Le 5 juin 2013 - Ottawa (Ontario)
Sous réserve de modifications
Je suis heureuse de me joindre à vous aujourd’hui au Club économique pour parler d’un sujet qui me tient à cœur et auquel le gouvernement attache une grande importance : l’Arctique canadien.
Étant moi-même née dans le Nord canadien, où j’ai grandi et où je vis toujours, je suis fière de faire partie d’un gouvernement qui accorde tant d’attention au Nord et au renforcement de la souveraineté du Canada sur ce territoire qui couvre 40 p. 100 de la masse terrestre du Canada.
Le Nord est une partie essentielle du patrimoine collectif du Canada et de son avenir. C’est pourquoi, en 2007, le gouvernement a lancé la « Stratégie pour le Nord du Canada : Notre Nord, notre patrimoine, notre avenir ».
La Stratégie pour le Nord porte sur quatre domaines prioritaires :
- promouvoir le développement social et économique;
- protéger notre patrimoine naturel;
- améliorer la gouvernance dans le Nord et y transférer des responsabilités;
- exercer notre souveraineté dans l’Arctique.
Nous prenons des mesures dans ces quatre domaines clés pour protéger les intérêts du Canada à l’intérieur de nos frontières et sur la scène mondiale. Ces mesures se fondent sur nos droits et nos responsabilités à titre de nation arctique et de puissance arctique.
En août de l’année dernière, j’ai eu l’honneur d’être nommée par le premier ministre [Stephen] Harper au poste de ministre responsable du Conseil de l’Arctique pour le Canada, l’instance de premier plan au chapitre de la coopération internationale dans les affaires arctiques.
C’est bien sûr un honneur de servir le Canada à quelque titre que ce soit, mais cette nomination m’a touchée profondément pour deux raisons.
Tout d’abord, c’est la première fois que le Canada nommait un ministre chargé spécifiquement du Conseil de l’Arctique. C’est là le témoignage de l’importance que le gouvernement attache au Nord, au Conseil de l’Arctique et au mandat de notre pays à la présidence de celui-ci pour les deux prochaines années.
Ensuite, il s’agit de la première fois qu’une personne née et élevée dans l’Arctique est nommée à ce poste. Cette décision met en relief l’importance qu’accorde le pays à l’expérience et au savoir particuliers que les gens du Nord peuvent mettre à contribution.
Les réactions positives des États de l’Arctique et des autochtones du Nord, et l’accueil qu’ils m’ont réservés, m’ont remplie de fierté. Le mois dernier, quand le Canada a pris la présidence du Conseil de l’Arctique en Suède, bon nombre de gens m’ont exprimé la fierté qu’ils ressentaient de voir une femme du Nord siéger pour la première fois à la tête du Conseil.
La présidence du Conseil de l’Arctique permet au Canada d’exécuter avec plus de vigueur son programme pour le Nord et l’Énoncé de la politique étrangère du Canada pour l’Arctique, en collaborant avec ses partenaires internationaux.
Étant donné que notre programme s’appuie sur les quatre piliers de notre Stratégie, je souhaitais vous informer aujourd’hui des points saillants du programme du Canada pour le Conseil de l’Arctique. Vous êtes le premier groupe de personnes au Canada auquel je m’adresse pour parler de ce programme et je suis heureuse de pouvoir commencer à transmettre cette information à la population canadienne.
Par la suite, je vais clore mon discours en suggérant à ceux et celles d’entre vous qui ont des antécédents d’affaires de songer à vous engager dans l’une des économies connaissant la plus forte croissance au pays.
Depuis la création du Conseil de l’Arctique à Ottawa, en 1996, les pays de l’Arctique et les peuples autochtones ont conjugué leurs efforts au sein du Conseil pour aborder des enjeux communs.
Au moment de sa création, il y a seize ans, le Conseil avait deux objectifs principaux.
En bref, ces objectifs consistaient à favoriser dans la région un développement économique et social respectueux de l’environnement.
Depuis, chaque État de l’Arctique a eu la chance d’assumer la présidence du Conseil. Je suis enchantée de dire que ces deux objectifs demeurent au cœur des travaux du Conseil alors que nous entamons un deuxième cycle des mandats à la présidence.
Le Canada continuera de faire progresser ces objectifs au cours de son mandat. Il y apportera toutefois un point de vue unique.
Dans les consultations que j’ai tenues avec des résidents du Nord depuis ma nomination, j’ai entendu un message clair : le bien-être et la prospérité des gens qui vivent dans le Nord doivent figurer en tête des priorités du Canada au Conseil de l’Arctique.
Je crois que le Canada doit jouer un rôle important pour s’assurer que cet objectif est atteint et que les activités du Conseil sont significatives aux yeux des habitants de la région et qu’elles améliorent réellement la vie de ces derniers.
