nouveau record de 728 000 instructions en octobre et, pour l'ensemble de 2008, il s'est établi à 549 218, en hausse de 48 % par rapport à 2007. Après les records constatés aux mois de septembre et d'octobre, soit jusqu'à la fin de l'année, les volumes de règlement dans la CLS Bank sont retombés à des niveaux plus congruents à la croissance stable observée en 2008. Au cours des mois records, les poussées de volume ont été gérées efficacement.
On a connu au Canada, pendant la semaine du 15 septembre, une incertitude quant au risque découlant des opérations de change réglées hors de la CLS Bank. Pour dissiper ce genre d'incertitude, la Banque du Canada et le Bureau du surintendant des institutions financières sont à mettre au point un plan de travail commun.
L'ACP et diverses questions touchant les systèmes de paiement
Conformément au cadre réglementaire régissant le Système automatisé de compensation et de règlement (SACR), le ministère fédéral des Finances consulte régulièrement la Banque du Canada au sujet des modifications proposées aux règles et d'autres facteurs qui concernent ce système8. Au cours de l'année, la Banque a revu neuf modifications des règles et des règlements qui s'appliquent au SACR.
Plus globalement, pour faciliter la collaboration entre la Banque et le ministère des Finances relativement aux questions de paiement, y compris l'évolution générale des politiques se rapportant aux systèmes de paiement, de compensation et de règlement, des hauts dirigeants et des fonctionnaires de niveau opérationnel se rencontrent chaque trimestre pour échanger des renseignements et le résultat de leurs analyses.
Les comités et groupes de travail réunissant les banques centrales
La Banque siège activement au Comité sur les systèmes de paiement et de règlement (CSPR) de la Banque des Règlements Internationaux. Ce comité rassemble des banques centrales chargées d'établir conjointement les normes qui orientent les politiques de surveillance à l'échelle mondiale. Il effectue également des analyses et des recherches sur un éventail de sujets se rapportant aux systèmes de compensation et de règlement9.
En 2008, le personnel de la Banque a aussi pleinement participé à divers groupes de travail formés par le CSPR. L'un de ces groupes de travail est chargé de préparer des lignes directrices concernant les normes liées au risque opérationnel et à la continuité des opérations. Un autre groupe s'est intéressé aux questions touchant l'amélioration des arrangements opérationnels des banques centrales qui participent à la distribution internationale de liquidités. Ce groupe met l'accent sur les mesures à prendre à court terme pour favoriser la mobilisation transfrontalière de titres, surtout en situation d'urgence, et il part du principe que les politiques et les arrangements opérationnels d'une banque centrale sont conditionnés par les besoins de son marché intérieur. Le groupe vise à inciter les banques centrales à s'entraider afin d'établir des arrangements transfrontaliers en matière de liquidités et de perfectionner ceux qui sont en place. En 2008, d'autres groupes de travail du CSPR ont publié les résultats d'une enquête mondiale menée en 2006 auprès de grandes banques internationales sur leurs pratiques de gestion du risque de règlement découlant des opérations de change, ainsi qu'un rapport traitant des liens d'interdépendance entre les systèmes de paiement et de règlement de titres dans les pays représentés au sein du CSPR, ainsi que du rôle possible de ces liens dans la transmission du risque entre systèmes et entre pays.
Par ailleurs, la Banque participe toujours à la surveillance commune de la Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication (SWIFT). SWIFT est le principal fournisseur de services de messagerie de paiements pour les institutions financières du monde entier et les systèmes cruciaux tels que le STPGV et la CLS Bank. Ce groupe de surveillance conjointe observe et évalue la mesure dans laquelle SWIFT maintient des mécanismes de gouvernance et de gestion des risques, des processus opérationnels et des contrôles propres à lever les inquiétudes au sujet de la stabilité financière.
Le groupe de surveillance de SWIFT s'est réuni deux fois en 2008. La restructuration des centres des opérations mondiaux de SWIFT (le projet dit d'« architecture distribuée ») a continué à retenir l'attention dans les échanges. Le projet, qui doit être lancé en deux phases, viendra répartir les services de messagerie SWIFT en deux zones de traitement la zone européenne et la zone transatlantique , chaque zone comportant deux centres d'exploitation. La première phase, qui devrait être achevée à la fin de 2009, comporte l'ouverture d'un nouveau centre d'exploitation temporaire en Europe, ainsi que celle d'un nouveau centre de commande et de contrôle dans la zone Asie-Pacifique. Pendant la seconde phase, un centre des opérations à la fine pointe de la technologie remplacera le centre d'exploitation temporaire. D'après les prévisions actuelles, cette seconde phase devrait se terminer à la fin de 2012.
L'architecture distribuée accroîtra la résilience et la capacité, permettra de réduire les coûts moyens à long terme des services de messagerie et allégera les inquiétudes concernant la protection des données, inquiétudes suscitées par les injonctions qu'a déposées le département du Trésor américain afin d'avoir accès aux données sur les paiements internationaux transitant par les services de messagerie SWIFT (voir Goodlet, 2007). Tous les messages qu'échangeront des membres canadiens par l'entremise de SWIFT seront traités au centre d'exploitation européen.
La planification de la continuité des opérations
La Banque du Canada collabore avec les exploitants et les acteurs des systèmes canadiens de compensation et de règlement d'importance systémique en vue de perfectionner les processus de continuité des opérations. Ces systèmes sont au cœur du système financier canadien, et la moindre défaillance de leur part pourrait avoir de lourdes conséquences pour l'ensemble de l'économie. En janvier 2008, la Banque a rencontré les exploitants et les acteurs des systèmes canadiens de compensation et de règlement d'importance systémique pour discuter des moyens de renforcer les processus intégrés de continuité des opérations. La Banque, de concert avec l'ACP et la CDS, travaille à mettre au point un cadre de mise en commun de l'information portant sur les principaux risques et les stratégies clés d'atténuation des risques liés aux systèmes canadiens de compensation et de règlement.
