Transcription de l'entrevue du président McGuire sur Insights with Don Mills and David Campbell
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Don : Bienvenue à cet épisode du balado Insights sur le réseau Huddle. Je m’appelle Don Mills.
David : Et je m’appelle David Campbell.
Don : Vous savez David, nous voulions nous entretenir depuis un certain temps avec Francis McGuire, le président de l’APECA. Cette organisation joue un rôle de premier plan dans la région. Nous avons consacré une partie de la discussion à la carrière de Francis, qui a été plutôt bien remplie à tous points de vue. Il a travaillé dans la fonction publique. Il a dirigé une importante organisation du secteur privé. Il a eu une carrière des plus intéressantes et, comme il nous l’a mentionné, il est sorti de la retraite à la demande pressante de certaines personnes importantes, comme Frank McKenna, je crois, et Donald Savoie, qui est à l’origine de la création de l’APECA et à qui nous avons parlé dernièrement, afin d’accepter cette fonction. Il ne fait aucun doute qu’il oriente l’organisation dans une nouvelle voie.
David : Oui, c’est exact, et je pense que c’était un choix tout indiqué. Je crois que, normalement, ce rôle aurait été attribué à un cadre supérieur du gouvernement fédéral, comme par le passé. Le fait de choisir une personne de l’extérieur du gouvernement et de sortir Francis de la retraite, un homme reconnu pour être un peu rebelle et pour faire bouger les choses, je crois que c’était une décision très brillante. Son genre de vision générale selon laquelle tout problème devient notre problème lorsqu’il s’agit d’un obstacle à la croissance économique dans la région, le fait d’avoir ce genre de vision pour l’APECA… Il a mentionné que ce ne sera pas facile de régler certains éléments, mais, au moins, on comprend maintenant que, s’il y a des obstacles à la croissance économique dans la région, l’APECA devrait se pencher sur ceux-ci et travailler de concert avec les partenaires. Je pense que cette vision est très importante pour l’APECA.
Don : Nous avons d’abord discuté de l’époque où il était PDG de Major Drilling, l’une des trois seules sociétés cotées en Bourse au Nouveau-Brunswick. Comme il l’a indiqué, à ses débuts, l’entreprise était pratiquement en difficultés financières. Elle engendrait des recettes d’environ 100 000 000 $ par année; quinze ans plus tard, elle produisait des recettes de 800 000 000 $ et était devenue la deuxième plus importante entreprise de forage minier au monde. C’était une expérience fascinante de parler avec lui des stratégies que l’entreprise avait utilisées. Je crois que cet aspect de la conversation sera très intéressant pour les gens qui souhaitent faire croître les activités de leur entreprise à l’échelle internationale. Il ne fait aucun doute que sa stratégie a joué un rôle clé pour assurer un tel succès.
David : Oui, quand j’ai travaillé pour lui dans le milieu des années 1990, il avait fait venir Ken Wong de Queen’s afin qu’il donne des genres de conférences à tout le personnel du Ministère. Je crois que, vous savez, c’est très, très important pour un PDG d’exprimer simplement et clairement ce qu’il essaie de faire. Francis McGuire était reconnu entre autres pour son travail acharné.
Juste pour vous donner un exemple… Quand j’ai commencé dans les années 1990, je restais au bureau jusqu’à 19 h ou 20 h tous les jours, vous savez, pour essayer de me faire un nom et de décrocher un poste que l’on ne voulait pas m’accorder. Mais, chaque fois que je partais, Francis était encore à son bureau. Il était la dernière personne à quitter le cinquième étage de l’Édifice du Centenaire à Fredericton chaque soir. C’est un homme qui travaille vraiment très fort. Je dirais que l’exemple que vous avez donné démontre qu’une expertise en la matière n’est pas nécessairement requise pour ces postes de PDG.
Vous pouvez apporter une expertise, un style et une approche dans une industrie complètement différente, puis obtenir d’excellents résultats… Je crois que c’était sa crainte, n’est-ce pas, quand il a accepté ce poste. Il a dit qu’il n’était pas certain d’avoir les aptitudes requises pour cette industrie, mais ce n’était pas ce que l’on recherchait. Il fallait posséder les bonnes compétences stratégiques et la bonne vision stratégique qui permettraient de faire croître cette entreprise. Il ne fait aucun doute qu’il s’en était vraiment bien tiré avec Major Drilling.
Don : En effet. Nous avons parlé avec lui de la raison pour laquelle il n’y avait pas plus de sociétés cotées en Bourse. Il a alors mentionné une chose à laquelle je n’avais pas pensé. Il a dit que les entreprises qui s’introduisent en Bourse présentent vraiment un besoin continu d’investissement. Ce n’est pas un besoin ponctuel, vous savez. C’est un besoin continu, et c’est pourquoi les banques sont davantage intéressées à soutenir des entreprises qui ont besoin d’investissements sur une base régulière. Je n’y avais pas pensé, mais c’est logique, n’est-ce pas?
David : Je dirais que c’est logique. Toutefois, on pourrait avancer qu’il y a probablement beaucoup d’entreprises dans la région du Canada atlantique qui pourraient profiter d’un plus grand apport en capitaux si elles acceptaient de courir davantage de risques et désiraient faire croître leurs activités. Je pense que ce point est tout à fait pertinent. Je crois tout de même que l’idée d’essayer d’encourager d’autres entreprises de la région à s’introduire en Bourse n’est pas nécessairement une mauvaise idée si l’on fait une comparaison, par exemple, avec le reste du pays. On peut dire qu’il y a une chose qui se distingue en quelque sorte, en particulier au Nouveau-Brunswick, mais aussi dans l’ensemble du Canada atlantique, soit qu’il y a vraiment très peu de sociétés cotées en Bourse. C’est comme une sonnette d’alarme à mon avis, mais sa réponse est très logique. Major Drilling… Nous avons parlé à Denis Larocque il y a quelques semaines. Vous vous rappelez que sa stratégie de croissance exigeait aussi beaucoup de capitaux. Il voulait acheter d’autres sociétés, vous savez, acheter de l’équipement, etc. Il est extrêmement important d’avoir accès à ce marché financier pour des sociétés de ce genre.
Don : Ensuite, quand nous avons abordé son nouveau rôle de président de l’APECA, nous avons eu une conversation très intéressante. Je crois qu’il ne fait aucun doute qu’il est vraiment concentré… ils sont concentrés sur certains enjeux. La pénurie de travailleurs constitue un enjeu clé. La numérisation de l’économie en est un autre, vous savez. Il a mentionné les données démographiques. Je dois dire, en passant, que j’ai donné bon nombre de présentations à la haute direction de l’APECA au cours de la dernière décennie pour parler de la situation démographique et des pénuries de travailleurs. J’espère que j’ai réussi à influencer le mode de pensée des dirigeants à cet égard, peut-être que non, mais j’aimerais penser que c’est le cas, vous savez.
Toute la question qu’il a mentionnée à propos de l’automatisation, alors qu’il obtenait des chiffres d’environ 30 % des gens dans le secteur privé qui envisageaient l’automatisation présentement. Évidemment, cette proportion doit monter. Il s’agit d’une façon de composer avec les pénuries de travailleurs, mais, en même temps, je ne suis pas vraiment sûr que l’on cherche à rétrécir l’écart dans le PIB que cette région a creusé avec le reste du Canada, selon mes calculs très approximatifs. Vous êtes meilleur que moi dans ce domaine, mais, prenons la dernière décennie par exemple, en moyenne, la croissance économique du Canada atlantique est restée en deçà de celle du PIB dans le reste du pays d’environ 1 %. Évidemment, cela ne semble pas être significatif, mais les montants s’accumulent, et la situation s’aggrave. Et cela signifie simplement que, chaque année, le pourcentage de notre contribution à l’économie canadienne continue de rétrécir. C’est un problème majeur. Et maintenant, avec le rythme de croissance de la population qui va sûrement s’atténuer légèrement dans l’avenir, je suis plutôt surpris que ce ne soit pas encore une mesure importante, un paramètre qu’ils utiliseraient pour mesurer la réussite.
David : Oui, évidemment, je crois que le budget de l’APECA est plus grand que ceux des quatre agences de développement économique provinciales mis ensemble. Ils disposent donc d’un budget relativement très important. Par comparaison avec le gouvernement fédéral dans son ensemble, ce n’est qu’une goutte d’eau dans l’océan, mais, sur le plan régional, ce sont de gros chiffres. Je crois que, vous savez, d’après ce que j’en déduis après avoir parlé à des cadres d’un peu partout dans la région, ils se disent : « Eh bien, nous ne pouvons pas contrôler le PIB, vous savez, c’est arrogant de penser qu’une agence de développement économique contrôle le PIB ». Mais je suis d’accord avec vous. Vous devez définir cela comme une cible puisque, ensuite, cela influence les décisions que vous prenez. Vous savez par la suite que la population doit croître, car c’est très difficile de stimuler la croissance du PIB sans les dépenses des ménages. Vous savez que vous avez besoin de plus d’entreprises productives parce qu’elles seront plus concurrentielles sur les marchés d’exportation. Je suis d’accord avec vous. J’aimerais bien que toutes les provinces et l’APECA s’entendent sur un taux de croissance cible du PIB, qui se rapprocherait de la moyenne nationale. Il n’y a aucune raison pour que nous ne soyons pas capables d’y parvenir dans cette région, en particulier si les efforts du premier ministre de la Nouvelle-Écosse sont couronnés de succès et qu’il réussit à obtenir une population de 2 000 000 d’habitants d’ici 2060; il aura besoin d’une croissance du PIB qui reflète la moyenne nationale. À mon avis, tout cela est très sensé. Je ne sais pas pourquoi ces agences ont des réticences.
