En 2006, trois séries d’ossements humains ont été découvertes par un jeune résident du village de Hallu, en France. L’année suivante, cinq autres séries d’ossement ont été découvertes dans le même secteur. Tous ces ossements se sont révélés être ceux de soldats canadiens de la Première Guerre mondiale, probablement du 78e Bataillon, aussi connu sous le nom de Winnipeg Grenadiers. Depuis 2006, la Direction – Histoire et patrimoine travaillent à l’identification de ces soldats.
L’identification de ces ossements a nécessité des recherches historiques, des travaux d’anthropologie physique, des recherches généalogiques, des tests génétiques et l’usage de la technologie isotopique. Il a donc fallu attendre en 2014 pour arriver à identifier positivement cinq des huit séries d’ossements.
Sur les quelque 68 000 militaires canadiens tués durant la Première Guerre mondiale, plus de 19 000 n’ont pas de sépulture connue. La découverte de ces ossement à Hallu est la plus importante trouvaille du genre et a donné lieu au plus vaste processus d’identification jamais entrepris depuis le lancement du programme d’identification des victimes de guerre du ministère de la Défense nationale en 2006.
Durant la Première Guerre mondiale, les Winnipeg Grenadiers, une unité de la milice, ont dirigé la campagne de recrutement pour le 78e Bataillon, et ils ont continué de perpétuer le souvenir du bataillon après la guerre. L’unité a été démantelée en 1946. De nos jours, la mémoire des Grenadiers se perpétue par l’entremise d’un corps de cadets à Winnipeg qui porte le nom des Grenadiers.
Le 78e Bataillon devait prendre la relève de la 3e Division dans les rangs canadiens à la suite de la première attaque de la bataille d’Amiens, le 8 août 1918. Le 10 août, les membres du bataillon reçoivent l’ordre de s’emparer du petit village de Hallu, situé dans la région de la Somme, en France. Même si la progression vers Hallu s’est amorcée lentement, la pression exercée par l’ennemi s’accroissait constamment. Au cours de la soirée du 10 août et encore une fois le lendemain, le 78e Bataillon était directement attaqué par des tirs ennemis, qui causèrent la mort de 46 soldats et la disparition de 54 autres. De ce nombre, 35 étaient toujours portés disparus et n’avaient aucune sépulture connue avant l’identification. La bataille pour s’emparer de Hallu était perdue. En se fondant sur cette histoire, sur le lieu où ont été découverts les ossement et sur plusieurs artéfacts trouvés sur le site, la famille militaire des Winnipeg Grenadiers s’avérait le meilleur point de départ pour le processus d’identification.
À partir de la liste des 35 soldats disparus du 78e Bataillon, une première liste de quinze soldats a été créée, basée sur la taille et l’âge, en utilisant la recherche historique et l’anthropologie physique. La recherche généalogique a servi à trouver des donneurs génétiques pour chaque soldat, et quatre des huit soldats ont ainsi été identifié en printemps 2014 grâce à des tests génétiques, soit :
- Le lieutenant Clifford Abraham Neelands : Né à Barrie, en Ontario. Résidait à Winnipeg, au Manitoba lorsqu’il s’est enrôlé. Âgé de 26 ans au moment de son décès;
- Le sergent suppléant John Oscar Lindell : Né à Virestad Parish, Kronobergm, Suède. Résidait à Winnipeg, au Manitoba lorsqu’il s’est enrôlé. Âgé de 33 ans au moment de son décès;
- Le soldat Lachlan McKinnon : Né à Campbeltown, Argyllshire, Écosse. Résidait au Manitoba lorsqu’il s’est enrôlé. Âgé de 29 ans au moment de son décès;
- Le soldat William Simms : Né à Russell, Manitoba. Âgé de 25 ans au moment de son décès.
Les donneurs génétiques et les plus proches parents des soldats identifiés ont été avisés de l’identification une fois que les résultats ont été confirmés. Les quatre séries d’ossements restantes ont subi d’autres tests dans l’espoir d’arriver à les identifier.
Un cinquième soldat a été identifié en octobre 2014 :
- 5. Le soldat Sidney Halliday : Né en Angleterre. Résidait à Minto, Manitoba lorsqu’il s’est enrôlé. Âgé de 22 ans au moment de son décès.
