Archivé - Déclaration préparée pour le Comité monétaire et financier international du Conseil des gouverneurs du Fonds monétaire international

Washington, D.C., le 11 octobre 2014

Depuis notre réunion du printemps dernier, il est devenu évident que la reprise à la suite de la crise économique et financière la plus prononcée depuis la Grande Dépression reste incomplète, déséquilibrée et fragile. Dans la présente déclaration, je vais décrire brièvement les défis importants auxquels l’économie mondiale est confrontée, de même que les conséquences de ceux-ci par rapport aux priorités stratégiques du Fonds monétaire international (FMI). Je vais aussi exprimer les points de vue des pays représentés par le Canada au sujet de questions stratégiques précises qui se rapportent à la gouvernance du FMI et à l’efficacité avec laquelle cette institution exerce son mandat.

Le renforcement prévu de la reprise économique mondiale ne s’est pas encore concrétisé. Dans l’ensemble, la croissance mondiale demeure faible et inégale, et ce, autant dans les marchés avancés que dans les marchés émergents. Le taux de chômage continue d’être obstinément élevé dans de nombreuses régions, et les perspectives mondiales sont obscurcies par les risques de détérioration et l’incertitude.

Dans ces conditions, une intervention stratégique audacieuse et coordonnée est nécessaire. Au Groupe des Vingt (G-20), les membres élaborent des stratégies de croissance exhaustives conçues pour augmenter la demande à court terme et agir sur les principales rigidités et distorsions qui viennent limiter la croissance économique à moyen terme. Des progrès appréciables ont été réalisés. Les membres du G-20 présentent une large gamme de mesures stratégiques visant à relever les défis auxquels fait face leur économie, surtout en ce qui concerne l’accroissement de la qualité des investissements, l’augmentation du taux d’emploi et du taux d’activité, la promotion de la concurrence et la facilitation des échanges.

Le FMI est au cœur de ces efforts. Il contribue à évaluer les forces et les faiblesses stratégiques et offre aux pays membres des recommandations stratégiques constructives et un soutien qui contribueront à réaliser une croissance plus forte, plus durable et plus équilibrée. Tous les pays membres du Fonds se partagent la responsabilité de mettre en œuvre des politiques qui visent à favoriser la croissance. Les domaines suivants devraient orienter le programme stratégique du Fonds au cours de la période à venir.

La reprise est faible, et ce, malgré la présence de conditions financières favorables, notamment une amélioration de la santé financière des ménages et des entreprises. Cette situation prouve qu’il faut en faire plus pour renforcer la reprise.

Le FMI a un rôle important à jouer pour aider les pays membres à cerner la portée de la mise en œuvre de mesures relatives aux politiques budgétaires qui favorisent davantage la croissance. En particulier, le FMI peut en faire plus pour aider les pays membres à déterminer les réformes à apporter aux politiques fiscales et à celles relatives aux dépenses, lesquelles réformes peuvent assurer une plus grande contribution à la croissance à court et à moyen terme, et ce, à l’intérieur des enveloppes budgétaires actuelles prévues. Dans les pays où ces réformes ne peuvent pas donner lieu à un gain de croissance suffisant, le FMI ne devrait pas hésiter à recommander des changements aux enveloppes budgétaires si les circonstances économiques et financières le justifient. Plus précisément, les pays membres qui affichent un taux d’inflation et un espace budgétaire à faible croissance et inférieurs aux objectifs fixés doivent tenir compte du rythme et de la composition du rééquilibrage des finances publiques et du caractère approprié d’un soutien financier ciblé, opportun et temporaire. En outre, il est essentiel que tous les pays membres disposent d’un cadre à moyen terme favorisant l’équilibre budgétaire et un niveau d’endettement viable.

Les économies avancées qui ont vécu une crise économique et financière grave et qui y ont réagi en mettant en place des politiques monétaires expansionnistes et non traditionnelles profitent maintenant d’une croissance plus solide. On peut en dégager des leçons évidentes qui peuvent s’appliquer aux autres grandes économies avancées où l’inflation est nettement inférieure à la cible établie. Dans le cas des marchés émergents, l’assouplissement des taux de change est essentiel afin de fournir aux autorités des réserves leur permettant de mieux gérer l’évolution des conditions financières externes et les chocs potentiels.