Don : Oui, l’un des problèmes présents dans notre région, c’est que notre population n’a pas connu une croissance aussi rapide que dans le reste du Canada jusqu’à maintenant, vous savez. Au Canada, nous avons connu une croissance de 1 % par année en moyenne sur une période de 60 ans, et ce 1 % par année contribue à la croissance économique, car, vous savez, au minimum, les gens doivent manger et doivent avoir un toit sur la tête, et cela crée des emplois et génère des activités économiques. À l’heure actuelle, au moins dans les trois provinces maritimes, vous savez, nous suivons le rythme de la croissance de la population, ce qui, en soi, permettra de réduire l’écart, j’en suis sûr. Cela réduira l’écart automatiquement, mais nous devons rester centrés sur le fait que nous continuerons de vivre des pénuries de travailleurs dans cette région. Les enjeux indiqués par Francis sont axés sur la productivité et sont importants également, car nous sommes moins productifs que les autres régions du pays. Vous savez, il y a de bons points qui sont examinés présentement. Une fois de plus, notre objectif doit être de se situer au minimum dans la moyenne. Essayons d’être dans la moyenne au Canada atlantique en ce qui a trait à la croissance économique; puis, nous pourrons mener le pays vers une croissance économique. Une étape à la fois.
David : Oui, c’est exact, mais la croissance de la productivité et la croissance de l’effectif ne sont pas dépendantes l’une de l’autre à l’échelle nationale. Entre la dernière grande récession qui a eu lieu en 2008 et jusqu’à avant l’arrivée de la COVID-19, il s’est ajouté 1 million de personnes à la population active du pays, sur l’ensemble du territoire. Cela a stimulé grandement la croissance économique; dans la région, l’effectif a à peine bougé. Si ce n’avait été de l’Î.-P.-É., le taux de croissance aurait probablement été négatif. Je crois que c’est les deux. On se doit d’être plus productif, mais il faut aussi disposer du bassin de travailleurs requis pour favoriser la croissance.
Don : Nous avons eu une conversation très intéressante avec Francis. Venons-en à cette conversation. Nous aimerions recevoir des commentaires de personnes qui écoutent ce balado afin de connaître leurs points de vue. Merci d’être à l’écoute.
Don : Bienvenue Francis à ce balado.
Francis : Merci beaucoup. Bonjour Don ! Bonjour David !
David : Francis, vous avez eu une carrière très intéressante, de sous-ministre au sein du gouvernement du Nouveau-Brunswick sous l’administration de Frank McKenna à PDG de Major Drilling, l’une des trois seules sociétés cotées en Bourse au Nouveau-Brunswick, et maintenant président de l’Agence de promotion économique du Canada atlantique. Parlons d’abord un peu plus en détail de votre carrière et de votre parcours. Où avez-vous amorcé votre carrière et quel a été votre cheminement pour vous retrouver là où vous êtes aujourd’hui?
Francis : J’ai fait des études à l’Université Dalhousie, puis je suis allé à l’université en France et j’ai finalement étudié à la Johns Hopkins School of Advanced International Studies, là où la plupart des étudiants s’inscrivent en commerce bancaire international. J’ai commencé à travailler dans une banque où j’ai appris tout ce que je sais sur les calculs financiers, etc., ce qui n’est pas tant que cela. Par la suite, je suis allé travailler au Conseil des premiers ministres des Maritimes. C’était la première fois que je participais vraiment à ce que j’appellerais la théorie du développement régional. Des gens comme Tom Kent. Il y avait un comité formé de personnes comme Tom Kent, Eldon Thompson et d’autres qui étudiait la région et ce qui pouvait être fait.
Par la suite, je suis allé travailler pour le compte de NBTel. Ce n’était pas un milieu qui me convenait vraiment. Je suis finalement allé travailler à Ottawa pendant quatre ans dans le domaine de l’emploi et de l’immigration, puis du transport. Dans le secteur des transports, je devais travailler avec tous les principaux organismes d’État : Air Canada, CN, Via Rail… Mais je travaillais beaucoup dans le domaine du développement communautaire quand j’étais au ministère de l’Emploi et de l’Immigration. Parmi les personnes qui se trouvaient à Ottawa en même temps que moi, il y avait Don Savoie. Don Savoie et moi-même sommes devenus amis alors que nous étions adjoints politiques sur la Colline. Il était évident que nous nous intéressions grandement tous les deux au développement régional, à l’économie de la région de l’Atlantique et à d’autres questions. Par la suite, je suis allé travailler au CN pendant un certain temps, et j’ai ensuite été recruté par Frank McKenna alors que j’étais leader de l’opposition. J’ai commencé à travailler avec lui deux ans avant qu’il ne forme son gouvernement, puis pendant une décennie alors qu’il était au pouvoir. J’ai quitté peu après le départ de Frank. J’ai travaillé pour le compte d’une société de TI qui connaissait une très forte croissance. En réalité, je crois que le magazine The Atlantic l’avait cotée comme étant la société qui connaissait la croissance la plus impressionnante. À partir de ce moment, quand les firmes de télécommunications ont fusionné, c’était évident que, euh, certaines personnes allaient devoir partir. Je suis donc allé voir Frank. J’ai dit : « Frank, je crois que mon tour est probablement venu. » Il a répondu : « Écoute, nous cherchons un PDG pour une société du nom de Major Drilling, serais-tu intéressé? » J’ai dit : « Frank, Frank, je ne connais rien au sujet du forage. » Il a répondu : « Francis, vous ne connaissez rien aux centres d’appels, au tourisme ou aux entreprises. Quel est votre problème? » Bon point !
Je suis donc allé travailler à Major Drilling pendant 15 ans, et nous avons transformé cette société qui valait 100 000 000 $ en une société de 800 000 000 $. C’est encore aujourd’hui la deuxième plus importante société de forage au monde. Fait encore plus important à noter, car quelqu’un m’a demandé si je voulais que l’entreprise devienne la plus grosse, j’ai répondu par la négative. J’ai dit : « Nous voulons qu’elle devienne la plus rentable ». J’ai travaillé là pendant 15 ans, puis j’ai pris ma retraite. Principalement en raison des voyages autour du monde. La moitié du temps, j’étais sur un autre continent, alors cela m’a épuisé, et j’ai pris ma retraite. Et puis on m’a parlé de revenir à l’APECA. Cela venait en partie de Scott Bryson. Il a probablement été la première personne à exercer des pressions à mon endroit; ensuite, Don Savoie a fait de même, et finalement Frank McKenna. Alors, j’ai fini par dire : « Pourquoi pas? » C’était en 2017. Et me voilà aujourd’hui.
Don : Francis, nous aimerions en apprendre davantage au sujet de vos fonctions de PDG de Major Drilling. C’est une histoire très intéressante, surtout évidemment en ce qui a trait au rendement de la société de 2000 à 2015, alors que l’entreprise a connu une croissance considérable, comme vous l’avez indiqué, et est devenue la deuxième plus importante entreprise de forage minier au monde. Et tout cela à partir d’un siège social se trouvant à Moncton. Pouvez-vous nous parler des stratégies qui ont mené à la croissance phénoménale de Major Drilling et à sa réussite?
Francis : Je donne beaucoup de… je ne sais pas ce que vous appelez des conférences ou des exposés… devant des groupes au Wallace McCain Institute. Je leur explique la façon dont je vois les entreprises et je leur donne des exemples. En gros, ce sont mes prémisses. Je les tiens d’un prophète à Queen’s du nom de Ken Wong. Il existe seulement trois stratégies d’affaires au monde. Point final. Il vous suffit de trouver laquelle vous convient. L’une des stratégies consiste à être le moins cher. Vous comprendrez qu’une telle stratégie entraîne toutes sortes de conséquences. Prenons Walmart par exemple. La stratégie la plus difficile est celle qui se fonde sur la valeur. La valeur signifie que vous allez demander le même prix que votre concurrent, mais en offrant un petit quelque chose de plus, de différent, etc. Cela s’avère difficile. Sinon, vous devez démontrer que vous êtes unique.
