le 05 novembre 2009, Ottawa, Ontario
La vie en mer est pleine de périls. Cependant, personne ne s'attend à être blessé par de l'équipement destiné expressément à sauver les gens en cas de danger.
Tel est pourtant le lot des marins. En effet, depuis 1990, les embarcations de sauvetage sont à l'origine d'accidents qui ont causé des centaines de blessés et de morts. On les doit habituellement à une défectuosité des crochets qui servent à mettre ces embarcations à l'eau. Par ailleurs, ces accidents ne surviennent pas en mer, mais lors d'exercices visant à préparer l'équipage à une véritable évacuation.
Une entreprise de St. John's a imaginé une nouvelle approche technique afin de rendre les embarcations plus sécuritaires. Mad Rock Marine Solutions connaît un énorme succès avec les crochets nouveau genre qu'elle a conçus, et ses fondateurs ont contribué à apporter à la réglementation certaines modifications qui doteront les navires du monde entier de crochets plus sûrs.

The RocLoc lifeboat hook.
Science et sécurité
L'ingénieur Dean Pelley travaillait comme étudiant de troisième cycle à l'Institut des technologies océaniques du CNRC lorsqu'on lui a demandé d'entreprendre des recherches sur la performance des embarcations de sauvetage dans des conditions climatiques extrêmes. Il a été fort surpris de trouver un grand nombre de rapports d'accidents spécifiquement associés aux crochets de libération des embarcations.
« J'ai vite constaté que les embarcations de sauvetage n'avaient presque pas fait l'objet de recherches scientifiques ou techniques. Jamais, déclare-t-il. Elles ont essentiellement été perfectionnées sur la foi d'évacuations désastreuses et n'ont pratiquement pas évolué depuis l'époque du Titanic. »
M. Pelley y a vu l'occasion de commercialiser les connaissances issues des travaux du CNRC. Avec son collègue Jason Dawe, il a donc lancé Mad Rock Marine Solutions en 2002 et a entrepris de concevoir de nouveaux crochets pour les embarcations de sauvetage.
Tous les navires construits après 1986 sont tenus d'avoir des crochets à « échappement largable en charge », c'est-à-dire des crochets qui s'ouvrent même lorsqu'une tension s'exerce sur eux, par exemple quand une embarcation se trouve suspendue au-dessus de l'eau. Une étude britannique de 2001 révèle que la raison la plus fréquente des accidents mortels survenus avec les embarcations de sauvetage est une défectuosité des crochets. La majorité des accidents se produisent quand un crochet à l'une des extrémités de l'embarcation s'ouvre inopinément, en raison d'un réglage incorrect ou à la suite d'une erreur humaine.

Le système de Mad Rock est stable par définition. C'est le poids de l'embarcation qui maintient les crochets fermés.
« L'embarcation pend verticalement et le crochet restant n'est pas conçu pour retenir un tel poids, poursuit M. Pelley. Il s'ouvre donc lui aussi et laisse échapper sa charge. » Une chute d'à peine un mètre suffit à blesser quelqu'un. « Alors, imaginez les conséquences d'une chute de 25 à 30 mètres. L'embarcation se brise. »
Une approche infaillible
Bien que la plupart des crochets conçus par l'industrie respectent les normes de la réglementation, les deux ingénieurs ont opté pour une approche différente. « Nous nous sommes dit qu'il fallait examiner le problème sous l'angle des contraintes techniques », reprend M. Pelley. « Qu'attend-on exactement du crochet? »
Le crochet doit fonctionner au moins une fois durant l'évacuation, mais il servira le plus souvent pour l'entraînement. « Nous avons donc imaginé un crochet qui fonctionnera au moment où on en aura besoin, mais qui pourra également être utilisé sans risque pour l'entraînement. » Parallèlement, les deux ingénieurs ont tenu compte de la corrosion sur les navires et de la réalité voulant que la maintenance s'y effectue de manière irrégulière.
Résultat : le crochet RocLoc. Fait d'acier résistant à la corrosion, il n'exige que peu d'entretien. Mais surtout, le crochet se fixe « par défaut » en position fermée.

Un employé de Mad Rock explique à l'équipage d'un navire comment utiliser les crochets des embarcations.
« En cas d'erreur ou de défectuosité, les anciens crochets avaient tendance à s'ouvrir d'eux-mêmes, reprend M. Pelley. Le nôtre se ferme automatiquement. Plus on tire dessus et plus la came qui le tient verrouillé se bloque dans cette position. Il est impossible que le crochet s'ouvre sans qu'on intervienne physiquement. »
Jusqu'à présent, l'entreprise a équipé 48 navires, et 30 autres sont sur une liste d'attente. L'approche de Mad Rock a permis à l'industrie de se tourner vers des crochets qui se « bloquent » lors d'une défectuosité, et l'Organisation maritime internationale a modifié son règlement pour faire en sorte que tous les vieux crochets soient remplacés par de nouveaux crochets ayant cette caractéristique.
M. Pelley déclare être fier « de voir que le produit de l'entreprise rehausse la sécurité des marins et d'avoir mis au point, à partir de rien, quelque chose qui a résolu un problème majeur de l'industrie ». En abordant un problème sérieux sous l'angle pratique de l'ingénierie, l'entreprise a contribué à introduire un changement qui pourrait sauver de nombreuses vies.
Un point de départ sûr
L'inspiration de Mad Rock découle des travaux de Dean Pelley auprès du chercheur du CNRC Antonio Simoes Ré, dont l'équipe s'est penchée sur les diverses facettes des systèmes d'évacuation maritimes. « Notre entreprise n'existerait pas sans cette équipe », déclare M. Pelley.
Mad Rock a vu le jour à l'Installation de partenariat industriel du CNRC, à St. John's. L'entreprise y a trouvé de l'encadrement, de l'aide pour l'essai des prototypes et des locaux où travailler. L'aide financière du PARI-CNRC et de divers organismes régionaux et provinciaux a permis à l'entreprise de survivre les premières années. « Les conditions nous ont été propices durant le développement de la technologie, explique M. Pelley. Tout cet appui du groupe s'est révélé inestimable. »
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