J’en suis arrivée à cette conclusion en raison de la frustration que j’ai moi-même ressentie dans le Nord à l’égard des personnes qui voulaient nous étudier de loin et faire des proclamations quant à la façon dont nous devions mener nos vies, mais qui s’intéressaient peu à contribuer de manière significative à bâtir des collectivités saines et durables.
Alors que l’Arctique continue de faire l’objet d’une attention internationale sans précédent, un nombre croissant de pays et d’organisations à l’extérieur de la région circumpolaire demandent à devenir des observateurs accrédités au Conseil de l’Arctique. Le Canada a appuyé la décision prise par consensus par les ministres du Conseil de l’Arctique d’admettre au Conseil plusieurs pays à titre de nouveaux observateurs.
Nous avons également convenu de ne pas prendre de décision définitive au sujet de l’Union européenne jusqu’à ce que les préoccupations concernant l’interdiction mal éclairée et politique des produits du phoque par l’UE aient été abordées.
Cette décision par consensus démontre que, sous la direction du Canada, lorsque d’autres pays prennent des décisions qui ont une incidence sur la qualité de vie des collectivités du Nord — comme c’est le cas avec l’interdiction des produits du phoque —, nous n’hésiterons pas à intervenir.
Ainsi, les observateurs ont l’occasion de mieux comprendre l’incidence qu’ont leurs politiques sur la vie des résidents du Nord. Je me réjouis à la perspective de collaborer avec l’UE pour réduire l’écart entre les deux parties à propos de cette question.
Il nous incombe de faire en sorte que le travail du Conseil demeure axé sur les sujets qui touchent directement les pays de l’Arctique et leurs habitants.
Le Nord a subi d’énormes transformations au cours de ma vie. Ce sont ces transformations qui m’inspiraient, il y a bien des années, lorsque je me suis portée candidate à des élections. Je voulais exercer une influence sur le cours du changement — pour assurer que les Inuits et les habitants du Nord en bénéficient directement. La même inspiration me guide encore aujourd’hui, et c’est pourquoi la présidence du Canada mettra l’accent sur les personnes.
Au cours des deux prochaines années, le thème global de notre présidence sera « Le développement au service de la population du Nord ». En quelques mots, nous voulons donner la priorité aux intérêts des habitants de l’Arctique.
Sous la présidence du Canada, le Conseil mettra l’accent sur le développement responsable des ressources, la navigation sécuritaire dans l’Arctique et le développement de collectivités nordiques durables.
Je suis fière de pouvoir dire que nous ne faisons pas que lancer des paroles en l’air en affirmant qu’il faut veiller à ce que le développement dans le Nord profite à ses habitants; le gouvernement prend des mesures concrètes à cet égard au Canada.
C’est pourquoi nous investissons dans des projets comme la Station de recherche du Canada de l’Extrême-Arctique (la SRCEA). Il s’agit d’une station de recherche de renommée internationale située à Cambridge Bay, au Nunavut. Par l’intermédiaire de ses activités en Arctique, la SRCEA soutiendra le gouvernement en favorisant la collaboration nationale et internationale, la recherche et l’innovation dans la région circumpolaire.
Le gouvernement investit également dans la recherche sur la santé autochtone. Pour la première fois, les chercheurs doivent collaborer avec les Autochtones dans quatre secteurs prioritaires : le suicide, la tuberculose, l’obésité et la santé buccodentaire.
En mettant l’accent sur les collaborations entre les chercheurs du domaine de la santé et les communautés autochtones, nous trouverons davantage de solutions relatives à la santé qui peuvent être mises en œuvre avec succès; les communautés seront ainsi en meilleure santé.
Il ne s’agit là que de deux exemples de projets dans lesquels le gouvernement a investi et que nous présenterons aux autres États de l’Arctique afin de montrer comment nous devons veiller à ce que les gens demeurent notre priorité.
Le développement dans l’Arctique doit se faire de manière responsable et durable sur le plan de l’environnement pour que le sol, l’eau et la faune, dont bon nombre d’habitants du Nord dépendent encore, n’en subissent pas les contrecoups.
En Suède, le mois dernier, les ministres de l’Arctique ont signé l’Accord sur la coopération en matière de préparation et d’intervention en cas de pollution marine par les hydrocarbures dans l’Arctique.
Un possible déversement d’hydrocarbures aurait de graves répercussions sur la subsistance des habitants du Nord. En agissant ensemble ici au Conseil, nous améliorons notre capacité collective de réagir aux catastrophes.
Nous devons maintenant axer nos efforts sur la prévention des déversements d’hydrocarbures dans les eaux de l’Arctique. Un nouveau groupe de travail élaborera un plan d’action visant à prévenir la pollution par les hydrocarbures et recommandera des façons de mettre ce plan d’action en œuvre. Le groupe déterminera quelles mesures pourraient être prises pour prévenir d’autres déversements et la façon dont le Conseil de l’Arctique ou les États de l’Arctique peuvent mettre de l’avant ces mesures.