Quand je suis arrivé chez Major Drilling, nous étions pratiquement sur le bord de la faillite. La banque nous avait placés dans les comptes spéciaux. Il y avait certaines choses que nous ne pouvions pas faire, mais j’ai remarqué que nous étions en concurrence avec tous les petits commerces familiaux au monde. C’était pendant un cycle à la baisse. Nous subissions de grandes pertes. Mais j’avais observé que, de temps en temps, on entendait un cadre dire : « Si j’achetais telle machine à 1 000 000 $, je pourrais décrocher cet excellent contrat qui nous procurerait une bonne marge. » Je me suis demandé de quoi on parlait. J’ai alors fait des vérifications et vous savez, au Chili, oui c’est peut-être en haute altitude, dans la zone arctique, il y a le forage glaciaire, puis j’ai réalisé que, eh bien, vous savez, tous ces éléments créent des entraves à l’accès et que, s’il y a des entraves à l’accès, vous pouvez créer quelque chose d’unique. C’est alors que nous avons vendu le concept de forage spécialisé. Quand nous avons procédé ainsi, personne dans l’industrie ne savait ce que c’était, et tous nos concurrents croyaient que nous étions fous. Ils ignoraient de quoi nous parlions, mais le marché des investissements a beaucoup aimé l’idée et l’a surtout comprise. Nous nous sommes donc concentrés sur le forage spécialisé et avons décidé que nous allions dominer cette part de l’industrie. Ce n’était pas pour être le plus gros de l’industrie ou quelque chose du genre, mais nous allions devenir le joueur le plus important parce que c’est le domaine où nous avons vraiment un contrôle sur les prix.
Nous avons forgé des trous d’une profondeur de trois kilomètres dans le désert de Gobi. Il existe seulement deux foreuses au monde qui peuvent faire de tels trous. Les deux nous appartiennent. Par conséquent, vous allez devoir payer si vous en avez besoin. Vous savez, nous avons dû composer avec tout un problème de culture et enseigner à nos cadres à ne pas avoir peur d’imposer des frais élevés pour des travaux de forage spécialisé. De nos jours, nous sommes toujours… vous savez, le forage spécialisé, à son sommet, aurait représenté 70 % de nos activités.... Quand nous parlons de forage souterrain ou seulement de forage traditionnel, vous devez comprendre… Eh bien, je ne peux faire ceci… Nous devons former notre monde en fonction de deux stratégies fondamentales. Premièrement, le caractère unique, c’est le prix que vous pouvez demander. Si vous êtes plutôt dans, vous savez, la compétitivité des prix, eh bien, tout ce que vous devez faire est de battre les autres prix et d’apporter une valeur ajoutée. La valeur ajoutée que nous apportions se composait en grande partie de petites choses, comme des stocks supplémentaires sur place, des normes de sécurité vraiment élevées. Les clients obtenaient tous ces extras au même prix.
Nous avions même fait ajouter sur les manches de nos cadres : V=QR2. Vous savez.... Valeur égale quantité, fiabilité, j’oublie ce qu’était l’autre élément, mais c’est une histoire d’endoctrinement d’une certaine façon. Vous apprenez quand vous.... Et cela aurait été vrai, c’est vrai pour l’APECA aujourd’hui. Il faut souvent changer la façon de penser, la mentalité et la façon de faire les choses des gens et, quand vous décidez de faire cela, vous devez répéter, répéter, répéter, répéter, jusqu’à ce que vous ne soyez plus capable de vous entendre. Et cela m’arrive souvent.
David : Quand j’y repense, c’était une stratégie que vous utilisiez également quand vous étiez à l’emploi du gouvernement provincial.
Entre parenthèses Francis, Don et moi-même aimerions vraiment comprendre pourquoi on compte si peu de sociétés cotées en Bourse qui sont établies au Nouveau-Brunswick. Savez-vous pourquoi cela semble si difficile ou pourquoi il n’y a pas plus d’entreprises qui deviennent assez grosses pour décider de lancer un premier appel public à l’épargne et s’inscrire en Bourse? Ou savez-vous pourquoi elles ne le font pas?
Francis : Quand vous vous inscrivez en Bourse, ce que le marché veut vraiment savoir, vous savez les banquiers, etc., c’est si vous allez poursuivre vos activités. Vous devez présenter un besoin continu d’investissement sinon le marché va vous oublier. Les investisseurs pourraient conclure une affaire avec vous, puis une fois l’affaire réglée, vous laissez croupir pour toujours. Si vous pensez sur 10 ans… Ce que je dis aux gens… Je leur demande : si vous avez un horizon de 10 ans, pendant lequel vous savez que vous aurez besoin d’encore plus de capitaux au cours de chacune des trois prochaines années, donc pour les 10 prochaines années, mais tous les trois ans, c’est ce que vous devez faire. Voilà une raison de s’inscrire en Bourse. C’est pour être capable d’amasser, pas sur une base continue, mais au moins une série de hausses. Sinon, le marché vous oubliera. Vous pouvez, vous savez… il y a peut-être un truc… Il y a quelques entreprises qui réfléchissent sérieusement et se disent : « Je vais continuer à me constituer un capital ou à donner des liquidités ou autres choses pour réaliser cela. » À moins de procéder ainsi, alors ne vous inscrivez pas en Bourse. C’est très coûteux et occupera environ 30 % du temps du PDG.
Quand je travaillais à Major Drilling, c’était pour toute l’Amérique du Nord. Je devais me rendre à Paris et à Londres, pauvre moi, entre autres pour rencontrer des actionnaires sans préavis. Pour ce qui est des compétences dont vous avez besoin, ce sont en partie des histoires, vous savez. Il faut avoir de bons arguments pour intéresser les gens, et les nôtres tournaient autour du fait que nous étions spécialisés. Voici pourquoi, voici comment, voici ce que nous faisons et voici les résultats. Notre présentation était solide. Il y a deux volets : se préparer à consacrer 30 % de son temps au marché; avoir continuellement besoin de mobiliser des capitaux. La plupart des personnes et la plupart des entreprises ici n’ont pas autant de capitaux ou ne pensent pas qu’elles en ont besoin. Certaines d’entre elles le pensent, mais elles ont été capables de s’en tirer sans s’inscrire en Bourse; elles ont plutôt opté principalement pour le marché des obligations.
David : Francis, quand j’ai travaillé brièvement pour vous, alors que vous étiez à la tête du ministère du Développement économique et du Tourisme au milieu des années 1990, vous aviez une vision assez claire à l’époque de la direction que vous vouliez donner à ce ministère. Je me souviens très bien d’une réunion de tout le personnel où vous aviez fustigé tous ceux qui utilisaient le terme « pitcher province ». Un certain nombre de personnes, comme McKenna et Savoie, vous avaient encouragé à accepter le poste à l’APECA. Mais quelle était votre vision? Comme si vous n’aviez pas besoin de cet emploi. Vous sortiez de la retraite. Quelle était votre vision? Pourquoi avez-vous accepté cet emploi?
Francis : Eh bien, au début, j’ai hésité parce que, quand on travaille dans la fonction publique fédérale, les choses se déroulent parfois lentement et, vous savez, cela me faisait vraiment peur. Finalement, cela n’a pas vraiment été un problème, mais c’était ce que je craignais et c’était ce qui me faisait hésiter. Frank avait l’habitude de dire qu’il en était de son obligation morale d’accepter cet emploi. J’ai réduit mon salaire d’un tiers également quand j’ai accepté le poste. Mon épouse m’a dit : « Oh, tu sais, la plupart des gens cherchent à augmenter leur salaire, pas à le diminuer. » Mais, peu importe, c’est ce que j’ai fait.
J’avais une vision très claire à mon arrivée. La toute première journée, nous avons notamment réuni tous les employés virtuellement. J’ai dit qu’il y avait deux choses qui allaient faire progresser la réalisation de notre programme. Premièrement, il y a l’effectif et ce que nous allons faire à ce sujet; deuxièmement, il y a l’automatisation et la numérisation, et ce que nous allons faire à ce propos. C’est l’avenir. De plus, on est d’avis à l’APECA que tout problème économique au Canada atlantique est notre problème. Nous ne sommes peut-être pas capables de gérer le problème avec nos propres budgets et nos propres programmes, mais nous devons faire du lobbyisme auprès d’autres ministères fédéraux et d’autres intervenants pour les sensibiliser. Cela nous mène à des orientations entièrement nouvelles avec lesquelles l’APECA n’avait jamais travaillé, y compris l’immigration.
Je sais que le cabinet Jupia a réalisé des travaux que nous avions financés au Nouveau-Brunswick et d’autres choses, mais cela ne s’était jamais produit avant. Cela nous indique qu’une partie de notre solution doit provenir de l’immigration et que nous devons donc nous lancer dans les affaires entourant l’établissement et commencer à travailler avec un groupe social. Par ailleurs, bon nombre de nos programmes ont commencé avec ce que nous pouvons accomplir pour que les compétences servent à arranger les choses et, tout d’un coup, nous nous retrouvions à financer beaucoup plus d’universités et de collèges communautaires parce que nous avons besoin d’un flux de production. Cette impression que tout, dans la présente décennie, pas la décennie dans laquelle nous étions David, tourne autour des pénuries de travailleurs et des moyens de les régler.
