Le 2 avril 2015
San Antonio (Texas)
Merci pour cette chaleureuse présentation, M. Linfield. Quelle belle conférence! C’est vraiment inspirant d’entendre ce qui se passe au sud de notre frontière.
Félicitations à l’Institute for Financial Literacy pour cette conférence, dont c’est la 10e édition cette année. C’est un moyen opportun de donner le coup d’envoi au Mois de la littératie financière aux États-Unis.
Je tiens à saluer les lauréats du prix de l’excellence en éducation financière de 2015 et à les remercier de leur dévouement, de leur esprit novateur et des retombées de leurs programmes. Je félicite en particulier mes collègues, les Comptables professionnels agréés du Canada.
Je suis honorée d’être votre première conférencière venant de l’extérieur du pays. Pour moi, cette année a été remplie de premières. C’est aujourd’hui ma première allocution à l’étranger en tant que chef du développement de la littératie financière du Canada. De plus, je fêterai bientôt le premier anniversaire de ma nomination. Le 15 avril, pour être exacte.
Mon année a été mouvementée. Aujourd’hui, je vous donnerai un aperçu de cette première année en évoquant les grandes étapes que nous avons franchies et en parlant un peu de mon rôle et de mon mandat. Entre autres, je vous indiquerai où nous en sommes dans l’élaboration de la stratégie nationale du Canada pour renforcer la littératie financière.
Pour commencer, je voudrais dire que la prise de décisions financières fait partie de la vie de tous les jours des consommateurs et que ces décisions ne vont pas en se simplifiant. Comme tout le monde ici le sait, les marchés et les produits financiers sont plus complexes que jamais. Beaucoup de consommateurs n’ont pas les compétences et les connaissances nécessaires pour prendre des décisions financières judicieuses.
Au Canada, nous définissons la littératie financière comme le fait de posséder les connaissances, les compétences et la confiance en soi requises pour prendre des décisions financières responsables. Aujourd’hui, la littératie financière est tout aussi importante que les compétences de base en lecture, en écriture et en calcul.
L’Agence de la consommation en matière financière du Canada (ACFC), où je travaille, est née en 2001 comme suite aux conclusions d’un groupe de travail fédéral sur les services financiers.
Selon ce groupe de travail « [l]e cadre actuel de protection du consommateur ne contribue pas à réduire aussi efficacement que cela serait souhaitable le déséquilibre qui existe entre les institutions et les consommateurs sur le plan de l’information et du pouvoir de négociation ». C’est à cause de ce constat que le gouvernement a créé l’ACFC. Notre agence est similaire à la CFPB des États-Unis. Nous avons deux mandats : la protection et l’éducation des consommateurs.
Soucieux de renforcer la littératie financière des Canadiens, le gouvernement a, en 2007, accordé des fonds à l’ACFC pour lui permettre de mettre sur pied un programme destiné aux jeunes, ce que nous avons fait. En 2009, le gouvernement a créé un deuxième groupe de travail, cette fois axé sur la littératie financière.
Les membres de ce groupe comprenaient des représentants des secteurs des affaires et de l’éducation, des organismes communautaires ainsi que des universités.
Le groupe a rencontré des Canadiens de partout au pays pour entendre leurs points de vue sur la littératie financière. De plus, il a commandé de la recherche et examiné les meilleures pratiques à l’échelle internationale.
En 2011, le groupe de travail a fait 30 recommandations dans son rapport final, dont l’une suggérait de nommer un chef pour élaborer et mettre en place une stratégie nationale destinée à renforcer la littératie financière.
De nombreux groupes du Canada des secteurs public, privé et à but non lucratif œuvrent déjà dans le domaine de la littératie financière. Les progrès dans l’amélioration de la littératie financière reposent et continueront à reposer sur la collaboration entre ces groupes et sur leurs efforts concertés.
En tant que chef du développement de la littératie financière, mon rôle est de collaborer et de coordonner les activités à l’appui d’initiatives qui renforceront la littératie financière de divers secteurs et d’élaborer une stratégie nationale.
Le ministre d’État aux Finances, Kevin Sorenson et moi avons mis sur pied, pour m’aider dans ma tâche, le Comité directeur national sur la littératie financière. Ses membres viennent d’un large éventail d’organismes publics, privés et sans but lucratif de tout le Canada. L’une des membres du Comité, Cairine Wilson de Comptables professionnels agréés du Canada, a remporté deux prix hier et est ici aujourd’hui. Les membres ont joué un rôle essentiel en m’aidant à élaborer une stratégie nationale pour la littératie financière qui est inclusive, pertinente et accessible à tous les Canadiens. La stratégie sera lancée sous peu.
