Edmonton (Alberta)
Le 18 février 2015
Peter Menzies, vice-président des Télécommunications
Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes
Merci de me donner cette occasion de me joindre à vous aujourd'hui et de revenir à Edmonton, une ville où j'ai passé les 10 premières années de ma vie et qui me rappelle de très bons souvenirs.
Parmi ces bons souvenirs qui me sont revenus en tête au moment de recevoir votre invitation à vous adresser la parole se trouve celui de la marche que je devais faire entre notre maison et l'école par une température de moins 40 degrés en février.
Sur le terrain de mon école, et certaines personnes se rappelleront de ceci, il y avait une sirène en cas de raid aérien; en rétrospective, cela a été mon premier contact avec les systèmes d'alerte d'urgence. Celle-là avait été installée pour nous avertir si la guerre froide devenait trop intense et que des missiles soviétiques étaient lancés vers nous. Mes professeurs nous avaient montré comment nous mettre à l'abri. Mon père avait spécifié à ma sœur et à moi l'endroit où nous rendre dans l'éventualité où ma mère aurait le temps de venir nous chercher afin que nous puissions nous enfuir de la ville et de la zone d'explosion immédiate. C'était, particulièrement pour un jeune garçon, troublant. Mais c'était la préparation en cas d'urgence. Et c'était devenir alerte en cas d'urgence.
Eh bien, la crise des missiles de Cuba s'est estompée. La guerre froide est depuis longtemps chose du passé. L'Union soviétique n'existe plus et la menace de recevoir des missiles provenant de cette source au moins, s'est dissipée. Pourtant, la nécessité d'informer les Canadiens d'une alerte — et nous sommes beaucoup plus nombreux aujourd'hui qu'à l'époque — demeure assurément au cœur des responsabilités du secteur public.
Depuis fort longtemps, l'Alberta est le chef de file dans ce domaine au pays — certainement en ce qui a trait à son utilisation du système de radiodiffusion. Dans mes fonctions antérieures, alors que j'étais conseiller régional de l'Alberta et des Territoires du Nord-Ouest au CRTC et que j'ai commencé à me rendre à Ottawa et à aborder ces questions, j'ai été étonné de découvrir que l'Alberta était la seule province ayant un système en place et faisant usage des signaux de radiodiffusion sous licence pour avertir le public en cas de menace imminente.
Le mois prochain, à la suite d'un processus que le CRTC a mené l'an dernier, les radiodiffuseurs du reste du pays vont rattraper leur retard et, à compter du 31 mars 2015, les radiodiffuseurs et les fournisseurs de services de télévision commenceront à relayer les messages d'alerte en cas d'urgence aux Canadiens.
Les stations universitaires et communautaires, les radiodiffuseurs autochtones et les entreprises de radiodistribution auront jusqu'au 31 mars 2016 pour se conformer.
L'automne dernier, le CRTC s'est adressé à tous les radiodiffuseurs canadiens (y compris les stations de radio touristique) et à tous les fournisseurs de services de télévision afin d'obtenir une mise à jour sur leur travail visant à mettre en place la technologie qui leur permettra de participer au système national.
Je suis heureux de vous informer que pour l'essentiel, la mise en œuvre va bon train et la plupart des secteurs de l'industrie devraient respecter l'échéance du 31 mars.
Certains radiodiffuseurs et distributeurs de services de télévision nous ont fait part des défis qu'ils ont évidemment eu à relever. Nous savons qu'un travail bien fait est rarement facile et qu'il y a certains défis associés à la technologie. Cela dit, nous savons également qu'un système d'alerte public est essentiel au bien commun. Nous n'avons pas fait part de cela à l'industrie sans préavis. Celle-ci a eu plusieurs années pour se préparer. Les abonnés aux services de distribution par câble et par satellite subventionnent la création du système d'agrégation et de dissémination national d'alertes via Pelmorex depuis plusieurs années.
Il est temps que les Canadiens reçoivent des messages d'alerte, alors que je tiens à préciser que notre patience est très limitée pour quiconque entend se traîner les pieds ou invoquer des excuses pour se défiler de ses responsabilités. Une licence de radiodiffusion ou de distribution n'est pas un droit. C'est un privilège qui est accordé au nom des Canadiens. Lorsque leur sécurité est en jeu, nous nous attendons à du rendement. En fait, nous insistons là-dessus.
Plus tard ce printemps, nous chercherons à savoir comment la mise en œuvre s'est déroulée. Les propos que nous entendrons permettront d'éclairer les prochaines initiatives relatives aux systèmes d'alerte publics.
Entretemps et avant d'oublier, je tiens à remercier publiquement le Conseil de gouvernance du service d'alerte de Pelmorex, qui a joué un rôle prépondérant dans le déploiement du système.
Parmi ses membres, on trouve de grands radiodiffuseurs, les cadres supérieurs responsables de la gestion des urgences (SOREM), Pelmorex (l'opérateur du système d'alerte actuel), Environnement Canada et Sécurité publique Canada. Ce groupe représente le secteur privé de la radiodiffusion et les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux.