Vous avez poussé la chose un peu plus loin en disant que, si nous nous concentrons sur la création d’emplois à 15 dollars de l’heure, nous n’allons aller nulle part. Vous avez parlé du PIB et d’autres aspects et du fait que nous devons nous concentrer sur des emplois qui commencent à 50, 60, 70 000 $. Vous avez commencé à réfléchir aux endroits où se trouvent de telles possibilités. Nous avons commencé… Je crois qu’il serait plus juste de dire que cela avait commencé avant mon arrivée… Entre autres, l’APECA recevait les idées d’entrepreneurs et les aidait quand même avec un certain succès. Par contre, nous n’utilisions jamais de méthodes trop énergiques en disant des trucs du genre : « Voici des domaines auxquels nous allons nous attaquer, pour lesquels nous allons faire de la promotion et auxquels nous allons obliger les gens à participer. » On parle notamment d’éléments que j’appelle des dossiers prioritaires. Nous nous sommes organisés en fonction de ces éléments, et cela englobe l’automatisation. Il y a eu une légère baisse depuis la COVID, mais cela représente la moitié de ce que nous faisions à la fin. Nous avons consacré du temps à la formation de notre personnel dans le domaine de l’automatisation. Nous tenions des séminaires de quatre jours pour notre personnel, il faut bien comprendre, il faut faire de la promotion. Nous avons commencé par essayer de comprendre les entrepreneurs et par nous assurer qu’ils étaient compris, mais ils étaient effrayés, vous savez, en grande partie parce qu’ils n’avaient jamais fait cela auparavant. Nous avons commencé par dire : « Eh bien, nous allons d’abord vous donner une subvention de 50 000 $ pour planifier tout cela. N’achetez rien. Ne faites rien. Il vous suffit de réunir des gens qui comprennent, car il s’agira d’une aventure qui durera cinq ans. » Comment faire pour mettre les gens à l’aise, puis les motiver, puis, vous savez, les financer, etc. C’était un aspect. L’immigration est un autre aspect.
De nos jours, nous poussons très fort dans le secteur des océans, car tout ce qui touche la technologie océanique est de la haute technologie. L’idée, et c’est ce qui vient me chercher, c’est d’avoir une image de la province. Oh et il y avait une autre image. Tout le monde a en tête Peggy’s Cove quand il pense à nous. Cela me rend… Nous faisons la promotion du tourisme… Mais Seigneur ! Seigneur, c’est que… Parce que vous savez, qu’il s’agisse de robotique, d’IA, tout cela fait partie des technologies océaniques. Elles sont très… et tous ceux qui viennent de finir leurs études commencent à des salaires de 60, 70, 80 000 $. C’est le genre d’emplois que nous devons créer.
Il y a aussi le secteur alimentaire. Croyez-le ou non, j’ignorais tout cela jusqu’à ce que soit mise en place la Stratégie de croissance pour l’Atlantique et que le premier ministre nous informe que nous avions besoin d’une stratégie alimentaire. Tous les intervenants se sont assis autour de la table. C’était ma première réunion en passant. Personne n’a levé la main. Alors j’ai dit que l’APECA allait en créer une. Nous avons fait des démarches et avons parlé à 75 personnes de l’industrie alimentaire. Lorsque l’on examine le secteur alimentaire qui va des bleuets au poisson en passant par les pommes de terre, etc., on constate que c’est le plus important secteur industriel du Canada atlantique. Ce secteur touche tout le monde de différentes façons, mais également, tout le monde ici. C’est une industrie principalement rurale. Donc vous pouvez cocher toutes les cases.
Quand nous avons rencontré et questionné ces 75 personnes, nous sommes restés surpris et avons passé quelques heures avec chaque personne parce que c’est dans ce temps-là que… Les gens avaient tout, à ma grande surprise, ils avaient tous les trois mêmes priorités absolues. Le numéro 1 était la pénurie de travailleurs, le numéro 2 se rapportait au fait que nous ne savions comment procéder pour l’automatisation et le numéro 3 concernait le transport par camion. J’ai dit que c’était ici que les stratégies touchant l’alimentation et l’automatisation commençaient à se chevaucher, et la moitié des activités d’automatisation que nous réalisons aujourd’hui sont liées à l’industrie alimentaire. À l’heure actuelle, qu’il s’agisse de homards, de pommes de terre, d’autres aliments et de la mise en sac de tous ces produits… Tout cela va s’améliorer et joue un rôle nécessaire dans l’amélioration de la productivité et aussi dans l’augmentation graduelle des exportations. Tout cela est très clair. Nous venons de mener une analyse auprès de gens que nous avons aidés pour voir si leurs ventes ont connu une croissance, et si cette croissance est majeure, parce que si vous décrochez une commande et que vous devez engager 20 personnes pour exécuter cette commande aujourd’hui, vous n’y arriverez jamais. Vous ne trouverez pas 20 personnes. Si je dois acheter un autre robot, oui d’accord, j’aurai peut-être un délai de six mois, mais je peux le faire.
Le fait de réaliser une augmentation graduelle fait partie, je crois, de ma vision pour ce qui est de ce que nous accomplissons aujourd’hui. En effet, si je possède une entreprise qui vaut 20 000 000 $, je dois la transformer en une entreprise qui vaut 40 000 000 $. Je pourrais probablement compter sur quelques employés de plus. Donc, la mesure que nous avions tendance à utiliser pour de bonnes raisons dans les années 1990 était la création d’emplois. Vous savez, tout emploi était un bon emploi. Aujourd’hui, c’est plutôt la création des richesses, le profit et la productivité. C’est ce qui compte, et c’est ce qui représente l’avenir. Nous ne compterons peut-être pas un plus grand nombre d’entreprises, mais, si tout le monde connaît une croissance de 50 %, là nous réussirons à rattraper le reste du Canada. Nous ne pouvons le faire que par l’automatisation; la numérisation devient un élément clé.
Les entreprises en démarrage forment un autre secteur sur lequel nous nous sommes vraiment concentrés depuis que je suis en poste. Que ce soit dans le secteur des biotechnologies comme nous l’avons vu… Vous savez, Verafin… Les gens ont tendance à oublier qu’il s’agit de la plus grosse opération capital-risque jamais conclue au Canada, mais, puisqu’elle a eu lieu à St. John’s, Terre-Neuve, on a à peine parlé de cette affaire, puis tout le monde a oublié, à part les Terre-Neuviens. Les gens misent là-dessus, ils comprennent, et cela encourage davantage de gens à se lancer dans le domaine des TI et des entreprises en démarrage. Et il y en a des tonnes. Qu’il s’agisse des sciences de la vie ou des TI, il y a tout un monde. Ici David, vous comprendrez pourquoi cela cadre avec le marché du travail et pourquoi nous finançons beaucoup d’entreprises. Certaines connaissent un énorme succès. Certaines, moins, et ce seront les éclopées de la prochaine décennie. Certaines échouent également. Si vous êtes une banque ou une société de capital-risque, les échecs font partie de… vous savez… c’est ainsi que l’industrie fonctionne. Si vous êtes une agence de développement, c’est un peu différent. Si vous pouvez aller chercher quatre, cinq, six jeunes qui travaillent pour le compte d’une entreprise depuis trois ans et que cela ne se passe pas bien, avec un peu de chance, ils se sont peut-être mariés, ont acheté une maison, n’ont pas les moyens d’aller à Waterloo ou à Toronto. Maintenant, ils sont pris ici et ils seront prêts à travailler pour quelqu’un d’autre. Cet aspect devient important.
Je pense ici à une entreprise de Fredericton qui engage rapidement des gens. Cette entreprise a connu un échec. Elle a été lancée à nouveau. À l’heure actuelle, l’employé moyen gagne plus de 100 000 $ par année. L’entreprise compte environ 60 employés, et ces gens habitent à Fredericton. C’est le genre de création de richesses dont nous avons besoin ici. C’est à cela que nous travaillons. À quoi d’autre travaillons-nous? Vous savez, nous faisons beaucoup de lobbyisme auprès d’autres ministères.
En ce qui a trait à l’immigration, nous travaillons en étroite collaboration avec Immigration Canada, ce que nous n’avions jamais fait auparavant. Nous travaillons avec le ministère de la Défense à des activités d’approvisionnement. Je crois que Marshall a annoncé, il y a un certain temps, la construction d’une usine de 60 000 000 $ grâce au volet des approvisionnements. Nous avons travaillé en étroite collaboration avec le MDN pour exercer des pressions dans ces dossiers. Pour ce qui est du ministère de l’Industrie, le plus gros investissement sur l’île a été fait dans la société Biovectra et est le fruit de deux ans de travail. L’histoire des PRM et tout le reste, dont le financement provient de RNCan ou ISDE, on y travaille à l’interne, on y travaille avec les promoteurs. Les activités de lobbyisme en font partie également.