Pour mieux comprendre les différents besoins en littératie financière des Canadiens, le gouvernement a organisé trois phases de consultation à l’échelle nationale. Elles portaient sur :
- les aînés;
- les groupes prioritaires, y compris les Autochtones, les nouveaux arrivants au Canada; les personnes à faible revenu et les personnes handicapées;
- les jeunes et les adultes canadiens.
Pour donner suite aux consultations et comme première étape vers une stratégie nationale, nous avons publié en octobre dernier un document intitulé Renforcer la littératie financière des aînés.
Ce document donne suite à l’engagement du gouvernement du Canada d’élaborer une stratégie répondant aux besoins particuliers des personnes âgées.
Les objectifs sont d’inciter les Canadiens à préparer leurs vieux jours et à planifier pendant leur retraite; d’améliorer l’accès aux programmes de prestation du gouvernement et la compréhension de ces programmes ainsi que de lutter contre l’exploitation financière des personnes âgées.
Plusieurs organismes ont annoncé de nouvelles initiatives à l’appui de la stratégie des aînés. Par exemple :
- Le mouvement des coopératives de crédit a commencé à former les travailleurs de première ligne à reconnaître et à examiner les cas possibles de maltraitance des personnes âgées, et à intervenir.
- L’Association des banquiers canadiens fait appel à des banquiers bénévoles pour organiser des séances à l’intention des aînés sur la fraude et l’exploitation financière des personnes âgées et la gestion de l’argent.
- De plus, le gouvernement fédéral a remanié un outil en ligne qui aide les Canadiens à calculer leur revenu de retraite.
Toutes les consultations ont fait ressortir deux idées :
- Premièrement, aucune solution universelle ne fonctionnera. Les messages et les initiatives doivent être adaptés au public visé.
- Deuxièmement, la littératie financière est la responsabilité de chacun. La collaboration est essentielle à notre réussite.
Nous devons adapter nos approches. Nous avons entendu à maintes reprises que les priorités des gens changent, qu’ils soient des aînés recevant un revenu fixe, des chefs de famille monoparentale épargnant pour les études de leurs enfants ou de jeunes adultes fondant une famille.
Ce sont là des « moments propices à l’apprentissage » : des étapes de la vie des gens où ils sont les plus ouverts à acquérir certaines connaissances financières et à développer leur capacité financière.
Toutefois, fournir des renseignements essentiels lorsque les consommateurs sont susceptibles d’y être réceptifs ne représente que la moitié de l’effort. Encore faut-il que l’information soit communiquée clairement, qu’elle soit facile à utiliser et à comprendre, et qu’elle provienne de sources fiables et objectives.
Au cours des consultations, nous avons entendu parler de la nécessité d’encourager les partenariats entre les secteurs public, privé et à but non lucratif. Tout le monde veut s’assurer que nous travaillons tous vers les mêmes objectifs.
Cela vient confirmer ce que nous avons appris à l’ACFC par l’expérience : nous ne pouvons pas tout faire seuls. La collaboration entre tous les individus et les organismes qui se consacrent à l’amélioration de la littératie financière des consommateurs canadiens est essentielle au succès. La collaboration est en fait au cœur de tout ce que nous faisons.
Depuis que je suis devenue chef du développement de la littératie financière l’an dernier, tous ceux parmi nous qui travaillent en faveur de la littératie financière au Canada ont contribué à développer les réseaux de collaboration. Et nous avons encouragé la création de nouveaux réseaux, lorsque c’était nécessaire.
Pour aider les organismes à nouer des liens entre eux, l’ACFC tient à quelques années d’intervalle une conférence nationale sur la littératie financière. Notre conférence est similaire à celle-ci, car c’est une occasion pour les membres de notre communauté de la littératie financière de discuter de pratiques exemplaires, de leurs réussites et des dernières recherches.
Lors de la conférence de 2014, j’étais fière d’annoncer le lancement de la dernière et de la plus importante initiative de collaboration de l’ACFC : la Base de données canadienne sur la littératie financière.
J’aimerais vous montrer une vidéo que l’ACFC a réalisée pour promouvoir cet outil.
Cette base de données est hébergée sur le site Web de l’ACFC à SinformerCestPayant.gc.ca. Elle constitue un guichet unique recensant plus de 860 ressources de plus de 75 organismes. Les utilisateurs peuvent faire des recherches en fonction du sujet, du public cible et de nombreuses autres variables.
Le site comprend un questionnaire d’autoévaluation qui mesure les compétences en gestion de l’argent. Selon les connaissances et les compétences qui lui manquent d’après le questionnaire, l’utilisateur est dirigé vers les ressources de base qui lui seraient les plus utiles.
La base de données est également un outil de réseautage, car elle permet aux organismes aux vues similaires de nouer des liens et d’établir des partenariats.