Parallèlement, les marchés financiers sont exposés à des risques accrus attribuables à une économie mondiale où tous les pays sont de plus en plus interreliés, aux primes de risque réduites et à la volatilité sur les marchés présentant des liquidités potentiellement limitées, aux concentrations toujours croissantes d’actifs financiers sous gestion, ainsi qu’à l’éventuelle normalisation des politiques monétaires. À cet égard, il est crucial que la communication de la part de la banque centrale soit claire et que le calibrage des politiques se fasse de façon prudente, de manière à atténuer le risque que la reprise en cours soit perturbée. Le FMI devrait rester attentif aux risques associés à ce contexte marqué par l’incertitude, en plus d’être prêt à aider ses membres à gérer toute volatilité qui en découle.

Des politiques macroprudentielles soigneusement élaborées, s’inscrivant dans des cadres de marchés solides, joueront également un rôle important. Nous encourageons le FMI à renforcer davantage les piliers analytiques de ses conseils dans ce domaine en vue de faciliter la définition d’orientations stratégiques plus éclairées à propos de la portée et de l’efficacité éventuelles de ces mécanismes.

Pour renforcer la productivité sous-jacente et donc accroître la croissance potentielle, il ne faut pas se contenter de prendre les mesures mentionnées ci-dessus : il faut aussi aborder les carences structurelles de longue date qui se présentent dans les régimes de commerce et d’investissement, sur les marchés du travail et des produits, et dans les systèmes bancaires et financiers des pays membres. Cette démarche permettrait non seulement de jeter les assises du renforcement de la croissance potentielle et à long terme, mais aussi de contribuer à promouvoir la confiance à court terme.

On peut améliorer le rôle de surveillance exercé par le FMI par une approche ciblée sur les réformes structurelles qui sont jugées essentielles d’un point de vue macroéconomique. Afin de réduire au minimum le risque que le Fonds s’engage dans trop de directions différentes, il faudra procéder à une réaffectation prudente et ciblée des ressources existantes. Nous encourageons le FMI à améliorer sa collaboration avec les autres organisations dans le but de tirer profit de l’expertise de tierces parties, dans la mesure du possible.

Au-delà de la surveillance bilatérale et multilatérale, le FMI doit continuer d’avoir recours à sa capacité de recherche et à ses analyses transnationales afin d’orienter la prise de décision et la coopération mondiale dans un environnement économique et financier mondial qui est de nature complexe, incertaine et changeante.

Les pays représentés par le Canada se réjouissent des recommandations découlant de l’examen triennal de la surveillance (ETS) de 2014 ainsi que de leur mise en œuvre future. Des progrès notables ont été accomplis depuis les innovations introduites par l’examen de 2011, bon nombre desquelles doivent encore être peaufinées pour réaliser leur plein potentiel. À l’avenir, il faudra se concentrer sur la mise en œuvre des principales constatations découlant de l’ETS et sur l’évaluation des résultats de l’examen.

En particulier, le Fonds doit poursuivre ses efforts destinés à mieux intégrer les analyses des risques de répercussions dans toutes ses activités de surveillance, y compris la surveillance bilatérale. Ces risques sont surtout importants dans le cas du secteur financier. Nous saluons le récent examen réalisé dans le cadre du Programme d’évaluation du secteur financier (PESF). Nous réitérons aussi qu’il est important que le risque systémique constitue le principe organisateur clé de toutes les facettes du PESF. À titre de proposition générale, il faut que l’examen de surveillance intègre davantage les évaluations du secteur financier, et ce, pour l’ensemble des membres.

Nous souhaitons aussi souligner l’importance du renforcement de l’analyse du secteur extérieur et d’une meilleure intégration de celle-ci à la surveillance bilatérale. Les évaluations des taux de change se trouvent au cœur du mandat du Fonds. En outre, les activités de surveillance des répercussions des politiques relatives aux taux de change sur les autres pays membres font partie intégrante d’une surveillance efficace.

En dernier lieu, nous faisons observer que les activités de surveillance exercées par le FMI sont freinées par les retards excessifs de certains membres pour ce qui est de se soumettre à un examen au titre de l’article IV. Nous réitérons notre appui à un renforcement des mécanismes d’exécution, où l’on exigerait que les membres entreprennent des examens ponctuels au titre de l’article IV. En outre, les examens seront plus productifs et obtiendront une meilleure adhésion s’ils sont transparents et mis à la disposition du public. Les pays représentés par le Canada accueillent favorablement l’examen à venir du cadre d’incitatifs au titre de l’article IV du FMI.