Le Système bancaire à haute disponibilité
La Banque du Canada demeure résolue à optimiser sa capacité de fournir ses services particuliers aux principaux systèmes de compensation et de règlement et aux institutions financières au moyen d'un système à haute disponibilité. Son nouveau système bancaire à haute disponibilité a été mis en service en octobre 2008.
Voici la liste des travaux de recherche sur les systèmes de compensation et de règlement effectués par le personnel de la Banque et publiés en 2008 :
- Bech, M., J. T. E. Chapman et R. Garratt (2008). « Which Bank Is the "Central" Bank? An Application of Markov Theory to the Canadian Large Value Transfer System », document de travail no 2008-42, Banque du Canada.
- Chande, N. (2008). « A Survey and Risk Analysis of Selected Non-Bank Retail Payments Systems », document d'analyse no 2008-17, Banque du Canada.
- Chapman, J. T. E. (2008). « Policy Coordination in an International Payment System », document de travail no 2008-17, Banque du Canada.
- Chapman, J. T. E., J. Chiu et M. Molico (2008). « A Model of Tiered Settlement Networks », document de travail no 2008-12, Banque du Canada. Un résumé de cette étude a été publié dans la livraison de juin 2008 de la Revue du système financier de la Banque du Canada, sous le titre « La modélisation d'un système de règlement à plusieurs niveaux d'intermédiation ».
- Embree, L., et K. Millar (2008). « The Effects of a Disruption in CDSX Settlement on Activity in the LVTS: A Simulation Study », document d'analyse no 2008-7, Banque du Canada. Un résumé de cette étude a été publié dans la livraison de juin 2008 de la Revue du système financier de la Banque du Canada, sous le titre « Simulation des effets d'une perturbation du processus de règlement du CDSX sur le STPGV ».
- Engert, W., T. Gravelle et D. Howard (2008). « The Implementation of Monetary Policy in Canada », document d'analyse no 2008-9, Banque du Canada.
- O'Connor, S., et G. Caldwell (2008). « What To Do about Bilateral Credit Limits in the LVTS When a Closure Is Anticipated: Risk versus Liquidity Sharing among LVTS Participants », document d'analyse no 2008-13, Banque du Canada.
- O'Connor, S., J. T. E. Chapman et K. Millar (2008). « Liquidity Efficiency and Distribution in the LVTS: Non-Neutrality of System Changes under Network Asymmetry », document d'analyse no 2008-11, Banque du Canada.
Bibliographie
Arjani, N., et D. McVanel (2006). « Le Système canadien de transfert de paiements de grande valeur : notions de base », Banque du Canada. Internet : http://www.banqueducanada.ca/fr/financier/stpv_neville.pdf.
Comité sur les systèmes de paiement et de règlement (2008). « The Interdependencies of Payment and Settlement Systems », publication no 84, Banque des Règlements Internationaux, juin.
--- (2008). « Progress in Reducing Foreign Exchange Settlement Risk », publication no 83, Banque des Règlements Internationaux, mai.
Engert, W., T. Gravelle et D. Howard (2008). « The Implementation of Monetary Policy in Canada », document d'analyse no 2008-9, Banque du Canada.
Engert, W., et D. Maclean (2008). « Activités de surveillance menées par la Banque du Canada en 2007 en application de la Loi sur la compensation et le règlement des paiements », Revue du système financier, Banque du Canada, juin, p. 47-54.
Engert, W., et D. Maclean (2006). « Le rôle de la Banque du Canada dans la surveillance des systèmes de compensation et de règlement », Revue du système financier, Banque du Canada, juin, p. 55-62.
Goodlet, C. (2007). « Activités de surveillance menées par la Banque du Canada en 2006 en application de la Loi sur la compensation et le règlement des paiements », Revue du système financier, Banque du Canada, juin, p. 33-37.
--- (2006). « Activités de surveillance menées par la Banque du Canada en 2005 en application de la Loi sur la compensation et le règlement des paiements », Revue du système financier, Banque du Canada, juin, p. 31-34.
1. Les trois premiers rapports de la série ont été publiés dans la Revue du système financier (juin 2006, 2007 et 2008) de la Banque du Canada. Auparavant, un compte rendu des activités de surveillance de la Banque figurait dans son rapport annuel.
2. Un système de compensation et de règlement est un ensemble d'instruments, de procédures et de règles, doublé d'une infrastructure technique, servant au transfert de fonds ou d'autres actifs entre ses participants.
3. On trouvera dans Engert et Maclean (2006) des précisions sur la stratégie utilisée par la Banque dans l'exercice de cette surveillance.
4. Le pourcentage global, de pair avec les limites de crédit bilatérales que les participants s'accordent mutuellement, constitue un paramètre clé quant au contrôle des risques au sein du STPGV. Le montant que chaque participant doit fournir au titre des garanties de tranche 2 correspond à la limite de crédit bilatérale maximum qu'il consent à tout autre participant, multiplié par le pourcentage global. Par ailleurs, la limite de débit net de tranche 2 qui restreint la possibilité qu'un participant présente un risque pour le système correspond à la somme de toutes les limites de crédit bilatérales qui lui sont accordées, multipliée par le pourcentage global. On trouvera une explication simple de ces éléments dans Engert, Gravelle et Howard (2008), et une description détaillée dans Arjani et McVanel (2006).
9. Pour en savoir plus sur le CSPR, voir à l'adresse suivante : http://www.bis.org/cpss/index.htm (en anglais seulement).