Banff (Alberta)
Le 4 juin 2015
Jean-Pierre Blais, Président
Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes
Priorité à l'allocution
Bonjour.
Avant de commencer, je tiens à reconnaître que nous sommes réunis aujourd'hui sur le territoire traditionnel des Premières Nations signataires du Traité 7, incluant les Premières Nations Stoney et Siksika. Je les remercie et rends hommage à leurs aînés.
C’est toujours avec plaisir que je m’adresse aux radiodiffuseurs et aux télédiffuseurs. Cette industrie me tient particulièrement à cœur, puisque j’ai passé une bonne partie de ma carrière à élaborer des politiques dans les domaines de la culture et des communications. Aussi, et ceci aidant, depuis quelques mois, le CRTC a apporté plusieurs changements stimulants à l’industrie de la radiodiffusion.
J’y reviendrai dans quelques instants.
Aujourd’hui, je suis ici pour livrer ce que vous pourriez appeler la première partie d’un discours en deux temps. Je prononcerai un deuxième discours en fin de semaine au Festival mondial des médias de Banff et j’y développerai des idées présentées ici aujourd’hui. Tout bon dirigeant d’entreprise de radiodiffusion sait qu’il n’y a aucune raison de mettre fin à une production s’il y a une chance d’élargir l’auditoire avec une suite ou une présuite.
Aujourd’hui, je veux vous présenter une mise à jour de nos activités récentes. Et je veux aussi regarder un peu vers l’avenir.
Le travail que nous accomplissons au CRTC depuis 12 mois se prête au jeu des spéculations au sujet de l’avenir, du changement et de ses effets. Cela me rappelle aussi un film que j’ai revu récemment, Retour vers le futur, un classique intemporel qui met en vedette Michael J. Fox et Christopher Lloyd.
Aussi, au cours des 20 prochaines minutes, j’aimerais voyager dans le temps un peu. Nous commencerons en 2015 en examinant l’état actuel de l’industrie de la télévision. Puis, nous retournerons en 2013, lorsque je suis venu à Banff pour la première fois en tant que président du CRTC afin de parler de l’avenir de la télévision. Pour terminer, nous reviendrons en 2015 et regarderons comment l’avenir est arrivée.
Pour paraphraser le docteur Emmett Brown, un homme toujours très perspicace, Mesdames, Messieurs, attachez bien vos ceintures. Nous avons des choses sérieuses à examiner.
Ère d’abondance
Nous vivons dans une ère d’abondance. Nous pouvons accéder au contenu audiovisuel — et en particulier le contenu télévisuel —à tout moment du jour ou de la nuit, peu importe l’appareil que nous choisissons. Ce simple fait change les choses pour nous tous. Les radiodiffuseurs mettent à l’essai de nouveaux moyens de présenter le contenu aux auditoires. Les créateurs produisent des émissions de meilleure qualité comme jamais auparavant.
Et les téléspectateurs? Ils contrôlent tout : ce qu’ils regardent, le moment où ils le regardent, l’endroit où ils le regardent et la façon dont ils le regardent. Ils règnent en empereurs sur cette ère d’abondance.
Ces changements ne sont pas une mode passagère. On ne parle pas ici du prochain magnétoscope à cassettes, d’une émission de téléréalité ou d’une mini-série provocatrice. Il s’agit d’un changement de paradigme qu’a engendré l’ubiquité de la technologie à large bande — et ses effets commencent seulement à se voir et à se ressentir. Cela peut inspirer crainte un peu à certains d’entre vous. D’autres pourraient avoir très peur. Et avec raison. Car à l’avenir, vous constaterez que la vieille façon de rejoindre les téléspectateurs, d’acheter de la publicité, d’octroyer des licences de contenu, de promouvoir les émissions, de préparer une grille d’émissions pour la soirée; tout cela ne fonctionnera plus. Vous devrez trouver de nouvelles façons d’attirer les téléspectateurs vers l’écran.
Cela étant, il n’y a pas meilleur moment pour changer que le présent. Nous ne pouvons arrêter un changement de paradigme comme celui-ci. Il entraîne un progrès inévitable, et pour tout dire, qui est le bienvenu. Mais nous pouvons adapter le contexte réglementaire au sein duquel le paradigme s’implante, s’étend et évolue afin que ces changements se produisent dans l’intérêt public.