Le soldat Halliday a été identifié après qu’un lien ait été établi entre des artéfacts trouvés sur le site et des journaux intimes familiaux auparavant inconnus, qui ont permis de confirmer les résultats des tests génétiques avec plusieurs corrélations positives.
Bien que des identifications positives n’aient pas encore été réalisées en ce qui concerne les trois cas restants, on a bon espoir qu’en procédant à d’autres tests et analyses, on réussira à identifier les trois autres soldats, qui pourraient aussi être des membres des Winnipeg Grenadiers.
Le MDN et les FAC collaborent avec la Commonwealth War Graves Commission pour planifier une cérémonie d’inhumation, en consultation avec les parents des soldats, afin de procurer à ces derniers un lieu de dernier repos honorable et approprié.
Le gouvernement du Canada, le MDN et les FAC se font un devoir de rendre hommage à ceux qui ont consenti le sacrifice ultime en veillant à ce qu’ils reposent dans une sépulture connue, lorsque c’est possible.
Plus de 26 000 militaires de l’Armée de terre, de la Force aérienne et de la Marine du Canada sont morts durant les Première et Deuxième Guerres mondiales et durant la guerre de Corée sans que leur corps ne soit inhumé dans une sépulture connue ou entretenue. Chaque année, certains des soldats disparus sont retrouvés, et il incombe au MDN et aux FAC de les identifier en utilisant différentes méthodes scientifiques et la recherche historique. La Direction – Histoire et patrimoine procède à l’identification des soldats, marins et aviateurs inconnus chaque fois que les ossements de soldats canadiens sont découverts. Pour ceux dont les ossements peuvent être récupérés et identifiés, le MDN et les FAC déploient tous les efforts pour leur offrir la dignité et le respect qu’ils méritent.
L’identification est le résultat d’une série de recherches historiques et de tests biologiques qui permettront éventuellement de déterminer qui est le militaire le plus susceptible d’être celui à qui appartiennent les ossements trouvés.
La première étape du processus d’identification consiste à consulter les dossiers du personnel militaire, les registres de sépultures, les journaux de guerre, les cartes et les historiques de régiments en vue de créer le profil historique de la personne inconnue. Les identifications basées uniquement sur des faits historiques sont rares, cependant, et le MDN cherche habituellement à obtenir une preuve biologique pour appuyer les autres documents.
Les spécialistes de l’anthropologie physique étudient les ossements pour déterminer le nombre de personnes, leur âge, leur taille, l’état de santé de leurs dents leur état de santé général et, si possible, pour obtenir des indices sur ce qui aurait pu causer leur décès. Le profil ainsi obtenu peut aussi contribuer à réduire le nombre de possibilités. On procède ensuite à des tests génétiques, par lesquels on peut arriver à identifier les ossements ou, à tout le moins, à réduire davantage le nombre de possibilités.
Afin de procéder à des tests génétiques sur les ossements de victimes de guerre, il faut extraire les informations génétiques des os ou des dents pour les comparer aux données fournies par les descendants des disparus. Malheureusement, même si l’ADN facilite le processus d’identification, son utilisation peut être limitée par le manque de donneurs et par la difficulté à extraire de l’ADN viable d’ossements plus anciens.
Étant donné que les ossements des soldats de la Première Guerre mondiale sont dans le sol depuis plus de 90 ans, on utilise un type particulier d’ADN, appelé « ADN mitochondrial ». Ce type d’ADN n’est transmis que par la mère et se préserve bien dans les ossements qui ont été dans le sol pendant longtemps. Des recherches généalogiques sont donc nécessaires pour localiser une ou des lignées génétiques très précises en vue de procéder à l’identification après une aussi longue période.
Récemment, le MDN a engagé un laboratoire qui a utilisé la technologie des isotopes stables pour tenter de déterminer l’origine des individus lorsque l’ADN ne constitue pas un moyen d’identification viable. Les isotopes stables peuvent permettre de déterminer où cette personne a été élevée (environ jusqu’à l’âge de 21 ans), et où elle a vécu pendant les dix ou quinze dernières années de sa vie. Ce type de test permet au MDN de réduire le nombre de possibilités en fonction des lieux où les individus ont été élevés et ont vécu avant de s’enrôler.
Il ne fait aucun doute que les nouvelles technologies et la facilité avec laquelle on peut accéder aux documents historiques permettront d’identifier avec plus de précision les soldats, marins et aviateurs canadiens inconnus, hommes et femmes.
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