La capacité du FMI à s’attaquer aux crises futures nécessite une capacité continue d’adaptation et d’apprentissage des expériences vécues. Afin d’encourager cette culture d’apprentissage au sein du Fonds, nous avons préconisé une évaluation exhaustive et objective du rendement du Fonds dans la foulée de la crise financière. Nous voyons donc d’un bon œil l’inclusion d’un examen des programmes de crise au Plan d’action mondial de la Directrice générale. Dans le but de maximiser les avantages associés à cet examen, nous encourageons le FMI à mener des consultations externes et à s’appuyer sur les nombreuses publications de grande qualité du Bureau indépendant d’évaluation dans ce domaine.

Dans l’ensemble, nous appuyons le plan de travail actuel du FMI qui concerne la restructuration de la dette souveraine, et ce, tout en insistant sur l’importance de mettre en place de meilleures mesures de protection des ressources du secteur officiel et des lignes directrices claires afin d’assurer un partage équitable du fardeau avec le secteur privé, à l’appui des efforts de rajustement. L’une des principales leçons tirées de certains programmes récents de prêts aux économies avancées est la nécessité d’examiner l’approche du FMI en matière de restructuration de la dette souveraine dans les cas où la soutenabilité de la dette est incertaine. Nous saluons les travaux qui ont été effectués récemment dans ce domaine. Nous encourageons aussi le Fonds à présenter des propositions qui prévoiront une approche plus efficace pour gérer les situations où les membres ont besoin d’un financement officiel exceptionnel, mais où la soutenabilité de la dette n’est pas certaine.

Des procédures judiciaires récentes sont venues mettre en évidence certains des défis actuels associés aux approches axées sur le marché en matière de restructuration de la dette souveraine qui découlent d’activités de créanciers récalcitrants militants. Nous sommes favorables à la prise de position du Fonds concernant les moyens à mettre de l’avant pour renforcer les approches contractuelles en vue de régler les problèmes liés aux actions collectives dans le contexte de la restructuration de la dette souveraine. On pourrait envisager d’autres mesures, dont le fait d’aider les pays membres souhaitant échanger une dette existante contre une dette assortie de nouvelles dispositions contractuelles conçues pour réduire les problèmes liés aux actions collectives.

Enfin, nous reconnaissons que le FMI a également un rôle important à jouer en tant que conseiller fiable, offrant aux pays membres de précieux services d’assistance technique et de renforcement des capacités. Nous encourageons le FMI à continuer d’adapter ses conseils aux défis uniques propres aux pays petits et vulnérables. Nous l’encourageons aussi à renforcer sa capacité à agir à titre de coordonnateur auprès des intervenants externes, le cas échéant – rôle que joue actuellement le Fonds en Ukraine.

Il est essentiel que le FMI soit outillé de la structure de gouvernance et des ressources nécessaires pour continuer à jouer son rôle essentiel dans l’économie mondiale.

La réforme des quotes-parts et de la gouvernance continue d’être essentielle pour faire en sorte que le FMI dispose des ressources et de la crédibilité nécessaires afin d’exercer efficacement son mandat. Les retards continus dans la mise en œuvre des réformes de 2010 sont fort regrettables, et nous incitons les membres qui n’ont pas encore ratifié les réformes à le faire à la première occasion.

Le renforcement du système de quotes-parts et de gouvernance du FMI s’inscrit dans un processus continu. Les pays représentés par le Canada restent ouverts à des options pratiques qui nous rapprocheraient de l’achèvement de la Quinzième révision générale des quotes-parts. Cette révision devrait reposer sur l’entente de 2010 et sur les progrès réalisés en vue de l’établissement d’une nouvelle formule de calcul des quotes-parts. La Quinzième révision devrait aussi permettre d’améliorer la représentation au Fonds, de sorte que celui-ci tienne mieux compte du poids économique relatif de ses membres et de leur intégration à l’économie mondiale. En guise de point de départ, la discussion sur les ressources permanentes futures du Fonds devrait être soutenue par une analyse des scénarios rigoureuse, transparente et fondée sur des données probantes. Cette analyse devrait mettre explicitement en lumière le rôle catalyseur que joue le Fonds en matière de financement.

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