Peu importe… ce sont le genre de choses, mais je devrais dire du point de vue organisationnel, tout cela revient au moment de mon arrivée. Ce serait juste de dire que l’APECA fonctionnait en quatre silos distincts : le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, l’Î.-P.-É. et Terre-Neuve. Il y avait très peu d’échanges. En créant ces dossiers prioritaires, nous avons formé des équipes régionales. C’est ce que j’appelle aussi le point rouge dans le front d’une personne. Je dirais au v.-p. au Nouveau-Brunswick : « Vous avez un point rouge directement dans le front; si ça ne se passe pas bien, je vous en tiendrai responsable, et je me fiche de ce qui se passe avec les autres v.-p. » Présentement, chaque v.-p. a un point rouge pour qu’il n’aide pas les autres, et cela fonctionne à merveille. Il y a une orientation claire parmi les v.-p. Les gens, les autres veulent suivre, car ils comprennent pourquoi c’est important. Ils se sont ralliés complètement, mais ils ont notamment des gens sur leur feuille de paye qui y travaillent, mais dont ils ne contrôlent plus les activités quotidiennes. C’est un autre v.-p. qui le fait. Parce que tout le monde, comme je l’ai dit, comme le gars sur l’Île, notre v.-p., il est responsable du dossier de l’alimentation. Il doit s’assurer que ce dossier progresse. Il va donc coopérer. Cela a très bien fonctionné. On a observé une plus grande intégration de cette façon dans ces dossiers que ce que je croyais. Espérons que d’autres personnes pourront faire progresser les choses, et progresser signifie créer des richesses. Beaucoup plus de gens, et je parle de milliers de gens, vous savez, les petits chiffres ne comptent pas, des milliers de gens qui pourraient gagner 60, 70, 80 000 dès le départ.
Don : L’APECA offre divers programmes de soutien financier pour différentes raisons, y compris le Fonds d’aide au tourisme, qui a été créé par le gouvernement fédéral et qui fournira un investissement de 500 000 000 $ à des organismes de tourisme au cours des deux prochaines années. L’APECA gère ce fonds dans la région ainsi que le Fonds pour l’emploi et la croissance, qui représente un autre montant de 700 000 000 $ que le gouvernement fédéral a mis de côté pour les trois prochaines années. Ce fonds est également administré dans la région par l’APECA. Pouvez-vous nous donner un simple aperçu ou quelques exemples de la façon dont ces fonds seront utilisés dans notre région?
Francis : Dans l’ensemble, ils seront utilisés comme nous les avons toujours utilisés. À certains égards, ce n’est pas différent. Je crois que le point important c’est que, en règle générale, notre budget est d’environ 350 000 000 $. L’année dernière, celle qui vient tout juste de se terminer, le budget est monté à 550 000 000 $. Il va commencer à redescendre cette année et l’an prochain à environ 450. Nous sommes donc un peu sur une pente descendante. Nous rencontrons continuellement des gens qui disent ne pas examiner nos programmes parce qu’ils les comprennent à peine. Venez ici et parlez-nous de votre problème. Quel défi devez-vous relever? Bon nombre d’entre eux ont été utilisés de différentes façons au fil du temps alors nous sommes passés par tout de… prenons l’aquaculture. Comment aidons-nous nos clients à progresser... Pour commencer, nous avions l’impression que tout allait s’effondrer pendant les trois premiers mois. Donc c’était la panique. Dans le genre : Oh… Qu’allons-nous faire pour vous garder la tête hors de l’eau? Et puis.... Oh… Grosse transition entre la restauration et le commerce de détail, mais qu’est-ce que cela signifie? Cela signifie que, tout d’un coup, j’ai besoin de nouveau matériel d’emballage, de nouveaux procédés de transformation, mais surtout de nouveau matériel d’emballage, etc. Dans d’autres cas, j’ai besoin notamment d’une plus grande capacité de congélation pour réaliser certaines activités. Au lieu de dire « Eh bien, nous allons simplement vous donner une subvention pour que vous puissiez payer des gens afin qu’ils demeurent au sein de votre entreprise », nous allons plutôt investir ces sommes afin que vous puissiez passer de l’autre côté, là où vous tirerez des avantages permanents. Vous savez ce qui se passera lorsque l’on se sortira de la crise liée à COVID, ou pas, et si les restaurants rouvrent au maximum de leur capacité… Ils ont repris leurs activités à court terme, mais que va-t-il se passer... Au moins, maintenant, nous avons une certaine diversification. C’est ce que nous avons fait.
L’an passé, dans le cas des exploitants d’entreprises touristiques, ce dont ils avaient besoin, c’était simplement des subventions. Alors, ils voulaient l’allègement du loyer, ils voulaient la subvention pour les salaires. Ils veulent encore avoir des subventions. Le nouveau programme qui a tout juste été adopté la semaine passée en offre, mais impose des examens rigoureux. Toutefois, en raison du rôle que nous jouons, nous avons remarqué un véritable changement dans l’industrie touristique en raison des séjours touristiques et dans ce que j’appelle l’économie active ou le tourisme actif. Bon nombre des exploitants ont connu quelques années difficiles. Et n’ont pas récolté beaucoup d’argent. Ils ne peuvent retourner voir leur banque. Vous savez, leurs dettes ont déjà augmenté. Ils ne possèdent pas l’argent pour se permettre de se dire : « Vous savez, je vais créer un projet de cyclisme, mais, pour y parvenir, j’ai besoin de 10 000 $. Je ne fais pas beaucoup de vélo, mais je dois acheter pour 20 000 $ d’équipement de vélo. J’ai besoin d’un tel inventaire. J’ai besoin de pneus, etc. Où est-ce que je vais aller chercher les 40 ou 50 000 dollars pour faire ça? »
Du côté de l’industrie touristique, même si nous pouvons offrir des liquidités si nous le désirons, nous voulons vraiment nous concentrer sur comment procéder pour que les gens fassent la transition eux-mêmes. Vous savez ce que le marché leur dit : vous avez eu de la difficulté à vous adapter. Laissez-nous maintenant les aider à s’adapter. Ce pourrait être, par exemple, un hôtel qui se dit : « Je suis le bord d’une rivière, j’ai un projet de canotage, je vais engager quelques jeunes pour organiser des tours guidés et d’autres activités, mais j’ai besoin de canots, et je suis un peu à court d’argent. » C’est le genre de choses que nous souhaitons encourager. Une fois de plus, nous sommes capables de fournir des liquidités, c’est-à-dire simplement leur permettre de rester en vie, mais nous visons aussi la viabilité, vous savez. Malheureusement, certaines personnes ne s’en tireront pas. Vous savez, c’est important de stimuler l’économie, que ce soit dans le secteur touristique ou dans d’autres secteurs, dans l’avenir. Si vous ne partagez pas ce point de vue, alors vous continuerez de travailler à l’ancienne. Je vais simplement vous remettre l’argent, que vous allez probablement perdre, et vous ne retirerez rien de tout cela… peu importe.
David : Francis, cela nous amène à notre question sur les paramètres. C’est un gros problème de nos jours si vous prenez l’économie dans son ensemble, en particulier au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse. Il y a environ une décennie, alors que la croissance de la population était presque nulle, tout comme la croissance du PIB et que la population active diminuait en fait, il ne semblait pas y avoir une grande levée de boucliers de la part des agences de développement économique. Les gens à l’APECA vous diraient que les entreprises avec lesquelles nous travaillons se portent bien. Les gens chez ONB disaient que les projets auxquels ils travaillaient se déroulaient bien, mais il n’y avait pas, de façon générale, un genre de connexion entre les agences de développement économique et l’économie dans son ensemble. J’ai bien aimé ce que vous avez dit plus tôt, soit que « tout problème devient notre problème », parce que cela vous permet à l’APECA de réfléchir à l’économie plus générale, à des éléments comme l’immigration, etc. Je crois que la question que je veux vous poser c’est… Quels sont les paramètres que vous utilisez présentement à l’APECA pour vous indiquer si vous êtes sur la voie de la réussite ou pas en ce qui a trait à l’utilisation de ces fonds et à la réalisation des initiatives que vous entreprenez?