Voilà où le CRTC entre en jeu. C’est pourquoi nous avons tenu la conversation « Parlons télé » dont vous avez tant entendu parler, et à laquelle certains d’entre vous ont peut-être participé. Autant que possible, nous voulions préparer une feuille de route pour l’avenir de la télévision qui tient compte du nouveau contexte de chacun et qui fait fond sur les forces de notre système.
De retour à Banff, en 2013
J’espère que tout cela n’est pas une surprise. Ça ne devrait pas l’être. Faites le voyage avec moi, en juin 2013, lorsqu’au Festival mondial des médias de Banff, j’ai parlé du terrain mouvant sur lequel se trouvait notre industrie de la télévision.
J’ai mentionné que la télévision traditionnelle ne possédait plus le monopole sur l’information et le divertissement.
Que les gens regardaient des émissions d’une manière inconnue il y a 10 ans et avec des appareils qui n’existaient pas à ce moment.
Que la radiodiffusion, telle que nous l’avons déjà connue, n’était plus la même et ne le serait jamais plus.
Que réglementer tout simplement pour règlementer n’apportait rien.
Que nous tous qui réglementons, créons et distribuons des produits dans l’industrie de la télévision devions changer notre façon de penser — au lieu d’élaborer et de suivre des règles, il fallait favoriser les résultats favorables.
Des règles aux résultats
Je vous rappelle tout cela car, de retour dans le monde d’aujourd’hui, nous avons récemment rendu publiques diverses décisions qui constitueront la fondation de l’avenir de la télévision.
Nos décisions ont mis la table pour qu’évolue une industrie de la télévision dynamique qui présente de nombreuses occasions aux créateurs, aux fournisseurs de services et aux téléspectateurs. Elles adhèrent au nouvel environnement centré sur les téléspectateurs et ajustent les objectifs du CRTC afin de créer des résultats dont tous bénéficieront.
Permettez-moi de vous expliquer.
En 2013, j’ai indiqué qu’au lieu de nous concentrer sur la production de grandes œuvres canadiennes, nous devions nous concentrer sur la production de grandes œuvres qui se trouvent à être canadiennes. Les créateurs seront bientôt en mesure de mettre à contribution des projets pilotes afin de créer du contenu original, doté de gros budgets et certifié comme étant canadien que les auditoires du monde entier veulent regarder.
J’ai dit qu’au lieu de mettre l’accent sur les contraintes, nous devions nous concentrer sur le choix. Les téléspectateurs auront bientôt accès à un service d’entrée de gamme abordable. S’ils en veulent plus, ils pourront choisir les chaînes de leur choix sur une base individuelle ou en petits bouquets de chaînes à prix raisonnable. Sous peu, ils pourront compter sur un code de conduite pour la télévision qui les aidera à prendre des décisions mieux éclairées relativement à leur fournisseur de services.
Et j’ai mentionné qu’au lieu de mettre l’accent sur l’atteinte de quotas, nous devions nous concentrer sur les nouvelles possibilités. Nous laissons tomber les règlements dépassés pour permettre aux radiodiffuseurs d’utiliser leur sens de l’innovation et de la créativité pour satisfaire la diversité des besoins et des intérêts des Canadiens.
Avec ces changements et d’autres, nous favorisons un marché plus dynamique. Le pivot de nos décisions est la création de contenu. Tous les ans, les contribuables, l’industrie et le gouvernement fédéral investissent des milliards de dollars dans la programmation canadienne — et c’est fort louable. Les émissions faites au Canada représentent des vitrines où nous pouvons nous voir et qui permettent au monde de nous voir.
En remisant les vieux outils comme les quotas de radiodiffusion, la protection des genres et les critères désuets de certification, et en exigeant que tous les radiodiffuseurs investissent dans des émissions créées par des Canadiens, nous mettons en place les conditions nécessaires pour que les radiodiffuseurs puissent voir à la création et à la promotion de contenu captivant et de grande qualité que les auditoires du monde entier voudront regarder.