Le Conseil établira en outre un Forum des affaires circumpolaires. Ce forum permettra aux entreprises autochtones et non autochtones et à l’industrie de collaborer avec les États arctiques et les Participants permanents. À l’occasion d’expositions et de salons commerciaux, par exemple, le Forum s’emploiera à bâtir des partenariats entre les nations de l’Arctique, à accroître la coopération et à partager des pratiques exemplaires sur des enjeux communs comme les nouvelles technologies adaptées à l’Arctique, l’énergie propre, le pergélisol, les lacunes en matière de transport et d’infrastructure ainsi que les préoccupations sociales et environnementales.
La création de ce forum arrive à un moment important pour l’Arctique. L’intérêt dans la région continue de croître, et nous devons faire en sorte que les habitants du Nord participent activement à ce changement, aux côtés des entreprises et de l’industrie qui œuvrent au développement de la région.
Je tiens à souligner que nous poursuivrons les recherches scientifiques importantes menées par le Conseil de l’Arctique à mesure que nous développons ce nouveau forum.
Nous devons toutefois nous assurer que la science est directement liée aux besoins des habitants du Nord et qu’elle leur profite.
Nous devons également nous assurer d’appliquer de manière concrète et pratique les résultats de ces travaux de recherche, pour aider à améliorer le bien-être et la prospérité des gens qui vivent dans l’Arctique.
À titre d’exemple, je sais combien il est important, pour les Inuits du Canada, que les études scientifiques et les processus décisionnels tiennent compte de l’« Inuit quayimayatuqangit », ou « savoir traditionnel ».
Nous devons combiner le savoir des peuples qui ont vécu dans le Nord pendant des générations, sachant que ce savoir englobe de l’information et des perspectives essentielles, à ce que nous avons appris grâce à notre recherche scientifique et à la technologie.
C’est pourquoi, durant la présidence du Canada, le Conseil formulera des recommandations en vue d’intégrer le savoir traditionnel et local à son travail.
Comme nous assumerons la présidence du Conseil pendant les deux prochaines années, je suis convaincue qu’en travaillant avec les autres États et partenaires du Conseil de l’Arctique, en continuant à faire face ensemble à nos défis communs et en prenant appui sur l’expérience et les connaissances acquises au cours des seize dernières années, nous créerons des communautés solides, saines, durables et dynamiques dans la région circumpolaire.
Au cours des prochaines années, sous l’effet des changements rapides que connaît la région arctique, nous pourrons tous accéder à une nouvelle région inexploitée.
J’aimerais conclure en disant quelques mots aux personnes ici présentes qui ont la fibre des affaires. En tant que membres d’un groupe qui s’appelle le « Club économique », vous êtes certainement nombreux à vous intéresser aux affaires économiques.
Examinons certains faits :
- Le PIB des trois territoires devrait croître collectivement de plus de 7 p. 100 en 2012 et en 2013, devançant aisément la moyenne canadienne de 2,1 p. 100 prévue pour cette année.
- L’exploration minière au Nunavut s’est chiffrée à 395,5 millions de dollars l’année dernière — le niveau le plus élevé parmi les trois territoires et, par rapport au PIB, le plus élevé au Canada.
- Au Nunavut, nous avons des ententes modernes sur les revendications territoriales et avons établi des régimes de réglementation. Nous avons également des processus d’évaluation environnementale modernes qui permettent aux Inuits de travailler directement avec le secteur privé relativement à la faisabilité de projets miniers.
- L’année dernière, le Yukon a enregistré un taux de croissance économique de 6,5 p. 100, soit le plus élevé du pays, grâce à la force de son secteur de l’exploration minière.
Le Nord est ouvert aux affaires. Il existe de nombreux débouchés au nord du 60e parallèle, et ce, dans tous les secteurs, des ressources naturelles à l’industrie des services.
Plus précisément, les entreprises dotées d’une stratégie d’affaires responsable sur le plan social auront accès au potentiel inexploité d’une main-d’œuvre qui, par l’intermédiaire d’une formation ciblée, veut travailler et investir dans sa collectivité locale.
Alors que le Nord continue de se développer, des défis et des possibilités se présenteront à nous : certains seront bénéfiques, d’autres, peut-être pas.
Toutefois, pour que nos efforts dans l’Arctique soient couronnés de succès à l’avenir, nous devons jeter des ponts entre les connaissances traditionnelles des peuples qui y vivent et les nouvelles réalités du monde d’aujourd’hui.
Je regarde les deux prochaines années avec beaucoup d’optimisme.
Qujannamiik. Merci.