Francis : Tout revient essentiellement à une nouvelle mesure dont les gens ne disposaient pas auparavant, soit la qualité des emplois, vous savez. Nous voulons nous sortir du problème qu’est le PIB insuffisant, etc. Vous pouvez créer des milliers et des milliers d’emplois à 15 dollars de l’heure. Ce sont des emplois précieux. Les gens doivent le faire. Il y a une grande dignité qui est associée à ces emplois, mais cela ne contribuera pas à améliorer la vue d’ensemble. Cette vue d’ensemble macroéconomique, c’est la création des richesses. On parle de ces personnes-là. En passant, les gens qui gagnent 100, 120 000, ce sont eux qui font rouler les restaurants. Ce sont eux qui font rouler les affaires des nettoyeurs à sec. Ils font rouler toute cette économie, vous savez. Il y a une limite à ce que l’on peut faire. Comme je l’ai dit, les seules limites que nous avons, ce sont des limites budgétaires. Et maintenant, comment pouvons-nous nous concentrer sur la partie la plus intéressante de la croissance et du développement? Mais nous nous attaquons à des dossiers comme, vous savez, l’immigration. Eh bien maintenant, l’immigration, le principal problème est le logement. Nous amorçons ainsi une réflexion en nous disant : « Ok, que pouvons-nous faire à propos du logement, et surtout du logement en milieu rural? » Vous savez, il y a évidemment des problèmes dans les villes, mais le marché est assez actif. Le marché ne fonctionne pas aussi bien dans les collectivités rurales, et c’est là qu’il faut intervenir en quelque sorte, vous savez.
En collaboration avec notre nouveau ministre, nous nous demandons ce que nous pourrions faire. Ce sera minime, mais, parfois, si nous pouvions diriger ou rallier d’autres ministères afin que nous nous concentrions réellement et un peu mieux… Je crois que ce serait juste de dire que, au Canada, le gouvernement du Canada et les provinces se penchent davantage sur le problème du logement en milieu urbain. Ce sont des synonymes. Ils oublient le problème de logement en milieu rural; de plus, il y a l’incapacité à attirer des immigrants. Je ne sais pas combien d’entreprises, je peux en nommer une douzaine, ont de la difficulté à faire venir des immigrants, et ce n’est pas à cause du recrutement, ni parce qu’ils ne peuvent les joindre, mais plutôt parce que, une fois ici, ces gens ne trouvent pas de logement à un coût raisonnable. Si on ne règle pas ce problème, on ne pourra pas aller chercher d’immigrants, on n’augmentera pas la population. Parfois, on dirait que l’on fait un pas en arrière. Ensuite, il faut aller de l’avant et se dire : « Ok, que pouvons-nous faire? ». Vous savez, nous espérons certainement que, au cours de la nouvelle année, nous aurons quelques bonnes nouvelles qui nous seront d’une certaine aide.
Cela concerne la macroéconomique. Donc, ce que nous mesurons, vous savez, c’est la masse salariale, s’il y a une bonne masse salariale et, en passant, quand vous automatisez une installation, vous payez normalement mieux vos employés. Vous avez besoin d’un diplôme d’un collège communautaire, vous avez besoin d’une formation en vue d’un avancement ou peut-être pas… Ce pourrait-être un cours de six semaines, vous savez. Quand ils font cela, il faut les payer davantage, car si vous ne le faites pas, vous allez les perdre en un clin d’œil. Je crois que tout cela, vous savez, c’est un genre de cercle vicieux.
David : Francis, nous avons reçu Donald Savoie il y a quelques semaines. Il semblait croire qu’il faudrait mettre davantage l’accent sur les régions rurales du Canada atlantique. Autrement dit, il soutenait que Moncton se porte bien, Halifax se porte bien, Fredericton se porte bien et que les efforts en matière de développement économique devraient être axés sur les centres urbains plus petits et les régions rurales. Il suggérait même, peut-être de façon un peu ironique, que les bureaux de l’APECA ou les agences de développement économique devraient déménager et se concentrer davantage sur ces secteurs ruraux. A-t-il raison? Que pensez-vous de ce genre d’écart croissant qui existe entre les centres urbains florissants, comme Charlottetown, et les secteurs qui connaissent plus de difficultés, comme le comté de Prince à l’Île-du-Prince-Édouard?
Francis : La présence initiale est très importante. Nous comptons 31 bureaux dans l’ensemble du Canada atlantique. Nous sommes donc présents dans de nombreuses petites collectivités également. Nous sommes là… Je dirais que plus de la moitié de nos activités se déroulent dans des régions rurales du Canada atlantique. Certains dossiers, comme le dossier alimentaire, sont, par définition, de nature rurale. Don et moi-même, nous nous sommes parlé. Il croit que le secteur alimentaire devrait s’y retrouver. J’ai dit « oui ». Nous nous sommes mis d’accord. Nous y travaillons depuis trois ou quatre ans. Les problèmes tournent autour de l’automatisation. Et il y a maintenant le problème du logement qui s’en vient. Il y a beaucoup de travail qui se fait, mais je ne laisserais pas tomber les villes non plus. Cela dépend de ce qu’on appelle une ville aussi. David, vous êtes d’accord avec moi pour dire que la définition d’une ville ne s’arrête pas aux limites de la ville. Ce que je veux dire, si Saint John est une ville, alors Grand Bay en est une aussi. Tout cela forme l’unité économique. Et les gens qui vivent à mi-chemin vers Norton, ils font aussi souvent partie de l’unité économique. Je suis d’accord pour dire qu’il y a beaucoup à faire. Je ne crois pas que ça peut être seulement les océans par exemple. C’est souvent de nature beaucoup plus rurale. C’est de la haute technologie, c’est très exigeant en capitaux, mais c’est de nature rurale.
Ce que je veux dire, si vous prenez l’aquaculture, rien de tout cela ne se déroule au centre-ville d’Halifax ou de Saint John, mais ces activités présentent un énorme potentiel de croissance, et c’est de la haute technologie. Il faut savoir… On oublie parfois que certains de ces filets ont une hauteur de 10 étages - ce sont des structures vraiment énormes, et vous vous dites : « Bon, comment allons-nous les nettoyer? Ah, il y a l’option des robots. C’est intéressant. » Ils ont des robots qu’ils contrôlent depuis la rive, ce qui, en passant, a permis à beaucoup plus de femmes de travailler en aquaculture que par le passé. Cela est particulièrement intéressant, n’est-ce pas? Je sais que bon nombre d’entreprises ne comptaient aucune femme parce que les femmes ne voulaient pas se retrouver sur un bateau pendant cinq jours avec un groupe de gars, disons-le en toute franchise. Oh… Si je pouvais travailler, même si c’était sur des quarts de travail, depuis le rivage, dans un bureau bien au chaud, et que je contrôlerais de tels robots, puis que je rentrais à la maison pour être avec mes enfants et faire peu importe ce que j’ai à faire, eh bien, les employés peuvent. Tout d’un coup, la technologie arrive dans un milieu rural, mais ils pourraient contrôler tout cela depuis la ville de Saint John ou le faire depuis St. George. Cela importe peu, tant qu’ils sont connectés, alors maintenant la connectivité devient un problème, vous savez. Vous voyez cette évolution… Ces opérateurs de robots, ils ne sont pas payés 15 dollars de l’heure parce que, s’ils causent la perte d’un robot qui vaut 500 000 $ ou qu’ils déchirent en morceaux un filet, cela va coûter très cher. Ce sont donc des emplois qui viennent avec de grandes responsabilités. Pensez seulement à toutes les aptitudes en communication. Il doit y avoir des communications, des technologues qui s’occupent de la connectivité. Mais, une fois de plus, ce genre d’emploi ne commence pas à 20 dollars de l’heure, mais plutôt à 40 dollars de l’heure. C’est le genre de choses que nous devons voir.
Don : Francis, j’ai rédigé récemment une chronique pour The Brunswick News et le Saltwire qui remettait en question l’efficacité des initiatives de développement économique mises en place au Canada atlantique, alors que son économie continue de s’affaiblir, par rapport au pourcentage de l’économie canadienne, et est restée en deçà du reste du pays quant à la croissance du PIB, d’environ 1 pour cent par année, en moyenne. J’ai estimé que les divers ordres de gouvernement et les collectivités dépensaient environ 1 000 000 000 $ en activités de développement économique; malgré tout, la région continue d’offrir un rendement économique insuffisant. Pourquoi est-ce ainsi et pourquoi le Canada atlantique continue-t-il d’offrir un rendement insuffisant par rapport au reste du pays?
Francis : C’est plutôt simple, nos degrés et niveaux d’automatisation et de numérisation sont plus bas et, tant qu’ils seront inférieurs, nous ne pourrons rattraper les autres. Il faut se concentrer sur ce que nous pouvons faire, sur les aspects sur lesquels il faut miser, et cela s’est avéré difficile. Ce que je veux dire, David pourrait vous en parler, je reviens sans cesse sur les pénuries de travailleurs et la situation démographique depuis… oh… huit ans… Je vous dirais que, les quatre premières années, je me disais : « Mais personne ne voit cela? Que se passe-t-il? Pourquoi suis-je le seul à penser ainsi? » Ce que je veux dire, c’est que c’est une question de données démographiques. Il ne s’agit pas d’essayer de deviner. Ça s’en vient. Alors, il faut prendre tout cela et se demander ce que cela signifie. Ok, il y a eu l’immigration, le personnel et d’autres éléments, mais il y a aussi l’automatisation. Je n’ai jamais rencontré une personne qui est en affaires et qui dit : « Si vous n’automatisez pas, vous ne connaîtrez pas de croissance point final. Et vous ne pourrez pas accroître votre productivité et vous ne pourrez pas verser de meilleurs salaires. » Les gens disent : « Eh bien, selon vous, puis-je payer de meilleurs salaires? » En fait, quand vous augmentez la productivité, vous le pouvez. En passant, pour accroître votre productivité, vous devez payer plus parce que vous devez aller chercher ce diplômé du collège communautaire ou cet ingénieur.
