29 avril 2010
Ottawa (Ontario)
Le Premier ministre Stephen Harper a prononcé aujourd’hui l’allocution suivante à l’occasion du Sommet des affaires du G8 et du G20 organisé par la Chambre de commerce du Canada :
« Bonjour, Mesdames et Messieurs. Merci Shauneen pour cette aimable présentation. J’aimerais saluer Perrin Beatty, président et chef de la direction de la Chambre de commerce du Canada, et John Manley, président et chef de la direction du Conseil canadien des chefs d’entreprise et président du conseil consultatif du Centre Munk. Messieurs, je suis heureux de vous rencontrer de nouveau.
« Chers invités distingués, c’est un immense honneur pour moi de m’adresser à vous à l’occasion de cette prestigieuse rencontre. J’aimerais remercier Perrin et la Chambre de commerce du Canada d’avoir organisé ce Sommet d’une importance capitale. Il n’aurait pas pu se tenir à un meilleur moment. Plus que jamais, nos chefs d’entreprises doivent se rencontrer pour trouver des solutions aux enjeux économiques auxquels se heurtent tous nos pays. Quel que soit le dossier, qu’il s’agisse du libre-échange, de la réforme financière ou de l’accroissement des débouchés économiques, votre expérience et vos connaissances peuvent vraiment changer la vie de millions de personnes du monde entier. Merci donc pour vos efforts.
« Mesdames et Messieurs, comme vous le savez, dans moins de deux mois, le Canada va accueillir les sommets du G8 et du G20. Je veux donc vous parler aujourd'hui de nos priorités au cours de ces deux sommets et de notre point de vue sur la gouvernance mondiale. De plus, j’ai de bonnes nouvelles pour certaines personnes présentes aujourd’hui dont je vous parlerez plus tard.
« Mesdames et Messieurs, nous vivons une de ces périodes de transition que l’histoire intercale entre des périodes de stabilité relative. Ceux qui ont eu une belle et longue vie ont déjà vécu ce genre d’événements. La fin de l’étalon-or. La montée de la domination du dollar américain. L’arrivée de nouveaux instruments de gouvernance économique mondiale. La série de Sommets réunissant les Grands de ce monde et dont le nombre est passé de six – au moment où le Canada s’y est joint – à huit, quand la Russie de l’après-guerre froide y a été admise. Le G8 a régulièrement mené des activités de sensibilisation avec les cinq grandes économies émergentes. Ces rencontres internationales ont permis de reconnaître tacitement que le pouvoir d’établir des règles mondiales et de répondre aux problèmes économiques était de plus en plus dispersé. Nous étions déjà loin de l’époque où Fort Knox symbolisait l’autorité financière. Et tout a changé en moins d’une génération.
« Ces deux dernières années, nous avons vécu la première crise de l’économie mondialisée. Elle a mis au jour de graves déficiences dans la supervision des institutions financières de certains pays, des déficiences qui se sont vite propagées dans le monde entier, causant du chômage et des difficultés généralisés. Et, cela nous a forcés à reconnaître qu’une gouvernance économique mondiale efficace requiert de tous les principaux acteurs qu’ils soient présents à la table. D’où la création du G20, qui souhaite réformer les grandes institutions, comme le Fonds monétaire international et le Conseil de stabilité financière.
« Notre gouvernement a un objectif clair pour les rencontres du G8 et du G20, placées sous le thème " Reprise et Renaissance ". Pour que l’économie mondiale reprenne ou connaisse une nouvelle ère de stabilité, il sera impératif, voire absolument vital, que le G20 favorise, au cours de ses futures rencontres, le même sens de responsabilité commune à l’égard de l’économie mondiale qu’il l’a fait au cours des 18 derniers mois.
« C’est ce que j’appelle le principe de la " souveraineté éclairée ". Si le G20 veut être la force efficace qu’il doit être, nous devons tous reconnaître que l’économie mondiale n’est plus la simple somme des économies nationales, ni ce qu’il reste après que les pays ont répondu à leurs intérêts, ni un jeu à somme nulle dans lequel une partie gagne au détriment de l’autre. Au contraire, nous devons prévoir et concevoir des approches viables que tous peuvent adopter et dont tous doivent bénéficier.