Je vous ai donc présenté certaines des activités que nous menons en collaboration avec le secteur privé et à but non lucratif. Pour promouvoir la collaboration au sein du gouvernement fédéral du Canada, je préside le Comité interministériel du gouvernement du Canada sur la littératie financière. Ce comité aide à renforcer le dialogue entre les divisions du gouvernement fédéral dont le travail touche à la littératie financière.
J’espère trouver des occasions similaires de collaboration avec les gouvernements provinciaux du Canada lorsque je prendrai contact avec eux cette année, par exemple, avec les ministères de l’Éducation. C’est qu’aucun ordre de gouvernement de notre pays ne détient tous les leviers pour améliorer la littératie financière.
Plus tard cette année, à mesure que le gouvernement déploiera la stratégie nationale pour la littératie financière, nous prévoyons que nos nombreux partenaires nous aideront à la mettre en œuvre.
Sa mise en œuvre sera en fait une responsabilité partagée. Nous comptons sur la participation des membres des réseaux de littératie financière, du Comité interministériel sur la littératie financière et du Comité directeur national. Ils agiront comme champions de la littératie financière et en porteront le flambeau au sein de leurs propres organismes et communautés pour engager la participation des consommateurs de partout au pays.
La stratégie nationale du Canada établira de grands objectifs dans le domaine de la littératie financière. Comment saurons-nous si nos plans produisent des résultats?
Nous allons les évaluer en utilisant une gamme d’outils et les ajuster, au besoin. Nos méthodes d’évaluation comprendront des enquêtes et d’autres moyens de consulter les intervenants. Notre enquête sur les capacités financières, réalisée tous les cinq ans, vise à évaluer les connaissances, les comportements et les attitudes des Canadiens dans le domaine financier. Elle continuera d’être une référence pour mesurer l’évolution de la littératie financière des Canadiens au fil du temps. Quelques résultats de notre enquête de 2014 : Moins de la moitié des Canadiens ont des budgets de ménage et un tiers éprouvent de la difficulté à payer leurs factures.
En outre, l’ACFC travaillera avec les secteurs privés et à but non lucratif pour élaborer une trousse d’outils d’évaluation. Nous allons partager notre trousse d’outils avec tous ceux qui offrent des programmes de littératie financière, pour qu’ils puissent évaluer l’efficacité de leurs programmes et déterminer où et comment la littératie financière s’améliore.
Une question demeure : la littératie financière aidera-t-elle les consommateurs à prendre de meilleures décisions financières?
Nous menons des recherches pour mieux comprendre les facteurs qui influent sur la prise de décisions. Nous savons déjà que les situations, les expériences et les personnalités des gens pèsent lourd dans leurs décisions. Leurs décisions sont également influencées par la façon dont l’information financière leur est présentée et communiquée, ainsi que par le contexte et le lieu dans lequel elle est présentée. C’est pourquoi il est essentiel d’adapter les renseignements financiers et les programmes de littératie financière aux besoins particuliers des gens.
La recherche nous montre également que les choix par défaut ont une incidence énorme sur les décisions de consommation. Par exemple, lorsque les gens commencent un nouvel emploi, ils doivent parfois choisir de participer ou non au régime de retraite de leur employeur, si ce dernier en offre un. Beaucoup regrettent plus tard de ne pas y avoir adhéré.
Le simple fait d’inclure une case sur un formulaire peut pousser les consommateurs vers des décisions financières aux répercussions majeures sur leur bien-être financier. Ce n’est qu’un exemple d’une situation où la collaboration entre le gouvernement et le secteur privé peut vraiment changer les choses.
Nous nous intéressons aussi aux études réalisées par nos homologues des autres pays sur l’économie comportementale. Je suis membre du Réseau international sur l’éducation financière, ou RIEF pour faire court. Ce réseau fait partie de l’Organisation de coopération et de développement économiques.
Les membres du RIEF travaillent ensemble pour établir les meilleures pratiques et des modèles que tous les pays peuvent utiliser pour améliorer la littératie financière.
Par exemple, le RIEF a élaboré des principes généraux concernant les stratégies nationales d’éducation financière. Le Canada a participé à l’élaboration de ces principes, qui ont été approuvés par les dirigeants du G20. Ces principes forment un cadre pour aider les pays à élaborer leur stratégie nationale. Quelque 50 pays ont utilisé ces principes à ce jour.
Le RIEF s’appuie actuellement sur ces principes pour élaborer un manuel de politiques et une liste de vérification, qui seront des outils pratiques pour aider les pays à mettre en œuvre leurs stratégies.
La littératie financière est une responsabilité partagée au sein de nos pays et à l’échelle internationale.
Nous avons un objectif commun : améliorer la littératie financière de nos populations.
Cette conférence annuelle sur la littératie financière illustre l’utilité de la collaboration en vue d’atteindre cet objectif.
Les séances auxquelles j’ai participé soulignent ce fait. J’ai hâte d’entendre parler de votre travail dans le domaine de la littératie financière.
Merci.