Transcription du discours de
l’honorable Greg Rickford
ministre des Ressources naturelles
La diversification des marchés des ressources naturelles du Canada : possibilités pour le Québec
prononcé au
Déjeuner-causerie de la série Politique du
Conseil des relations internationales de Montréal
Montréal (Québec)
Le 11 avril 2014
Merci pour cette chaleureuse présentation. Je pensais justement à un certain professeur que j’ai eu à la Faculté de droit, ici, à McGill, notre université de renommée mondiale. « Donc, le printemps est arrivé : les Canadiens font les séries, mais pas les Leafs. »
Mon propos n’est pas de débattre avec vous de mes allégeances sportives, mais il y a une raison pour laquelle j’ai commencé de cette façon. Cependant, avant toute chose, je veux vous remercier de votre aimable invitation. Je prononce aujourd’hui mon premier discours comme ministre des Ressources naturelles du Canada devant un auditoire québécois.
Avant de poursuivre, j’aimerais vous dire quelques mots, du fond du cœur, après l’événement tragique qui est survenu hier. Le ministre Flaherty [l’honorable Joe Flaherty, ancien ministre des Finances] était un ami et il était mon mentor en politique. Il a été selon moi le meilleur ministre des Finances du monde. Il a mis notre pays en tête de liste des pays qui ont tenu le cap pendant et après la récession. Il possédait ses dossiers – et il le fallait bien, puisqu’il était le ministre des Finances – mais personne ne savait y faire avec autant d’équité et de gentillesse que lui, et la seule chose dont on devait s’inquiéter avant de l’approcher pour une affaire quelconque c’était d’être bien préparé à en discuter. Voilà le souvenir que je garde du ministre Flaherty, et je vous remercie de m’avoir permis de vous livrer ces quelques mots, les premiers que j’ai l’occasion d’exprimer publiquement à ce sujet.
Mesdames et messieurs, comme député de Kenora, une grande circonscription dans le nord-ouest de l’Ontario, où l’on se dit Mantarien très souvent, les ressources naturelles sont abondantes, c’est pourquoi je connais très bien l’importance de ce secteur pour l’économie, en particulier celle des régions. J’envisage des échanges nombreux et fructueux au Québec où les ressources naturelles ont été tout au long de l’histoire un moteur de développement économique et social. Bien entendu, on pense ici non seulement à Montréal ou à Québec, mais aussi et en premier lieu à tout un réseau de collectivités sur le vaste territoire québécois. On pense à ces collectivités qui participent à la longue chaîne de production, de transformation, de transport et d’expédition de nos ressources naturelles pour notre enrichissement collectif.
Les Québécois, plus tôt cette semaine, ont exercé leur choix démocratique. Je m’empresserai dès la formation du gouvernement et la nomination de mon homologue de lui tendre la main pour que nous travaillions ensemble au développement responsable des ressources naturelles. Je crois que nous avons ici une situation économique et politique ravivée qui nous permet d’aller de l’aller.
Je suis également très heureux de pouvoir m’adresser au CORIM à la veille de son 30e anniversaire. La mission que vous ont confiée les fondateurs du conseil, favoriser une plus grande connaissance des affaires internationales et susciter une collaboration plus étroite entre les divers milieux intéressés, est plus actuelle que jamais. Que ce soit dans la métropole de Montréal ou dans le nord du Québec, comme dans le reste du Canada, notre avenir économique doit se tracer et se réaliser dans un contexte mondial. Aujourd’hui, je propose que nous nous penchions sur les possibilités que les marchés mondiaux en évolution nous offrent, particulièrement les avantages que représentent l’élargissement et la diversification des marchés d’exportation des ressources naturelles pour le Canada.
La forêt – commençons par le secteur de la forêt. Le Canada, comme vous le savez, est depuis longtemps un chef de file dans l’industrie mondiale de la forêt. Nous sommes en effet le deuxième exportateur de produits forestiers en importance dans le monde après les États-Unis. Le succès de notre secteur forestier comme celui de la plupart de nos industries se joue en grande partie sur les marchés étrangers. Si les États-Unis sont encore notre plus grand marché, c’est la Chine qui aujourd'hui constitue la principale source de croissance de la demande mondiale et de nos exportations, et d’ici 2025, l’Inde sera le cinquième marché mondial de consommation.
La prospérité des régions forestières du Québec, de même que celle de ma circonscription de Kenora, dépendra donc en partie de décisions prises à Beijing et à Mumbai. Le succès de notre secteur forestier à moyen et long terme exige une plus grande présence sur ces marchés. Pour y arriver, nous devons non seulement renforcer nos relations avec ces clients, mais aussi redoubler d’efforts en matière d’innovation, de productivité et de compétitivité. C’est pourquoi le plan économique de 2014 du gouvernement canadien propose un appui soutenu à la transformation de ce secteur névralgique. Le plan prévoit une somme de 90,4 millions de dollars sur quatre ans pour prolonger le programme Investissement dans la transformation de l’industrie forestière.