J’étais chez Craig Manufacturing. Je m’excuse d’utiliser cet exemple. Ils me diraient peut-être de ne pas en parler. J’allais donc à cet endroit. Parce qu’ils n’étaient pas capables de recruter assez de soudeurs, ils s’étaient rendus aux États-Unis pour essayer de faire venir des soudeurs de première classe à Woodstock, mais c’était insuffisant. Ils ont commencé à acheter des robots pour s’occuper du soudage. Quand je suis entré, j’ai vu ces deux gars qui faisaient fonctionner les machines. Ils portaient des jeans et des vêtements avec des motifs de camouflage, etc. Ils avaient l’air détendus. Vous voyez le genre. En les voyant, une personne aurait pu se dire que c’était de vieux copains qui travaillaient ensemble, mais les deux avaient un point en commun : ils portaient un anneau de fer. Alors ce qu’il fallait faire, c’était de ne pas payer quelqu’un avec un anneau de fer 15 dollars de l’heure. Ce que je veux dire en fait… C’est un exemple de deux personnes qui gagnent un bon salaire et qui font augmenter la productivité, qui favorisent la croissance de Craig Manufacturing. C’est un exemple.
Il y a un gars à Dartmouth, ou dans cette région, Greg Hargrove. Il exploite une installation de sucre d’érable. Son installation est entièrement automatisée. Il y a de la fibre optique qui passe à travers ses arbres. Combien d’employés a-t-il? Chaque printemps, il doit en engager quelques-uns, mais, essentiellement, il compte trois employés et il exploite son entreprise depuis un centre de contrôle. Et ça se passe dans les bois ! Vous vous dites, s’ils ont pu le faire… Ou prenons les huîtres BeauSoleil; ils ont fait la même chose. Ils ont automatisé les installations. Ils ont utilisé l’IA. Certains éléments ont fonctionné; d’autres, non, vous savez. Ce n’est pas tout beau. On compte de nombreux échecs et d’autres problèmes, mais, Seigneur, on trouve les huîtres BeauSoleil partout dans le monde de nos jours. Comment est-ce possible? Eh bien, à mon avis, c’est impossible à moins d’automatiser lorsqu’il n’y a pas suffisamment de travailleurs. Si nous revenons aux études de la Banque du Canada entre autres, notre principal problème, c’est que nous ne suivons pas le rythme du reste du Canada et, pire encore, des États-Unis, en ce qui a trait à la productivité, à l’automatisation et à la numérisation. Fin de l’exposé. Désolé !
Don : J’ai soutenu qu’il y avait vraiment trop d’agences de développement économique dans la région, que leurs efforts souvent se chevauchaient ou se dédoublaient et que bon nombre d’entre elles n’avaient aucun moyen de mesurer leur rendement pour pouvoir rendre des comptes. Ce que je veux dire, je note votre argument au sujet de la nécessité de numériser et d’automatiser… Je crois que cela combiné aux difficultés que nous vivons sur le plan de la main-d’œuvre sont des points très importants, mais en même temps, vous savez. Dans quelle mesure devons-nous encore combler l’écart économique avec le reste du pays? Il faut que l’on établisse certaines mesures en fonction desquelles les agences de développement économique devraient rendre des comptes. Ne croyez-vous pas Francis? Vous savez, un minimum, si ce n’est pas la croissance de l’emploi.
Francis : Bien sûr.
Don : Ce sera, vous savez, la numérisation et l’automatisation, c’est bon, mais il y aura toujours, vous savez…
Francis : Cela fait partie de la productivité, si vous mesurez la productivité.
Don : Nous devrions au moins suivre la moyenne de la croissance économique du reste du pays, ne croyez-vous pas?
Francis : Non. Vous revenez à ce que vous pouvez faire. Donc, nous sommes de retour à l’amélioration de la productivité, et c’est ce que nous mesurons. Nous retournons voir nos clients et leur demandons : « Ok, il y a deux ans, vous avez fait X, où en êtes-vous maintenant? » Dans de tels cas, maintenant cela s’applique aux personnes à qui vous dites « Excellent ! » si vous êtes l’un de nos clients. L’une des choses que nous tentons de faire, et puis il y a ces dossiers prioritaires… Nous ne nous contentons pas de nous asseoir et d’attendre que des gens se présentent. En fait, nous avons des agents qui se promènent et qui disent : « Écoutez, vous n’aviez même pas pensé à cela. Vous voulez venir à un séminaire? Vous voulez faire ceci? Vous voulez vous lancer en affaires et nous vous aiderons financièrement? Nous ferons ce qu’il faut. » Nous sommes sur la bonne voie… David comprendrait ce que je veux dire. Vous vous souvenez du bon vieux temps; nous tentons de changer les mentalités. Il s’agit de changer la mentalité des entrepreneurs. Il faut qu’ils en viennent à se dire : « Je vais le faire. » C’est difficile. C’est effrayant. Nous le comprenons. C’est coûteux également. Cela ne fait aucun doute. Nous devons vous aider dans votre cheminement et, pour ce faire, nous devons mesurer ceci. Je dois admettre que cela n’a pas été facile de se rallier les provinces. Je me dis que l’Î.-P.-É. s’en tire vraiment bien. Ils sont assez persuasifs quand ils échangent avec nous. La société Innovacorp est également assez persuasive à cet égard. C’est difficile de s’assurer que tout le monde est sur la même longueur d’onde.
Donc, une des choses qui comptent…. Ce serait donc cela la mesure. C’est le nombre de personnes que je compte dans ces programmes de productivité. Sont-elles plus efficaces? C’est ce que nous mesurons. Combien de personnes ne sont pas encore dans ces programmes? Ça tourne autour de 30 %, soit 70 % qui ne sont pas dans les programmes. Et maintenant, nous devons nous dire : je dois changer cela avec le temps et devenir persuasif afin d’obtenir un taux de participation de 70 % et non plus de 30 %. C’est un changement de mentalité. Il faut répéter et répéter, le dire encore, motiver les gens, leur donner des incitatifs, les financer, faire ce qu’il est possible de faire pour aller les chercher.
David : Francis, nous avons parlé beaucoup aujourd’hui des pénuries de travailleurs, de l’immigration et de la croissance de la population. C’est un sujet important que soulève le balado Insights, mais vous savez, comme nous l’avons mentionné, la majorité des activités d’immigration se déroulent encore et toujours dans les grands centres urbains : Fredericton, Charlottetown, Moncton, Halifax et, dans une moindre mesure, St. John. Quel est le rôle de l’APECA à cet égard? Ce que je veux dire, je crois que vous en avez parlé un peu précédemment, mais vous avez eu un certain nombre de défis à relever dans ces plus petites collectivités. Vous avez eu des problèmes de logement. Vous avez eu des problèmes avec les services d’établissement. Vous avez eu des problèmes de maintien de l’effectif, comme vous le savez. Vous avez reçu des immigrants provenant de très loin, partout dans le monde. C’est déjà difficile pour eux de s’installer à Halifax, encore plus à Parrsboro. Quel est le rôle de l’APECA, et je suis heureux de voir que vous parlez d’un rôle parce que, selon moi, si nous revenions dix ans en arrière, vous savez, l’APECA n’évoluait pas du tout dans cette sphère. On pourrait même dire il y a cinq ans. Quel est le rôle de l’APECA pour ce qui est de s’assurer qu’elle sait si les employeurs de Parrsboro ou de Minto disposent des travailleurs dont ils ont besoin pour aller de l’avant?