« Plus particulièrement, le G20 doit mener à bien ses engagements de relancer l’économie à court terme. La crise grecque nous rappelle que les gouvernements ne peuvent accumuler des dettes infiniment. Nous devons aussi commencer à axer nos efforts sur le développement et la mise en œuvre du Cadre pour une croissance forte, durable et équilibrée convenu à Pittsburgh. Je crois que ces efforts détermineront si le G20 deviendra réellement la " principale tribune mondiale pour la coopération économique " qu’il prétend être.
« Il faut admettre que le travail du G20 a jusqu’à maintenant été impressionnant. Malgré l’incertitude qui demeure dans l’économie mondiale, la promesse crédible de mesures de relance internationales coordonnées au début de la récession a permis, comme le reconnaissent la plupart des analystes, de stimuler la confiance et de soutenir l’emploi et l’activité économique. En effet, elle a permis de colmater la digue et d’empêcher un déluge qui, comme vous le savez bien, aurait pu entraîner l’économie mondiale dans une véritable dépression. Nous avons agi et évité un cataclysme. Toutefois, dans d’autres dossiers, nous n’avons que conclu des ententes. Nous devons maintenant les mettre en œuvre. Ainsi, les discussions de juin doivent porter non pas sur la conclusion de nouvelles ententes, mais sur l’établissement d’un cadre de responsabilisation pour celles déjà conclues.
« Outre les mesures de relance, le G20 doit faire preuve de leadership sur deux autres plans : la lutte contre les pratiques commerciales restrictives – le protectionnisme, en d’autres termes – et la réforme de la réglementation financière. Encore une fois, la tentation d’agir seul et dans son propre intérêt va de soi. Le pays qui peut exporter sans sanctions et imposer ses propres obstacles tarifaires jouit d’un avantage évident. Mais nous en avons déjà fait l’essai il y a 80 ans et avons connu la grande dépression. Que Smoot et Hawley et leur mauvaise idée reposent en paix.
« La réforme de la réglementation du secteur financier est bien plus complexe. Bien des problèmes d’aujourd’hui découlent de l’irresponsabilité dont les contribuables ont finalement fait les frais. On a naturellement demandé l’imposition de mesures plus rigoureuses, et même punitives, aux responsables.
« Si vous suivez l’actualité, vous savez qu’un des refrains du jour est une taxe mondiale sur les banques. Vous savez aussi que le Canada ne reprend pas cette chanson. Tout comme on ne peut pas taxer une économie pour en augmenter la prospérité, on ne peut pas taxer le secteur financier pour en accroître la stabilité. Il existe une meilleure solution à ce problème et le Canada a une certaine expertise dans ce domaine. Mesdames et Messieurs, pendant que les banques du monde entier étaient soumises au pire test de notre époque et que les banques et les institutions financières s’écroulaient tout autour de nous, les banques canadiennes, elles, sont restées à flot.
« Elles ont su maintenir de bons ratios de levier financier et éviter de s’exposer à des actifs nocifs. Aucune des principales institutions financières canadiennes n’a fait faillite ni n’a eu besoin d’être sauvée par le gouvernement. D’ailleurs, le FMI, Moody’s et le Forum économique mondial ont reconnu leurs forces. Et selon le Forum économique mondial, nous possédons le plus solide des secteurs financiers du monde entier.
« L’élément clé de nos banques, à part, bien sûr, leurs propres décisions avisées, a été une supervision forte et active par un cadre réglementaire visant à éviter les risques et à assurer la transparence. Et également une conciliation adéquate du risque, de la performance et de la récompense. Ce sont là les mécanismes que le Canada va encourager quand les leaders du G20 parleront du secteur financier. Parce que ces solutions fonctionnent. Parlant des Canadiens et des Canadiennes dont les efforts donnent des résultats, permettez-moi de mentionner que la semaine dernière, le FMI a publié ses nouvelles projections pour la croissance. Selon l’organisme, de toutes les économies du G7, celle du Canada connaîtra la plus rapide cette année et l’année suivante. ‘‘La situation du Canada lorsqu’il est entré dans la crise mondiale était bonne; les stratégies de sortie y semblent donc beaucoup plus faciles à mettre en œuvre que dans les autres pays’’.
« En d’autres termes, Mesdames et Messieurs, ces propos confirment ce que nous disons depuis quelque temps : le Canada a été la dernière des principales économiques développées à entrer en récession et il en sortira plus rapidement et avec une force inégalée.
« Permettez-moi d’aborder brièvement la question du G8. Le groupe devra se concentrer sur des enjeux de portée plus générale, comme le développement et la démocratie, la paix et la sécurité.