Le secteur minier – Le Canada est aussi une puissance mondiale dans le domaine de l’exploitation minière. Nous produisons plus de 60 minéraux et métaux. Le Québec contribue puissamment au dynamisme de ce secteur et ce, de façon très diversifiée avec une production de 30 minéraux et métaux. L’investissement dans le secteur minier peut transformer l’avenir de toute une région, c’est un fait. Il crée des emplois bien rémunérés pour ses travailleurs et pour les jeunes qui font leur entrée sur le marché du travail, particulièrement dans les petites villes et les collectivités éloignées partout au pays. Et je dois ajouter, en raison de mes propres origines, que le secteur crée également d’incroyables débouchés pour les Premières Nations. Face à l’intense concurrence mondiale, nous ne pouvons jamais prendre l’investissement pour acquis. Pour que les investissements se concrétisent, nous avons besoin d’un cadre d’investissement stable, de règlements prévisibles et transparents, et d’une collaboration efficace entre tous les intervenants.
Je parlerai maintenant de l'énergie. Le Canada est aussi un leader mondial dans le secteur de l’énergie, cinquième producteur mondial de pétrole, troisième d’hydroélectricité, cinquième de gaz naturel. On peut faire mieux et nous savons tous que le secteur de l’énergie est un moteur économique important pour le Canada. Les industries énergétiques représentent environ 9 % de notre produit intérieur brut et fournissent plus de 300 000 emplois directs bien rémunérés et une multitude d’emplois indirects dans toutes les régions du Canada.
En plus de nos ressources naturelles, nous disposons aussi d’un savoir-faire inégalé. Nos entreprises, nos firmes d’experts-conseils, nos technologies, celles que nous avons déployées pour construire ce pays et le maintenir parmi les plus prospères au monde sont un formidable atout dans un marché mondial toujours plus concurrentiel. Nous devons prendre aujourd'hui les décisions qui s’imposent pour mettre pleinement en valeur nos industries de ressources naturelles en particulier l’énergie pour profiter des immenses possibilités à l’étranger.
Au moyen d’initiatives comme Technologies du développement durable Canada, nous appuyons le développement technologique lié aux énergies non classiques, aux énergies renouvelables, à l’efficacité énergétique et aux solutions environnementales qui créeront de nouvelles possibilités pour le Canada et le reste du monde. Ces technologies nous aideront à répondre à de nouveaux besoins, à réduire les gaz à effet de serre et à protéger l’environnement et à créer des emplois de qualité chez nous.
La situation énergétique au Québec – Le Québec est déjà un joueur de rang mondial sur l’échiquier énergétique grâce notamment à son extraordinaire capacité de production d’énergie hydroélectrique. Le Québec possède aussi des ressources de pétrole et de gaz naturel prometteuses. La question de l’exploitation possible de ces ressources donne lieu à de nombreux débats, c’est sûr. Je prendrai les moyens pour que nos deux gouvernements poursuivent leur travail pour mettre en œuvre l’Accord Canada-Québec sur la gestion conjointe des hydrocarbures dans le golfe du Saint-Laurent signé en 2011. Cet accord assurera au Québec de profiter des redevances et retombées économiques du développement des ressources extracôtières comme si celles-ci étaient situées sur la terre ferme de son territoire.
Une autre question se pose : est-ce souhaitable que le Québec continue d’utiliser du pétrole étranger pour alimenter ses raffineries? Présentement, 92 % du pétrole utilisé au Québec provient de l’extérieur du Canada. En 2012, les importations québécoises de pétrole brut atteignaient environ 323 000 barils par jour, pour une valeur de 36,1 millions de dollars, soit 13 milliards par année. C’est beaucoup.
Alors la solution d’avenir, remplacer le pétrole importé par du pétrole canadien. Est-ce réaliste? Est-ce que c’est possible? Le Québec n’est pas condamné à dépendre éternellement des producteurs étrangers. Nous connaissons la cause du problème : une capacité insuffisante des moyens de transport du pétrole. Nous connaissons aussi la solution à ce problème : l’acheminement du pétrole canadien vers le Québec et les provinces atlantiques. La solution est mise de l’avant. Des pipelines, moi, j’aime ce mot, car oléoduc et acheminement sont des mots difficiles à prononcer pour moi, de toute façon. L’acheminement du pétrole canadien en remplacement du pétrole étranger. Des projets comme l’inversion de la canalisation 9 et l’Oléoduc Énergie Est rendront les raffineries Suncor à Montréal et Jean-Gaulin plus concurrentielles.