Tout cela est bon.
Les choses vont mieux qu'avant.
Mais comme nous le savons tous, nous vivons dans l'une des périodes de changements les plus dynamiques de l'histoire de l'humanité. Jamais auparavant les changements n'ont-ils été aussi rapides, et particulièrement dans la façon dont les gens interconnectent et communiquent. Il n'existe donc plus aujourd'hui de ligne d'arrivée où l'on peut faire une pause afin de reprendre son souffle. La course en vue de s'assurer que les Canadiens disposent d'une vaste infrastructure de communications moderne qui peut faciliter la diffusion de messages d'alerte en cas d'urgence sur toutes les plateformes et au moyen de toutes les installations s'avère, au moins aussi loin que l'on puisse voir en ce moment, un marathon incessant.
À titre d'objectif principal, l'article 7 (a) de la Loi sur les télécommunications stipule que :
Vous constaterez que j'ai mis l'accent sur le mot « sauvegarder ».
Et vous noterez aussi que ce n'est pas notre rôle de faire du travail de sauvegarde comme tel, mais c'est très certainement notre rôle, voire même une obligation du Parlement, de voir au « développement ordonné » d'un système qui protège les Canadiens.
Comme je l'ai mentionné plus tôt, nous n'avons plus à nous protéger de la grande menace de mon enfance, l'Union soviétique. Mais les menaces à la sécurité publique ne disparaissent jamais. Elles évoluent, tout simplement. Le système d'alerte de l'Alberta a élargi ses plateformes de distribution à la suite de la tornade de force F4 qui, le 31 juillet 1987, a découpé un corridor d'une longueur de 40 kilomètres sur une largeur d'un kilomètre dans cette ville et dans certaines parties du comté de Strathcona. Au total, 27 personnes ont alors été tuées et plus de 300 ont été blessées. Un nombre équivalent de propriétés a été détruit.
Il y a moins de deux ans, des inondations ont submergé Calgary et High River et 100 000 personnes ont été évacuées. Deux semaines plus tard, un train laissé sans surveillance a amorcé sa course, déraillé et provoqué une boule de feu dans la collectivité de Lac-Mégantic. En tout, 47 personnes sont mortes dans le pire accident ferroviaire au pays depuis la Confédération.
Et tout juste en octobre dernier, je me suis trouvé à être confiné, comme plusieurs milliers d'autres personnes à Ottawa et à Gatineau, parce qu'un tireur avait tué un soldat canadien et pris d'assaut le Parlement. J'ai expérimenté personnellement les événements de Calgary et d'Ottawa. Dans le premier cas, les gens de la radiodiffusion, en particulier ceux de Shaw, et des télécommunications, en particulier ceux de Telus, ont servi les citoyens de manière admirable. Et ils ont fait de même à Ottawa. Mais aux deux endroits, on a relevé que l'une des nouvelles sources d'information était les médias sociaux, notamment Twitter.
Mais nous avons tous connu des cas où de mauvais renseignements ont circulé rapidement sur les médias sociaux, en particulier lors d'une crise où la situation peut évoluer d'une minute à l'autre. Sur ces nouvelles plateformes, comment pourrait-on faire pour offrir aux Canadiens une information qui soit authentifiée et qui fasse autorité?
Tout comme la nature des menaces évolue, il doit en être de même pour l'infrastructure requise en vue d'informer les gens de l'imminence d'une menace.
Je sais que vous y travaillez tous. C'est l'objet même de ce sommet.
Nous nous intéressons vivement aux progrès en cours afin d'élaborer un ensemble de normes nationales, en particulier en lien avec le groupe de travail Réseau et ses travaux sur un système d'alerte au public sans fil.
Ce groupe, qui relève du Comité directeur du CRTC sur l'interconnexion, est à élaborer des normes qui permettraient aux responsables de la gestion des urgences de communiquer de l'information aux Canadiens sur leurs téléphones cellulaires.
Les normes que le groupe de travail est à valider sont issues des cadres supérieurs responsables de la gestion des urgences et, espérons-le, une démonstration en direct pourra être organisée plus tard cette année. Nous suivrons cet essai avec grand intérêt, dans l'espoir que cela incitera toutes les juridictions à les adopter.
Nous croyons aussi savoir qu'une fois de plus, la province de l'Alberta pourrait jouer un rôle actif dans cet espace et qu'elle examine les avenues en vue d'élargir son réseau actuel de messagerie d'alerte et d'y englober les messages d'alerte au moyen du sans-fil. Nous suivrons également ces efforts de près.
Dans les limites de notre mandat, nous poserons des gestes de manière aussi opportune que possible afin de nous assurer que les politiques appropriées sont en place. Cela dit, nous sommes conscients des défis techniques associés à la création et à la mise à l'essai de normes, sans compter les efforts nécessaires pour surmonter les difficultés techniques qui pourraient se présenter.
Aussi, nous sommes impatients de mieux connaître vos besoins et vos capacités.