« Malheureusement, le travail ne manque pas à cet égard. Le terrorisme, la piraterie, la pauvreté et le sous-développement sont des enjeux dont la meilleure solution demeure une coopération étroite entre des pays amis et des alliés aux vues similaires. Voilà pourquoi nous nous concentrerons sur notre initiative sur la santé maternelle et infantile qui a reçu hier l’aval des ministres du Développement du G8. Cette initiative vise à lutter contre le taux consternant de mortalité des mères et des enfants dans les pays en développement.
« Or, la plus sérieuse des menaces à la sécurité mondiale est sans aucun doute le risque que des personnes malveillantes mettent la main sur des armes nucléaires. Dans ce dossier, la coopération internationale est indispensable. Cependant, l’accord sur l’entreposage en toute sécurité des matières nucléaires conclu à Washington plus tôt ce mois-ci me donne de l’espoir. En fait, cet accord est l’exemple parfait de pays qui conjuguent leurs efforts à leur avantage. Le renvoi des combustibles nucléaires épuisés à la source contribuera à mettre les matières fissiles à l’abri des personnes qui sont les plus susceptibles de les utiliser. À Muskoka, les dirigeants du G8 devront s’inspirer de cet exemple pour montrer que les progrès sont possibles, mais qu’ils ne s’accomplissent pas sans effort.
« J’ai mentionné que j’avais de bonnes nouvelles pour certains d’entre vous. En fait, ce sont de très bonnes nouvelles pour tous les Canadiens et Canadiennes qui se soucient de l’avenir. Nous présidons les Sommets du G8 et du G20 à une époque difficile où l’économie mondiale demeure incertaine et divers pays et régions sont en proie à une agitation considérable. La pertinence des institutions internationales se modifie. De nouvelles technologies influencent le marché et ont parfois des répercussions sur la sécurité. Tout est en évolution constante. Dans le monde numérique, même les frontières de la souveraineté délimitées par les cartes semblent avoir perdu de leur signification.
« En une période d’évolution comme celle-là, le plus grand défi est de comprendre comment le monde suit le mouvement. Heureusement pour les Canadiens et les Canadiennes, l’École Munk des affaires mondiales de l’Université de Toronto a décidé de relever ce défi. Établie et enrichie grâce à la générosité exceptionnelle de deux citoyens canadiens, Peter et Mélanie Munk, l’École a déjà acquis une réputation d’excellence dans les études sur la sécurité internationale. Une telle preuve de succès mérite du renfort.
« J’ai donc le plaisir d’annoncer que notre gouvernement va soutenir financièrement l’agrandissement de l’école. Celle-ci deviendra le Centre canadien de l’École Munk des affaires mondiales, et développera une véritable expertise sur la sécurité mondiale, axée sur la sécurité nationale et la cybersécurité. Dans une société du savoir, le bien le plus précieux d’un pays et son moyen de défense le plus efficace est ses connaissances. Je tiens à profiter de cette occasion pour remercier Peter et Mélanie de leur vision et de leur volonté patriotique de contribuer aussi généreusement à doter le Canada des outils nécessaires pour relever les défis futurs.
« Une dernière chose : le monde va changer autour de nous. Cependant, les Canadiens et Canadiennes devraient savoir que nos principes directeurs, eux, ne changeront pas. Le Canada va continuer à chercher à faire ce qui est juste; soit, collaborer. Or, collaborer ne signifie pas suivre la vague ou se replier et devenir un médiateur moralement neutre lorsque l’enjeu est critique. Dans de telles circonstances, la neutralité n’est pas une qualité et l’impartialité est un reproche à notre conscience.
« Les Canadiens et Canadiennes s’attendent à ce que leur gouvernement se fasse le défenseur de la liberté, de la démocratie et de la justice, qu’il fasse les bons choix et qu’il les défende avec passion. Au pays. À l’étranger. Maintenant et dans l’avenir. Comme les Canadiens et Canadiennes l’ont toujours fait. Mesdames et Messieurs, je vous remercie de m’avoir invité. Je vois que votre programme est fascinant et c’est avec regret que je dois partir.
« Je tiens à féliciter une fois de plus la Chambre de commerce du Canada et tous ceux qui ont bien voulu entreprendre des travaux d’importance nationale au nouveau Centre canadien d’études sur la sécurité mondiale.
« Merci beaucoup. Et à la prochaine. »