La protection de l’environnement – Alors il est évident que la production et le transport du pétrole ne doivent pas se faire au détriment de l’environnement, c’est bien certain et c’est une question de sécurité pour les Canadiens dans chaque communauté. Ceci est la base de l’engagement de notre gouvernement en faveur du développement responsable des ressources naturelles.
Bien sûr, la tragédie de Lac-Mégantic qui a profondément touché tous les Canadiens d’un bout à l’autre du pays nous rappelle que nous n’en ferons jamais assez pour protéger nos citoyens et notre environnement et qu’il faut prendre toutes les mesures possibles en ce sens. Comme le souligne ma collègue Lisa Raitt, ministre des Transports, notre approche en matière de sécurité dans le secteur du transport ferroviaire est centrée sur la protection de nos communautés et de nos citoyens.
C’est pourquoi nous avons resserré considérablement la réglementation et nous continuons de travailler à rendre plus rigoureuses encore les règles et les pratiques de l’industrie. Nous travaillons aussi à augmenter la sécurité du transport maritime du pétrole.
Je veux vous assurer que le gouvernement du Canada prend au sérieux les incidences environnementales possibles de tous les projets énergétiques. L’un des piliers importants de notre plan de Développement responsable des ressources est le renforcement de la sécurité des pipelines. La fiabilité et la sécurité des pipelines canadiens sont déjà remarquables. On ne dit pas assez souvent ce que les chiffres disent pourtant clairement : 99,999 % du pétrole brut et des produits raffinés transportés par les pipelines sous la réglementation de l’Office national de l’énergie arrivent à destination en toute sécurité.
Nous avons renforcé encore plus la sécurité des pipelines dans le cadre du plan d’action économique et notamment augmenté de 50 % le nombre d’inspections annuelles de pipelines et des gazoducs, doublé le nombre de vérifications annuelles détaillées pour détecter les problèmes et possibilités d’accidents, et ainsi empêcher que des accidents se produisent. Pour les oléoducs de grand volume, on exigera aussi des exploitants une capacité financière d’un milliard de dollars de façon à assurer que dans les cas exceptionnels de déversement, les travaux nécessaires soient réalisés sans tarder et sans risque pour le contribuable.
En conclusion, mes amis, le Canada a grandi et prospéré depuis presque 125 ans. C’est le même temps qui s’est écoulé depuis que les Leafs ont gagné la Coupe Stanley, j’imagine. J’ai encore du mal à l’accepter. En 125 ans donc, le Canada est devenu un des pays les plus prospères au monde grâce en grande partie à ses richesses naturelles et en particulier énergétiques.
Sous le leadership du premier ministre Harper, l’emploi, l’économie et le soutien aux familles demeurent la priorité de notre gouvernement. Aujourd'hui le Canada a le meilleur bilan du monde développé en matière d’emplois, presque 1,1 million d’emplois ayant été créés depuis la récession.
Aujourd’hui, mesdames et messieurs, marque le début d’un nouvel élan grâce à nos richesses en ressources. Les grands projets de ressources qui sont en cours ou prévus au cours des dix prochaines années représentent des investissements totalisant environ 650 milliards de dollars et des centaines de milliers d’emplois, dans tous les secteurs de notre économie et dans l’ensemble du Canada.
Le Québec peut faire partie de ce développement historique. Il est en fait admirablement bien placé pour profiter de cette croissance et pourrait même devenir un jour exportateur net de toutes les formes d’énergie. Vous pouvez compter sur notre gouvernement pour appuyer un tel élan et contribuer à ouvrir de nouveaux marchés pour vos industries et vos collectivités.
J’ai voulu venir ici aujourd'hui pour vous le dire, nous voulons collaborer avec le Québec pour développer tout le potentiel de ressources naturelles de nos régions. Nous pouvons le faire. Nous avons déjà démontré que la collaboration est possible en signant l’Accord Canada-Québec sur la gestion conjointe des hydrocarbures dans le golfe du Saint-Laurent. Nous devons le faire pour notre prospérité et la prospérité des générations futures.
Mesdames et messieurs, c’est donc tout en ce qui me concerne. Je m’appelle Greg Rickford, député représentant les 326 716 km2 de la vaste circonscription de Kenora. C’est pour moi un privilège et un honneur de servir mes électeurs et, dans mon rôle de ministre des Ressources naturelles, de vous servir.
Je vous remercie de m’avoir donné la chance de prendre la parole devant vous.