L’Australie a prouvé qu’elle pouvait créer des émissions de télévision pour le monde entier. Le Danemark a fait de même. La Grande-Bretagne a fait de même. Le Canada est tout aussi bien placé pour réussir. Nous avons l’argent pour financer des productions de classe mondiale : le soutien aux productions de télévision canadienne est évalué à 4 milliards de dollars par année. Nous avons les gens — les scénaristes, les producteurs, les réalisateurs et les comédiens, sans compter les musiciens et les auteurs, dont on célèbre le talent partout dans le monde.
Faisons de la télévision la prochaine grande scène où nous ferons concurrence. Tirons profit des Canadiens et de leur talent de calibre mondial — ces gens qui vivent au pays ou qui vont parfaire leurs habiletés à l’étranger — afin de créer un contenu qui côtoie ce qui se fait de mieux dans le monde, qui y fait concurrence — et qui gagne!
Promotion et découvrabilité
Un morceau important de ce casse-tête est la promotion. Les créateurs et les distributeurs doivent adapter les outils qu’ils utilisent pour faire connaître leurs émissions aux téléspectateurs afin de tenir compte du nouveau paradigme télévisuel. Pour eux, continuer de se fier aux radiodiffuseurs pour attirer l’attention du téléspectateur n’est plus suffisant. Votre rôle en tant qu’intermédiaires entre les créateurs et les téléspectateurs — à titre de gardiens du contenu — est moins grand. Tous les jours, de plus en plus de gens se fient aux recommandations faites de bouche-à-oreille et aux algorithmes intégrés aux services de vidéo sur demande pour trouver leur prochaine émission préférée.
Les créateurs et les distributeurs devront travailler plus que jamais auparavant. Ils devront trouver de nouvelles façons de travailler afin de créer de l’engouement et de rejoindre les téléspectateurs. Ce changement sera difficile mais ceux qui l’épouseront — ceux qui innoveront — en tirereront les bénéfices.
L’autre morceau du casse-tête qui doit tomber en place est la découvrabilité. En cette ère d’abondance, alors que les téléspectateurs peuvent choisir du contenu à partir d’un nombre quasi illimité de sources, la découverte peut mener le téléspectateur vers les émissions qui satisfont le mieux ses intérêts, et vice versa.
Au cours des prochains mois, nous tiendrons un sommet sur le sujet. Lors de cet événement, nous visons à réunir les cerveaux les plus éminents — des gens responsables de l’élaboration de politiques publiques, des ingénieurs, des scientifiques, des psychologues et d’autres — d’ici et de l’étranger afin de mettre au point de nouveaux modèles qui mettent en relation les créateurs, les radiodiffuseurs et les téléspectateurs. La découverte constitue un défi auquel font face les industries audiovisuelles partout dans le monde. Notre sommet abordera ce problème de front en vue de trouver des solutions applicables au monde entier, et non pas seulement au Canada.
Aussi, au milieu de tous ces échanges entourant la promotion d’ordre planétaire, il ne faut pas oublier l’importance de la télévision locale. Cette plateforme est encore celle que la plupart d’entre nous utilisent pour l’information, l’éducation et la culture. La télévision locale compte. Le CRTC a confirmé cet état de fait en janvier dernier.
Au cours des mois à venir, nous lancerons une instance afin d’examiner notre approche à l’égard de la programmation locale et communautaire. Nous avons pour objectif de nous assurer que nos politiques et règlements sont toujours adéquats afin de favoriser une programmation locale pertinente, qui reflète la vie locale et qui est accessible à la collectivité. Et si ces mesures ne sont pas adéquates pour la nouvelle ère télévisuelle, nous ferons ce qu’il faut pour les modifier.
Les Canadiens valorisent la télévision locale, et le CRTC continuera de lui accorder son appui.
L’avenir de la radio
Au cours de la dernière année, nous avons consacré une grande partie de notre temps à réfléchir à l’avenir de la télévision. Cela dit, nous n’avons pas oublié l’industrie de la radio. Nous réfléchissons à son avenir aussi. Sur un plan global, je peux vous dire que la radio est dans une situation semblable à celle de la télévision. Les stations de radio doivent innover et mettre l’accent sur l’avenir afin de survivre.
