L'immigration des filles du roi en Nouvelle-France
Document d'information
Venues d’horizons divers et représentant près de la moitié des femmes qui se sont établies au pays sous le Régime français, ces quelque huit cents immigrantes, pour la plupart des orphelines sans le sou, ont joué un rôle déterminant dans l’histoire du peuplement de la Nouvelle-France. À l’origine d’une longue tradition de futures épousées dans les sociétés de colons, l’émigration de ces femmes, organisée et soutenue par l’administration royale, a permis d’accroître la population française de cette colonie aux prises avec un grave déséquilibre hommes-femmes et de contribuer de façon importante à l’implantation d’une présence française en Amérique du Nord.
La Nouvelle-France connut trois vagues d’immigration féminine, mais la plus importante fut sans contredit la deuxième, qui s’échelonna de 1663 à 1673. Au début des années 1660, la colonie était encore très peu peuplée, bien que les Français y étaient établis depuis le début du siècle, et le roi Louis XIV désirait assurer la survie de sa colonie. Diverses mesures furent mises en place afin d’améliorer la situation, dont l’instauration d’un nouveau régime institutionnel, l’établissement dans la colonie des soldats du régiment de Carignan-Salières et l’immigration de jeunes femmes en âge de procréer. Au cours des années 1663 à 1673, quelque huit cents jeunes femmes vinrent au pays, aux frais du roi, afin de s’y marier et d’y fonder une famille. Six mois après leur arrivée au port de Québec, 80 pour cent d’entre elles étaient mariées. Plus de la moitié de ces immigrantes s’établirent dans la région de Québec, alors que les autres s’installèrent dans les régions de Montréal et de Trois-Rivières.
Les jeunes femmes qui immigrèrent au pays pendant cette période avaient en moyenne 24 ans; elles étaient pour la plupart des orphelines sans le sou et plusieurs d’entre elles venaient de la région parisienne. Ceci ne fut pas sans incidence sur la langue parlée au Canada, à une époque où l’uniformisation linguistique n’était pas encore achevée et où les patois régionaux étaient fort répandus. En raison de leur nombre et de leur rôle dans la transmission de la langue en tant que mères, ces jeunes femmes accélérèrent en quelque sorte la diffusion du parler français au pays. Leur plus grand apport, cependant, demeurera toujours de nature démographique. En effet, dix ans après l’arrivée de ces femmes courageuses, la population française de la vallée du Saint-Laurent avait presque triplé et la colonie pouvait maintenant compter sur ses propres ressources humaines pour accroître sa population.
Les filles du roi ont fait l’objet de nombreuses études au fil des ans, le tout ayant débuté en 1703 dans une publication où le baron de La Hontan mettait en doute leur moralité. Depuis, plusieurs auteurs se sont penchés sur la question et l’on convient aujourd’hui qu’il s’agissait là d’un faux débat qui n’avait pas sa raison d’être. Les filles du roi continuent toujours de retenir l’attention, cependant, et non pas seulement celle des généalogistes. Elles inspirent encore les créateurs et elles sont à l’origine d’une impressionnante production artistique, tant littéraire que picturale et cinématographique. Et comment pourrait-il en être autrement quand elles représentent plus de la moitié des pionnières dans l’origine du patrimoine génétique des Canadiens français et qu’on estime que leur descendance actuelle en Amérique du Nord se chiffre probablement par millions.
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