Francis : Vous y êtes presque, qu’en est-il de Chipman? L’une des choses que nous avons faites à Chipman, par exemple, est de nous attaquer à la question du logement. Puisqu’ils n’avaient pas un gestionnaire de projet pour développer leur volet logement, nous avons dit : « Voilà, nous allons payer le gestionnaire de projet. » Vous savez, il n’y a pas suffisamment de ressources ni d’expertise à cet endroit. C’est de cette façon que nous avons pu aider. Nous comptons plusieurs centres, que nous finançons en fait par l’intermédiaire de nos programmes de développement communautaire, nos centres pour immigrants afin qu’ils puissent, vous savez… Il y a un gymnase et une salle… C’est un endroit où ils peuvent se réunir. Nous le faisons en collaboration, nous le faisons à Chipman. Nous accomplirons un certain nombre de choses en disant, par exemple : « Ok, que sont les centres communautaires? » Donc, nous parlons ici davantage de nos programmes communautaires. Nous avons fait ceci dans les collectivités rurales. Et non pas, vous savez, dire que nous avons une association multiculturelle pour Moncton et le YMCA de St. John, mais vous avez raison, l’enjeu principal dans ces collectivités rurales, c’est le logement. C’est pourquoi nous essayons de réfléchir ensemble, vous savez, pour déterminer ce que nous pouvons faire de plus, à part fournir un planificateur. Bien sûr, cela se passe très souvent dans une petite collectivité. La première étape qui est absolument essentielle et que tout le monde comprend est le zonage et les recherches sur les terres. Et ce dont j’ai besoin pour les infrastructures comme les égouts, etc. Je ne peux pas juste me promener comme bon me semble. Nos petites collectivités, pour de bonnes raisons, ne disposent tout simplement pas des ressources requises pour faire cela. Nous pouvons leur fournir. Il s’agit de la première étape. Nous allons tenter de voir ce que nous pouvons définir comme deuxième étape, car il y a quelque chose à faire à ce niveau-là, c’est certain. C’est la même chose avec l’immigration francophone parce que c’est une question morale; c’est également difficile dans les régions rurales. Donc, nous devions trouver des moyens d’améliorer tout cela.
Don : Encore quelques questions avant de terminer le balado, Francis. Nous avons tenté, dans nos balados, de mettre l’accent sur des segments des grappes qui ont connu du succès dans les régions afin qu’ils servent de modèles à d’autres secteurs du Canada atlantique, y compris le secteur des sciences de la vie à l’Î.-P.-É. et le secteur de l’industrie océanique autant en Nouvelle-Écosse qu’à Terre-Neuve, et la cybersécurité au Nouveau-Brunswick. Quelles sont les autres grappes dans la région qui, selon vous, offrent des possibilités sur lesquelles l’APECA pourrait se concentrer et pourraient contribuer à développer?
Francis : Parmi les premières technologies habilitantes, vous savez des domaines comme la robotique et d’autres domaines, nous avons investi dans des centres de robotique de diverses universités, l’Université de Moncton entre autres. L’IA également. Dans certains cas, on pourrait dire qu’il s’agit simplement de technologies habilitantes et non de grappes, mais elles sont requises partout. Ce que vous devez faire en partie est de vous assurer que cela existe bien et qu’il y a une croissance. Nous en avons certaines qui sont vraiment trop petites.
Quand vous regardez bien, vous savez, nous parlons d’universités qui ont doublé leur capacité en matière de science informatique en passant de 100 par année à 200 par année. C’est très bon, mais, oh, c’est nettement sous l’objectif que vous devez atteindre. Il y a d’abord les technologies habilitantes, puis nous avons des points forts et le secteur alimentaire, qui se retrouve en zone rurale, qu’il s’agisse de pommes, de pommes de terre ou d’aquaculture. Ce sont des choses que vos centres d’excellence, je ne sais pas si vous les appelleriez ainsi, mais il s’agit d’industries vraiment sophistiquées que… Vous savez… Nous parlons d’aquaculture de précision… Eh bien, c’est de la science et de la technologie. Il ne s’agit pas simplement de labourer votre potager. On parle de ce genre de choses. La génétique, par exemple, est un volet très important de la foresterie, de la culture des pommes de terre, etc. Ce sont des éléments fondamentaux. Vous savez, les grappes, elles se développent.
Il y a une sorte de grappe de TI à Fredericton, il y en a toujours eu une, elle est riche, nous la soutenons. Elle comporte un cybervolet. Vous savez, je l’ignore, il faut aller vraiment beaucoup plus loin en ce qui a trait aux océans, c’est certain, aux biotechnologies, c’est sûr. Mais vous savez, le secteur des biotechnologies tente de former 500 personnes présentement. Je crois que tout ce que nous devons faire c’est de nous concentrer sur la façon de résoudre tel ou tel problème. Ce que je veux dire, l’industrie des TI… je crois… Le Nouveau-Brunswick envisage plus de.... Évidemment, David a participé à ce dossier, mais plus de 4 000 emplois qui doivent être comblés je crois. David, vous pouvez me corriger, mais je crois que ce sera dans 4 ou 5 ans. Ce que je veux dire, où allons-nous trouver ces gens? Je crois que ce ne sera pas trop difficile de trouver un autre défi à relever. Il y a beaucoup de défis présentement que nous ne parvenons pas à relever. Nous devons vraiment nous concentrer sur ceux-ci pour obtenir des résultats.
David : Francis, nous demandons toujours à nos invités, à la fin de l’entrevue, s’ils sont optimistes ou pessimistes à propos de l’avenir de la région. Nous allons maintenant tenter notre chance… Disons que, puisque vous êtes le PDG de l’APECA et, en quelque sorte, le responsable en chef des ventes de l’ensemble de la région, vous êtes très optimiste face à l’avenir. Si c’est le cas… Qu’est-ce qui vous rend le plus optimiste et vous fait croire que, à mesure que nous progresserons, l’économie de cette région deviendra forte et florissante?
Francis : Je vais vous dire ce qui m’inquiète et ce qui me rend optimiste. Je crois que c’est ce que je viens juste de décrire et, vous savez, le fait d’avoir une vision claire de ce qui est problématique. C’est ce qui me rend optimiste. Par exemple, il y a quatre ans, David, vous le savez, personne ne voulait entendre parler de pénuries de travailleurs. Ce que je veux dire, je n’aime juste pas ça; c’est comme un train qui fonce sur vous. C’est une question de contexte démographique. On ne parle pas d’essayer de deviner. Oui, les gens commencent à comprendre la situation. Ils commencent à comprendre certaines des solutions.
Ce qui m’inquiète, c’est que nous n’allons pas assez vite. J’ai dit qu’environ 30 % des gens optaient pour l’automatisation, et 70 %, non. Je trouve que c’est frustrant, mais je me dis toujours qu’il y a quelque chose que je peux faire à ce propos. Maintenant, je peux me présenter, m’exprimer et accomplir des choses. Le secteur alimentaire présente un excellent potentiel de croissance d’un bout à l’autre. Comment pouvons-nous le démontrer? Mais le secteur alimentaire relève de la génétique, et il y a la robotique et toutes ces sciences. Alors, comment pouvons-nous stimuler tout cela? C’est la même chose pour les océans. Nous avons commencé bien des choses ici, je crois, en nous promenant sur la route pour convaincre des gens. Je crois qu’il y a quelque chose qui nous attend. Il existe une façon de faire pour intéresser les jeunes à ces industries. C’est là que nous sommes rendus. Je crois que, à mon arrivée, il y a quatre ans, nous n’en étions pas là. Si je regarde ce qui s’est passé au cours des quatre dernières années, je peux dire que nous avons réalisé de véritables progrès pour ce qui est de changer ce genre de mentalité. Je dirais par contre… vous savez… si je regarde les provinces, je serais critique à l’égard de certains de mes collègues qui ont dit : « Ouais, quand ils obtiennent ce qu’ils veulent, après ils n’agissent pas; il faudrait qu’ils commencent par agir. Certains sont beaucoup mieux que d’autres; on peut dire ce genre de trucs.
Je suis optimiste, car je crois que nous nous dirigeons vers un consensus sur ce que sont la croissance durable et la création de richesses. Là où je deviens pessimiste, c’est quand je constate que personne ne veut reconnaître que tout cela doit passer par la création de richesses. Je suis un fonctionnaire dans l’âme; je dirais donc que je suis un petit libéral. Il faut que je fasse attention ici; quelqu’un pourrait dire le contraire. Mais, peu importe, je suis un petit libéral. Je crois vraiment au partage des richesses, mais il faut posséder des richesses. C’est ce sur quoi il faut se concentrer.
Un de mes amis a déjà dit : « La richesse vous assure une liberté; la liberté de choisir où vous voulez dépenser votre argent. Si vous n’avez pas d’argent, vous n’avez pas de liberté puisque vous ne pouvez faire aucun choix. » Je me suis dit : « Oh.... Quelles paroles profondes ! » Si vous voulez être libre, alors vous devez disposer de ressources vous permettant d’assurer votre liberté.
David : Francis, un libéral qui aime la richesse, c’est le genre de libéral que nous aimons ici, Don et moi-même, dans le cadre de notre balado Insights. Nous sommes très heureux de vous avoir reçu aujourd’hui. Nous tenons à vous remercier d’avoir partagé votre point de vue.
Francis : Merci. Ce fut un plaisir.
Voix anonyme : Vous venez d’écouter le dernier épisode du balado Insights sur le réseau Huddle. Mark Leger et Tyler McLean ont participé à la production de cet épisode. Vous pouvez vous abonner à l’émission en cherchant « Huddle Insights » sur des plateformes de balado comme Apple et Spotify. Si vous avez aimé ce que vous avez entendu, n’oubliez pas d’aller noter l’émission et de rédiger une évaluation. Don et David seront de retour la semaine prochaine.
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