Je n’ai pas besoin de vous parler du rôle important que joue la radio. Elle informe. Elle éduque. Elle divertit. Elle nous met en relation avec la culture et avec nos communautés, tant géographiques qu’ethnoculturelles. Parmi l’ensemble de médias dans nos foyers, dans nos bureaux et dans nos poches, la radio est toujours le média auquel on peut se fier lors d’une panne de courant. C’est encore vers la radio que plusieurs d’entre nous se tournent pour obtenir des informations et des nouvelles fiables et à jour lorsque surviennent des crises. Elle établit des liens importants avec les collectivités locales partout au pays.
Et pourtant, dans sa forme traditionnelle, la radio exerce moins d’attrait auprès de certains auditeurs. Les jeunes délaissent ce médium au profit de services de diffusion en continu en ligne ou de services sur abonnement. Parallèlement, les organismes de réglementation que nous sommes constatent, comme cela a été le cas pour la télévision, que les quotas de radiodiffusion sont de moins en moins efficaces. La question devient dès lors : comment utiliser la radio pour en faire un agent qui influence les goûts musicaux? Comment la radio traditionnelle peut-elle continuer d’aider les gens à découvrir de nouvelles musiques? Car dans un contexte de divertissement, elle excelle en la matière.
Si une partie de la solution aux problèmes de la radio réside dans les quotas de radiodiffusion, alors parlons-en. Au CRTC, nous ne sommes pas opposés au fait d’adapter les quotas. Après tout, c’est ce que nous faisons pour la télé. Mais avant que quiconque fasse une telle affirmation, sachez que nous ne ferons pas disparaître les quotas avant d’avoir défini un outil de rechange qui nous aidera à respecter les objectifs qui nous sont imposés au chapitre de la politique culturelle. Il se peut qu’une partie de la réponse réside dans la promotion des artistes canadiens en ondes, ou encore, dans la promotion de la musique canadienne en faisant participer ses représentants à d’importants festivals de musique comme South by Southwest.
La radio doit aussi relever d’autres défis difficiles. Quel est l’avenir de la radio AM? Quel sera le rôle de la radio numérique? Comment s’assurer que les téléphones intelligents sont équipés de puces FM qui sont activées? Comment s’assurer que la bande FM sur le tableau de bord d’une voiture branchée soit facile à trouver?
Nous voulons travailler avec vous afin de parvenir à des solutions pour ces défis et d’autres. Notre voyage débutera cet automne lorsque nous amorcerons une instance visant à examiner la musique vocale de langue française. Voilà qui n’est peut-être pas un sujet très d’actualité pour les radiodiffuseurs de l’Ouest canadien, mais il ne fait aucun doute que l’instance et l’audience publique connexe aideront à orienter et à éclairer les audiences éventuelles sur des sujets qui concerneront plus directement vos intérêts.
Conclusion
Ce philosophe de renom Marty McFly a déjà dit : « si vous y mettez l’effort, vous pouvez accomplir tout ce que vous voulez. » Il a raison. Le changement est inévitable, mais nous pouvons tous nous y adapter, et survivre, si nous possédons les outils et les ressources nécessaires.
Notre conversation Parlons télé a débouché sur des solutions pour l’industrie de la télévision dans une ère de changements. Nous avons mis en place un cadre qui permet à l’industrie de répondre à l’évolution des habitudes et des goûts des téléspectateurs, de mettre à profit les plus grandes forces de notre industrie canadienne, et de créer des émissions de calibre mondial et des modèles de prestation de service qui fonctionnent bien pour les créateurs, les distributeurs et les téléspectateurs.
C’est maintenant à vous, gens de l’industrie, de vous y mettre en vue d’utiliser ces outils et de parvenir à des résultats exceptionnels. Bonne chance!
Avant de vous quitter, j’aimerais vous présenter une courte vidéo. Puisque certains d’entre vous n’ont pu se rendre au Cercle canadien d’Ottawa pour entendre mon dernier discours, j’ai apporté un peu d’Ottawa en Alberta.
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