De même, nous savons que les situations d'urgence peuvent être de petite ou de grande envergure, et qu'une partie significative du travail du personnel affecté aux situations d'urgence consiste à répondre à celles-ci, et non pas à informer les gens à leur sujet. Pour y parvenir, les Canadiens et les intervenants d'urgence doivent pouvoir compter sur un système 9-1-1 efficace.
La plupart des provinces, mais pas toutes, ont adopté des lois au sujet du 9-1-1 — notamment l'Alberta et Terre-Neuve-et-Labrador au cours de la dernière année, et environ 96 p. 100 des Canadiens ont accès à ces services. Il reste des régions au pays où le système n'est pas accessible et il y a encore des citoyens dans ce pays qui n'y ont pas accès. Mais grâce aux initiatives annoncées récemment, il est rassurant de voir que l'écart se rétrécit à cet égard.
Terre-Neuve-et-Labrador est à mettre en œuvre ses nouvelles dispositions législatives, le Yukon a pris des mesures en vue de la mise en œuvre complète d'un système 9-1-1 et les Territoires du Nord-Ouest cherchent à amorcer les choses en ce sens.
Voilà autant de bonnes nouvelles, mais permettez-moi de souligner à nouveau que la mise sur pied de centres d'appels et d'équipes d'intervention d'urgence, et leur fonctionnement relèvent des compétences municipales et provinciales. Au CRTC, notre travail consiste à nous assurer que les systèmes de télécommunications qui relèvent de notre responsabilité sont disponibles afin de répondre à vos besoins et à ceux des Canadiens, en particulier lorsqu'il s'agit de mettre les citoyens en lien avec les services d'urgence.
(Au sujet des centres d'appels, parmi tous ceux que j'ai visités se trouve celui de St. Albert où, l'an dernier, les gens m'ont offert un accueil des plus chaleureux. Comme tous les Canadiens, j'ai été profondément bouleversé et attristé par le meurtre du gendarme David Wynn, et j'aimerais exprimer mes condoléances à sa famille, à ses collègues ainsi qu'à ceux et celles qui l'aimaient le plus.)
Voici ce que nous avons fait au sujet du 9-1-1.
Il y a quelques années, le CRTC a exigé des entreprises de sans-fil qu'elles mettent à niveau leurs réseaux afin d'aider les intervenants d'urgence à localiser avec plus de précision une personne qui appelle le 9-1-1 au moyen de son téléphone cellulaire.
Plus récemment, les mêmes entreprises ont dû apporter des changements à leurs réseaux afin que les personnes ayant des troubles de la parole ou de l'audition puissent communiquer avec les centres d'appels 9-1-1 au moyen de messages texte. Plusieurs centres d'appels au Canada ont déjà intégré cette nouvelle fonctionnalité, y compris tout récemment la Nouvelle-Écosse, où le service est offert à l'échelle de la province depuis la mi-janvier. La mise en œuvre se poursuit partout au pays.
L'an dernier, nous avons approuvé la fourniture d'un nouveau service appelé le service de relais vidéo. Lorsqu'il sera lancé, les Canadiens pourront faire des appels « téléphoniques » au moyen d'Internet en utilisant la langue des signes américaine (ASL) ou la langue des signes québécoise (LSQ) avec l'aide d'un interprète. Une particularité importante du nouveau service, durant ses heures de fonctionnement, sera de hiérarchiser les appels aux centres d'appels 9-1-1. Les appels d'urgence seront placés en première ligne pour un interprète, qui établira ensuite la communication avec les intervenants d'urgence.
En juin dernier, à la suite d'un rapport d'enquête de l'ancien conseiller Timothy Denton, le CRTC a fait connaître son plan d'action relatif aux services 9-1-1.
Le plan comprend davantage d'initiatives visant à renforcer le système 9-1-1 actuel, et il nous mènera à un examen du cadre réglementaire pour les services 9-1-1 de prochaine génération en 2016. Dans un avenir assez rapproché, les Canadiens pourront accéder et bénéficier des services d'urgence de manière inédite, et le CRTC est prêt à jouer son rôle.
Dans le cadre de cette instance, notre objectif est d'élaborer un cadre grâce auquel les réseaux canadiens de télécommunications sont outillés pour soutenir les services 9-1-1 de prochaine génération, au moment où les centres d'appels sont prêts à intégrer les nouvelles capacités.
En conclusion, soyez assurés qu'à l'instar de tous les Canadiens, nous savons que c'est grâce à vos efforts que nous pouvons dormir l'esprit un peu plus tranquille la nuit, et nous vous sommes reconnaissants pour votre sagesse, votre calme et votre courage.
Nous continuerons de collaborer avec vous, avec l'industrie et avec le gouvernement — et à l'intérieur de notre rôle et de notre mandat — pour faire en sorte qu'un système fiable soit à votre disposition afin de garder les Canadiens en sécurité et de pouvoir les informer en cas d'urgence, et ce, sur toutes les plateformes et sur tous les appareils de communications. Nous savons très bien qu'il faut pouvoir joindre les gens là où ils se trouvent, et non pas seulement là où ils étaient.
Merci.
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